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Critiques de Éric Pessan (650)
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La nuit du second tour

2017, nous élirons notre futur(e) Président(e) de la République et le scénario du livre pourrait devenir réalité.



Un homme découpe sa carte d’électeur en petits morceaux avec de gros ciseaux, un couple pleure, d’autres crient leur colère ou manifestent. Oui, c’est arrivé, le pays a basculé du côté de l’extrémisme. « Chacun a les dirigeants qu’elle mérite, crie un homme caché par l’ombre d’un mur. »



David erre à travers les rues de la ville seul, se fait apostropher par des clochards, pardon SDF, ou par des personnes qui, comme lui, ont perdu tous leurs repères. David cet homme qui ne sait jamais dire non à son patron, qui part travailler la boule au ventre, revient lessivé avec toujours la même boule au ventre qui a encore grossi. Cet homme est gris, insipide à force de renoncement. Même Mina, il a réussi à la perdre à force de se taire, de ne pas s’expliquer, de renoncer. C’était pourtant une belle histoire d’amour entre eux. Mina aurait bien voulu tout partager avec David, mais voilà, le mur est devenu opaque à force de ne pas se parler, ne pas se confier. « Peut-être qu’avec David ils ont manqué d’endurance, qu’ils se sont essoufflés trop vite, qu’ils n’ont pas su faire front ensemble. A force d’humiliations minuscules, chacun n’avait plus assez d’estime de soi pour supporter d’être aimé. » Elle est partie, retournée chez ses parents, les écouter, les regarder s’engueuler, plutôt son père gueuler, exiger…

Le jour des élections, elle est partie sur un cargo direction les Antilles pour ne pas savoir, ne pas voir, ne pas connaître le résultat. Quitte à être seule, au moins l’être au milieu de nulle part sans apercevoir la terre ; la mer, encore la mer, toujours la mer.



Pourtant, ils sont encore connectés, encore liés. Ils ne peuvent s’empêcher de penser l’un à l’autre, de sentir, voir les mêmes choses à peu près au même moment. Lui « Faiblement éclairé, son reflet n’a que des trous la place des yeux », elle « Mina chercher son regard dans le reflet d’un hublot, ne voit qu’une vague figure percée de trous béants. ».

A terre, les français se réveillent avec la gueule de bois. Ils se ruent dans la rue, les pour, les contrer, les autres. Le pays se retrouve coupé en deux. Ceux qui ont voté pour et les autres.

Eric Pessan l’écrit dans le dernier chapitre, cite une phrase de Tristan Bernard « Agé de presque quatre-vingts ans, arrêté durant l’Occupation pour être déporté à Drancy, l’écrivain aurait déclaré à son épouse : Jusqu’à présent nous vivions dans l’angoisse, désormais, nous vivrons dans l’espoir »



Certains chapitres, commençant par « Il y a le feu sur terre sont écrits avec des paragraphes qui ne se terminent pas par des points, pour mieux faire ressortir l’urgence, l’essoufflement, le trouble suite aux résultats du second tour des élections présidentielles.

‘Qui a envie de voter pour quelqu’un qui annonce d’emblée de ne pas pouvoir contrer la financiarisation du monde ? Qui a envie de s’engager pour quelqu’un qui est à demi dans le renoncement ? Qui veut soutenir quelqu’un qui ne parle que de rigueur, de crise, d’austérité, dans un monde que l’on sait prospère et florissant comme jamais le monde ne l’a été ?

A force d’oublier qu’ils doivent faire rêver, les partis traditionnels ont enfanté un cauchemar. »



J’ai découvert Eric Pessan avec Muette, un superbe livre aux petites phrases quotidiennes et assassines. La nuit du second tour est un roman intense et engagé, peut-être pour nous dire réveillons-nous avant qu’il ne soit trop tard..

Et vous, que feriez-vous si cela arrivait ?

Les éditions Albin Michel ont publié un livre engagé. La littérature sert à ça aussi.

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La fille aux loups

Eric Pessan met le doigt là où ça fait mal. C’était déjà le cas avec Muette.

