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Critiques de Stéphane Mallarmé (49)
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Poésies

Mallarmé, un nom qui est pour de moult lecteurs l'incarnation de l'hermétisme le plus arrogant. Hermétisme peut-être, mais arrogant non! Hermétique parce que fermé à la sentimentalité du romantique et de l'innovation baudelairienne, Mallarmé cherchait "autre chose". Toute sa poésie n'était qu'un exercice en vue d'écrire son "Livre". C'est cet exercice qu'on retrouve dans ce recueil, cet entraînement unique dans l'histoire de la littérature mondiale. Les entraînements d'un ascète (cela rime étrangement avec poète).



On sait très bien que Flaubert écrivait des phrases plutôt que des romans, cette petite unité était l'élément le plus important qu'il fallait travailler (je renvois ici à un excellent texte de Barthes). Pour Mallarmé c'était le mot. Il voulait mettre chaque mot devant le mot qui lui convenait le plus dans un agencement absolu (un coup de dés que lui seul savait la manière de jouait) . L'absolu poétique. Une syntaxe poétique nouvelle.



La lecture de la poésie de Mallarmé est un acte assez particulier. On retrouve une poésie parfaite (au sens mallarméen), pure, débarrassée des sentiments, du quotidien, du personnel et du compréhensible, c'est tout cela à la fois qui vient trouver refuge dans cette poésie, notre quotidien qui trouve un parallèle poétique, un miroir, cette autre chose! Bien entendu, on croise quelques poèmes de la tradition baudelairienne, un reste de l'admiration de Mallarmé. Les poèmes de Mallarmé sont la traduction qu'il a faite d'une oeuvre venue d'un ange.
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Bonne année !

Très bonne année en compagnie d’Aragon, Beauvoir, Céline, Mallarmé, Zola, Stendhal, Simenon, Oulitskaïa… 10 réveillons littéraires, de Moscou à Paris en passant par les Flandres !

Un petit livre savoureux ( collection folio 3€ ), un vrai régal pour les fêtes sans crainte des lendemains!!!

Alors très bonne année à tous les Babéliotes - et à tous les autres aussi bien sûr !
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L'après-midi d'un faune : églogue

Aujourd'hui, ayant quelques moments de libre, j'en ai profité pour chercher un poème sur Wikisource sur mon portable. Et, très rapidement, j'ai pensé à Mallarmé. Je n'avais jamais lu sérieusement cet auteur. Me souvenant de la musique de Debussy, j'ai donc choisi dans la liste proposée « L'après-midi d'un faune ». Le faune est un être mi-homme mi-dieu, mi-homme mi-bouc, vivant dans les forêts et appréciant la compagnie des nymphes. Je ne suis pas très qualifié pour critiquer ce poème. Tout ce que je peux dire, c'est que c'est magnifique. On est un peu dans l'esprit d'un faune, qui, à la vue de nymphes près d'un point d'eau, est transporté de désirs. C'est très court, mais très beau. Voilà, je viens de découvrir la poésie de Mallarmé.
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Poésies et autres textes

Ce livre rassemble la quasi totalité des poèmes en vers, sauf le célèbre "Un coup de dés jamais n'abolit le hasard" ainsi que les poèmes en prose de Mallarmé. Sont réunis aussi plusieurs écrits, dont certains donnent un éclairage précis de la conception de la poésie de Mallarmé. Grâce à eux, on comprend que le poète, à l'opposé de Rimbaud qui voulait changer le monde, qui rêvait d'une fonction sociale de la poésie, lui veut en faire un art élitiste, réservé à des initiés, inaccessible au commun des mortels; il se montre d'ailleurs irrité du caractère populaire qu'a pris selon lui l'art poétique. Et cette ambition d'une poésie sacrée, religieuse, mystique, va se traduire par l'utilisation préférentielle des mots pour leur son ou leur capacité d'évocation, par une syntaxe altérée, par un rythme si particulier, hypnotique, que l'on ressent à la lecture à haute voix, toujours indispensable pour le poème, la poésie est orale, oracle même dans ce cas. Mais il faut noter qu'à l'inverse du Rimbaud des Illuminations, qui a choisi la prose, ou de la poésie surréaliste du 20ème siècle, qui emploie principalement le vers libre, Mallarmé enchâsse son texte poétique dans le cadre strict du mètre et de la rime, le poème ayant souvent la forme du sonnet.



