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Citations de Radhika Jha (54)


Quelle chose magnifique qu’un escalator – c’est comme marcher sur le dos d’un serpent. Vous avancez sans avoir besoin de bouger un muscle. Vous volez dans les airs mais vous êtes suspendue, vos pieds douloureux sont soulagés, délivrés de leur labeur. Du coup, vous vous tenez plus droite, vous vous grandissez. Vous relevez le menton et regardez devant vous avec avidité. Qu’allez-vous trouver aujourd’hui au club ? Comment les achats que vous ferez réécriront-ils l’histoire de votre vie ?
Tandis que vous vous élevez sans effort sur le nouvel escalier mécanique, très cher et très silencieux, vous éprouvez une excitation croissante, une impatience qui ne laisse place à aucun autre sentiment. Vous vous sentez vide mais heureuse car vous savez que le vide sera bientôt comblé.
Alors surgit cette émotion particulière que vous attendiez, cette sensation qui vous ramène sans cesse au departo. Elle commence comme un léger chatouillement dans les orteils, comme de petites bulles envahissant chaque cellule du corps. Mais ce n’est que le début. Une fois le joyeux pétillement retombé, une concentration silencieuse s’empare de l’esprit, tandis que commence la chasse.
[…] De même qu’en amour, quand enfin vous trouvez l’objet magique, le vêtement ou l’accessoire qui est fait pour vous, votre cœur se remplit de gratitude. Oui, de reconnaissance, car vous sentez sur vous la main des dieux. Vous avez été choisie. Vous avez gagné. Vous vous précipitez devant toutes les autres belles femmes intelligentes et déterminées qui font exactement la même chose que vous, vous vous emparez de l’objet de votre désir et cherchez la cabine d’essayage la plus proche. Si vous êtes un membre chevronné comme moi, nul besoin de chercher, vous savez où elles se trouvent. La topographie du departo est gravée dans votre cerveau.
Et maintenant, nous arrivons au cœur de mon club. Notre endroit de prédilection, à nous autres femmes – le salon d’essayage. Y entrer, c’est comme se retrouver seule avec son bien-aimé pour la première fois. Le moment est venu de tenir votre trophée entre vos mains et de goûter le plaisir de la propriété. Loin des regards indiscrets, vous pouvez caresser votre butin, l’embrasser et enfin vous glisser dedans. Dans le secret de la cabine d’essayage, vous savourez votre intimité. Là, vous en prenez possession pour la première fois.
Une fois satisfaite, je regagne le comptoir avec mon trophée. […] Et je suis heureuse. Et ce bonheur durera jusqu’à ce que je regagne ma chambre. Grâce à vous, les Américains, nous avons découvert le bonheurisme. Et maintenant, nous voulons que le monde entier soit heureux et achète, achète et achète encore, comme nous. Alors, la paix régnera dans le monde.
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La musique rend les états d'âme supportables en leur donnant forme et beauté. (Page 377)
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Les voitures avançaient. Personne ne prêtait attention à un gigantesque éléphant, entièrement décoré et pomponné, sur le dos duquel trônait un mahout affublé d'un survêtement rouge et vert flambant neuf. L'éléphant se rendait à un mariage dans les quartiers sud de Delhi. Le mahout savait qu'ils étaient en retard. Il força donc sa bête à s'immiscer dans le flot des véhicules, tout simplement.
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Aussi n'en voulais-je pas à la douleur, elle n'était que l'envers de mon bonheur. Et là, dans ma petite maison en désordre qui sentait le poisson, j'étais heureuse comme je ne l'avais jamais été. C'est alors que j'ai pris conscience que la douleur pouvait avoir du bon. A travers elle, il est possible de se remémorer et revivre une expérience avec davantage d'intensité. La douleur effaçait aussi en moi tout sentiment de culpabilité.
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Les gens disent que la frontière entre la vie et la mort est très claire. La vie est la vie, la mort est la mort et les deux ne se rencontrent jamais. Mais je crois qu'en réalité, elles cohabitent dans un même corps. On peut être vivant à l'extérieur - manger, boire, travailler - et se sentir mort à l'intérieur.
Lorsque mon mari m'a emmenée voir un prêtre pour me guérir de mes désirs mauvais, j'ai demandé au religieux comment il se pouvait qu'on soit vivant à l'extérieur et mort à l'intérieur. Il m'a répondu que c'était possible parce que parfois l'âme mourait mais l'esprit ne s'en rendait pas compte et ordonnait au corps de continuer à vivre.
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Quand ils sont venus au Japon après la Deuxième Guerre mondiale, les soldats américains ont offert à leurs "girls" des bas nylon extra-fins. Avant cela, la Japonaise moyenne ne portait pas de vêtements occidentaux, sauf si elle travaillait dans un bureau à l'occidentale ou si elle venait de la haute société chrétienne très occidentalisée.
Mais quand les Américains sont repartis, les citadines de toutes les classes sociales avaient adopté les tenues occidentales.
Désormais quatre-vingts pour cent des vêtements proposés dans les grands magasins comme Mitsukoshi ou Isetan, qui au départ ne vendaient que des kimonos, étaient importés d'Occident.
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Et je suis heureuse. Et ce bonheur durera jusqu'à ce que je regagne ma chambre. Grâce à vous, les Américains, nous avons découvert le bonheurisme. Et maintenant, nous voulons que le monde entier soit heureux et achète, achète et achète encore, comme nous. Alors, la paix régnera dans le monde.
