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Citations de Stefan Hertmans (139)


Je prie chaque jour. Comme un robot, je débite d'interminables prières car, plus qu'une foi inébranlable, le rythme de la prière m'aide à résister aux crises d'angoisse et de désespoir face à la mort.
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Je pense aux hautes maison étroites de mon village provençal. Quelqu'un m'a dit un jour à leur sujet : comme on attribuait aux juifs de très petites parcelles, ils ont inventé les constructions à plusieurs étages.
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Elle va prier le matin dans la petite chapelle et demande au dieu des Chrétiens de lui pardonner d'appartenir à présent au dieu juif. Mais elle sait qu'elle implore toujours le même dieu: cette voix désespérée, secrète, au plus profond d'elle- même.
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Je voudrais pouvoir la mettre en garde contre ce qui va lui arriver. Passe ton chemin, jeune fille, choisis un autre homme, échappe à ce sort, fuis ce qui t'attire. Mais non : elle tombe si profondément amoureuse qu'elle laisse tout son monde derrière elle.
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Une chose continue d’occuper ses pensées, les jours suivants. Le spectacle des têtes d’animaux dans la cour crasseuse. Dans son souvenir, la douce lumière de l’après-midi brille sur ce tas de laideur à couper le souffle, et ce qu’il voit sont des couleurs, des teintes, les transitions les plus subtiles entre la lumière et l’ombre, les gris et le rouge, le sépia et le bleu nuit, le rouge foncé devenu presque noir, le jaune délicat presque blanc, d’un morceau de pelage près d’un museau mort. Il se rappelle un des vieux livres que feuilletait son père, en particulier un certain tableau qui l’avait marqué quand il était enfant : une carcasse de taureau, peinte par le célèbre Rembrandt. Ce tableau représentait une chose dont on ne pouvait dire qu’elle était belle en soi, mais qui était transmuée en un spectacle puissant et beau. Cette contradiction le ronge au plus profond de son être. Il prend lentement conscience, tandis qu’il fixe la bouche mugissante du four à la fonderie et que les projections dansent autour de lui comme des lucioles, que le choc provoqué par sa répugnance face au tas apocalyptique de viande pourrissante remplie de regards morts a éveillé quelque chose qui l’attire, qui le fait souffrir, qui ouvre en lui un nouvel espace – que pour la première fois est né en lui un désir qui semble le dépasser. C’est le désir de dessiner et de peindre, et dès l’instant où il s’en rend compte, juste au moment où il serre une fois de plus entre ses mains une de ces lourdes cuillères remplies de fer en fusion, il a l’impression de sentir ses genoux fléchir. Sa soudaine prise de conscience l’assaille avec une force intense, empreinte d’une certaine culpabilité.
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D’ailleurs, qui parcourt encore ici cent mètres à pied, dans un monde qui n’est plus à échelle humaine ? Je regarde autour de moi : il n’y a que des espaces à l’abandon, sans nom, comme en ont laissé partout dans le monde les grandes industries. Dommages collatéraux urbains.
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Il se tient de nouveau à l’endroit devant moi, frotte la poussière de ses mains, remet son chapeau et dit, le visage un peu rouge : tu peux tout faire, du moment que tu en as envie.
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Ces migrations favorisent la prostitution ; des femmes abandonnées essaient de survivre en vendant leur corps. Le pape Urbain pouvait difficilement prévoir la déchéance morale, les atrocités et l'endurcissement général que son appel enthousiaste à al croisade allait déclencher.
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David, qui a parlé de la jeune fille aux rabbins, l'a présentée en tant que prosélyte. Cela fonctionne: les convertis étaient les bienvenus dans le monde juif d'alors. Quand on voulait se convertir, on passait pour pleinement juif.
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Je suis la diaspora des choses.
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Ma besace était raidie par la boue et la crasse ; près d'une ferme abandonnée, nous rinçâmes nos affaires. Je découvris mon matériel de dessin, que j'avais presque oublié, un fusain et un crayon ; les quelques feuilles que j'avais apportées de la maison étaient couvertes de taches de boue. La gorge serrée, je m'assis contre un tronc d'arbre et dessinai le paysage ravagé, les ruines, les cratères formés par les bombes, les corps, les souches d'arbres pulvérisées, le cheval mort que je vis suspendu à un orme brisé, tout droit, la tête ensanglantée à moitié arrachée, horriblement tordue, formant un contraste saisissant avec, dans l'arrière-plan, le ciel frais du matin, les pattes entremêlées comme des branches dans les restes de l'arbre.
