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Critiques de Paul Klee (11)
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Théorie de l'art moderne

"L'art ne reproduit pas le visible, l'art rend visible."

Cette célèbre phrase de Paul Klee se trouve au début du chapitre "Credo du créateur" de ce livre Théorie de l'Art Moderne.



Klee, l'un des 3 K, Kandinsky, Klee et Kupka, trois génies de la peinture qui furent, au début du 20ème siècle, les grands initiateurs de l'art abstrait, encore que Klee ne l'utilisa pas toujours. Ils furent contemporains, et, pour ce qui est de Klee et Kandinsky, de grands amis ayant participé à ce beau projet du Bauhaus, démoli par les Nazis.

Ils ont aussi en commun d'avoir tous trois essayé de rendre compte, par leurs écrits, de leur vision révolutionnaire de ce que pourrait être la peinture dégagée de la représentation de la réalité. Kupka dans le livre "La Création dans les Arts Plastiques", Kandinsky dans "Du spirituel dans l'Art et dans la Peinture en particulier", ainsi que dans "Point et Ligne sur Plan", et enfin Klee dans le présent livre.



C'est un livre passionnant et stimulant pour qui s'intéresse à la peinture abstraite et à la peinture en général. Comme les livres de Kandinsky et Kupka, c'est loin d'être l'aspect technique qui prime, mais la dimension spirituelle, philosophique qui est la plus importante.



Paul Klee met en avant que la réalité visible sur terre n'est qu'un aspect du visible, qui peut être celle du cosmos, de l'imaginaire, du rêve, de l'inconscient. Et qu'il faut donc ne pas se limiter à la représentation de la réalité, même déformée comme c'est le cas du cubisme, alors le mode émergeant en peinture, que Klee critique, disant qu'il faut aller plus loin.

Il faut rendre visible une vision secrète, et Klee s'attache à nous faire comprendre le processus de la création et l'état d'esprit nécessaire.

Toutes les formes sont possibles, à condition d'utiliser les moyens plastiques appropriés.Donc, ce n'est pas donné à tout le monde, il faut en quelque sorte être capable de dévoiler le mystère au grand jour. Klee met avant pour cela à la fois le savoir-faire technique et le génie nécessaire de l'artiste, "un génie qui ne s'enseigne pas, car il n'est pas norme mais exception".

Mais aussi, de façon passionnante il développe la notion qu'à la fin, l'œuvre de l'artiste lui échappe et que c'est le spectateur qui la fera vivre.

Klee insiste aussi sur l'importance que ce dernier puisse comprendre le processus créatif, et se fait un critique du formalisme, de la répétition, de la représentation fidèle de la réalité. L'œuvre doit être vivante.



Klee décrit les trois données fondamentales dont il faut tenir compte: la "ligne" (i.e.graphisme), le clair-obscur, c'est à dire, par exemple les N "nuances de gris", et bien entendu la couleur, et il développe sur chacune de ces composantes le rôle qu'elle peuvent jouer dans la création picturale.

C'est tout à fait passionnant de lire ces pages dans lesquelles Klee nous donne des indications sur les valeurs psychologiques que peuvent avoir telle ou telle forme, telle ou telle couleur.



Un des chapitres est "une esquisse d'une théorie des couleurs" dans lequel Klee utilise la représentation imagée d'un cercle dont la circonférence comporte toutes les couleurs pures et les diamètres toutes leurs combinaisons.



Un autre point intéressant est la comparaison entre peinture et musique et l'importance que le peintre doit accorder à une composition polyphonique de son oeuvre. Pas étonnant cela, quand on sait que Klee était un virtuose du violon, (son violon d'Ingres ou de Klee?) et l'on retrouve souvent dans ses tableaux une vision musicale, par exemple dans la "fugue en rouge".



Le livre se termine par des Esquisses Pédagogiques, exposé stimulant et ludique sur ce que disent les formes, et par les reproductions de quelques-unes des oeuvres du peintre, qui en fit plus de 10000.



