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Critiques de Taina Tervonen (30)
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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

En 1890, le colonel français Archinard et son armée prennent la ville de Ségou, dans l'actuel Mali. Ils s'emparent du trésor du palais, dans lequel figurent notamment des bijoux et un sabre, qui aurait appartenu à El Hadj Oumar Tall, seigneur musulman érudit et chef de guerre, qui fonda au 19ème siècle un empire sur le territoire des actuels Sénégal, Mali, Guinée et Mauritanie. Parmi le « butin » ramené en France par Archinard se trouvent également deux enfants, dont Abdoulaye, 10 ans, petit-fils d'Oumar Tall.



A l'heure où le Sénégal et d'autres pays africains réclament la restitution des objets acquis (pour ne pas dire pillés) par les métropoles pendant la colonisation, l'auteure, journaliste et documentariste qui a passé son enfance au Sénégal, a décidé d'enquêter sur les objets volés à Ségou et en particulier sur le sabre d'Oumar Tall, désormais restitué au Sénégal par la France et exposé au Musée des Civilisations Noires de Dakar. Que sont devenus les autres objets, quel a été le sort des deux enfants enlevés à leurs racines ? Et le sabre en question est-il réellement celui d'Oumar Tall ? Exploitant toutes les archives et sources disponibles en France et au Sénégal, elle retrace peu à peu la piste des enfants et du butin, et fait émerger un pan violent et déshumanisant (mais ne le sont-ils pas tous?) et peu connu de l'histoire coloniale française. Sans se prétendre historienne, son enquête est cependant méthodique et fouillée, même si elle n'atteint pas le résultat escompté. L'auteure met le doigt sur la condescendance dont les (anciens) colonisateurs faisaient et font encore preuve à l'égard de leurs (anciens) colonisés. Ainsi, citant Felwine Sarr*: « Il y a comme une impossibilité à prendre en compte le fait qu'il existe un continent d'un milliard d'individus avec une jeunesse qui a droit à son patrimoine – exactement comme les jeunes Européens ont droit à leur patrimoine. Non, ils pensent que ce qui est à eux est à eux, et ce qui est à nous est aussi à eux ! Ils proclament l'universalité des musées, mais c'est une universalité centrée sur soi. [...] Il y a toujours des arguments. 'Il n'y a pas de musées en Afrique' - nous en avons dénombré autour de 500. 'A qui doit-on rendre ? A l'époque, le Sénégal ou le Bénin n'existaient pas'. Quand des objets ont été pris dans l'Empire austro-hongrois, on les a bien rendus à l'Allemagne ou à l'Autriche, même si l'empire n'existait plus. 'Les objets n'ont pas été pris, ils ont été donnés ou vendus'. Oui, donnés ou vendus dans un rapport asymétrique de pouvoir. N'est-ce pas la même question que pour les biens spoliés juifs ? Quand des Juifs vendaient des toiles de maître pour trois fois rien afin d'échapper à la mort, on leur a quand même rendu leurs biens, à eux ou à leurs descendants. Pourquoi ces analogies ne fonctionnent-elles pas ? [...] Rapidement, on se rend compte que la question ne se joue pas au niveau de la raison, mais bien ailleurs, poursuit-il. Elle se joue dans une vérité intime qui s'est construite dans le temps, à force de répétitions dans les films, dans les livres, dans les médias, dans les livres d'histoire, dans les discours politiques. Au fond, il y a toujours cette idée que l'Africain est un incapable ».



Un récit sensible et captivant et d'une lecture très fluide, qui témoigne d'une volonté d'ouvrir les esprits, avec humanité et humilité : « Je parcours les vitrines [du musée du Quai Branly], mes leçons de primaire en tête, et je vois une étranger mise en scène de l'histoire coloniale, transformée en un récit de dons, dénuée de toute trace de violence guerrière ou de domination, de toute référence à la brutalité dont ces objets sont les témoins directs. le silence me paraît assourdissant ». « Ainsi, en 1893, il était impossible de penser que ces pièces soient africaines : trop délicates, trop fines, fabriquées avec des techniques trop sophistiquées. L'Afrique ne pouvait produire ce que les journalistes, à la vue des bijoux, qualifiaient d' « originalité » et de « sentiment artistique ». Près de cent trente ans plus tard, leur regard me paraît schizophrène : il fallait admirer la beauté du butin de guerre, témoin de notre domination sur l'Afrique, tout en se disant que cette beauté ne pouvait provenir d'Afrique ».



*auteur en 2018, avec Bénédicte Savoy, du rapport commandé par E. Macron sur la question des restitutions



En partenariat avec les Editions Marchialy via Netgalley.

#LesOtages #NetGalleyFrance
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Les fossoyeuses

Remuer la terre et les morts pour soulager les vivants ?



Taina Tervonen, journaliste finlandaise nous livre ici un témoignage important, une quête pour le devoir de mémoire.



Elle part à la rencontre de deux femmes qui tentent jours après jours de mettre des noms sur cadavres que la terre a engloutis. Corps exécutés au nom d’une guerre nationaliste qui éclate en 1992. Les corps, preuves honteuses de la folie sanguinaire humaine pour assurer une suprématie ethnique, sont disséminés sur différents charniers, plus ou moins connus.

