Là-bas, là-bas, entre Soumana et Yakidji, le sombre des nuages se résout en traînées grisâtres, qui unissent à la terre le ciel.
La colonisation est une déesse âpre et cruelle, qui ne se paie pas de mots et se nourrit de sang.
L'air frait vient, fuit,revient, caresse. Et produisent les arbres un musical frisselis de milles feuilles mouillées. Et frémissent les cibles des hauts fromagers. Et entrechoquent leurs longues tiges flexibles,les bambous longuement gémissent.
Un dernier coup de vent dechire enfin les dernières brumes d'où le soleil surgit, lavé, intact, lucide.
De la plaie qui s'élargit, là bas,du rouge soleil semble émaner un apaisement prodigieux qui,d'espace en espace, gagne les plus lointaines solitudes.
La chanson monotone décomposait la quiétude ambiante. Lorsqu’elle cessait, on n’entendait plus que le crépitement de la brousse séchée par le soleil ou l’éclatement des siliques ( cosses) des tamariniers ; on ne percevait plus que tous ces bruits menus dont est fait le silence. Puis la chanson reprenait plus indistincte, là-bas…
Il a pu se marier. Et voilà des années qu'il a pu faire ce que je voudrais faire, et ce qui m'est défendu. Car je ne suis qu'un nègre, moi. Et un nègre n'a pas le droit de s'évader de sa race.
Il faisait bon. Le vent, un doux vent mou, soufflant de l’endroit où le soleil se lève à celui où il se couche, ventilait la brousse. Lolo avait encore un long espace à parcourir avant d’atteindre le milieu du ciel. Le tam-tam des li’nghas gravissait, en se riant, l’étendue sans route qui monte vers les villages bleus où il demeure.