AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Louis-Ferdinand Céline (2885)


Les études ça vous change, ça fait l’orgueil d’un homme. Il faut bien passer par là pour entrer dans le fond de la vie. Avant, on tourne autour seulement. On se prend pour un affranchi mais on bute dans des riens. On rêve trop. On glisse sur tous les mots. Ça n’est pas ça. Ce n’est rien que des intentions, des apparences. Faut autre chose au résolu. Avec la médecine, moi, pas très doué, tout de même je m’étais bien rapproché des hommes, des bêtes, de tout. Maintenant, il n’y avait plus qu’à y aller carrément, dans le tas. La mort court après vous ; faut se dépêcher et faut manger aussi pendant qu’on cherche et puis passer en dessous la guerre par-dessus le marché. Ça fait bien des choses à accomplir. C’est pas commode.
Commenter  J’apprécie          00
De l’autre côté de ce puits de courette, la paroi s’alluma par une, puis par deux chambres, puis des dizaines. Dans certaines d’entre elles, je pouvais apercevoir ce qui se passait. C’étaient des ménages qui se couchaient. Ils semblaient aussi déchus que les gens de chez nous les Américains, après les heures verticales. Les femmes avaient les cuisses très pleines et très pâles, celles que j’ai pu bien voir tout au moins. La plupart des hommes se rasaient tout en fumant un cigare avant de se coucher.
Au lit ils enlevaient leurs lunettes d’abord et leurs râteliers ensuite dans un verre et plaçaient le tout en évidence. Ils n’avaient pas l’air de se parler entre eux, entre sexes, tout à fait comme dans la rue. On aurait dit des grosses bêtes bien dociles, bien habituées à s’ennuyer. Je n’ai aperçu en tout que deux couples à se faire à la lumière les choses que j’attendais et pas violemment du tout. Les autres femmes, elles, mangeaient des bonbons au lit en attendant que le mari ait achevé sa toilette. Et puis, tout le monde a éteint.
C’est triste des gens qui se couchent, on voit bien qu’ils se foutent que les choses aillent comme elles veulent, on voit bien qu’ils ne cherchent pas à comprendre eux, le pourquoi qu’on est là. Ça leur est bien égal. Ils dorment n’importe comment, c’est des gonflés, des huîtres, des pas susceptibles, Américains ou non. Ils ont toujours la conscience tranquille.
Commenter  J’apprécie          00
Comme si j’avais su où j’allais, j’ai eu l’air de choisir encore et j’ai changé de route, j’ai pris sur ma droite une autre rue, mieux éclairée, « Broadway » qu’elle s’appelait. Le nom je l’ai lu sur une plaque. Bien au dessus des derniers étages, en haut, restait du jour avec des mouettes et des morceaux du ciel. Nous on avançait dans la lueur d’en bas, malade comme celle de la forêt et si grise que la rue en était pleine comme un gros mélange de coton sale.
C’était comme une plaie triste la rue qui n’en finissait plus, avec nous au fond, nous autres, d’un bord à l’autre, d’une peine à l’autre, vers le bout qu’on ne voit jamais, le bout de toutes les rues du monde.
Les voitures ne passaient pas, rien que des gens et des gens encore.
C’était le quartier précieux, qu’on m’a expliqué plus tard, le quartier pour l’or : Manhattan. On n’y entre qu’à pied, comme à l’église. C’est le beau coeur en Banque du monde d’aujourd’hui. Il y en a pourtant qui crachent par terre en passant. Faut être osé.
C’est un quartier qu’en est rempli d’or, un vrai miracle, et même qu’on peut l’entendre le miracle à travers les portes avec son bruit de dollars qu’on froisse, lui toujours trop léger le Dollar, un vrai Saint-Esprit, plus précieux que du sang.
Commenter  J’apprécie          00
« Va ! Mais on te prévient encore : T’as pas des bons goûts pour un pouilleux ! C’est ta fièvre qui te rend dingo ! T’en reviendras de ton Amérique et dans un état pire que nous ! C’est tes goûts qui te perdront ! Tu veux apprendre ? T’en sais déjà bien trop pour ta condition ! »