Ces victimes, soldats ou civils, sont en grande partie des hommes, emportent avec eux bien peu de chose si ce n’est l’anonymat. Il y a bien quelques fragments d’effets personnels : une chaussure un pull un morceau de pantalon que la terre n’a pas encore eu le temps de digérer, mais en temps de guerre tout s’échange et le pull d’un mort est précieux pour survivre au froid… Les techniques d’identification de l’époque – principalement visuelles sont très hasardeuses et de ce fait les erreurs d’identifications sont nombreuses. Ce n’est qu’avec la banalisation des recherches ADN que des recherches sérieuses vont être relancées pour que des noms puissent être apposés sur ces ossements humains retrouvés enchevêtrés dans des charniers.



Document assez intimiste sur la quête d’une journaliste qui retrace une partie du parcours qui l’amènera à rebours de charnier en institut médico-légal improvisé dans une usine, on fait avec les moyens du bord, et ils sont faibles. La poursuite du quotidien répétitif d’une anthropologue judiciaire, qui aidée par une enquêtrice de terrain qui récolte l’ADN chez les familles qui souhaitent le partager, pour pouvoir rendre un corps à sa famille et à la terre une dernière fois.



Si les trois femmes de ce récit sont lumineuses par la cause noble qu’elles poursuivent, le récit lui est d’une noirceur déprimante, rentrer dans le quotidien de ces proches marqués par une guerre qui a dévasté le pays et les liens familiaux, et qui force le silence, c’est dur.



Une lecture pénible, non pas à cause du style journalistique, très agréable, mais par la réalité de l’horreur et l’ambiance constamment terne de mort qui est omniprésente. Je m’attendais, comme pour certains autres ouvrages publiés par l’excellente maison Marchialy, à une enquête fouillée, poussée et riche sur le pourquoi et le comment avec de chouettes rebondissements et de grandes surprises…je suis malheureusement sur témoignage d’une grande noirceur qui m’a apporté beaucoup de tristesse, d’amertume et peu de plaisir de lecture. Un pays et un ensemble de nationalités marqués par les horreurs de la guerre, et cloitré dans un silence glacial, l’auteur arrive à leur extirper quelques mots mais qu’ils sont durs...



Un témoignage difficile mais nécessaire pour ne pas oublier que la barbarie de l’homme même enfouie là où on ne veut plus la voir n’est jamais bien loin pour nous hanter pour de bon.





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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

1890. Alors que les batailles pour coloniser une partie de l'Afrique se poursuivent, le général français Archinard prend la ville de Ségou, et le trésor qui va avec, bijoux et sabre à haute valeur symbolique puisque appartenant à un illustre chef de guerre et héros de la résistance anticoloniale, El Hadj Oumar Tall, le ramène en France, rapporte aussi un dernier petit "bonus", Abdoulaye, petit-fils d'El Hadj, afin de le "civiliser" pour qu'il ne prenne pas la suite de la révolte après son père, qui vient d'être vaincu.



Taina Tervonen, qui a vécu son enfance au Sénégal, connaît l'histoire de ces otages pris par la France, les uns entreposés dans des musées, l'autre placé dans une famille lui permettant d'obtenir une éducation convenant aux préceptes français, tout en gardant contact avec son "sauveur", Archinard.



Partant de cette histoire, elle choisit d'enquêter et de connaître la véritable histoire de ces objets et de ce jeune adolescent : entre témoignages, recherches dans divers musées et lieux d'archives, retranscription de documents comme une partie des lettres qu'Abdoulaye a pu envoyer à Archinard, pour mieux montrer comment le pillage des pays colonisés est systémique, et oblige actuellement les états africains à demander de pouvoir récupérer des objets de valeur, historique, culturelle, qui leur appartiennent de droit - ce qui s'est passé à Ségou n'est en effet qu'un exemple parmi tant d'autres -. Elle montre aussi que, parfois, ces pillages sont en partie supercherie, pour mieux asseoir la position de colonisateur dominant et tout-puissant. Elle montre enfin que ce pillage, en touchant également des êtres humains, n'a fait que renforcer les violences commises et l'inhumanité subie par les pays colonisés, par l'exemple concret d'Abdoulaye et de ses mésaventures à sa tentative de retour au pays.



Une enquête passionnante, écrite comme un roman ou presque, actuellement d'une grande nécessité.
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Les fossoyeuses

Difficile de trouver des mots pour parler de ce livre, Les fossoyeuses.

Je commencerai par dire que j'en ai aimé l'écriture. Le sujet est traité avec beaucoup de sensibilité. Au milieu de ces corps, de ces os, un travail de réhumanisation. Mais aussi un travail de fourmi, d'enquête, d'aller au devant des gens qui ont perdu leurs proches pour espérer leur rendre un jour.

La chance de pouvoir leur offrir une sépulture, de les retrouver.

Le roman rend hommage au travail de ces deux personnes.

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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

Les plaies de la colonisation des pays africains par la France sont loin d'être toutes cicatrisées, et si aujourd'hui les relations sociétales et diplomatiques sont globalement apaisées, il reste encore des domaines dans lesquels des crispations persistent.