Ici, une fratrie en complète déliquescence se retrouve pour débarrasser la maison des parents disparus avant sa mise en vente.

Dès les premières lignes, j’ai ressenti la gêne qu’il y a entre les deux frères et la sœur. Difficile, pour eux, de se réapproprier, ne serait-ce qu’une journée, la maison de leur enfance. Les souvenirs ressurgissent.

J’ai supputé, deviné, mais pas entièrement. Rien n’est dit explicitement. L’attitude d’Anna, toute épine dehors, cette incapacité à se toucher, à se parler, pourquoi ? Et ce jeu du loup, où chacun sursaute lorsque l’autre le touche, ce jeu puéril, joué sans joie, histoire de ne pas se parler, de retarder le moment où. D’ailleurs se parler, ils ne le peuvent pas, plus ?

Par petites touches, Eric Pessan dévoile, sans dévoiler, tout en soulevant le voile de leur enfance commune.

Il y a dans le titre de ce livre un rappel du jeu et de l’expression populaire « voir le loup ». Anna a vu le loup et en reste blessée à vie, tout comme ses deux frères. Le jeu est allé trop loin, beaucoup trop loin. Ils ne peuvent et ne savent comment affronter cette épreuve. « Parler n’a pas été, n’est pas, et ne sera pas possible. Trois loups s’accrochent aux branches d’un roman familial complexe dont le tronc se perd bien au-delà de ce qu’ils savent eux-mêmes. »



Encore cette inaptitude des parents de voir, de supposer ce qui se passait sous leurs yeux, parents effacés, aveugles ou qui ne veulent ou n’osent pas voir et savoir.



Les illustrations de Frédéric Khodja, sa mise en page soulignent l’angoisse, la peur, le silence, comme cette femme tronquée aux prises avec des mains que l’on devine hostiles.



Cette collection du Chemin de fer, «vu par », très originale, m’a offert deux petits bijoux de lecture.




Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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La fille aux loups

Les morsures de l’enfance



Paru en novembre 2014 aux éditions Le chemin de fer, ce court roman d’Eric Pessan, illustré par des œuvres de Frédéric Khodja, évoque le retour étouffant d’Anna et de ses deux frères dans la maison de leur enfance pour régler l’héritage de leurs parents, une maison qui se délabre et d’où remontent les marques mordantes, la parole scellée et les douleurs rentrées de leur enfance.



«Des éclats remontent, vifs et colorés, d’une netteté hallucinante.»



Pour échapper à la pesanteur de cette maison et de leurs souvenirs, frères et sœur se retrouvent dans le jardin pour jouer au loup. Les gestes d’enfants leur reviennent, conservés intacts dans la mémoire du corps mais impossibles à reproduire chez ces adultes aujourd’hui contrôlés et distants les uns des autres. Le pays spontané de l’enfance, désormais perdu, affleure, en même temps que les mots rentrés des anciennes zones d’ombre.



«Peu à peu, ils perçoivent une odeur ; pas celle de la pourriture, une odeur plus difficile à saisir, une odeur qui – lentement – se déploie ; une odeur à peine perceptible tant l’air est irrespirable ; une odeur familière pourtant, qu’ils connaissent parfaitement : celle de la maison d’avant, celle de leur enfance. La puanteur lustrée de leur passé.

Cette maison – leur mémoire – est un musée qu’ils visitent comme l’on rentre dans un pays ruiné.»



Ce récit sombre s’illumine autour du personnage solaire d’Anna, enfant étrange devenue étrangère dans sa propre famille. Anna s’est rebellée, a négligé les rituels et attentes parentales, a exprimé son rejet de la violence et de la prédation dans les dessins, la musique et la mode, a multiplié les amants et les provocations.



«Anna se moque. Tu ne veux pas être le loup ? rit-elle. Tu ne veux pas endosser la peau de l’animal ? Tu te souviens du latin ? demande-t-elle essoufflée, les Romains qui appelaient louves leurs putes.»