De ce fait, sauf pour les premiers poèmes en vers influencés par Baudelaire, et certains sonnets de circonstance (tels les trois "Éventails' le "Billet à Whistler",...), la poésie en vers de Mallarmé est difficile, hermétique, mais, et ceci entre autres par le choix de respecter une construction traditionnelle, la lecture à haute voix de beaucoup de poèmes donne une sensation, certes un peu froide, ici pas d'envolées lyriques, mais une sensation extatique, religieuse, analogue pour moi à un motet de Palestrina, une oeuvre d'Arvo Pärt, ou à un vitrail de cathédrale. Mémoriser certains de ces poèmes et les réciter permet d'en mieux saisir leur caractère "magique". Je cite quelques uns de mes préférés: les Tombeaux de Poe, Baudelaire, Verlaine, le Don du Poème, la Prose pour des Esseintes, "Ses purs ongles très-haut...", "Une dentelle s'abolit dans le doute..." "À la nue accablante tu..."



Les poèmes en prose sont beaucoup plus accessibles, la forme emprunte à Beaudelaire (d'ailleurs, ils ont été écrits presque tous avant que ne paraissent les Illuminations de Rimbaud en 1887, qui montrent de nouvelles façons d'agencer le poème en prose). Ce sont de textes, souvent pleins d'ambiguïté, de mystère et d'étrangeté.



En conclusion, même si j'ai plus "d'affinités électives" avec, entre autres, la poésie de Rimbaud, Baudelaire, Apollinaire, Eluard, Chedid, pour ne citer que les poètes français, j'admire aussi depuis longtemps le rythme sacré du vers mallarméen.
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Poésies

Si le concept de "poésie pure" signifie quelque chose, alors, nul doute qu'il convient parfaitement à l'œuvre de Mallarmé. Celui-ci, en effet, ne veut retenir des mots, non leurs sens précis, mais leur musicalité, leurs vibrations - ce qu'ils peuvent évoquer dans l'esprit du lecteur: d'où le fameux "hermétisme" mallarméen! "Nommer un objet, dit-il, c'est supprimer les trois quarts de la jouissance du poème qui est faite de deviner peu à peu; le suggérer, voilà le rêve."

Peu lui importe donc, à la limite, que ses poèmes aient une quelconque signification littérale; il suffit que, par leur beauté formelle, ils fassent naître un état d'âme, éveillent des sensations, inspirent des images, un peu comme le feraient formules magiques ou incantations... Bien qu'étant agnostique, il y a dans sa conception de la poésie un côté religieux, voire mystique.



"Sait-on ce que c'est qu'écrire? Une ancienne et très vague mais jalouse pratique, dont gît le sens au mystère du cœur."

À chaque lecteur de plonger dans ce mystère!
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Poésies et autres textes

Dès les premières pages de cet ouvrage, ce fut d'abord la beauté du vers (ou de la prose, d'ailleurs) qui m'a saisie. J'ai réellement trouvé le style, la musicalité de la poésie de Mallarmé magnifique. Les images de la nature, des fleurs, de l'eau sont très jolies sans être classiques. En fait, je ne sais pas trop dire pourquoi ni comment mais ces poèmes m'ont touché, m'ont parlé sans que j'en comprenne toujours le sens. Je me suis simplement laissée porter par la mélodie, la beauté des images... Cette première lecture m'a donné envie de conserver cet ouvrage dans un coin pour le redécouvrir plus tard sous un nouveau jour, et sans doute mieux le comprendre. Je suis cependant passée un peu à côté de la prose, ce qui n'a rien d'étonnant puisque je n'aime pas vraiment lire de poèmes en prose.

Bref, je n'ai pas beaucoup d'arguments à avancer mais ces poèmes sont certainement parmi les plus beaux, quoique parfois obscurs, que j'ai lu. Ils m'ont appris qu'il y avait deux niveaux de compréhension : celui du cerveau, et celui du coeur. Et cela m'a fait du bien de reposer un peu mon cerveau pour laisser le champ libre à mon coeur, à mon âme. Une belle découverte.
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Poésies

Il n'est guère nécessaire de relire Mallarmé : ses poèmes ont un tel pouvoir sonore et "imaginal" qu'ils se fixent tout seuls dans la mémoire à la première lecture. Ce poète m'a accompagné depuis mon adolescence, conduite à lui par Baudelaire qu'il continuait à sa façon, dans ses premiers poèmes. Je n'ai pas souvent rouvert Mallarmé depuis, car il m'est resté dans l'oreille et dans l'imagination frais comme au premier jour.