À travers le travail de la journaliste franco-finlandaise Taina Tervonen, qui a grandi au Sénégal, nous allons découvrir comment ce passé colonial persiste encore sur de nombreux objets d'art, considérés comme patrimoine historique pour les pays d'où ils proviennent et qui souhaiteraient les récupérer.



Malgré quelques petits efforts généreusement mis en scène pour les médias, l'essentiel de ces objets reste encore enfermé dans les musées français, dans les salles d'exposition comme dans leurs archives, quand ils n'ont pas tout simplement disparus. Plus édifiant encore, l'autrice explique comment la France ne se contentait pas des objets comme butin de guerre.



C'est une enquête et un récit à la fois, richement documenté, qui nous emmènera dans l'histoire de l'Afrique et de la spoliation coloniale. Pour un néophyte comme moi sur le sujet, j'ai trouvé l'ouvrage pédagogue, compréhensible et très intéressant, il permet de mesurer l'immensité du chemin qu'il reste à parcourir pour réparer ces dommages du passé.



📖 Les Otages, Contre-histoire d'un butin colonial de Taina Tervonen a paru le 31 août 2022 aux éditions Marchialy. 300 pages, 20€.



🔗 Service de presse numérique obtenu via NetGalley.
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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

Tout part de l'idée de l'autrice de retrouver les objets d'El Hadj Oumar Tall, volés après le pillage du palais de Ségou en 1897 ... L'autrice décide donc d'en savoir un peu plus sur un sabre qui aurait appartenu à ce symbole de la résistance aux colons français à la fin du XIXème siècle, ainsi que des bijoux et des tambours mentionnés ça et là au travers d'articles de presse ou de lettres.

Et son enquête est tout à fait impressionnante ! Non seulement on découvre que ce sabre n'a aucune histoire précise mais aussi que les objets, bijoux et armes ont été nombreux à être envoyés en France, sans les retrouver tous de nos jours d'ailleurs. Ce qui est le plus choquant est le sort réservé aux membres des familles des résistants : des enfants (notamment le fils d'Ahmadou envoyé en France) et des femmes servent de cadeaux, d'objets de troc.

Nous suivons son enquête à travers ses rencontres et son étude des différents documents de l'époque, notamment la correspondance entre Archinard et Abdoulaye.

La restitution est vraiment une question épineuse, complexe mais qui heureusement semble avoir été plus simple avec les statues de trois rois du royaume du Dahomey, rendues au Bénin : le général français Dodds avait pillé le palais royal après de sanglants combats et avait "fait don" des statues au musée de l'Homme, ancêtre du Quai Branly.

C'est une enquête vraiment passionnante, qui m'a fait redécouvrir le musée du Quai Branly avec des yeux différents. J'espère qu'à l'avenir, le débat sera moins passionné et que tous les peuples pourront récupérer les objets faisant partie de leur identité culturelle.
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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

Taina Tervonen, franco-finlandaise, a vécu et a été scolarisée au Sénégal jusqu'à l'âge de 15 ans. Journaliste et documentariste en France, elle s'étonne que les noms de Faidherbe, et surtout d'Archinard soient généralement méconnus ici, alors qu'ils sont évoqués dans les programmes d'histoire de l'école au Sénégal.

Dans ce livre, l'autrice suivra la conquête colonialiste française de Saint Louis à Segou, en menant l'enquête pour remonter aux origines des "dons" du général Archinard à différents musées en France à la fin du 19e et au début du 20e siècle.

En cette période actuelle, où la restitution des objets d'arts ou du quotidien originaires des anciennes colonies est en débat, Taina Tervonen s'intéresse notamment à suivre la trace du butin de Ségou, et du sabre à haute valeur symbolique dit d'El Hadj Oumar Tall, souverain et chef de guerre Toucouleurs, érudit musulman, né au nord du Sénégal.

A travers ses investigations, la violence de la colonisation militaire puis administrative qui s'exerce sur les populations vaincues, et dont les objets dérobés gardent la mémoire, est manifeste. On est aussi ahuri de découvrir l'existence, à Saint Louis, d'une école des otages, rebaptisée plus tard l'école des fils de chefs de guerre, car il s'agissait en effet de scolariser, malgré eux, les fils des vaincus pour en faire des collaborateurs assimilés de la conquête et administration coloniale. Abdoulaye, petit-fils d'El Hadj Oumar Tall, a fréquenté cette école, mais Archinard, dans un souci de l'écarter de toute tentative de rébellion, l'emmène avec lui en France à l'âge de 11 ans, pour le confier à un couple d'amis. L'expérience du jeune Abdoulaye il y a 130 ans, reflète la complexité des relations teintées de paternalisme, bienveillance, condescendance, arrogance, offense ; un passé toujours apparent dans le vécu des discriminations et du racisme aujourd'hui.