J’avais beau leur répondre que j’avais des amis dans l’endroit et qui m’attendaient. Je bafouillais.
« Des amis ? Qu’ils faisaient comme ça eux, des amis ? Mais ils se foutent bien de ta gueule tes amis ! Il y a longtemps qu’ils t’ont oublié tes amis !...
— Mais, je veux voir des Américains moi ! Que j’avais beau insister. Et même qu’ils ont des femmes comme il y en a pas ailleurs !...
— Mais rentre donc avec nous eh bille ! Qu’ils me répondaient. C’est pas la peine d’y aller qu’on te dit ! Tu vas te rendre malade pire que t’es ! On va te renseigner tout de suite nous autres sur ce que c’est que les Américains ! C’est tout millionnaire ou tout charogne ! Y a pas de milieu ! Toi tu les verras sûrement pas les millionnaires dans l’état que t’arrives ! Mais pour la charogne, tu peux compter qu’ils vont t’en faire bouffer ! Là tu peux être tranquille ! Et pas plus tard que tout de suite !... »
Voilà comment qu’ils m’ont traité les copains. Ils m’horripilaient tous à la fin ces ratés, ces enculés, ces sous-hommes. « Foutez-moi le camp tous ! que je leur ai répondu ; c’est la jalousie qui vous fait baver et voilà tout ! S’ils me font crever les Américains, on le verra bien ! Mais ce qu’il y a de certain, c’est que tous autant que vous êtes, c’est rien qu’un petit four que vous avez entre les jambes et encore un bien mou ! »
C’était envoyé ça ! J’étais content !
Commenter  J’apprécie          00
En route, les bêtes de la forêt je les entendis bien souvent encore, avec leurs plaintes et leurs trémolos et leurs appels, mais je ne les voyais presque jamais. […] Par ces rafales de cris, d’appels, de hurlements, on aurait pu croire qu’ils étaient là tout près, des centaines, des milliers à grouiller, les animaux. Cependant dès qu’on s’approchait de l’endroit de leur vacarme, plus personne, à part ces grosses pintades bleues, empêtrées dans leur plumage comme pour une noce et si maladroites quand elles sautaient en toussant d’une branche à l’autre, qu’on aurait dit qu’un accident venait de leur arriver.
Plus bas, sur les moisissures des sous-bois, des papillons lourds et larges et bordés comme des " faire-part " tremblotent de mal à s’ouvrir et puis, plus bas encore c’était nous, en train de patauger dans la boue jaune.
Commenter  J’apprécie          00
Dans la fièvre, ces mots-là me lancinaient. « Faut te débrouiller ! »... qu’il m’avait dit encore. J’essayais de me lever. Je n’y arrivais pas non plus. Pour l’eau qu’il fallait boire, il avait eu raison, de la boue c’était, pire, du fond de vase. Des négrillons m’apportaient bien des bananes, des grosses, des menues et des sanguines, et toujours de ces papayes, mais j’avais tellement mal au ventre de tout ça et de tout ! J’aurais vomi la terre entière.
Commenter  J’apprécie          00
« Mais, et l’inventaire ? Demandai-je, tout à fait éberlué par ces précisions. Le Directeur général m’a bien recommandé de l’établir l’inventaire dès mon arrivée, et minutieusement !
— Pour ce qui est de moi, qu’il me répondit alors parfaitement calme, le Directeur général, je l’emmerde... Comme j’ai l’honneur de vous le dire...
— Mais, vous allez le voir pourtant à Fort-Gono, en repassant ?
— Je ne reverrai jamais, ni Fort-Gono, ni le Directeur... Elle est grande la forêt mon petit ami...
— Mais alors, où irez-vous ?
— Si on vous le demande, vous répondrez que vous n’en savez rien ! Mais puisque vous avez l’air curieux, laissez-moi, pendant qu’il en est encore temps, vous donner un sacré conseil et un bon ! Foutez-vous donc des affaires de la " Compagnie Pordurière ", comme elle se fout des vôtres et si vous courez aussi vite qu’elle vous emmerde, la Compagnie, je peux vous dire dès aujourd’hui, que vous allez certainement le gagner le " Grand Prix " !... Soyez donc heureux que je vous laisse un peu de numéraire et ne m’en demandez pas davantage !... Pour ce qui est des marchandises si c’est vrai qu’il vous a recommandé de les prendre en charge... Vous lui répondrez au Directeur qu’il n’y en avait plus, et puis voilà tout !... S’il refuse de vous croire, eh bien, ça n’aura pas grande importance non plus !... On nous considère déjà tous solidement comme des voleurs, de toutes les manières ! Ça ne changera donc rien à rien dans l’opinion publique et pour une fois que ça nous rapportera un petit peu... »