Comme c’était le cas dans "Muette", son précédent roman paru en 2013, l’écriture subtile et maîtrisée d’Éric Pessan, sa capacité à dire les non-dits dans les blancs de la langue impressionne, dans ce roman jalonné des injonctions à double fond des comptines d’enfants .



«Parler n’a pas été, n’est pas, et ne sera pas possible. Trois loups s’accrochent aux branches d’un roman familial complexe dont le tronc se perd bien au-delà de ce qu’ils savent eux-mêmes.»

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Muette

Muette est le nom de l'adolescente dans le nouveau roman d'Eric Pessan tant le silence la détermine entièrement.

Non pas qu'elle soit dans l'incapacité physique d'entendre et de parler "Manier les mots, Muette sait le faire ; ouvrir la bouche, arrondir les lèvres et tordre la langue pour articuler des phrases."

Mais les paroles ne franchissent plus ses lèvres à force de se briser dans le silence froid de son père et les morsures verbales de sa mère.

Silencieuse, sa mémoire est envahie de pensées, de voix haïes et de souvenirs qui la martyrisent.

D'une sensibilité extrême, Muette souffre dans sa chair quand la planète souffre de la faim, de la guerre et des catastrophes irréparables pour l'Humanité entière.

Jusque là confinée dans sa chambre, Muette fuit ses parents pour tenter d'apaiser ses tourments.

Une (re)découverte d'elle même qui passe par le contact charnel avec la Nature.

Elle devient animale aux sens redoublés, instinctive, vivante et sauvage telle la Déesse Artémis. Elle veut sentir la terre, s'enfouir en elle, échapper à la domestication de la main de l'Homme qui brutalise le paysage pour le rendre docile.



Ce très beau roman est à la fois terrible, troublant et poétique. J'ai beaucoup aimé l'écriture d' Eric Pessan qui par l'utilisation de mots bruts nous fait partager la douleur qu'endure Muette mais réussit en même temps à la respecter et la protéger en conservant son secret et ce, jusqu'à la fin dans une note poétique finale.





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Muette

Muette fugue ; non pas pour aller retrouver un improbable amoureux, non pas pour parcourir le monde, mais pour se retrouver, loin d’un père qui ne parle, ne lui parle, jamais et d’une mère qui ne la regarde pas, tout en n’étant qu’à quelques kilomètres de chez elle, dans une grange abandonnée depuis longtemps. L’indifférence de la mère est insupportable dans l’épisode de la marche dans le sable si chaud qu’il brûlera la plante des pieds de Muette. Bien sûr, la mère accuse sa fille et la petite de 5 ans le pense vraiment « Et Muette se tait, elle croit sincèrement que tout est de sa faute, qu’elle s’est mal comportée, qu’elle a fichu en l’air la journée de sa mère et la sienne. ». Toujours à rabrouer Muette, fille non désirée, née alors que la mère est juste lycéenne ; « Je n’ai pas choisi, je n’en voulais pas de cette enfant » Ce bébé qui a « gâché » les rêves de la mère. Tout ce fiel retombe sur la petite fille qui écoute sans broncher ces phrases assassines.

Pourtant, il y a eu de l’amour entre elles lorsqu’elle était petite « Muette –petite et confiante- se blottit dans les bras tendus, au chaud….. Muette se relâche, se détend, jure à sa mère qu’elle l’aimera toujours et sa mère jure en retour qu’elle la protégera toute sa vie, »



Bien sûr, les gendarmes la retrouve et la ramène chez elle, mais sa fugue n’a rien changé « Elle va parler et Muette prie pour que cela ne soit ni un reproche ni une demande d’explication. En ce sens, elle est exaucée. Ma pauvre fille, dit la mère, tu es folle. »



Le monologue de Muette est entrecoupé des « gentilles phrases assassines» que certains ont eu la malchance d’écouter de la bouche d’un parent, d’un enseignant, d’un conjoint. Là, elles sortent de la bouche de ses parents et elles paraissent si justes : Arrête cette comédie. On t’aura prévenue, à croire que tu le fais exprès pour nous donner des soucis.

