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Citations de Lucia Etxebarria (362)


Mais, comme cela sied à sa qualité de génie, elle est un peu bizarre. Elle ne voit pratiquement personne. Elle a un caractère tellement hermétique qu'il semble scellé sous vide.
Mon autre soeur n'est pas non plus, un prodige de stabilité mentale.
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Nous vivons dans une société qui a le culte du corps et qui trouve normal qu'une femme dépense autant ou plus pour son apparence physique (gym, coiffeur, épilation ...) que pour son alimentation, une société où les petites annonces d'embauche exigent des candidats une bonne présentation, une société qui nous fait croire qu'il n'est point de salut au-delà de la taille 40 […]. Oui, la société dans laquelle nous vivons dévalorise à ce point les choses de l'esprit que s'épiler est jugé plus important que se faire soigner, et quelqu'un qui va voir un psychologue est considéré comme un fou ou un asocial.
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Chaque anniversaire suppose le pense-bête de votre conscience : cette année-là non plus vous n'avez rien fait de votre vie.
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Acceptons nos limites, revendiquons-les, et n'oublions pas que non seulement nous ne pouvons pas toujours plaire aux autres mais que nous ne devons pas chercher à le faire.
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Je ne regrette absolument pas ma décision, et jamais, au grand jamais, je ne retournerais travailler dans une multinationale.
Plutôt devenir une pute.
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Ralph me quitta aussi par une nuit de pleine lune. On se revit bien des soirs, à la cafétéria. On discutait de choses et d'autres comme si on ne s'était jamais embrassés, comme si on n'avait pas partagé notre sueur, nos orgasmes dans le lit. Comme si nous n'avions pas de mémoire. J'acceptais cette froideur absurde sans broncher, résignée, comme si cela avait été joué d'avance.

Cela se passa une nuit où Cat travaillait au bar et où je traversais à nouveau un passage à vide. Tout à coup je m'étais retrouvée seule et désemparée, loin de Madrid, loin de chez moi, de Monica, immergée dans une vie que je ne comprenais pas et à laquelle je ne participais pas. J'avais désespérément besoin de parler à quelqu'un, de m'en sentir proche, de traverser les eaux de cet océan boueux, de remonter à la surface et de toucher la lumière du bout des doigts. Je ne pouvais pas me tourner vers Cat car elle n'avait pas le droit de recevoir des appels durant ses heures de travail, sauf en cas d'extrême urgence. J'appelai donc les renseignements et demandai le numéro de Ralph. Mr. Scott-Foreman, 9, Baker Street. Si incroyable que cela puisse paraître, je n'avais pas son numéro, je ne l'avais jamais appelé.

Sa voix sombre et caverneuse, dissociée de sa personne physique, acquérait une nuance différente, follement bandante. Elle m'attrapait d'une façon aussi immédiate que la musique. Je ressentis soudain un besoin impérieux de l'avoir près de moi, de danser au rythme de cette voix cadencée, de me laisser emporter par son courant de testostérone. Il n'avait pas l'air surpris, alors que je ne l'avais jamais appelé auparavant et qu'il ne m'avait jamais donné son numéro. Comment vas-tu ? demanda-t-il. J'attendis quelques secondes pendant lesquelles j'entendais une musique ambient en toile de fond. Je ne sais pas, dis-je enfin. Pas très bien. Qu'est-ce qu'il t'arrive ? dit-il. Je me sens seule. Nous sommes tous seuls, répondit-il. Plus vite tu t'y habitueras, mieux ça vaudra. Je n'ai pas envie de commencer à m'y habituer cette nuit. Pas vraiment cette nuit. J'espérais qu'il m'inviterait chez lui, mais il se tut. Les synthétiseurs de The Orb reprirent possession du silence. Qu'est-ce que tu fais ce soir ? demandai-je enfin. Je travaille à ma thèse, répondit-il, d'ailleurs je dois m'y remettre. Prends soin de toi. On se voit bientôt. Puis il raccrocha.

Je sortis dans la rue. La froidure s'abattait, la nuit tombait et la brume s'emparait de la ville aussi vite que l'angoisse qui dévorait mon organisme. Les contours des immeubles se diluaient, menaçants. Le monde semblait léger et un peu vide. Je marchais dans Édimbourg et je me sentais comme dans un rêve. Les points de repère - le château, le pont, la colline - étaient suspendus en l'air comme dans un décor de théâtre, isolés au milieu de la brume. J'avançais à la dérive dans un paysage incomplet, une sorte d'ébauche de Édimbourg que je connaissais, lampadaires et tours flottaient hors contexte, dans l'air tacheté de petits points lumineux.