Commenter  J’apprécie          00
Et puis, pendant qu’il y était, il me donna quelques autres renseignements engageants : « Le jour c’est la chaleur, mais la nuit, c’est le bruit qui est le plus difficile à supporter... C’est à pas y croire... C’est les bestioles du bled qui se coursent pour s’enfiler ou se bouffer, j’en sais rien, mais c’est ce qu’on m’a dit... toujours est-il qu’alors vous parlez d’un boucan !... Et les plus bruyants parmi, c’est encore les hyènes !... Elles viennent là tout près de la case... Alors vous les entendrez... Vous vous y tromperez pas... C’est pas comme pour les bruits de la quinine... On peut se tromper quelquefois d’avec les oiseaux, les grosses mouches et la quinine... Ça arrive... Tandis que les hyènes ça rigole énormément... C’est votre viande à vous qu’elles reniflent... Ça les fait rire !... C’est pressé de vous voir crever ces bêtes-là !... On peut même voir leurs yeux briller qu’on dit... Elles l’aiment la charogne... Moi je les ai pas regardées dans les yeux... Je regrette dans un sens...
— C’est drôle ici ! » que je réponds.
Mais c’était pas tout pour l’agrément des nuits.
« Y a encore le village, qu’il ajouta... Y a pas cent nègres dedans, mais ils font du bousin comme dix mille, ces tantes !... Vous m’en direz des nouvelles de ceux-là aussi ! Ah ! si vous êtes venu pour le tam-tam, vous vous êtes pas trompé de colonie !... Parce que ici, c’est tantôt parce que c’est la lune qu’ils en jouent, et puis, parce que c’est plus la lune... Et puis parce qu’on l’attend la lune... Enfin, c’est toujours pour quelque chose ! On dirait qu’ils s’entendent avec les bêtes pour vous emmerder les charognes ! »
Commenter  J’apprécie          00
Louis-Ferdinand Céline
ces gens écrivains ne marchent pas sur terre ...ils évoluent dans les nuées des mots .et ils ne savent rien faire à mon ses avec les mots ,ressassent les clichés.ils sont ivres de vanité,et ivrognes sans fantaisie .
Commenter  J’apprécie          00
Oh, faut que je me hâte, nom de Styx!...Je veux pas décéder puant d'âme!...La charogne c'est rien, c'est l'ingratitude qu'est tout!...Je veux reconquérir l'estime!...ma propre estime!...plus en surplus celle de mes pairs!...une place à l'Académie!...Au pire!...n'importe laquelle!...la consécration!...le lustre!...que mes morts se consolent un peu de mes façons!...des peu d'égards...ma mère d'abord!...Je veux que mes morts me reconsidèrent!...
Commenter  J’apprécie          00
Je suis entendu le notoire vendu traître félon qu'on va assassiner , demain.. après-demain...dans huit jours...Ça les fascine de biais le traitre...
Commenter  J’apprécie          00
Quand on a pas d'imagination, mourir c'est peu de chose, quand on en a, mourir c'est trop.
Commenter  J’apprécie          00
J'avais bien du mal à penser à autre chose qu'à mon destin d’assassiné en sursis
Commenter  J’apprécie          00
Il n’y a de repos, vous dis-je, pour les petits, que dans le mépris des grands qui ne peuvent penser au peuple que par intérêt ou sadisme
Commenter  J’apprécie          00



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten


Lecteurs de Louis-Ferdinand Céline Voir plus

Quiz Voir plus

Quiz Voyage au bout de la nuit

Comment s'appelle le héros qui raconte son expérience de la 1ère guerre mondiale

Bardamu
Bardamur
Barudamurad
Barudabadumarad
Rudaba Abarmadabudabar

9 questions
1301 lecteurs ont répondu
Thème : Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand CélineCréer un quiz sur cet auteur

{* *}