En conclusion, c'est pour moi, avec ceux de Kandinsky, un livre majeur pour qui veut saisir l'esprit de la peinture moderne.
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Théorie de l'art moderne

Son attirance pour la modernité et l'avant-garde lui vaudra d'être rejeté de ses fonctions par les nazis en 1933 et de figurer parmi les "dégénérés" à l'exposition "Entartete kunst" de Munich en 1937. Paul Klee est très tôt attiré par l'expressionnisme, le cubisme, et le dadaïsme. Sa rencontre avec Delaunay, Kandinsky et les artistes du "Blaue Reiter", sa découverte de Paris, son voyage lumineux en Tunisie en 1914, seront quelques-unes des étapes marquant le parcours de cet étonnant créateur. Autre donnée non négligeable et essentielle le concernant : sa carrière et son engagement pédagogique au Bauhaus, entre 1921 et 1931, et à l'Académie de Düsseldorf, qui inspirent bon nombre des écrits et des notes, supports de son activité professorale, publiés de son vivant ou à titre posthume.



Avec un père professeur de musique une mère cantatrice on ne s'étonne pas d'apprendre qu'il ait été initié au violon, dans sa prime jeunesse. S'étant décidé plus tard pour la peinture, il épouse une pianiste (Lily Stumpf) ; dimension fortement musicale imprégnant son tempérament qui constitue un repère intéressant, pour qui souhaite s'immerger dans sa théorie. Une très riche, et pas si lointaine, exposition à la Cité de la Musique en 2011 : "Polyphonies", a montré d'ailleurs, à bon escient, les innombrables échanges entretenus entre les deux univers - pictural et musical - dans son oeuvre, et que l'artiste n'a jamais cessé d'explorer. Propension qui se retrouve à la lecture de la première partie du livre où une pensée musicale s'y fait parfois aussi entendre.



Cet essai réunit, en deux parties bien distinctes et complémentaires, d'une part différents textes de sa pensée théorique présentés, en huit chapitres, sous une forme très littéraire et donc très accessible, de l'autre, ses esquisses pédagogiques (publiées par le Bauhaus en 1925), représentant un ensemble plus foisonnant de notes brèves et de textes courts, assortis de nombreux croquis, détaillés ou plus allusifs, regroupés sous plusieurs thématiques. Tout ce qui touche la première partie : l'exposé sur l'art moderne introduisant l'approche plus générale sur l'art qui en découle, la conception nouvelle de la création ("Le credo du créateur") et les moyens d'y parvenir (l'étude de la nature devient exploration interne des choses, réflexion sur la forme et la couleur), s'y conçoit bien et s'y lit facilement. L'ensemble aboutissant à la philosophie de la création, quelque peu "cosmique", de Paul Klee, dont on comprend que la préoccupation majeure est l'élargissement du domaine du visible, plutôt que l'étude détaillée des apparences. Chaque créateur, à la recherche d'une loi originelle qui lui est propre, s'inscrit dans la Loi du Monde, par son oeuvre personnelle.



"Autrefois, on représentait les choses qu'on pouvait voir sur terre, qu'on aimait ou aurait aimé voir. Aujourd'hui la relativité du visible est devenue une évidence, et l'on s'accorde à n'y voir qu'un simple exemple particulier dans la totalité de l'univers qu'habitent d'innombrables vérités latentes. Les choses dévoilent un sens élargi et bien plus complexe qui souvent infirme en apparence l'ancien rationalisme. L'accidentel tend à passer au rang d'essence." (Credo du créateur, p. 39)