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La voie qui permet d'accéder au statut de superwoman est voilée de mystère et le restera à jamais. Mais je vais dire où elle se trouve; Pour être une superwoman, vous devez créer en vous-même un jardin secret, dans lequel vous jetez toute votre fange - tout ce que vous ne pouvez ni dire ni ressentir -, votre lassitude, votre colère, votre haine pour votre famille et vos responsabilités, la routine immuable de votre vie. Dans le silence infini de la nuit, vous regardez pousser votre jardin du mal. Le jour, vous le piétinez et vous êtes une superwoman.
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A Nandgaon, la visite de l’étranger poussiéreux sur sa motocyclette fut vite oubliée. En moins de quinze jours, il fut réduit à l’état d’épouvantail, juste bon à effrayer les enfants désobéissants. Le village oublia même pourquoi il était venu. Ce n’était ni fortuit ni choisi. Nandgaon s’était coupé du monde. Avant d’arriver au village, la route avait bifurqué, abandonnant le sentier sur lequel Manoj s’était égaré. Cet isolement avait garanti la paix et une certaine harmonie : toute ingérence extérieure était considérée comme une menace.
En revanche, le mariage de Lakhsmi avait été bien plus commenté, et pendant bien plus longtemps. Tout d’abord, les villageois s’étaient émerveillés de la façon dont Ramu, l’idiot du village, avait réussi à se dégotter une épouse belle et intelligente. Quand ils apprirent qu’elle avait même fait des études supérieures, ils en restèrent stupéfaits et quelques peu apitoyés. Pourquoi, se demandèrent-ils, une telle femme avait consenti à épouser ce béta ? Mais quand ils surent que le père de Lakshmi s’était donné la mort, ils cessèrent de l’inviter, de peur d’être contaminés par sa malchance. Même les femmes les plus pauvres prirent leurs distances.
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Je freine brutalement au moment où un troupeau de vaches déboule entre des monceaux de fruits abîmés, d'emballages en papier journal et de légumes. Les bêtes choisissent délicatement ce qu'elles ont envie de manger. Sur la route, elles sont au moins vingt-cinq. Nous attendons qu'elles traversent. Pour moi, elles sont plutôt belles - îlots de quiétude au sein de ce tourbillon frénétique qui anime Delhi.
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Les jours devinrent familiers et prévisibles, limités à une série d'impressions insignifiantes sur fond immuable d'espoir.
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Mais dans les années 1960, une nouvelle religion est arrivée au Japon et a éloigné bon nombre d'entre nous des anciennes croyances. Ce culte nouveau n'avait pas de nom, je lui en ai donné un - je l'appelle le bonheurisme. C'est la religion que vous les Américains, nous avez apporté, la raison pour laquelle nous n'avons pas tué vos soldats quand vous êtes venus nous occupées. [...] J'appartiens à la première génération de Japonais, qui pratiquent le bonheurisme. Comme vous le verrez, je suis en fait plutôt experte en la matière.
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"Tokyo est beau. Tokyo regorge de belles choses. Et il est si facile de désirer les belles choses. Quel mal y a-t-il à désirer être heureux ? Quel mal y a-t-il à vouloir posséder de belles choses ? Mais le bonheurisme nous a pris au piège. Et à présent, on ne demeure en vie qu'aussi longtemps que l'on continue d'acheter."
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Le problème avec les belles choses, c'est que quand on en possède une, on en veut deux, et quand on en a deux, on cherche à avoir une troisième.
Car la faim des yeux ne connaît pas de limites.
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La foule se mit à bourdonner comme une ruche. Les musiciens allumèrent les lampes à gaz pour accorder leurs instruments, les chevaux hennirent et martelèrent le sol, les chameaux se relevèrent, les invités du marié ajustèrent leurs turbans roses.
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Les étrangers demandent toujours pourquoi le Japon est un endroit si sûr. Comment il se fait qu'il n'y ait pas plus de policiers sur les routes, qu'ils ne portent jamais d'armes et que malgré tout personne n'enfreigne la loi. Je vais vous le dire. C'est à cause des voisins. Ils sont vos policiers, vos juges et vos geôliers. Mais par-dessus tout, ils sont vos maîtres. Ce qui nous oblige, nous autres Japonais, à respecter les règles, c'est la honte que nous éprouvons quand nous nous faisons surprendre à désobéir à nos maîtres. Et dès lors que ceux qui nous prennent sur le fait sont aussi ceux qui nous enseignent, cette association maître-policier est inévitable.
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(...)le mariage est un placard où l'on vous enferme pour le restant de vos jours(...).
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Parce que quand je suis avec eux, je pense à l'argent que je vais gagner et immédiatement une image prend vie dans mon esprit : je vois un étang au milieu de rizières. L'étang est couvert de lotus et je suis l'un d'eux. Je sens le vent me caresser de ses mains rugueuses et le froid de la vase où mes racines ont trouvé leur point d'ancrage. Et je sens mon corps prendre la forme de cette fleur superbe et délicate, ouverte au vent et à la pluie.
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D’abord, les oignons se défendent. Ils gardent leur eau, ils ont peur de mourir. Ils chantent, ils te crient dessus, ils te maudissent et ils dégagent une odeur horrible. Puis le feu et l’huile font leur travail et les oignons abandonnent la lutte. L’odeur les quitte comme le souffle quitte un mourant, et entre dans les autres ingrédients.
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Mon odeur de pourri m'enrobe comme un linceul et fermente avec suavité. Je décide que mon corps pue plus fort qu'une benne d'ordures. A l'inverse du camion à ciel ouvert où s'accrochent chaque jour les éboueurs, mon odeur reste bouclée à l'intérieur, en un lieu privé d'air et de lumière, et filtre par tous mes pores comme un redoutable déchet chimique auquel personne ne veut toucher. Je sens ses relents d'épices tout autour de moi, agglutinés à l'air humide, et la puanteur d'aliments pourris s'accentue chaque fois que je prends une inspiration.
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