On peut s'intéresser au destin tragique de ce poète, et avec les théoriciens de la poésie ou de la psychologie des profondeurs comme Charles Mauron, considérer ses poèmes comme les traces d'un grand oeuvre raté, d'un naufrage poétique et personnel. On peut aussi, tout bien considéré, lire ses rares poèmes pour eux-mêmes et se laisser ensorceler par leur caractère orphique : le chant, le son, l'image sont fascinants.



Enfin, à propos de la fameuse obscurité, de l'hermétisme qu'il hérite de Lycophron ou de Gongora, et qu'il transmet aux poètes modernes ultérieurs, on ajoutera ceci : si le sens manifeste du poème résiste à la raison, ce n'est pas grave ; l'esprit, libéré de l'obsession de comprendre rationnellement, peut alors se livrer à l'enchantement du rêve, de la mélodie des mots, à une activité poétique du lecteur de laquelle les Surréalistes, en leur temps, ont magnifiquement parlé. Mallarmé rend son lecteur poète en le plaçant dans l'état poétique de sommeil de la raison et d'éveil des autres facultés de l'esprit.
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Poésies

Je ne sais pas au juste pourquoi j'aime les poésie ou la poésie de Stéphane Mallarmé car de toute évidence je n'y comprends rien et, pire, ses textes pris dans leur ensemble ne m'inspirent pas grand chose. En revanche, je trouve ses vers absolument magnifiques individuellement même si, bout à bout, ils cessent de me parler. Comme un tableau vu de très près qui paraîtrait somptueux et qui serait décevant vu de loin.

Encore davantage en ce qui concerne Mallarmé, la poésie gagne à être lue à voix haute et chaque vers devient alors une mélodie particulière dont les oreilles et l'âme se régale ! Sauf que la mélodie suivante n'est pas accordée et que l'ensemble me semble, hélas pour moi, être une cacophonie, je me répète.

Pierre Desproges nous proposait de déclamer trois vers de Verlaine à un quelconque guichet administratif, essayez donc avec du Mallarmé !
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Poésies

J'ai déjà fait une critique sur un recueil de Mallarmé et celle-ci va être très proche, je pense. Pour certains, Mallarmé, c'est le mal-aimé, ses poèmes ne touchant pas tout le monde. Pour ma part, ils me parlent et c'est toujours avec le même plaisir que je lis et relis son oeuvre. Effectivement, il n'a rien à voir avec Baudelaire par exemple, mais tant mieux, ils sont uniques, comme chaque poète d'ailleurs. Son style bien à lui mériterait d'être beaucoup plus reconnu. Lisez son oeuvre sans préjugé et jugez par vous même. Vous risquez d'être (agréablement) surpris.
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Pour un tombeau d'Anatole

Je ne conseillerais pas de lire ce livre à ceux qui ne connaissent pas déjà la poésie de Mallarmé. Non qu'il soit plus obscur et hermétique que les autres, d'ailleurs, mais parce qu'il nous introduit directement dans l'univers du poète, celui de l'inachèvement, du projet rêvé, esquissé mais non mené à bien, de ce qui aurait pu être, dont toute son oeuvre témoigne.
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Poésies

(Nikos Kazantzakis sur les poésies de Mallarmé, dans ALEXIS ZORBA:)

'poésie pure! La vie devenue un jeu lucide, transparent [...] Des mots d'un bleu décoloré, vides, suspendus en l'air [...] Tout m'apparut exsangue, dénué d'odeur, de saveur et de substance humaine.' Cela dit tout!
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Poésies

Les années passant, je continue de feuilleter ces Poésies. Peut-être seulement pour relire encore et à chaque fois "Les fenêtres". Je ne sais pas pourquoi, Mallarmé est mon poète préféré. La poésie touche au cœur, ça ne s'explique sans doute pas.
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Poésies

Relecture en demi-teinte pour ce recueil de poésies. J'avais un souvenir assez prégnant de cette lecture faite au collège, j'étais tombée en adoration devant les évocations mythologiques et les nombreuses métaphores de Mallarmé et là... C'est tombé à plat. Je pense que mes goûts en matière de poésie ont grandement évolué depuis mon adolescence parce que j'ai trouvé son style très emphatique, il en fait des tonnes, certaines métaphores reviennent très voire trop souvent. Le lien à la mythologie ne m'a pas vraiment convaincue par une trop plein d'emphase.