La deuxième partie, immédiatement visuelle, vient parfaitement s'accorder à la première, grâce au dessin. L'ordre plastique basique régi par la ligne, la tonalité et la couleur, définies en préambule, trouve ici naturellement sa place et sa formulation. C'est ici que se jouent les gammes. D'emblée, peut s'y lire la capacité de l'artiste, autant que l'intention pédagogique, à élargir le champ exploratoire de la création, en direction de tout ce qui peut l'enrichir. La géométrie, l'anatomie, l'astronomie, la cinétique, la physique, les mathématiques, la dynamique, l'optique ou les sciences de la nature servent de support aux études sur la ligne et la surface, la structure, les dimensions, l'équilibre et le mouvement. La symbolique des formes et des signes directionnels (la flèche) et la couleur porteuse de sens, occupent une place toute particulière qui renvoie immanquablement au dynamisme et au chromatisme de l'oeuvre de Klee (quelques reproductions au centre du livre). Agencements, échanges, production/réception, symétrie/asymétrie, jeu des forces et de leurs contraires : curiosité inventive et intérêt manifeste pour le rythme et la mobilité, offrant sans doute aussi une perception renouvelée des choses et des phénomènes, à ses étudiants du Bauhaus, qui ont dû méditer longuement devant le marteau hydraulique ou le système de reproduction de la plante. Un cours plutôt pragmatique et qui débouche finalement sur une vision métaphysique de l'art, d'où la poésie n'est pas absente. Hommage final à deux de ses contemporains : Franz Marc, Emil Nolde.





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Journal

Paul Klee se raconte homme et artiste à la fois. Son Journal s'aborde comme un objet littéraire intimiste, biographique, mais également comme une source d'informations sur sa création artistique. Ces deux éclairages, mêlés, fécondent autant son écriture que sa peinture, l'une comme l'autre traçant un geste hautement expressif.
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Théorie de l'art moderne

Du bien fondé de lire les artistes.

Plusieurs textes de Paul Klee sont ici rassemblés : des essais, des notes et des cours que l'artiste donnait au Bauhaus. Dans un style lapidaire et épuré, le peintre s'intéresse aux questions qui agitent sa peinture et celle de ses contemporains : celle de la modernité, de la recherche de l'effet en un minimum de signes et de gestes, de l'économie de moyen... Cela passe par l'étude de l'optique, de la persistance rétinienne, par la représentation du mouvement, donner l'illusion, et surtout amener le regardeur à réfléchir sur le sens de l'art et ce qu'est une forme si ce n'est uns synthèse intellectuelle de ce qui est sensé être. L'illusion, le regard autant de pistes qui amènent à comprendre l'art moderne puis contemporain.

Une relecture nécessaire.
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Théorie de l'art moderne

Ouvrage pas lu dans ma bibliothèque et lorsque l'on me l'a proposé, je me suis dit allez faut sauter le pas, car même s'il est assez court, il demeure assez ardu si l'on n'ait pas adepte ou amateur d'art moderne.

Finalement, j'ai apprécié cette lecture qui tendait aussi vers une optique de conception artistique assez originale, mêlant les courbes... tiens cela fait penser à :

"Apprêtez-vous à entrer dans une nouvelle dimension, une dimension faite non seulement d'images et de sons, mais aussi d'esprit. Une expérience entre réalité et fiction, un champ d’hypothèses entre science et religion, dans une contrée sans fin dont les frontières sont votre imagination. Entrez avec nous dans la 4ème dimension"

Sinon bien pour ouvrir son esprit à un autre sujet de réflexion.
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Le Temps des Inventions : Lettres 1902-1905

Il précisait ce qu'il cherchait à peindre : «La floraison d'un pommier, ses racines, la montée des sèves, les anneaux de croissance, la fleur, sa structure, le fruit, l'enveloppe abritant les pépins...» Difficile d'être plus précis au pays de l'imaginaire
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Théorie de l'art moderne

Une référence pour comprendre les bases de l'art moderne ainsi que ses tenants et ses aboutissants. Paul Klee, dans cet ouvrage, tente de nous expliquer la complexité de sa vision de l'art, grâce à de courtes dissertations et des dessins schématiques plutôt clairs. Malgré deux ou trois passages assez complexes, l'artiste a vraiment essayer de rendre son ouvrage accessible. Ce dernier nous révèle une très belle vision des choses, qui feront changer d'avis les dernières personnes persuadées que l'art moderne n'est qu'une juxtaposition aléatoire de choses infondées. Un classique à mettre en commun avec "Du spirituel dans l'art " de Kandinsky, que j'espère découvrir très rapidement.
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Journal

Une déception. Ce journal ne concerne que la jeunesse de Klee jusqu'en 1917. Sa participation au Bauhaus est postérieure. Son voyage en Tunisie qui avait motivé ma lecture n'est qu'une très courte partie (30 pages) de ce journal.