On retiendra de cet ouvrage la valeur des enquêtes rigoureuses, la valeur de l'existence d'archives ouvertes à la consultation, la valeur de l'expertise (comme celle du bijoutier Makhtar Niang), la nécessité de questionner, de changer de point de vue pour entrapercevoir la complexité de l'Histoire et comprendre d'où nous venons.
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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

On a ici un livre qui fait réfléchir, qui tire vers le haut, une enquête passionnante de l’auteur qui ayant vécu son enfance au Sénégal décide de partir retrouver les trésors disparus de ce pays qu’elle affectionne. L’idée lui vient alors qu’un sabre est restitué au Sénégal, pas n’importe quel sabre il s’agirait (les dates ne concordent pas, ni les lieux) de celui de El Hadj Oumar Tall. En cherchant dans les archives françaises et Sénégalaise elle va déterrer un pan de l’histoire coloniale peu reluisant comme c’est souvent le cas dès que l’on parle de colonie. Elle va suivre la trace de d’objets disparus et réquisitionnés par la France alors qu’ils sont réclamés par leur pays d’origine. Et là elle met le doigt sur la condescendance constante envers l’Afrique où s’est beaucoup servi la France (mais pas qu’elle) pour remplir ses musées. Pourquoi dit-on qu’ils sont mieux ici et que de toute manière il n’y a pas de musée en Afrique alors qu’il y en a plus de 500 ? Pourquoi lorsque ce sont des pays d’Europe on rends facilement les objets qui sont les leurs par exemple l’Allemagne et la Hongrie ou bien les juifs a qui nous avons rendus à eux ou leurs descendants les biens subtilisés, vendus ou donnés ? Qu’est-ce que cela nous dit de notre rapport à ce continent ? C’est autant de questions que se posent l’auteur et qu’elle invite le lecteur à se poser.



C’est un livre que je n’ai pu lire d’un seul trait car il traite d’un sujet sensible et qu’il m’a mise mal à l’aise dans le sens où je ne me sens pas en accord avec les pillages, les vols et le fait que la France face la sourde oreille dès qu’il s’agit d’Afrique. Ce n’est pas l’idée que je me fais d’un pays aux moeurs éclairées et pratiquant l’humanisme. On découvre que les femmes servaient souvent de monnaie d’échange, de cadeau et que la question de la restitution est souvent source de conflit et dérangeante. Je ne regrette pas de l’avoir lu car la cause est juste et il est nécessaire qu’un maximum de gens soient informés de ces méfaits et ce sont des sujets qui m’intéresse depuis longtemps déjà.



La suite sur mon blog...
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Les fossoyeuses

Un immense et difficile coup de cœur. Une plongée dans une réalité peu connue de l'après guerre. Taina Tervonen nous guide avec justesse dans ce récit violent, triste et en même temps nécessaire, à la rencontre de deux femmes qui luttent pour aider les familles à retrouver leurs disparus. Et si notre façon de considérer les morts en disait bien plus sur notre humanité que nous ne voulons le croire ? Comment faire face à ce passé de guerre, de perte, de silence, de honte, de deuil sans corps, pour y trouver, qui sait, la paix ? J'ai lu ce livre les yeux humides, je ne peux que le conseiller. J'avais trouvé « À qui profite l'exil » très instructif et intéressant, « Les Fossoyeuses » est bouleversant. Un grand livre.
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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

Taina Tervonen est documentariste et journaliste indépendante. Cette franco-finlandaise a passé son enfance au Sénégal avant de venir vivre en France à l’âge de quinze ans. L’ignorance des Français quant à une histoire coloniale dont ils sont pourtant les héritiers l’incite à mener l’enquête dont "Les otages" est le récit.

C’est donc l’histoire d’un butin colonial dont le Sénégal réclame aujourd’hui la restitution, qui compte des bijoux, des manuscrits, et un objet à haute valeur symbolique : un sabre attribué à El Hadj Oumar Tall, éminente figure de l’histoire sénégalaise, à la fois résistant contre l’occupant européen et guide spirituel dont les écrits continuent d’éclairer le monde arabe dans les domaines de la poésie, de la mystique et de la littérature.



Ce butin est le résultat d’un pillage opéré par les troupes d’Archinard. Ce colonel français arrive en 1880 à St-Louis avec pour mission d’élargir le territoire colonial de plusieurs milliers de kilomètres, et de sécuriser le développement des transports de marchandises des côtes atlantiques jusqu’à l’intérieur des terres. C’est dans le cadre de cette mission qu’il juge nécessaire d’attaquer Ségou (au Mali) où il dérobe le trésor du palais d’Ahmadou Tall, fils de El Hadj Oumar, trésor qui connait ainsi le sort de milliers d’objets qui ont rempli les musées d’Europe au gré de l’expansion coloniale et des commandes passées par les conservateurs aux explorateurs, aux missionnaires et aux militaires. Aujourd’hui, certains dorment dans des réserves quand d’autres, exposés au public, mettent en scène une histoire coloniale transformée en récits de dons, dénuée de toute trace de violence guerrière ou dominatrice. Malgré l’évidente légitimité des demandes de restitutions des anciennes colonies, le sujet reste sensible, les nations occidentales arguant notamment de l’incapacité des africains à protéger ces pièces contre les vols et les trafics. Et si, au moment où Taina Tervonen mène son enquête, le sabre d’El Hadj Oumar Tall a été rendu au Sénégal, où il est exposé au Musée des Civilisations Noires, c’est en réalité sous la forme d’un prêt de cinq ans, et ce type de geste s’entremêle généralement aux intérêts économiques : on lâche sur la symbolique pour vendre des missiles, à l’image des verreries et des breloques que l’on offrait aux indigènes pour les amadouer…



Ce sabre est-il d’ailleurs celui du chef de guerre sénégalais ? Les avis des historiens sur ce point divergent. La nature prestigieuse du sabre n’aurait-elle pas été inventée par Archinard pour glorifier sa campagne ?