« Muette dépoussière ses pensées, elle y déniche des questions qu’elle n’a jamais formulées, des questions qui se sont heurtées aux regards fuyants et coléreux de son père, à l’empressement de sa mère, maman ? Plus tard maman s’il te plaît. Plus tard j’ai dit, ne traîne pas dans mes pattes.

Epargne-moi la honte. Moi, je t’ai tout donné, tu pourrais me respecter.

Elle n’a eu que ce qu’elle mérite….

Ce livre, presqu’un « hymne » à l’indifférence, fait peur. Toutes ces petites phrases alignées bout à bout ont détruit Muette plus sûrement que des coups.



Muette n’est qu’émotions devant le monde qu’elle découvre à travers les informations. Ces parents ne comprennent absolument pas. Les infos de la télévision ne sont, pour eux, qu’un bruit de fond qui ne désamorce pas leur indifférence, leur petite vie étriquée de ceux qui n’ont pas, qui ont peur de…. Vivre ??? . Si Muette ne parle pas, ce n’est pas par infirmité mais parce qu’elle se l’est imposé et pourtant : «Souvent, Muette parle. Les choses ne se réduisent pas à une grossière simplification, il ne faut pas croire. Manier les mots, Muette sait le faire ; ouvrir la bouche, arrondir les lèvres et tordre la langue pour articuler des phrases, elle y parvient si bien que beaucoup se leurrent et ne voient pas qu'au fond d'elle, elle est Muette.»



Ce livre est dur. Les monologues de Muette sont ponctués par les phrases quotidiennement et banalement assassines de sa mère et ses petites phrases font mal, très, très, mal. Oui, vraiment c’est ce que je retiens de ce livre.


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Ma tempête

David qui devait mettre en scène La tempête de William Shakeaspeare n’a pas réussi à obtenir les financements. Déçu, un peu amer, il doit garder sa fille pour la journée de grève des employés de la crèche. Pour l’occuper et s’occuper lui aussi, il décide de jouer avec elle, de lui montrer sa Tempête.

Dans ce court roman, Eric Pessan parle de culture, des arts. De la politique culturelle et des apprentissages culturels. Vaut-il mieux ne financer que les projets qui marchent, avec des personnalités connues au détriment de tous ceux qui tentent de montrer d’autres aspects, d’user de chemins plus sinueux, moins aisés, qui obligent à la réflexion ? La culture n’est-est qu’un simple amusement ou doit-elle éveiller des consciences, "développer la curiosité". Doit-elle être "pensée comme un divertissement sans importance [… ou] comme une émancipation, comme une émotion" ?

C’est bien d’aller voir, d’écouter parfois des œuvres faciles, qui ne trouent pas le cerveau, qui ne sont là que pour distraire et qui le font -plus ou moins- bien, mais ce n’est pas suffisant. Osons découvrir, lire, écouter, voir différent ! Je ne me fais jamais plus plaisir que lorsque je suis surpris par un livre, un film, une musique. Rien ne m’ennuie davantage que la sensation d’avoir déjà lu, vu ou entendu ce qui est pourtant censé être nouveau.

Avec Eric Pessan -et d’autres-, je n’ai jamais cette sensation. A chaque fois, il me pousse à réfléchir, à me poser des questions et ça j’aime bien. Alors, je le conseille, offre ses livres. Et souvent l’on me dit : "Ah je n’aurais jamais pris ce livre, mais ça m’a fait plaisir de découvrir autre chose." Alors, pourquoi se limiter à ce qui est censé marcher, à ce qu’il est de bon ton de voir ou lire ? Et là, j’évoque surtout la littérature -et j’ai tenté pendant quinze ans sur le blog Lyvres avec plus ou moins de réussite d’ouvrir les envies d’autres horizons littéraires-, mais c’est vrai dans tous les arts.
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Ma tempête

Après La Tempête de William Shakespeare et Une Tempête de Aimé Césaire, arrive Ma Tempête, de Éric Pessan, tout droit sortie des Forges de Vulcain et mise en avant sur NetGalley.