Ses émois pré-pubères et adolescents m'ont ennuyée. Je suis toujours mal à l'aise -même lorsqu'il s'agit d'écrivains majeurs - dans les relations amoureuses des jeunes gens de 1900, qui adoptent une attitude très "limite" dans leurs rapports aux jeunes filles, pleines de préjugés, condescendance avec les modèles et même avec leurs fiancées. Beaucoup de ragots, peu de peinture ou de musique.

En revanche ses récits d'excursions en montagne, son voyage en Italie et en Tunisie sont racontés avec beaucoup d'humour et de vivacité
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Théorie de l'art moderne

« Théorie de l’Art » de Paul Klee édité et traduit par Pierre-Henri Gonthier (1964, Gonthier, 174 p.) rassemble les idées du peintre pour ce qui concerne l’art moderne. Ce livre regroupe pour la première fois l'ensemble des textes théoriques parus du vivant de Paul Klee. Il comprend, entre autres les célèbres « Pädagogisches Skizzenbuch » (Esquisses pédagogiques) (1965, Florian Kupferberg, 55 p.) ainsi qu’une série de courts essais et conférences.

Parmi les questions auxquelles Klee tente de répondre figurent : Quelle est la fonction de la peinture contemporaine ? Quels sont les rapports qu'elle entretient avec d’autres sources de création comme la musique, la poésie, les mathématiques ou la biologie ? Quels sont les pouvoirs de de l'espace, de la forme, la ligne, et de la couleur ? Comment expriment-ils notre conscience de nous-mêmes et de l'univers ? Il en ressort d’une part les principes fondamentaux de sa grammaire picturale et une vision originale d’autre part de la place de l’artiste dans l’univers.



L‘art abstrait, au début du XXème siècle, doit beaucoup aux 3 K que sont Klee, Kandinsky, et Kupka, trois peintres qui ont révolutionné la façon de peindre, pendant que Breton, Arp, Carrington et Tzara inventaient le surréalisme et dada en littérature.



Paul Kee (1879-1940) est un artiste allemand né à Münchenbuchsee, à côté de de Berne en Suisse. Il nait dans une famille de musiciens. Sa grand-mère maternelle l'initie très tôt au dessin au crayon et à la mine de plomb, ainsi qu’à la peinture. Il commence l'étude du violon à l'âge de sept ans, mais préfère dessiner des caricatures dans ses livres de classe. En 1898, il entre à l'atelier d'Heinrich Knirr (1862-1944), où il étudie le dessin figuratif et devient très vite le « meilleur élève de Knirr ». En octobre 1900, il est admis à la « Akademie der Bildenden Künste München » (Académie des beaux-arts de Munich), dans l'atelier de Franz von Stuck, en même temps que Vassily Kandinsky. Mais les deux peintres ne se fréquentent pas, ou pas encore, pas avant 1911. Il se fiance en 1901 avec la pianiste Lily Stumpf (1876-1946), fille d'un médecin munichois, mais le couple ne se mariera qu’en 1906.

À Munich, en 1907, il visite l’exposition des impressionnistes. « Klee n'adopta pas le style des impressionnistes, mais il vérifia leurs principes pour les intégrer à son expérience. […] Klee était plutôt préoccupé par les problèmes de tonalité, ce qui aboutit au développement de l'aquarelle noire ». Il expose à Berne, puis à Bâle où il fait connaissance d'August Macke, puis il voyage en Tunisie. Dans son « Journal » il note à Kairouan « La couleur me possède […] Je suis peintre ».

En apparence, la guerre l’affecte peu. Il est nommé secrétaire de la « Münchener Secession » (Nouvelle Sécession munichoise), une association d’artistes de Berlin et de Vienne venus étudier et vivre à Munich. Celle-ci est dissoute en 1938 par les nazis lors de la « purification culturelle ».