C’est entre autres autour de cette question que Taina Tervonen organise son enquête, qui la mène du Sénégal -sur les traces des troupes françaises suivant le fleuve Sénégal jusqu’au Mali actuel pour conquérir le Fouta, dans l’échoppe d’un artisan expert en bijoux, ou encore à la rencontre des héritiers d’El Hadj Oumar Tall… - au Havre, ville natale d’Archinard, en passant par les réserves des musées de l’Armée ou du Quai Branly (et la liste n’est pas exhaustive).



Mais elle s’intéresse aussi au sort réservé au jeune Abdoulaye, fils d’Ahmadou Tall kidnappé par Archinard lors de la prise du palais de ce dernier. Ces enlèvements, permettant de tenir les parents en respect, étaient fréquents. On menaçait d’envoyer les enfants en France pour les éduquer à l’européenne, ou de disséminer d’autres membres de la famille pris en otage dans plusieurs contrées africaines, où épouses et petites filles pouvaient être offertes en cadeau à d’autres chefs en échange d’un traité ou d’un accord. Des dizaines de femmes et d’enfants ont ainsi changé de mains…



Abdoulaye a quant à lui été emmené en France et confié à des amis d’Archinard, qui a fini par le considérer comme son propre fils. Une importante correspondance entre le colonel et son pupille traduit les difficultés croissantes du jeune homme qu’est devenu l’enfant, déchiré entre ses racines et son éducation, notamment lorsqu’aspirant à intégrer Saint-Cyr, il subit malgré ses constants efforts d’intégration l’injuste mépris des représentants d’une administration française profondément racistes, qui ne cessent de lui mettre des bâtons dans les roues.



Cette dernière partie m’a particulièrement intéressée et émue (plusieurs lettres d’Abdoulaye sont transcrites). Je dois avouer que le reste de ses investigations (sur les bijoux et les manuscrits du trésor de Ségou) a fini par me perdre dans ses impasses, ses incertitudes et le caractère administratif de certains documents d’époque. Elle est toutefois l’occasion de digressions fort pertinentes en lien avec le contexte des recherches et des rencontres conséquentes.



Car à travers cette enquête, est révélée l’histoire du regard porté sur les peuples colonisés dont on a nié le passé, la culture et les savoirs ancestraux, mais aussi la complexité des liens engendrés par quatre siècles de présence occidentale en Afrique, débutant par exemple pour le Sénégal avec l’installation à Saint-Louis du premier comptoir commercial français, au temps du négoce du cuir et de la gomme arabique… De ces siècles de commerce puis de traite, de cohabitation et de conflits, est née à Saint-Louis une société coloniale métissée, formant l’élite de la ville, devenue le symbole des paradoxes issus de ces relations. Le passé y est à la fois critiqué et glorifié, tantôt renié et tantôt célébré, comme si chaque détail de l’histoire était à la fois un stigmate à rejeter et un trésor à chérir.



La difficulté des occidentaux à accéder aux demandes de restitution de patrimoine de plus en plus nombreuses, ou les polémiques suscitées autour des statues de grandes figures de l’histoire française qui ont en réalité été des acteurs de la violence coloniale témoignent des crispations autour de ces contradictions. Il faudra pourtant bien en finir avec cette arrogance européenne, et avec cette impossibilité à admettre qu’il existe un continent d’un milliard d’individus avec une jeunesse qui a droit à son patrimoine et à se réapproprier le récit de son histoire.


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Les fossoyeuses

Merci aux éditions MARCHIALY pour ce service presse et cette belle découverte pour faire entendre la voix des journalistes et plus particulièrement celle de TAINA TERVONEN pour son documentaire-roman " les fossoyeuses".



MON AVIS :



Laisser à des journalistes la possibilité de rendre hommage à un peuple/ à un pays oublié, de rendre hommage à des femmes qui ont oeuvrer toute leur vie pour rendre la dignité à des corps enfouis dans " des charniers" et les rendre à leurs familles.



Quel titre ! Quel documentaire !

Taina a su avec ses mots, sa plume rendre cette effroyable guerre des Balkans en 1992 d'une grande sensibilité d'une humanité chez ceux qui restent.

Ce ne sont pas que des corps qu'on analyse, qu'on déterre, qu'on assemble. Ce sont des pères, des frères, des maris, des amis, des voisins, des êtres humains qui ont eu un parcours, une vie, une famille.

L'auteure nous a permis de nous immiscer dans ce process et mettre en avant deux femmes extraordinaires : Senem, anthropologue judiciaire bosniaque et Darija enquêtrice auprès des familles. Elles ont été en charge de recueillir leurs témoignages, de prélever leur ADN pour permettre la reconnaissance des corps. Car oui, il y eu tellement de morts enterrés que cela s'est déroulé sur de très nombreuses années.

Il est difficile de dire coup de coeur pour ce genre de témoignage mais je l'écris quand même car Taina TERVONEN a fait un travail remarquable et à tisser au fil des années des liens très forts avec les familles et ces deux femmes qui ont consacré leur vie à rendre la dignité à ces corps afin que les familles puissent faire leur deuil.