J’avoue que la météo s’est mise de la partie pour me faire aimer ce livre : c’est la première fois qu’en plein mois de juillet je reçois un message du gouvernement français qui me conseille de rester chez moi à cause de ce qui risque de m’arriver si je sors.

La première fois si j’oublie la période Covid …



N’empêche, bien que je ne sois pas féru de théâtre classique, et assez ignorant du théâtre en général, j’ai bien apprécié Ma Tempête pour plusieurs raisons.



D’abord parce qu’il a pour trame de fond une relation père-fille et qu’en qualité de père de deux filles et de trois petites-filles (pour l’instant), cela ne m’a pas laissé insensible. Je précise pour les petites-filles parce qu’en l’occurrence, la fille de David, le personnage principal, est à peine âgée de trois ans pour autant que je m’en souvienne (je ne prends jamais de notes).



Il apparait donc relativement évident qu’en racontant sa version de la pièce de Shakespeare à l’enfant il évite un long monologue qui serait douloureux et symptomatique d’un état psychique délétère.



J’ai lu ici et là des critiques (déjà !) qui soulignaient l’aspect geignard du personnage (et certainement de l’auteur par voie de conséquence).



Je ne partage pas cette opinion. Certes, David s’épanche sur la difficulté pour le théâtre de pouvoir simplement exister de façon pérenne dans un système commercial avide, il dit les lendemains hésitants des intermittents du spectacle, la mainmise des pouvoirs politiques et financiers sur le monde de la culture mais n’a-t-il pas raison de souligner ces problématiques ?



Je pense qu’au contraire l’époque le réclame à grands cris, trop peu audibles, trop peu relayés, souvent incompris (la preuve). Ce ne sont pas les médias classiques, pas les chaînes d’information continue en tout cas, qui tireront la sonnette d’alarme à propos du manque de soutien envers les artistes.



Si l’on veut prendre conscience que les gouvernements utilisent les budgets (les impôts ?) pour financer la guerre et les grandes entreprises déjà richissimes plutôt que pour préserver ce qui fait notre humanité, l’art, la littérature, la culture enfin, il vaut mieux éteindre sa télévision et lire Ma Tempête en attendant que le beau temps se lève et qu’on puisse aller au théâtre (ou au cinéma, voir Yannick, de Quentin Dupieux).



En plus laisser un téléviseur allumé pendant une tempête c’est dangereux. Il vaut mieux le débrancher.



Et lorsque l’orage est passé, prendre plaisir à laisser la fiche sur le sol, inutile, au pied du mur.
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L'homme qui voulait rentrer chez lui

J'aime beaucoup la sensibilité des romans de cet auteur. On retrouve parfois certains personnages d'un livre à l'autre et ici le narrateur, Jeff, est le petit frère du Norbert qui avait apporté une grenade au collège. Mais il n'y a pas besoin d'avoir lu les autres histoires ; elles sont toutes indépendantes.

J'ai été un peu déroutée par l'angle de la science-fiction pour ce récit qui aborde la question de l'exil et de l'immigration, de la recherche d'un chez-soi et de la discrimination qui touche l'étranger, de la difficulté de communiquer lorsqu'on ne partage pas la même langue.

Il y a le cadre familier d'un quartier dans lequel les habitants d'un HLM qui va être détruit préparent leur déménagement. De très belles pages sur ce qui fait du lieu de vie auquel on est attaché une partie de nous-même.

Et puis l'élément déclencheur est la découverte d'un étrange étranger qui a trouvé refuge dans la cave de Jeff et Norbert...

C'est puissant, intrigant et ça fait réfléchir.
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Ma tempête

Avec ce livre, je suis vraiment sortie de ma zone de confort. J'aime regarder les pièces de théâtre mais la lecture ne m'attire pas trop. Ce roman se décline en actes et non pas en chapitres.