Après la formation au Bauhaus, dirigé par Walter Gropius, Klee y est nommé et enseigne la peinture sur verre, puis le tissage. Avec Kandinsky, il donne des leçons sur la forme et expose la première théorie systématique des moyens qui clarifie les possibilités contenues dans les procédés abstraits. Les notes de ses cours forment les « Contributions à la théorie de la forme picturale » puis la « Théorie de l'art moderne » publiée de façon posthume en 1945, traduite par Pierre-Henri Gonthier (1964, Gonthier, 174 p.).

Paul Klee résilie son contrat avec le Bauhaus en 1931. En tant que musicien, il cherche à lier peinture et musique dans l'idée d'un « rythme pictural », suggérant d'observer les mouvements d'un chef d'orchestre ou le rythme naturel des marées. Il structure alors ses tableaux comme une partition musicale. Puis en 1933, considéré comme « juif galicien » lors de son licenciement de l'académie de Düsseldorf, il est violemment attaqué par les nazis, faisant de lui le précurseur le plus important de « l'art dégénéré ». En 1935, il ressent les premiers effets d'une maladie de la peau, la sclérodermie, que l’on ne savait pas reconnaître, et qui l’affectera beaucoup. Il meurt en 1940 à Locarno.

Il faut aller voir le musée qui lui est dédié, le « Zentrum Paul Klee » à côté de la ville de Berne. Conçu par l’architecte Renzo Piano sous forme de trois bâtiments en forme de vagues, semi-enterrés, le musée regroupe près de la moitié de l'œuvre de l'artiste. Au total, 4000 tableaux, aquarelles et dessins sont exposés, ainsi qu’une superbe collection de marionnettes confectionnées pour son fils Félix.









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Frimousse

De belles illustrations très colorées, un récit vivant qui passionne les tout-petits. Mais où est donc caché ce coquin de chat ? Sa propriétaire, une petite fille, le cherche partout. Au fil des pages : Près de la rivière où il guette les poissons, dans l'arbre où il rêve d'attraper l'oiseau, dans la mousse douce où il aime bien se coucher. Ma petite fille de 2 ans et quelques mois adore ce livre. Je dois encore et encore lui raconter. Elle pousse des cris de joie dès qu'elle trouve le chat. Sa sœur qui a 4 ans et quelques mois, plus pausée, énonce doctement où il se trouve et la partie du corps qui lui a permis de le découvrir. Je recommande vivement.
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Le Temps des Inventions : Lettres 1902-1905

« Le Temps des Inventions. Lettres1903-1905 » de Paul Klee, traduit par Anne-Sophie Petit-Emptaz (2005, Farrago, 322 p.) est un ouvrage agréable à lire, tiré de « Briefe an die Familie 1893-1940 », en deux tomes (1979, Du Mont Buchverlag, Köln, 661 et 1346 p.), édition établie par son fils Félix Klee.

En approximativement 300 pages, on peut lire des lettres de Paul Klee, adressées à sa future épouse Lily Stumpf entre 1903 et 1905. Cela fait suite aux « Lettres d’Italie (1901-1902) » également traduit par Anne-Sophie Petit-Emptaz (2002, Farrago, 163 p.). On pourra aussi lire son « Journal » (2004, Grasset, 366 p.) dont l’écriture commence en 1898, et qui jalonne sa prime enfance jusque vers 1917. Toutes ces lettres sont conservées au Zentrum Paul Klee, Berne.



Paul Klee (1879-1940) est né à Münchenbuchsee, près de Berne, dans une famille de musiciens. De nationalité allemande, c’est un des artistes majeurs de la première moitié du XXeme siècle. Il commence par appendre à jouer du violon, mais préfère tracer des caricatures dans les marges de ses livres de classe.