Je remercie encore et surtout les éditions MARCHIALY de leur choix d'auteurs.

Vous êtes un vecteur de transmission de savoirs et de messages forts par un choix précieux de vos textes.

Et toujours une couverture à couper le souffle. J'adhère et j'adore le graphisme de vos couvertures.
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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

Le sujet est très intéressant et certaines pages, de même que des réflexions de l’autrice et des personnes qu’elle interroge, donnent parfois le vertige sur les rapports entre le France, l’Afrique occidentale et les oeuvres que ses représentants y ont pillées. Ceci étant, cela reste une enquête de terrain, méticuleuse, qui reste dans le pur factuel, ce qui manque un peu de reliefs sur un sujet où il y aurait pu sans doute y en avoir plus, ne serait-ce que pour les novices comme moi. En bref, un très bon documentaire quand on s’intéresse déjà à cette histoire et qu’on souhaite approfondir le sujet.
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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

La restitution d'objets pris de force au cours de la colonisation ou des guerres est un sujet à la mode depuis quelques années. Il va bien avec le renouvellement du discours sur la colonisation, qui parfois cherche à rendre le discours plus nuancé et complexe et parfois le simplifie au point de le rendre pire que caricatural. Alors quand j'ai découvert ce livre, qui prend le temps sur ce sujet qui m'intéresse mais pour lequel je n'ai aucune formation, et qu'en plus j'ai vu qu'il est édité par Marchialy, une maison d'édition spécialisée dans les livres de reportage au long cours que j'ai découvert plus tôt cette année (même si la maison a été fondée en 2016, je ne suis pas toujours en pointe de l'actualité) avec le très intéressant [The Good Girls : un meurtre ordinaire], je n'ai pas été longue à le solliciter sur netgalley et à me plonger dans sa lecture.

Taina Tervonen, une journaliste finlandaise qui a passé une grande partie de son enfance au Sénégal (et qui n'en est pas à son premier reportage au long cours), décide, à la suite de la restitution du sabre d'El Hadj Oumar Tall au Sénégal par la France, de mieux comprendre le cheminement de cet objet et de ceux qui l'accompagnaient et d'éclairer cette décision de restitution et le sens d'une telle décision.



Le livre commence lentement, un peu trop à mon goût, mais passé les vingt ou trente premières pages, on rentre vraiment dans le vif du sujet et cela devient vite passionnant. Parce que ce sabre et les objets qui l'accompagnent, le trésor de Ségou, ont une histoire bien emberlificotée. On découvre des personnages historiques qui sont semble-t-il connus de tous les petits élèves sénégalais mais dont, pour ma part, je n'avais jamais entendu le nom. Archinard, d'abord, ce grand pacificateur de l'Afrique de l'Ouest (et l'on sait ce que recouvre le mot pacificateur dans ce contexte…), El Hadj Oumar Tall aussi bien sûr, fondateur d'une congrégation soufie. Ces deux-là sont reliés par une confrontation qui culmine (pour l'histoire qui nous intéresse, pas du point de vue de l'histoire ou de la stratégie militaire) dans la « bataille » de Ségou (les guillemets sont de mon fait, parce qu'en matière de bataille, la ville a été évacuée et il n'y a pas eu d'affrontements…). Mais on se rend très vite compte que les dates ne vont pas : El Hadj Oumar Tall est mort en 1864 alors qu'Archinard arrive au Soudan français en 1880. Et puis les lieux non plus : on parle du trésor de Ségou, qui est aujourd'hui une ville du Mali, alors que le sabre a été restitué au Sénégal…

Au fur et à mesure de ses enquêtes, Taina Tervonen démêle ces apparentes contradictions. En particulier elle s'interroge sur la portée historique et symbolique de ce sabre, montrant comment les musées et les objets participent de l'historiographie, montrant aussi comment les discours et les émotions suscités par un objet historique diffèrent selon le côté de l'histoire où l'on se trouve. Au fil des quelques 300 pages de cet ouvrage (et ces 300 pages passent étonnamment vite tant la plume de Taina Tervonen est facile à lire et le propos intéressant), on suit la journaliste dans son enquête pour essayer de démêler cet écheveau. On se promène entre Dakar, Le Havre, Paris, Halwar, Aix-en-Provence… On écoute des héritiers des témoins de cette époque, on compulse des lettres dans les archives…

Et, contrairement à ce que l'on pourrait croire, j'ai eu la sensation que l'histoire devenait de plus en plus complexe au fur et à mesure de ma lecture et de l'enquête de Taina Tervonen. Car il ne faut pas compter sur elle pour livrer à la fin la vérité vraie sur cette histoire, la version définitive. Non, elle livre les faits, les éclaire par des évocations du contexte, les met en perspective, mais elle garde toute la complexité de cette histoire. A la fin, même Archinard devient une figure plus nuancée que ce que l'on aurait pu penser au début.

C'est donc un livre qui oblige le lecteur à réfléchir, à se forger, petit à petit, sa propre opinion des faits, en demeurant autant que possible fidèle aux faits, à leur complexité et parfois même leurs apparentes contradictions.