Soudain je la vis dans le ciel, immense, pleine de présage, voilée de larmes et de nuages, embuée par ma propre respiration. L'image brouillée de la pleine lune. Superstition absurde, mais le fait est que par tradition, depuis que je connais Cat, je faisais l'amour toutes les nuits de pleine lune. Toutes les nuits de pleine lune, excepté celle-ci. J'aurais pu, pourquoi pas, rentrer à la maison et attendre qu'elle revienne. Mais je n'avais pas envie de Cat : j'étais déprimée et n'avais ni l'énergie ni les sourires nécessaires. Une sorte de fidélité absurde faite chromosome, imprimée dans mon patrimoine génétique, devait me forcer à désirer Ralph et seulement lui, du moins cette nuit. De sorte que je rebroussai chemin en zigzaguant sur les trottoirs, en esquivant des ivrognes et en réfléchissant. Mon rival, mon compétiteur, mon amant, cet homme dont j'enviais l'argent, la tranquillité et le sang-froid qui me manquaient, m'avait fait faux bond au moment où j'avais besoin de lui.

D'un côté je culpabilisais terriblement de vouloir lui imposer ma présence à toute heure, d'être aussi possessive et pressante, de vouloir qu'il vive pour moi. De l'autre, n'avais-je pas lu dans un tas de livres que cette obsession pour l'objet du désir, cette envie d'exclusivité était un sentiment universel ? On s'était l'un et l'autre comportés comme des lâches. Je ne m'étais pas décidée entre Cat et lui. Il ne s'était pas décidé pour moi.

Je me suis demandé pourquoi, Beatriz, malgré la clarté de ce qui t'arrive, alors que tu as déjà choisi, que tu restes avec la légitime, avec ta fille-chat, celle qui peut t'offrir une stabilité et un lien solide, fondé sur le temps et les complicités construites pas à pas, pourquoi n'assumes-tu pas ton choix jusqu'au bout ? Pourquoi ne cesses-tu pas d'appeler Ralph, pourquoi es-tu obsédée par ce que tu n'as pas ? Mais bordel, pourquoi n'acceptes-tu pas une fois pour toutes l'impossibilité de ce qui ne peut pas être ?

Ce qui fait mal, ce qui faisait vraiment mal, c'était cette blessure infectée d'impuissance, ce vouloir et ne pas pouvoir qui me rongeait. L'essence de mon angoisse était dans les désirs réprimés et les rencontres avortées. Tout ce que j'aurais pu mais ne pouvais ni donner ni recevoir. For all the lovers and sweethearts we'll never meet. Et je me demandais : comment osé-je réclamer une exclusivité que je ne peux moi-même offrir ?