En octobre 1900, il est admis à la « Akademie der Bildenden Künste München » (Académie des Beaux-Arts de Munich), dans l'atelier de Franz von Stuck, en même temps que Vassily Kandinsky. Mais les deux peintres ne se fréquentent pas, ou pas encore, pas avant 1911. Il se fiance en 1901 avec la pianiste Lily Stumpf (1876-1946), fille d'un médecin munichois, mais le couple ne se mariera qu’en 1906.

Ensuite, il voyage en Italie avec son ami le sculpteur Hermann Hallen, où il découvre l’architecture de la Renaissance ainsi que « la notion d'idéal dans le domaine des beaux-arts est tout à fait inactuelle ». Tout cela est narré dans « Lettres d‘Italie, 1901-1902 ».

Il expose à Berne, puis à Bâle où il fait connaissance d'August Macke, avec qui et avec Louis Moillet, il voyage en Tunisie en 1914. Dans son « Journal » il note à Kairouan « La couleur me possède […] Je suis peintre ».

En apparence, la guerre l’affecte peu. Il est nommé secrétaire de la « Münchener Secession » (Nouvelle Sécession munichoise), une association d’artistes de Berlin et de Vienne venus étudier et vivre à Munich. Celle-ci est dissoute en 1938 par les nazis lors de la « purification culturelle ».

Après la formation au Bauhaus, dirigé par Walter Gropius, Klee y est nommé et enseigne la peinture sur verre, puis le tissage. Avec Kandinsky, il donne des leçons sur la forme et expose la première théorie systématique des moyens qui clarifie les possibilités contenues dans les procédés abstraits. Les notes de ses cours forment les « Contributions à la théorie de la forme picturale » puis la « Théorie de l'art moderne » publiée de façon posthume en 1945, traduite par Pierre-Henri Gonthier (1964, Gonthier, 174 p.). Il existe également le « Cours du Bauhaus » compilation de ses cours à Weimar (1921-1922) qui sont des contributions à la théorie de la forme picturale (2004, Hazan, 224 p.), ainsi que les « Lettres de l’époque du Bauhaus (1920-1930) » traduites par Anne-Sophie Petit-Emptaz (2004, Farrago, 298 p.).

Paul Klee résilie son contrat avec le Bauhaus en 1931. En tant que musicien, il cherche à lier peinture et musique dans l'idée d'un « rythme pictural », suggérant d'observer les mouvements d'un chef d'orchestre ou le rythme naturel des marées. Il structure alors ses tableaux comme une partition musicale. Puis en 1933, considéré comme « juif galicien » lors de son licenciement de l'académie de Düsseldorf, il est violemment attaqué par les nazis, faisant de lui le précurseur le plus important de « l'art dégénéré ». En 1935, il ressent les premiers effets d'une maladie de la peau qui l’affectera beaucoup et dont il meurt en 1940 à Locarno.

Il faut aller voir le musée qui lui est dédié, le « Zentrum Paul Klee » à côté de la ville de Berne. Conçu par l’architecte Renzo Piano sous forme de trois bâtiments en forme de vagues, semi-enterrés, le musée regroupe près de la moitié de l'œuvre de l'artiste. Au total, 4000 tableaux, aquarelles et dessins sont exposés, ainsi qu’une superbe collection de marionnettes confectionnées pour son fils Félix.



Dans « Lettres d’Italie (1901-1902) » Paul Klee part tout d’abord pour Rome de mi-octobre 1901 jusqu’en mars 1902, où il va à Florence. Il s’est secrètement fiancé avec Lily Stumpf. Cette correspondance est l'occasion d'une réflexion sur soi. La musique, la littérature et l'art sont au cœur de son propos, mais la question essentielle reste celle de la formation à l’art. Paul Klee mêle ses lectures et son propre apprentissage. A tout instant et propos, il interroge son travail de créateur. Il fait aussi part de ses doutes et de ses progrès. D’être confronté à tant de richesses de la Renaissance, tant en architecture, sculpture et peinture lui ont révélé un Immense potentiel.