Les Otages, un titre qui fait référence aux héritiers des chefs de guerre envoyés en France pour les couper de leurs racines et pour éviter qu'ils ne reprennent le flambeau de leurs pères, mais qui peut englober les objets culturels, leurs trajets complexes, leur histoire, ce qu'ils disent et ce qu'on leur fait dire. Un livre qui fait réfléchir aussi, qui permet de creuser une question importante, plus pour certains que pour d'autres semble-t-il, et qui prend des significations différentes selon l'angle où l'on se place pour l'aborder. Encore une fois, j'ai beaucoup aimé ce livre, qui se lit étonnamment facilement. Je n'ai pas fait le tour de la question, mais j'ai beaucoup appris, et, si j'ai pu répondre à quelques questions, je crois que j'ai plus de questions en fermant ce livre qu'en l'ouvrant, et c'est une bonne chose que d'éveiller l'intérêt, la curiosité et d'affûter les esprits, sur ce sujet comme sur d'autres !



Merci aux éditions Marchialy de m'avoir permis de lire ce livre, via netgalley. Deuxième livre venu de cette maison d'édition et deuxième belle découverte.
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Les fossoyeuses

Magnifique roman de Tania Ternoven

Une claque. Une roman qui laisse des traces quand on comprend ce qu'est un pays après guerre. Quand on essaye de se mettre dans la tête d'une personne qui reste dans l'espoir de retrouver un parent lâchement massacre tué et balancé dans un "charnier" ...Tellement poignant criant de vérité
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Les fossoyeuses

Road trip en compagnie de Senem, anthropologue judiciaire et de Darija enquêtrice, toutes deux chargées de faire parler les morts pour réparer les vivants dans une Bosnie-Herzégovine traumatisée par des années de guerre. La première identifie les ossements humains dans les charniers, la seconde rencontre les familles des disparus pour prélever de l’ADN afin de rendre une identité aux cadavres anonymes.

Raconté ainsi, ce documentaire de Tania Tervonen peut rebuter bien des lecteurs. A tort. La documentariste nous embarque non seulement dans les méandres d’un épisode pas si ancien de l’histoire européenne. Elle nous fait surtout rencontrer deux figures exceptionnelles par leur travail, leur humanité et leur humilité.

A leurs côtés, au jour le jour, durant plusieurs années, Tania Tervnonen nous fait entrer dans leur intimité, nous fait partager l’étourdissante responsabilité et le poids de leurs charges, leur engagement et leur fatigue tout comme leurs éclats de joie. Portées par une quête de vérité et de réparation, les deux femmes écartent tout idée d’héroïsme ou d’angélisme pour ne retenir que leurs devoirs envers les vivants et les morts. Grâce leur soir rendue.

Ouvrage à lire de toute urgence autant pour l’importance des stigmates des guerres de Bosnie que pour ses deux personnages uniques. Ce billet est aussi l’occasion de dire et redire la grande qualité des éditions Marchialy. Que ce soit par le choix des textes, toujours originaux et d’une force littéraire indéniable, que par la composition graphique de l’objet livre.

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Les fossoyeuses

Une lecture débutée par le hasard; travaillant en bibliothèque, je me retrouve à devoir réorganiser un rayonnage et parmi les livres déjà présents celui-ci retient mon attention. La couverture est originale et sort de l'ordinaire pour un ouvrage classé "adulte". J'ai été transportée par cette lecture, qui m'a ouvert les yeux sur un conflit que je ne connaissais que de nom, car jamais ou presque évoqué pendant mes études. La plume de l'auteur est agréable, le sujet est très dur mais néanmoins passionnant. C'est une lecture renversante, qui parle de meurtre, de massacres et de la guerre, dans une période contemporaine à la nôtre et pourtant méconnue par beaucoup.
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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

Ouvrage très intéressant sur une enquête entre la France et l'Afrique sur les trésors pillés, volés, empruntés lors des campagnes coloniales… que cela soit sous prétexte de protection ou pour une exposition importante, nombreux objets sont exposés dans les musées français (et européens) alors que certains pays réclament le retour sur le sol noir.

Taina Tervonen fait une enquête de fourmis, allant interroger les descendants des grands combattants d'une lande de terre entre Sénégal et Mali, pour recueillir la version orale et officiellement enseignée dans les écoles de ces pays. Elle le sait, elle a été à l'école 15 ans au Sénégal… ses ancêtres n'étaient pas gaulois mais finnois, mais elle a appris des noms qui ne figurent pas forcément au chapitre Colonial des manuels français.

Archinard, Faidherbe, Mage ne sont connus que des personnes vivant dans leurs villes d'attache, ou par des passionnés de l'expansion coloniale.

Ici, on sent cette plaie, toujours ouverte, où on pardonne beaucoup aux actuels, sans oublier le sang versé, les personnes déplacées, les objets volés. On n'exige pas, on souhaite juste récupérer quelques objets symboliques pour unifier les peuplades, les ethnies, l'Histoire d'un continent.

