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Citations de Ron Rash (747)


Dans un marais on pouvait couper des arbres tout en sachant que des poissons continueraient à nager là où il y avait eu des arbres, et puis sur leurs souches on voyait des grenouilles, des tortues boîtes et des oiseaux. Mais ici les souches pâles donnaient à la terre un aspect vérolé, comme si elle était infectée par une horrible maladie. Une maladie qui tuait aussi l’ensemble des animaux, parce que Quince n’avait vu ni lapin, ni cerf, ni oiseau dans le secteur qu’ils avaient déboisé.
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L’équipe examina les arpents encore intacts.
« Va savoir s’ils nous demanderont pas d’accélérer la cadence, comme à la filature, dit Quince. Mon oncle Nebuchadnezzar, il y a travaillé dans une de ces usines, et v’là-t-y pas que leur « expert en efficacité » y se ramène avec une montre et chronomètre l’oncle Neb quand y change les bobines, comme si c’était une course ou un truc de ce genre, et pis qui dit à Neb qu’y devrait s’activer comme ça toute la journée. L’oncle Neb, il a demandé au type s’il voyait un fil électrique qui lui sortait du cul. Quand le type a répondu que non, l’oncle Neb lui a dit « Ben voilà », et y s’est tiré.
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Jacob ferma les yeux mais ne dormit pas. Non, il imagina des villes où des hommes affamés s’accrochaient à des wagons de marchandises pour aller chercher un travail impossible à trouver, des baraques où vivaient des familles qui n’avaient même pas une vache à lait au dos creux. Il imagina de grandes cités où du sang maculait les trottoirs au pied d’immeubles aussi hauts que des montagnes. Il s’efforça d’imaginer un endroit pire que celui où il se trouvait.
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Lorsque Pemberton regagna les montagnes de Caroline du Nord, après trois mois à Boston où il était parti régler la succession paternelle, parmi les personnes qui attendaient son train, sur le quai de la gare, se trouvait une jeune femme enceinte de ses œuvres. Elle avait auprès d'elle son père qui, sous sa redingote défraîchie, était armé d'un couteau de chasse affûté le matin même avec beaucoup de soin, de façon à pouvoir l'enfoncer aussi loin que possible dans le cœur de l'arrivant.

(Incipit)
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Elle se rendit compte qu'on pouvait avoir aussi faim de mots que de nourriture, parce que leur absence creusait le même vide au dedans de vous, un vide qu'il fallait combler pour pouvoir affronter une nouvelle journée.
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Qu'est-ce qu'y peut être dur, ce monde où qu'on vit. Pas étonnant qu'un bébé, y pleure en arrivant sur la terre. Dès le premier moment, on traverse une vallée de larmes.
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Ellen Kowalsky est entrée dans le bassin. L’eau a recouvert ses chaussures, est montée le long de ses tibias. Allen s’est avancé pour la détourner des chutes. Il a posé une main légère sur son coude tandis qu’ils revenaient vers la rive, lentement, presque cérémonieusement. Elle a laissé échapper le mouchoir en papier froissé. On aurait dit une fleur de cornouiller qui dérivait vers le centre du bassin, puis coulait.

(p. 222)
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« J’ai déjà tenté de sortir Ruth de là et je n’y suis pas arrivée. J’ai besoin de l’aide de M. Brennon et de son barrage. Et j’ai besoin que le Service des forêts et les personnes qui sont ici soutiennent M. Brennon. C’est la dernière chose que je peux faire, a-t-elle dit, sa voix commençant à faiblir. Il est trop tard pour quoi que ce soit d’autre. »
À ce moment-là, nul être présent dans l’assemblée, pas même le plus cynique, n’aurait pu douter que la perte de son enfant l’avait brisée et qu’elle ne pourrait tenter de guérir que lorsque sa fille reposerait sous terre, et non plus sous l’eau.

(p. 188)
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« En d’autres termes, elle [Ruth] était comme l’enfant de tout un chacun. Mais il y avait des jours où nous manquions de patience envers elle alors que nous n’aurions pas dû, des jours où nous ne l’entourions pas d’autant d’attention et d’amour que nous l’aurions pu. N’importe quel parent dans cette salle sait que cela arrive : nous sommes tellement absorbé par notre propre existence que nous en oublions que rien ne compte davantage que nos enfants. (…) »
Elle s’est tue pendant quelques instants. La salle était tellement silencieuse que j’entendais des grillons chanter au-delà des fenêtres ouvertes. Je me suis soudain rendue compte qu’Ellen Kowalsky ne regardait pas le mur du fond. Elle regardait "à travers", plus loin que le pont et que Bobcat Rock, jusque sous cette cavité dans Wolf Cliff Falls.

(p. 186-187)
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Le brouillard s’était finalement dissipé et le soleil avait percé. Nous étions à ce moment-là sur une partie de la rivière où des bosquets de peupliers bordaient les deux rives. Tandis que les dernières taches de brouillard s’évaporaient, les feuilles jaunes des peupliers sur lesquelles tapait le soleil s’étaient illuminées telles des mèches de lampe qu’on allume. L’air était électrique et vivant, comme lorsque des éclairs trouent le ciel avant la pluie. Nous étions sur des eaux lentes mais le pouls de la rivière avait paru s’accélérer. Tout, y compris Luke et moi, miroitait dans une lumière dorée. Pour la première fois de ma vie, j’avais vu la rivière comme il me semblait qu’il la voyait.