Je suis devenue hermétique à ce poète, ce sont des choses qui arrivent. Si vous aimez la poésie autour des thèmes de la mythologie, de la nature et des couleurs et qu'un style assez ampoulé ne vous effraie pas, allez jeter un oeil à la poésie de Mallarmé.
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Un coup de dés jamais n'abolira le hasard

J'ai souvent entendu dire que la poésie de Mallarmé était très hermétique et un peu rebutante. Pourtant, j'ai adoré ma lecture, même si force est d'admettre que ce n'est pas la poésie la plus accessible qui soit, surtout à cause de la forme (une sorte de calligrammes). Cela dit, même si on ne comprend pas tout, ça n'empêche pas le lecteur de ressentir la magie des mots du poète.
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Un coup de dés jamais n'abolira le hasard

Ypsilon Éditeur est né, en septembre 2007, d’un désir : celui de publier

Un coup de Dés d’après les épreuves* – corrigées par Mallarmé – de l’édition qui devait paraître chez Ambroise Vollard : le choix du format et des caractères était fixé tout comme celui des illustrations d’Odilon Redon.

Le poème venait d’être publié à moitié dans la revue Cosmopolis, quand l’édition Vollard se proposait d’être définitive : « Cosmopolis a été crâne et délicieux ; mais je n’ai pu lui présenter la chose qu’à moitié, déjà c’était, pour lui, tant risquer ! Le poème s’imprime, en ce moment, tel que je l’ai conçu »**. Finalement, la première édition du poème en volume ne parut qu’en 1914

chez Gallimard et cette édition dite originale (toujours rééditée depuis) ne respecte pas le projet initial. Son format n’est pas conforme à celui voulu par Mallarmé, l’emploi de caractères elzéviriens (Garamont) contredit le choix de Mallarmé de composer le texte en Didot et les illustrations de Redon sont ignorées, et pour cause le sont restées longtemps.

La publication, pour nous fondatrice, du Coup de Dés tel que prévu par Mallarmé a, évidemment, déterminé notre orientation : les livres de littérature côtoient les ouvrages concernant la typographie et, récemment, une nouvelle collection de livres illustrés est venue compléter notre catalogue.

* Deux jeux d’épreuves sont conservés à la Bibliothèque nationale de France, un jeu à la bibliothèque littéraire Jacques Doucet.

** Lettre de Stéphane Mallarmé à André Gide du 14 mai 1897.


Lien : http://www.ypsilonediteur.co..
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Divagations (extraits)

Mallarmé écrit pour lui-même ! Il s'écrit ! Il fait une œuvre ! Il ne s'adresse pas au lecteur ! Il s'écoute ! Il se gargarise de son style hermétique, de cette invention dont il se sent fier ! Il s'étale ! Comme les cubistes, il transforme tout. Tout peut être « repeint » en mallarméen et peut importe que ce soit compréhensible ou pas. Ainsi séparer les pages d'un livre avec un coupe-papier devient un travail de boucher !!!!
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Poésies

Ce volume contient les poésies les plus célèbres de Mallarmé , des vers de jeunesse (un peu mièvres parfois) et des vers de circonstances qui s'apparentent aux divertissements de salon. En ce qui concerne le cœur de son œuvre ma réaction fut et reste assez mitigée : des textes inoubliables (Apparition,Brise marin,L'Azur,Le vierge , le vivace...,) mais aussi une recherche parfois forcée (à mon goût) de l'hermétisme et de l'effet . "Donner un sens plus pur aux mots de la tribu " certes mais pourquoi?
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Poésies - Anecdotes ou Poèmes - Pages diverses

"Poésies" : des consonances connues, sans grande surprise

"Anecdotes ou poèmes" : presque insignifiant mais étrangement captivant,

"Hérésies artistiques" : jet de l'éponge après ce passage nauséabond, O laideur !

Je cite :

« Faites que s'il est une vulgarisation, ce soit celle du bon, non celle de l'art, et que vos efforts n'aboutissent pas – comme ils n'y ont pas tendu, je l'espère – à cette chose, grotesque si elle n'était triste pour l'artiste de race, le poète ouvrier.

Que les masses lisent de la morale, mais de grâce ne leur donnez pas notre poésie à gâter.

O poètes, vous avez toujours été orgueilleux ; soyez plus, devenez dédaigneux. »

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Mallarmé : Oeuvres complètes, tome 1

Je n’ai rien voulu ajouter...

