« Et si on ne faisait rien ? »
On ne lirait même pas ce livre…
Michel Piquemal ne l’aurait d’ailleurs même pas écrit…
Et je ne serais pas obligée d’écrire ce que j’en ai pensé…
Anthologie des paroles les plus « paresseuses », ce livre regroupe des passages inspirés par des auteurs de tous temps et de tous horizons. Marc Aurèle ou Christian Bobin, Omar Khayyam ou Rabindranath Tagore, propageront le bâillement de leur flegme jusqu’à nous, lecteur, qu’on imagine assoupi dans un hamac, avachi dans un canapé ou presque ronflant dans un plumard.
En fait, non. Le paradoxe de la paresse moderne est de ne pas pouvoir exister sans s’inscrire dans le sillage des mouvements d’indignation et de révolte contre le tout-agir que Michel Piquemal résume à deux mots dans sa préface : travailler et consommer.
« Il faut faire du bricolage, du parapente, du jardinage, du footing ou du canyoning… Faire et toujours faire, c’est-à-dire en clair acheter et consommer. Nous croyons être actifs, nous sommes activisés… »
La paresse n’est pas gratuite et contrairement à ce qu’il veut nous faire croire, elle ne consiste pas en contemplation pure et vide –oserait-on dire inutile ? Elle signifie refus de la compétitivité, refus de la consommation, refus de l’exploitation. Elle se justifie par opposition aux valeurs capitalistes et libérales –mais sans cela, vaudrait-elle quand même quelque chose ? Michel Piquemal n’évoque pas cette perspective et pour peu que l’on ait envie d’être vraiment paresseux, c’est-à-dire loque sans envie de révolte, un peu comme Samuel Beckett qui écrivait « Ah ! me répandre comme une bouse et ne plus bouger ! », on se sentirait presque coupable de ne pas rendre notre paresse utile pour la société.
Hormis cette légère gêne, Paroles de paresse reste fidèle à ses promesses et nous dispensera d’allonger notre liste de livres à lire en nous donnant trop de nouvelles idées de lecture. Les citations regroupées sont si peu stimulantes et valorisent si peu cette paresse insouciante qui nous semble être la plus pure, qu’elles ralentissent même le rythme de la main qui tourne les pages. En ce qui concerne la paresse, le mieux consiste encore à ne pas en parler.
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