cc les amis , pour moi qui bosse a l'usine et qui a une culture ouvrière , j'ai ressenti en lisant les petits textes de ce petit livre une vision de l'auteure que je connais de cette endroit qui berce mes journées de travail . ce livre fait pour moi de cette culture qui en plus d'être connu par plein de monde doit aussi être appris a notre jeunesse et ce livre je pense peu le faire . en plus il transmet une ambiance de ce qu'est l'usine et d'une partie de la vie des ouvriers cela reste une lecture accessible a tous et agréable . bonne lecture les amis
Commenter  J’apprécie         100
Livre instructif et livre témoignage sur la vie des ouvriers, ouvrières en France, avant la totale expension de la mondialisation.
Kaplan écrit bien avant la délocalisation et nous fait découvrir l'univers de l'usine, ses rythmes, ses saisons, ses ambiances, son esprit.
Ce livre n'a pas pris trop de rides. Si on s'intéresse à la question du monde ouvrier et aux personnes sur les lignes de production alors il ne peut échapper à la bibliographie.
Mon vrai coup de coeur, sur ce thème, revient à Ponthus pour ses feuillets d'usine 2019, entre poésie et roman.
Commenter  J’apprécie         51
L’usine, on y va. Tout est là. On y va.
L’excès – l’usine.
Un mur au soleil. Tension extrême. Mur, mur, le petit grain,
brique sur brique, ou le béton ou souvent blanc, blanc
malade ou la fissure, un peu de terre, le gris. La masse mur.
En même temps, ce soleil. La vie est, haine et lumière, La vie-
four, d’avant le commencement, totale.
On est prise, on est tournée, on est à l’intérieur.
Le mur, le soleil. On oublie tout.
La plupart des femmes ont un merveilleux sourire édenté.
On boit un café à la machine à café.
La cour, la traverser.
Être assise sur une caisse.
Tension, oubli.
p.12
On fait des câbles près de la fenêtre. Les câbles ont beaucoup
de couleurs, on les enroule en circuits. Il y a de la lumière,
l’espace est mou. On va, on vient. Couloirs, oubli.
On fait des câbles près de la fenêtre. Tension extrême. Le ciel,
et les câbles, cette merde. On est saisie, tirée par les câbles, le
ciel. Il n’y a rien d’autre.
Tout l’espace est occupé : tout est devenu déchet. La peau est
morte. Les dents mordent une pomme, un sandwich. On
absorbe, le regard se colle à tout comme une mouche.
On travaille neuf heures et on fait des trous dans des pièces avec
une machine. On met la pièce, on descend le levier, on sort la
pièce, on remonte le levier. Il y a du papier partout.
Le temps est dehors, dans les choses.
p.13
L’usine, la grande usine univers, celle qui respire pour vous.
Il n’y a pas d’autre air que ce qu’elle pompe, rejette.
On est dedans.
Tout l’espace est occupé : tout est devenu déchet. La peau, les
dents, le regard.
On circule entre des parois informes. On croise des gens, des
sandwichs, des bouteilles de coca, des instruments, du papier,
des caisses, des vis. On bouge indéfiniment, sans temps. Ni
début, ni fin. Les choses existent ensemble, simultanées.
À l’intérieur de l’usine, on fait sans arrêt.
On est dedans, dans la grande usine univers, celle qui respire
pour vous.
p.11
Les autres ateliers, on ne les connaît pas. On y pense.
On voit des emboîtements, des cadres, des escaliers. Des marches montent et descendent. L'air est éliminé, on voit surtout des lignes.
Il y a une activité intense, spéciale.
Les gens sont comme sur des fresques, on ne peut pas passer derrière.
On est là, faible, sans projet.
On a amené une petite glace. On la sort de sa poche, c'est une
petite ronde.
On se regarde attentivement. On cherche les traits.
Le visage est blanc, avec les cheveux tirés. On ne se rappelle
pas.
Une main tient la glace, avec le visage dedans. En un sens, le
visage est toujours bien.
On ne se rappelle pas, on sait. On voit les cercles du sommeil,
quand les constructions tombent et s'élèvent de nouveau, len-
tement, en silence.
p.29
Leslie Kaplan - L'Assassin du dimanche - éditions P.O.L - où Leslie Kaplan tente de dire de quoi et comment est composé "L'Assassin du dimanche" et où il est question notamment de femmes qui s'organisent et de collectif, de littérature et de hasard, de Franz Kafka et de Samuel Beckett, d'une usine de biscottes et du jardin du Luxembourg, à l'occasion de la parution aux éditions P.O.L de "L'Assassin du dimanche", à Paris le 21 mars 2024
"Une série de féminicides, un tueur, « l'assassin du dimanche ». Des femmes s'organisent, créent un collectif, avec Aurélie, une jeune qui travaille en usine, Jacqueline, une ancienne braqueuse, Anaïs, professeure de philosophie, Stella, mannequin, Louise, une femme de théâtre…"
+ Lire la suite