«Comme des Parisiens intelligents et vaccinés,

confrontés à l’émerveillante liste,»

comme des

« Les poètes bons pour l'aumône ou la vengeance»

nous voulons

«délaisser l’art vorace d’un pays

cruel et souriant aux reproches vieillis...»

et chercher

« l'Infini qui fait que l'homme pèche...»

nous resterons

«Tel qu'en Lui-même enfin l'éternité le change,

Le Poète suscite avec un glaive nu

Son siècle épouvanté de n'avoir pas connu

Que la mort triomphait dans cette voix étrange !»



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Poésies et autres textes

Poésies/Stéphane Mallarmé/ Éditions Gallimard-Poésie

Comme le disait jean Paul Sartre, « avec les hommes et avec lui-même, Mallarmé conserva toujours une imperceptible distance et c’est cette distance qu’il voulut exprimer dans ses vers. »

Toute sa vie durant, Mallarmé a pratiqué le culte de la poésie tel une religion. Cette noble attitude, cette exigence exaltante et hautaine expliquent la vénération dont il fut entouré tel un saint ou même un martyr de la poésie.

Dans un premier temps Baudelaire fut une révélation pour le jeune Mallarmé qu’il influença tout comme le fit Edgar Allan Poe, et auquel il inocula le spleen baudelairien avec son appel du large et son rêve d’un mystérieux ailleurs.

Plus tard ce spleen prit une couleur plus métaphysique, influencé qu’il fut par l’occultisme. Plus hermétique encore devint la composition du poète avec le temps, l’hyperbole prenant une place prédominante pour chercher l’essence des choses. Une démarche proche de l’existentialisme qui pense que l’existence précède l’essence.

Hélas il arrive d’aventure que cela débouche sur le néant ou le chaos. Ou alors s’interroge le poète, l’harmonie de l’univers est peut-être intraduisible, ce qui conduit à l’absence et le vide avec la répétition de mots tels que « abolir » ou « inanité » (Aboli bibelot d’inanité sonore) ! En prononçant ce vers célèbre, en vérité, Mallarmé nous fait percevoir une traduction pour l’oreille tout en teintant la sonorité d’un certain mystère et d’un évident ésotérisme. C’est tout l’art de la poésie de Mallarmé qui au fil du temps devient plus hermétique, plus précieuse au sens littéraire, plus raffinée et concise, riche de formules hiératiques, plus subtile et toujours plus éloignée du banal, en un mot plus insaisissable. On a pu dire que Mallarmé, prêtre de la poésie, refusait au profane l’accès au temple !

La technique de Mallarmé est parfaitement mise au point, avec une structure de la phrase revue et corrigée, avec une dislocation de cette phrase avec appositions et ellipses alternant avec les périphrases. Le choix des mots, rares, vieillis ou sibyllins complète cet art de la traduction. Et bien sûr, la musique et le rythme de la phrase en regroupant les mots habilement placés pour induire une suggestion des sons, les rimes apposant le point d’orgue.

On a pu dire aussi qu’en se complaisant dans l’hermétisme, Mallarmé s’était coupé du grand public. Chacun aura son avis. Pour moi, la musique n’a pas toujours besoin d’être expliquée : il suffit qu’elle soit ressentie.

Pour illustrer mon propos, j’ai choisi un très célèbre sonnet publié en 1895, évoquant l’absence, le désastre, le naufrage et la fureur quand le rêve est symbole d’une création avortée. Appris par cœur jadis, sa musique m’en a épargné l’oubli à tout jamais. Musique des mots, rythme de la phrase : c’est tout l’art de Mallarmé.

A la nue accablante tu

Basse de basalte et de laves

A même les échos esclaves

Par une trompe sans vertu



Quel sépulcral naufrage (tu

Le sais, écume mais y baves)

Suprême une entre les épaves

Abolit le mât dévêtu



Ou cela que furibond faute

De quelque perdition haute

Tout l’abîme vain éployé



Dans le si blanc cheveu qui traine

Avarement aura noyé

Le flanc enfant d’une sirène.



Bien sûr, on pourrait aussi citer « Brise marine » et son premier vers si célèbre :

La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres.



Un dernier exemple extrait de « Apparition ».

La lune s’attristait. Des séraphins en pleurs

Rêvant, l’archet aux doigts, dans le calme des fleurs

Vaporeuses, tiraient de mourantes violes

De blancs sanglots glissant sur l’azur des corolles.

Magnifique.

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