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Un peu plus loin, le patient traceur de sentiers me montre, sous un tas de rameaux d’orme morts, un endroit où il a vu la première fois deux jeunes loups. Lançant sa lumière oblique – douce magie automnale –, le soleil matinal franchit la crête de la colline qui nous fait face. Je voudrais pouvoir regarder sans penser.
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(…) il est souvent irascible, fulmine contre la politique belge et le laxisme des traîtres flamands à la bonne cause, appelle Bruxelles un cancer, le drapeau belge un torchon et sa patrie l’homme malade de l'Europe, il déclare d’un ton pontifiant qu'ils auraient dû agir plus radicalement pendant la guerre, que les Allemands auraient fait place nette en éliminant ces fransquillons bruxellois arrogants, qu'ils feraient mieux d'être rattachés aux Pays-Bas, mais là-bas aussi tout va de travers, à Amsterdam des bolcheviques aux cheveux longs quasi sauvages circulent dans les rues, ils fument de la drogue et baisent tous entre eux, l'Europe tout entière est un grand matelas, ose écrire un de ces beatniks d'Amsterdam, où va le monde.
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Y aurait-il une corde à tresser
dans ce drap blanc comme un suaire ?
Y aurait-il un crochet salvateur
tout en haut de ce mur sans fenêtre,
une sortie, une sortie de secours à travers le mur,
en dernier ressort, loin de ce maudit sort ?
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Stefan Hertmans
Le fasciste d'aujourd'hui ne va pas regarder le monde en disant que c'est lui qui a raison, mais qu'il est dans sa bulle et déteste les autres bulles. Le fascisme est devenu d'une subjectivité farouche : ce n'est plus une idéologie avec une vision, des solutions, c'est un comportement : ils ne réfléchissent pas, ils réagissent.

Dans le journal "Le Soir" du 21 janvier 2022.
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« Je touche les murs rugueux sur lesquels perle l’humidité et me dis : David Todros, je touche mille ans plus tard la pierre que tu as connue. » (p. 68)
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Elle doit apprendre à se taire quand on ne lui demande rien et à ne pas prendre la parole la première. Elle doit baisser les yeux quand elle marche dans la rue et ne dévisager personne. Elle doit savoir marcher à petits pas élégants.
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A cette occasion, en fin de journée, il se produit ce qu’elle espérait : le jeune homme est de nouveau occupé à parler avec ses amis devant l’école talmudique. Elle se sent haleter d’excitation. Elle approche, n’est plus qu’à quelques pas du petit groupe. Elle doit lever les yeux, il le faut, il le faut. Elle le fait et regarde droit dans ses yeux. Il est encore plus choqué qu’elle, par ce mélange d’hésitation et de franchise dans le regard de la jeune fille. Elle semble vriller ses yeux dans les siens, elle sent que son regard produit sur le garçon un effet douloureux. Quand elle s’en aperçoit, elle éprouve une curieuse volupté qui lui donne une brève impression de puissance, de cruauté, tandis que son cœur s’emballe sous ses beaux habits brodés. Non seulement les autres jeunes hommes se taisent, mais ils voient avec un certain étonnement le jeune David Todros s’interrompre au milieu de son discours, tenter de se ressaisir et cligner des yeux. Vigdis Adelaïs a déjà disparu au coin de la rue.
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La mort n'est pas un maître,
c'est une brute épaisse,
un rond-de-cuir sans imagination.
(Silence.)
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Partout surgissent de véhéments patriotes, qui pendant la guerre se livraient à un commerce clandestin mais intensif avec les Allemands. Partout des traces et des témoignages sont fiévreusement effacés. Partout j’assiste à des querelles, de l’animosité, des ragots, des trahisons, des lâchetés et des pillages, tandis que les journaux exultent en évoquant une paix bienheureuse. Nous, les soldats qui revenons du front, nous sommes mieux informés. Nous nous taisons, luttons contre nos cauchemars, éclatant parfois en sanglots en sentant l’odeur du linge fraîchement repassé ou d’une tasse de lait chaud.
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