Véritable travail de policier/scientifique/historien, Tervonen avance, pas à pas, de rencontres en rencontres, sous le soleil accablant ou dans un musée poussiéreux. Elle juge parfois, souvent, les travers de notre pays qui n'affronte pas le passé… (à l'heure où certains veuillent l'effacer et le remodeler)… d'ailleurs, un proverbe dit qu'on ne sait pas où l'on va tant qu'on ne sait pas d'où on vient… comme quoi, l'Afrique est le berceau de la sagesse de l'humanité, non ?

J'ai vraiment adoré ma lecture ; c'est passionnant, détaillé, étayé et on se prend à devenir, nous-même, des enquêteurs, des défricheurs d'Histoire.

Reste les réflexions personnelles et les petites leçons de morale, ça et là de l'auteure qui peuvent agacer mais qui sont suffisamment bien distillées pour ne pas écarter le lecteur de la piste de « ces otages ».

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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

Petit dernier de la collection de récits-reportages des Editions Marchialy, jamais décevante et riche en formidables découvertes, « Les Otages, contre-histoire d’un butin colonial », présente l’enquête menée par la franco-finlandaise Tania Tervonen, autour du pillage mené par les colons en Afrique, à partir de l’accaparement en 1890, à Ségou, du trésor d’un roi africain, dans lequel figurait des bijoux, et, surtout, un sabre, devenu aujourd’hui l’un des objets symboliques dans le débat concernant la restitution des œuvres « volées » exposées dans nos musées. Partant de la question « A qui appartient la beauté ? », voyageant entre Dakar, Saint-Louis au Sénégal, et le Paris du Quai Branly ou le Centre d’histoire et d’études des troupes d’outre-mer à Fréjus, interrogeant notre mémoire et nos réactions face à la brutalité de la conquête coloniale et de ses exactions, le récit tient jusqu’au bout le lecteur en haleine, lui faisant voir et entendre les protagonistes africains et européens de l’époque, l’invitant à découvrir de nombreux faits laissés dans l’ombre, le laissant juge, enfin, de l’attitude à adopter face à la revendication des Africains appelant au retour de leur patrimoine sur leur continent. Un reportage plein d’intelligence, écrit d’une plume vivace et passionnée, l’un des textes qu’il nous faut méditer pour mieux faire notre deuil de la Françafrique ?
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Les Otages : Contre-histoire d'un butin col..

Je tiens d’abord à remercier babelio de m’avoir fait découvrir cet ouvrage via l’évènement « masse critique non-fiction ».



Dans cet ouvrage la journaliste-autrice cherche à découvrir ce qu’il est advenu du butin pris lors de la prise de Ségou en 1890. Butin qui comportait plusieurs bijoux, or ou encore un sabre. Sabre qui est aujourd’hui demandé pour restitution par le Sénégal.



L’autrice procède, entre la France et l’Afrique, à une enquête fouillée et précise. Ce fait historique est assez méconnu par chez nous. Il est vrai que la période coloniale est peu enseignée contrairement dans les pays africains. Le propos est clair et se veut à la portée de tous.

J’ai énormément apprécié ma lecture surtout que l’autrice garde une certaine distance et ne cherche pas de coupable. Elle cherche à comprendre uniquement les faits.



C’est un essai nécessaire pour la compréhension des périodes coloniale et post-coloniale. C’est également une histoire ancrée dans l’actualité car plusieurs pays souhaitent récupérer les objets acquis durant la colonisation.
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Les fossoyeuses

Dans Les Fossoyeuses, la journaliste Taina Tervonen nous raconte comment elle a suivi le travail d'équipes chargées de mettre un peu de lumière sur les ombres que la guerre des Balkans a déployées sur un pays meurtri : La Bosnie-Herzégovine. Sur place, elle rencontre tout d'abord Senem, une anthropologue judiciaire qui doit identifier les ossements humains retrouvés dans les différents charniers mis à nu des années après la fin des conflits. Elle comprend cependant que pour identifier, il faut comparer, et donc partir à la rencontre des familles, ceux qui ont perdu des proches, ceux qui restent. C'est le travail d'enquêtrice de Darija.



En nous partageant le récit du quotidien de ces deux femmes, Taina Tervonen nous raconte tous les obstacles qui se dressent devant ceux chargés de trouver la vérité au milieu d'une population marquée par le conflit armé. Les obstacles techniques tout d'abord : les difficultés à rassembler les ossements mélangés, issus de charniers qui ont pour la plupart été déplacés, les difficultés de l'identification après toutes ces années. Les obstacles humains ensuite : le silence, le mensonge, le traumatisme. Elle raconte le deuil, aussi, et la recherche d'un quelconque apaisement.



Les Fossoyeuses nous plonge au cœur du travail de ces femmes et de leurs équipes. Un travail souvent ingrat, et paradoxalement peu gratifiant, dont le sens échappe parfois à ceux qui les côtoient. Un travail pourtant nécessaire, important pour l'histoire de leur pays et pour les familles qui doutent toujours. Un travail profondément marquant.

Les Fossoyeuses nous fait aussi le portrait d'un pays ravagé par la guerre, d'une population partagée entre le souvenir et l'oubli, le refoulement et la résilience, le déni et la soif de vérité.



Les Fossoyeuses est un récit fort, détaillé et précis, infiniment intéressant. Il raconte la science et les humains et dresse le portrait éclairé de deux femmes passionnantes.
Lien : https://unspicilege.org/inde..
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