(p. 179)
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Nous étions maintenant presque au sommet de Stumphouse, à plus de sept cents mètres au-dessus du niveau de la mer. Dans les bois, quelques fleurs de cornouillers s’attardaient, comme au petit jour des étoiles dans le ciel.

(p. 171)
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C’était comme si nous avions mal calculé tout ce que nous pouvions nous dire et qu’il nous restait encore assez de rancœur pour protéger ce qui se trouvait au plus profond, ce qui ne pouvait s’exprimer que par des paroles de réconciliation et de pardon – des paroles pour reconnaître que nous étions liés par le sang et la famille, et même, malgré notre volonté qu’il en soit autrement, par l’amour. Des paroles si effrayantes que nous fermions hermétiquement la bouche, n’osions pas une seule syllabe de ce langage-là. Parce que nous comprenions tous deux que, une fois que l’on ouvre la bouche pour prononcer ces mots-là, on ouvre aussi son cœur. On l’ouvre aussi grand qu’une porte de grange, on démonte les gonds, et du coup n’importe quoi peut en sortir ou y entrer. Y a-t-il quoi que ce soit de plus effrayant ?

(p. 162-163)
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J’ai écouté le temps égrener son tic-tac comme des sabots frappent la chaussée. Mais on ne peut pas serrer la bride au temps. Il avance sans jamais s’arrêter, nous emportant avec lui quel que soit notre désir qu’il en soit autrement.

(p. 158)
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Papa avait appelé une ambulance. Et puis tante Margaret. Il avait quitté la chambre dès son arrivée. « Je ne peux pas la regarder mourir. Non, je ne peux pas », lui avait-il confié. Il avait attendu sur la galerie que tout soit fini. Mais tante Margaret était là auprès de nous, elle parlait à maman d’une voix apaisante, sa main lui effleurait les cheveux. Ensuite maman avait soufflé une dernière fois, presque un soupir. J’avais soulevé son poignet pour lui tâter le pouls et son bras m’avait semblé plus lourd, comme si la mort ajoutait au corps un poids de plus à porter.

(p. 158)
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Sous l’éclairage rouge d’une chambre noire, tout est gris. Vos mains sont sans vie. Le bain d’arrêt vous emplit les narines et le ventre comme du formol. C’est peut-être normal, au fond, car ce que fait un photographe, c’est embaumer quelque chose ou quelqu’un dans une éternité encadrée et figée.

(p. 145)
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Allen m’a tendu ma bière et s’est assis, plus près, sa jambe tout contre la mienne, pendant que les musiciens jouaient l’intro de « Omie Wise ».
Ce n’était pas la première fois que le chagrin pouvait être purifié en se transformant en une chanson, ai-je soudain pensé. Tout comme un morceau de charbon est purifié en se transformant en diamant.

(p. 131)
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Après le deuxième couplet, Randall a joué un solo. J’ai observé la tache floue de ses doigts qui pinçaient les cordes et les faisaient ployer. J’ai tenté de m’imaginer ce que c’était de connaître un objet aussi bien que Randall Alexander connaissait cette guitare, sans pouvoir le voir, de ne le connaître que par le toucher. Le regard posé sur le vieil homme, sur sa tête penchée vers les cordes comme en une conversation secrète, je me suis demandé si la vue n’était pas qu’une distraction de plus, un obstacle empêchant d’entrer en ce lieu au cœur de la musique où rien ni personne ne pouvait s’introduire de force.

(p. 129-130)
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(…) elle se dit Ne respire pas, (…) sa bouche et son nez s’ouvrent en même temps, ses poumons explosent de douleur et puis la douleur a disparu avec l’obscurité, des couleurs vives volent en éclats autour d’elle comme des morceaux de verre et elle se souvient de son cours de sciences naturelles de sixième, du glougloutement de l’aquarium au fond de la classe le matin où le professeur a tenu un prisme hors de la fenêtre pour qu’il s’emplisse de couleur, elle a une dernière et belle pensée – qu’elle est maintenant à l’intérieur de ce prisme et sait quelque chose que le professeur lui-même ne savait pas, que les couleurs du prisme sont des voix, des voix qui tournoient autour de sa tête comme une couronne, et à cet instant ses bras et ses jambes, dont elle ne se doutait même pas qu’ils s’agitaient, s’arrêtent, et la voilà qui fait partie de la rivière.

(p. 14-15)
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Ce qui avait été une prairie où coulait une rivière ressemblait à présent à un marais des basses terres. Des épicéas et des chênes noirs avec lesquels les bûcherons ne s’étaient pas embêtés pointaient hors de l’eau. Les souches des grands feuillus se dressaient pareilles à des pierres tombales. Mais plus on avançait moins on en voyait. L’eau devenait plus profonde et cachait davantage de choses. Au bout de la vallée, là où les montagnes se resserraient, un mur de béton blanc bloquait la rivière comme un garrot bloque une veine.

(p. 274)
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Un fermier attrape des cals aux mains. Un shérif les attrape au cœur.

(p. 271)
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