Citations de Paul Éluard (1676)
Solitaire
J'aurais pu vivre sans toi
Vivre seul
Qui parle
Qui peut vivre seul
Sans toi
Qui
Etre en dépit de tout
Etre en dépit de soi
La nuit est avancée
Comme un bloc de cristal
Je me mêle à la nuit.
d'une seule caresse
je te fais briller de tout ton éclat
la courbe de tes yeux fait le tour de mon cœur,
un rond de danse et de douceur, auréole du temps, berceau nocturne et sûr,
et si je ne sais plus tout ce que j'ai vécu
c'est que tes yeux ne m'ont pas toujours vu.
(...)
le monde entier dépend de tes yeux purs
et tout mon sang coule dans leur regard
le désespoir n'a pas d'aile,
l'amour non plus
, pas de visage,
ne parlent pas,
je ne bouge pas,
je ne les regarde pas,
je ne leur parle pas
mais je suis bien aussi vivant que mon amour et que mon désespoir
elle est debout sur mes paupières et ses cheveux sont dans les miens
, elle a la forme de mes mains, elle a la couleur de mes yeux, elle s'engloutit dans mon ombre comme une pierre sur le ciel.
l'art d'aimer, l'art libéral, l'art de bien mourir, l'art de penser, l'art incohérent, l'art de fumer, l'art de jouir, l'art du Moyen-Âge, l'art décoratif, l'art de raisonner, l'art de bien raisonner, l'art poétique, l'art mécanique, l'art érotique, l'art d'être grand-père, l'art de la danse, l'art de voir, l'art de l'agrément, l'art de caresser, l'art japonais, l'art de jouer, l'art de manger, l'art de torturer.
je n'ai pourtant jamais trouvé ce que j'écris dans ce que j'aime
Ecrire dessiner inscrire
[...]
Le premier jour je t'embrasse
Le lendemain tu me tutoies
Et pour toujours je crois en toi.
Je n'ai rien à gagner
Je t'aime trop pour perdre
Je ne joue plus je t'aime.
Certitude
Si je te parle c’est pour mieux t’entendre
Si je t’entends je suis sûr de comprendre
Si tu souris c’est pour mieux m’envahir
Si tu souris je vois le monde entier
Si je t’étreins c’est pour me continuer
Si nous vivons tout sera à plaisir
Si je te quitte nous nous souviendrons
Et nous quittant nous nous retrouverons.
L'Alliance
Définitivement ils sont deux petits arbres
Seuls dans un champ léger
Ils ne se sépareront plus jamais.
Le Dernier Souffle
Un oiseau meurt d'une flèche
À tes épaules décombres
Pend un reste de lumière
Années valent moins que jours
Et la vie moins que l'amour
Tu vaux encore un baiser
Rien que le temps d'éprouver
Ce qu'il me reste d'éveil
Tout est clair sous ce drap blanc
Qui te délivre et m'attend.
Belle épouse
Belle épouse de mémoire
Elle sortit de son lit
Comme on entre dans l'histoire.
Il y a des mots qui font vivre
Et ce sont des mots innocents
Le mot chaleur le mot confiance
Amour justice et le mot liberté
Le mot enfant et le mot gentillesse
Et certains noms de fleurs et certains noms de fruits
Le mot courage et le mot découvrir
Et le mot frère et le mot camarade
Et certains noms de pays de villages
Et certains noms de femmes et d'amis
Le Baiser
Toute tiède encore du linge annulé
Tu fermes les yeux et tu bouges
Comme bouge un chant qui naît
Vaguement mais de partout
Odorante et savoureuse
Tu dépasses sans te perdre
Les frontières de ton corps
Tu as enjambé le temps
Te voilà femme nouvelle
Révélée à l’infini.
Si l'on voulait il n'y aurait que des merveilles
À ta vue je sais que rien n’est perdu.
Les uns ont inventé l’ennui d’autres le rire
Certains taillent à la vie un manteau d’orage
Ils assomment les papillons font tourner les oiseaux en eau
Et s’en vont mourir dans le noir
Toi tu as ouvert des yeux qui vont leur voie
Parmi les choses naturelles à tous les âges
Tu as fait la moisson des choses naturelles
Et tu sèmes pour tous les temps
On te prêchait l’âme et le corps
Tu as remis la tête sur le corps
Tu as percé la langue d l’homme rassasié
Tu as brûlé le pain bénit de la beauté
Un seul cœur anima l’idole et les esclaves
Et parmi tes victimes tu continues à travailler
Innocemment
C’en est fini des joies greffées sur le chagrin.
Les femmes les enfants ont le même trésor
De feuilles vertes de printemps et de lait pur
Et de durée
Dans leurs yeux purs
Les femmes les enfants ont le même trésor
Dans les yeux
Les hommes le défendent comme ils peuvent
Les femmes les enfants ont les mêmes roses rouges
Dans les yeux
Il fallait bien que la poésie prit le maquis
Ma grande adorée belle comme tout sur la terre et dans les plus belles étoiles de la terre que j’adore ma grande femme adorée par toutes les puissances des étoiles belle avec la beauté des milliards de reines qui parent la terre l’adoration que j’ai pour ta beauté me met à genoux pour te supplier de penser à moi je me mets à tes genoux j’adore ta beauté pense à moi toi ma beauté adorable ma grande beauté que j’adore je roule les diamants dans la mousse la plus haute que les forêts dont tes cheveux les plus hauts pensent à moi – ne m’oublie pas ma petite femme sur mes genoux – à l’occasion au coin du feu sur le sable en émeraude – regarde-toi dans ma main qui me sert à me baser tout au monde pour que tu me reconnaisses pour ce que je suis ma femme brune-blonde ma belle et ma bête pense à moi dans les paradis la tête dans mes mains.
Je n’avais pas assez de cent cinquante châteaux où nous allions nous aimer on m’en construira demain cent mille autres j’ai chassé des forêts de baobabs de tes yeux les paons les panthères et les oiseaux-lyres je les enfermerai dans mes châteaux forts et nous irons nous promener tous deux dans les forêts d’Asie d’Europe d’Afrique d’Amérique qui entourent nos châteaux dans les forêts admirables de tes yeux.
Je ne peux m'empêcher d'écrire, et c'est le seul moyen que j'ai trouvé dans ma vie d'être libre.