Puis dans « Le Temps des Inventions. Lettres1903-1905 », donc la période qui suit son retour d’Italie, il a pour projet de constituer un corpus de gravures qu'il exposera pour se faire connaître. Ce qu’il a produit en peinture l’a laissé insatisfait alors qu’il a l’impression que son travail graphique semble s’ouvrir sur de plus vastes perspectives. Il cultive l’art de la gravure avec pour but la simplification de la figure. Le but ultime de ces efforts est de libérer la main pour retrouver la spontanéité du geste et l'ingénuité de l'enfance. Sous la forme d’une correspondance assidue avec la femme aimée, ces lettres témoignent de ses doutes et de ses progrès. C’est plus qu’une relation épistolaire, c’est une illustration des échanges intellectuels de leur vision du monde, donc l'occasion d'une réflexion sur soi.

« L’enfance était un rêve, celui de pouvoir un jour accomplir toutes choses. Les années d’apprentissage, une recherche en tous domaines, dans les plus petites choses, dans les plus cachées, dans le bien et le mal. Puis une quelconque lumière se lève et l’on poursuit une direction unique (c’est le stade auquel j’accède à présent, nommons-le celui des années de voyages) ».

Il faut rappeler que Paul Klee est né en 1879. Ces lettres, qui font suite à celles d’Italie, ont donc été écrites alors qu’il a entre 23 et 25 ans. Donc, Paul Klee écrit, ce qui fournit le matériel et le titre de « Le Temps des Inventions ». Il se présente en « futur peintre ».

On peut alors suivre l’évolution de l’artiste entre décembre 1902 et juillet 1905. Paul Klee s’initie à la gravure. Au début ce sont des eaux fortes sur plaques de cuivre, vite remplacées par des plaques de zinc enduites d’un vernis que l’artiste grave plus ou moins profondément, avant de passer à l’attaque par un acide. Le vernis doit être retiré par fines striures fines striures afin d'éviter les grandes zones sans vernis, des « crevés », qui ne pourront pas retenir efficacement l'encre, lors de la phase de l'encrage. Ses premiers essais, de début 1903, aboutissent à des gravures représentant « Femme et Animal » ou « Femme semant l’ivraie », reproduites dans le livre. Les corps sont musculeux, assez déformés par des formes qui ressemblent à des athlètes de culturisme, ayant pour but d’individualiser les masses musculaires. Personnellement, je ne trouve pas ces formes très gracieuses, que ce soit chez les humains ou animaux. Le tout reste largement figuratif. Par contre, me montrant ces gravures, j’aurais été incapable de les attribuer à Paul Klee.

Courage, Paul, la vérité est au bout du burin. Et puis, il continue de lire, d’aller au théâtre, de faire du violon.

Ce qu’il y a d’intéressant, c’est qu’il modifie et améliore progressivement ses modèles. Ainsi la gravure « Weib und Tier » (Femme et Animal) qui initialement est datée de juillet 1903, est retravaillée en novembre, puis en février 1904 « Weib und Tier II ». Ce n’est pas (pas encore) « Weib und Tier » (Animal sans vergogne), aquarelle datée de 1920, qui préfigure l’abstrait. Mais déjà cette gravure « Weib und Tier » datée de 1904 montre une femme moins musculeuse. Seul le bas de sa robe a encore des fioritures. Le chien, par contre, n’a pas changé sa répartition musculaire. Il garde ses pattes d’araignée, déjà fortement nuancées par rapport à « Windspielartiges Tier » (Animal ressemblant à un lévrier) datée de 1902. Il faudra attendre 1926 pour que la gravure de « Nackte Frau » (Femme Nue) soit dessinée sous forme de succession de figures géométriques, cercles, ovales, qui précède les aquarelles géométriques de la fin des années 20.



« Seul l’artiste qui crée est totalement libre »



En observateur attentif, il décelait l’animal qui se cache dans l’humain et, inversement, l’humain dans l’animal. Et il inversait les rôles : dans ses œuvres, les hommes se transforment en « bêtes » tandis que les animaux présentent des traits humains. Il a recours aux fables pour commenter les événements politiques et, dans des scènes animalières, nous présente avec humour un comportement qui n’est que trop humain.

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