Citations de Leslie Kaplan (106)
Millefeuille voyait le poème sur la page, les vers se détachaient, Baudelaire parlait des vices,
"Il en est un plus laid, plus méchant, plus immonde !"
Millefeuille souriait intérieurement et continuait
"Et dans un bâillement avalerait le monde :"
C'est l'ennui ! ...
Incroyable que Baudelaire ait trouvé que l'ennui était un vice, une erreur, une faute très grave, un péché, pas un malheur, on éprouve pourtant comme un malheur de s'ennuyer, moi en tout cas, je l'éprouve comme un malheur
Certains des assassins parvenaient à s'enfuir, mais la plupart étaient pris et revendiquaient crânement leur crime, on les voyait même rire, se moquer, faire des plaisanteries plus ou moins drôles, bref c'était le monde à l'envers.
Page 10 (Sur 55, mais pourquoi les trois dernières ne sont-elles pas numérotées?)
l'autre jour j'ai vu une affiche
"apprenez à habiter votre corps
en 25 leçons"
je n'ai pas compris
"habiter son corps"
qui habite mon corps ?
moi il me semble
il te semble ?
il me semble, moi
si ce n'est pas moi
ce serait qui ?
La Terre s’était aplatie, progressivement et de façon continue, par la masse énorme, qui grandissait sans cesse, et qu’on n’arrivait absolument pas à éliminer, dont on n’arrivait absolument pas à se défaire, de bêtises, stupidités, imbécillités, idées reçues, clichés, tautologies, discours vides, mots creux, bref, de platitudes, le terme s’imposait, oui, de platitudes qui s’échangeaient à chaque instant et finissaient par avoir un effet. Et comment non ? Les idées sont une force matérielle, c’était prouvé depuis longtemps. (L'aplatissement de la terre)
L’usine, on y va. Tout est là. On y va.
L’excès – l’usine.
Un mur au soleil. Tension extrême. Mur, mur, le petit grain,
brique sur brique, ou le béton ou souvent blanc, blanc
malade ou la fissure, un peu de terre, le gris. La masse mur.
En même temps, ce soleil. La vie est, haine et lumière, La vie-
four, d’avant le commencement, totale.
On est prise, on est tournée, on est à l’intérieur.
Le mur, le soleil. On oublie tout.
La plupart des femmes ont un merveilleux sourire édenté.
On boit un café à la machine à café.
La cour, la traverser.
Être assise sur une caisse.
Tension, oubli.
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Et Simon aimait que les hommes changent, puissent changer. Laissent leurs maux. Mettent une distance, soient moins tristes, moins blessés, moins misérables, et jouent, apprennent à jouer, à être gais. Guérir une fois pour toutes l'angoisse, non, sûrement pas. Mais arriver à en faire autre chose, à s'en défendre autrement que par des rituels obsessionnels ou des somatisations, sans parler de comportements délinquants qui visent à tout faire porter au voisin...(p.56- coll. Folio)
Un homme libre, qu’est-ce que c’est ?
.....
c’est Bartleby le copiste de Melville qui un jour arrête tout en disant, I would prefer not to, Je préfère ne pas. Quand on finit par le mettre en prison et que son ancien patron vient le consoler, Regarde le ciel bleu, regarde l’herbe verte, il répond seulement, I know where I am, Je sais où je suis.
....
c’est Franz Kafka qui n’a jamais réussi à se marier mais qui peut, en imaginant la Statue de la Liberté, voir, à la place de la torche, un glaive ;
c’est un homme qui dit, alors qu’il est enfermé à Dachau, « La nuit était belle ». Robert Antelme.
.....
c’est une vieille dame à qui deux jeunes gens viennent de prendre tous ses bijoux et qui dit, Peut-être ils ne savent faire que ça .....
Dans le pays flottait un sentiment diffus et massif, un sentiment d'inachevé, d'inabouti. Pas un découragement, non. Une déception.
Les autres ateliers, on ne les connaît pas. On y pense.
On voit des emboîtements, des cadres, des escaliers. Des marches montent et descendent. L'air est éliminé, on voit surtout des lignes.
Il y a une activité intense, spéciale.
Les gens sont comme sur des fresques, on ne peut pas passer derrière.