Je me suis arrêtée devant une cabine. J'y suis entrée. J'avais retenu le numéro de Ralph, imprimé dans ma mémoire à l'encre du désir. J'ai introduit une pièce et j'ai composé les sept numéros. Il a décroché.
- C'est encore moi. J'ai envie de te voir.
- Je t'ai dit que ce n'était pas possible.
- Il y a quelqu'un chez toi ? ai-je demandé.
- Non je suis seul.
Pause interminable. On entendait The Orb au loin, bande-son de mon anxiété. Au bout d'un moment, j'ai entendu à nouveau sa voix. Beatriz ... Ce prénom sonnait différemment dans sa bouche, ce n'était plus le mien, celui que m'avait choisi ma mère, c'était celui qu'il m'accordait, lui, qui me muait en quelqu'un d'autre par le seul fait de prononcer le z comme un s. Béatrice ... Il ne voulait pas être mon Dante.
- Beatriz, je crois que tu attends trop de moi. Tu attends ce que je ne peux pas te donner. Il y a des choses que je ne peux pas me permettre.
- Qu'est-ce que tu ne peux pas te permettre ?
- Laissons tomber. Beatriz, je ne veux pas aller plus loin. Je ne veux pas t'expliquer ... Et tu es trop intelligente pour continuer à me questionner.
Je ne soufflai mot.
- Ca va ? ai-je entendu.
Je n'ouvris plus la bouche. Je reposai le combiné à sa place. Il ne m'avait jamais rien promis, il avait raison. Je n'avais même pas le droit de poser des questions.
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Il vaut mieux regretter le manque que de finir par regretter la présence. Je préfère la nostalgie à la routine.
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J'ai appris à les reconnaître à la tête. J'arrive au comptoir et je peux dire en quelques secondes combien de clients se sentent seuls. L'ecstasy n'aide que pendant quelques heures. Parfois même pas. Ils sont tous sous ecstasy, abrutis, mais dans le fond, ils restent seuls. Il n'y a pas de drogue pour soigner ça.
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Chaque anniversaire suppose le pense-bête ponctuel de votre conscience : cette année-là non plus vous n'avez rien fait de votre vie.
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- Avant qu’il m’arrive ça, jamais il ne m’était venu à l’esprit que je pourrais mourir un jour. C’était quelque chose qui arrivait aux autres. Je pensais que je mourrais de vieillesse, comme tout le monde…
David reste muet, défait, intérieurement dévasté, comme agité jusqu’au tréfonds de l’âme par le pressentiment d’infinies amertumes.
- Mais la mort fait partie de la vie. Nous naissons tous avec une date de péremption. Nous ne pensons jamais, évidemment, que notre tour viendra avant celui des autres. Ni qu’il va nous tomber dessus une longue maladie, comme la mienne… Mais les maladies existent, il faut donc bien qu’elles tombent sur certains d’entre nous. Si l’on accepte la vie, il faut accepter l’existence de la mort…
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L'écriture n'est pas invasive. Elle est passive. Tu choisis de lire ce livre ou de ne pas le lire ; tu choisis de lire un livre tout court, ou pas. C'est pour cela que les timides, la plupart du temps, savent écrire.
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On ne reçoit rien de la vie si on n'identifie pas d'abord son Désir. Mais la plupart des hommes et des femmes ne savent pas bien quel est leur Désir, c'est pourquoi il leur échappe.
Ils s'égarent dans de faux désirs, ils croient désirer une voiture ou une maison ou la célébrité ou l'amour d'une femme, mais ce ne sont pas leurs désirs véritables. Par exemple, il y a des hommes qui ne désirent une femme que parce qu'elle est convoitée par d'autres hommes, et non par amour. Et ils font le mauvais choix, celui de la femme qui ne leur était pas destinée.
Il arrive aussi, dans le monde occidental, que beaucoup croient désirer ce que la publicité leur a en fait mis dans la tête. Mais le vrai Désir est une chose plus profonde, qui fait partie de la vie de chacun de nous. Et nous devons très tôt l'identifier, pour nous concentrer sur sa quête.
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L'ignorance est une traîtresse qui s'est alliée à l'imagination.
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Quatre choses que m'a apportées l'âge et dont j'aurai tout aussi bien pu me passer : l'amour, la curiosité, les tâches de rousseur et les doutes. Et cette phrase n'est pour comble même pas de moi. Elle est de Dorothée Parker.
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Je ne veux pas m’engager avant d’être sûre de ce que j’éprouve, car je redoute que le pire de moi-même ne finisse par s’installer entre les cercles de nos solitudes respectives. Il n’est pas de pire solitude que celle que l’on partage.

S’il ne tenait qu’à moi, je passerais mes journées à faire l’amour, pas seulement parce que j’aime ça, mais parce que c’est là que les choses atteignent leur limite ; même si cela ne dure que trois secondes, je fuis, je sors de moi-même, je me gonfle de lumière et je m’éclaircis, heureuse, sans mémoire, accrochée à des lèvres qui inventent de superbes duperies. Je me dis alors que cela a un sens de continuer, malgré la certitude d’être toujours seule.
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- [...] Quelquefois, la vie n'est qu'une longue suite d'erreurs, un escalier qu'on descend marche après marche....
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Nous avons tous besoin que quelqu'un nous prenne dans ses bras de temps en temps.
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[...] dans l'amour, comme dans le jazz, le plaisir dépend de la surprise, de l'inattendu, de l'improvisation.
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Si on pouvait nettoyer la vie comme des rideaux intérieurs, si on pouvait faire disparaître nos taches dans la machine à laver, tout serait plus facile
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Si on résiste au réflexe naturel de remonter à la surface pour respirer, la mort par asphyxie dans l’eau est la moins douloureuse de toutes… Mais je savais que, même si j’entrais dans l’eau, je n’aurais pas le courage de me noyer. Je sentais un désir intense d’en finir avec tout, mais je n’avais pas la force de volonté pour en finir vraiment. Je n‘avais aucune raison de continuer à vivre, mais je ne souffrais pas non plus suffisamment pour être capable de cesser de respirer de ma propre initiative.
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Qui a peint ce tableau?

Cette artiste-peintre à la personnalité indépendante fut cofondatrice du mouvement impressionniste. Sa toile "Le Berceau" (1872) a marqué un tournant dans sa carrière. A l'initiative de Renoir, elle accepte d'organiser avec Monet et Sisley une vente aux enchères de leurs œuvres à l'hôtel Drouot à Paris le 24 mars 1875 au cours de laquelle elle fut insultée, ce qui ne l'empêcha pas de continuer à vivre de son art et pour son art. Il s'agit de:

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