Les mots classe, domination, subordination, etc., étaient devenus désuets, difficiles à manier, d'ailleurs en grande partie à cause de l'influence de ces mêmes grands patrons ou chefs d'entreprise qui détenaient, c'était bien connu, la plupart des journaux, des radios et des télévisions. Alors que faire ?
je prends l'eau
l'eau qui glisse
qui coule le long du mur
qui suinte
qui goutte
qui perle
qui se condense
qui descend les parois
flux et reflux
fluide et flots
vagues et rouleaux
pluie, orage, tempête, ouragan
vagues
raz-de marée
Mai 1968 est une révolution culturelle contre la production industrielle de masse contre l'idée que la seule chose qui compte, c'est ce qui se compte.
Mais qu'est-ce qu'un dialogue ?
Comment est-ce qu'on signifie à l'autre qu'on veut vraiment lui parler, qu'on lui parle vraiment, qu'on ne fait pas semblant, qu'on ne lui donne pas des mots pour rien, des mots creux, des mots vides, des mots pour en finir, pour finir de lui parler, pour passer à autre chose, de plus important, de plus urgent.
L’usine, la grande usine univers, celle qui respire pour vous.
Il n’y a pas d’autre air que ce qu’elle pompe, rejette.
On est dedans.
Tout l’espace est occupé : tout est devenu déchet. La peau, les
dents, le regard.
On circule entre des parois informes. On croise des gens, des
sandwichs, des bouteilles de coca, des instruments, du papier,
des caisses, des vis. On bouge indéfiniment, sans temps. Ni
début, ni fin. Les choses existent ensemble, simultanées.
À l’intérieur de l’usine, on fait sans arrêt.
On est dedans, dans la grande usine univers, celle qui respire
pour vous.
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Je me traîne, je suis fatigué avant de commencer la journée, je deviens vieux, se disait Millefeuille. Il dit la phrase sans y penser, ensuite il la considéra, la retourna dans tous les sens, elle n'en avait pas réellement, de sens, c'était clair, je deviens vieux, c'est clair.
et pour le dessert
é goiabada cascao com muito queijo,
une goiabada avec beaucoup de fromage
dépois café, cigarro é um beijo
de uma mulata chamada ..
et après le café une cigarette et un baiser
d'une mulâtre qui s'appelle
Léonore ou Dagmar...
les oubliés
ils ont des rêves
d'enfants
l'enfer est vert
HAINE (IMPOSSIBLE) DE LA NOSTALGIE
Ce matin, œufs jaunes, café. Et après la rue.
mes ennemis je les connais …
mes ennemis je les connais, je les connais
je les vois
et cet ennemi invisible, alors ?
c’est ça
s’il est invisible
c’est clair
il est partout
partout, partout, partout
je suis tellement fatiguée
ça me prend la tête
je ne peux faire confiance à personne
les enfants ont bien de la chance
ils ne s’occupent pas de tout ça
des ennemis invisibles.
Il est traversé par une pensée vraiment bizarre, il se dit C’est vraiment bizarre de penser ça, pourquoi je pense ça, l’idée de rester là devant le tableau pour toujours.
Un point c’est tout.
Pour toujours.
Je reste là pour toujours.
Pourquoi je pense ça, se demanda Millefeuille. C’est bizarre.
Et non. C’est une idée simple, normale.
C’est ridicule, se dit Millefeuille, complètement ridicule.
Je m’en vais, il dit à voix haute, fort même.
(…) J’y retourne, dit Millefeuille, après un temps, j’y retourne. Je ne peux pas ne pas y retourner. Il se leva, il était quand même fatigué, mais il revint sur ses pas, et se planta de nouveau devant l’autoportrait. Il attendit un peu.
Au bout d’un moment, il entendit distinctement, Ça suffit l’agitation.
Il regarda autour de lui, personne. Évidemment, c’était le tableau.
Il soupira. Ensuite il dit, Je sais, je sais. Il avait envie de pleurer.
Désordre, désordre, désordre.Le pays n’en pouvait plus.On finit par rétablir la guillotine.Après qu’on l’eut rétablie, le
premier crime fut le fait du président
de la République qui dans un accès
de toute-puissance et en proie à un
irresistible impulse (une pulsion irrésistible) étrangla son garde du corps.On leva l’immunité.On choisit la date du 21 janvier
pour l’exécution.Après l’exécution tout rentra
immédiatement dans l’ordre.D’ailleurs la guillotine fut supprimée.