Une bien curieuse histoire se déroule sous nos yeux. David, un comédien et metteur en scène nous raconte sa journée avec sa fille de deux ans, Miranda qu'il doit garder en raison d'une grève à la crèche. Il va alors raconter à sa fille, la pièce « la tempête » de William Shakespeare, oeuvre qu'il a tenté de mettre en scène et qu'il n'a pas pu financer . La femme de David travaille à l'extérieur. L' activité de David se situe à la maison. Il se livre à une réflexion sur la paternité. Il est soit chez lui, soit au théâtre. Tout en déclamant cette pièce, il réfléchit à sa situation. Artiste, quelle est sa place dans la société ? Son statut n'est pas vraiment reconnu. Les artistes sont les parents pauvres de notre société.

J'ai aimé la réflexion sur le processus artistique. L'écriture est fluide. Je ne connaissais pas ce texte, et il m'encourage à lire l'oeuvre de Shakespeare.

Un livre qui valorise le théâtre, très belle action, le lecteur est entraîné dans ce milieu parfois inconnu du monde de l'art. Ce livre sortira en Août 2023.

#matempêtePessanShakespeare #NetGalleyFrance #NetGalleyChallengeBingo
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La gueule-du-loup





Ce livre d’Éric Pessan est un roman d’aventure avec quatre personnages principaux Jo la narratrice et personnage principal qui raconte leurs séjour dans la maison de leurs grands parents , Nono, son petit frère et leurs parents.



Le livre m’a plu, il est accessible à tout le monde est facile à lire. L’ambiance est un peu angoissante pour les personnes qui aime ça. On a envie de le lire jusqu’à la fin car on veut savoir ou bien découvrir d’où viennent tous ces phénomène très étranges.







Résumé :

L’histoire d’une famille pendant le confinement en raison de cette pandémie, Il décide d’aller vivre dans la maison laissé à l’abandon de leur grands-parents morts il y a trois ans, qu’ils n’ont jamais vu du haut mauvais terme que leur mère avait gardé avec eux. Mais dans cette maison , La maman va avoir beaucoup de souvenirs qui vont resurgir dans cette maison, et elle va avoir un comportement très étrange et plusieurs phénomènes encore plus étranges vont se produire chaque jour dans cette maison, comme led bruits bizarres ou des objets qui bougent.



M.K
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Tenir debout dans la nuit

Un jour j'irai à New York avec toi.



New-York la nuit. Lalie erre dans les rues de la ville, après avoir échappée à son ami, qui estimait qu'elle pouvait bien le remercier de l'avoir invitée ici, elle qui n'était jamais partie bien loin de Nantes.

Elle erre, de Brooklyn à Ground Zero, de Bushwick à la caravane d'une retraitée SDF, sans portable, sans argent, sans papiers. Avec seulement 2-3 mots d'anglais, son appareil photo, un livre de poésie, et, passé le choc et la peur, beaucoup de colère.



Un texte d'une nuit, intelligent, touchant et très fort, abordant des sujets sociaux et politiques importants, dénonçant avec une justesse vibrante la culture du viol et le patriarcat. Une nuit pour remettre la société en question.

Avec une plume toute en sensibilité, pleine de crainte mais surtout de colère. Une colère légitime. Qu'on ne taira plus.
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Tenir debout dans la nuit

Lalie, une ado de 16 ans vit avec sa mère dans un appartement modeste. Pour les vacances de Pâques, son ami de lycée Piotr accompagne sa mère aux États-Unis pour le travail. Quand Piotr propose à Lalie de l'accompagner, elle voit une opportunité qu'elle ne peut refuser. Arrivée à New York, Lalie comprend qu'elle va devoir rester seule dans le studio avec Piotr. Seulement ce dernier, veut une "récompense" pour son invitation. Piotr devient violent envers Lalie, cette dernière réussit à s’échapper. Elle se retrouve seule, sans argent, à errer en pleine nuit dans une ville qu'elle ne connait pas.

Un cout roman poignant et révoltant qui aborde des thèmes importants comme la condition des femmes et les failles du système de santé des États-Unis. Eric Pessan arrive parfaitement à se mettre dans la peau d'une adolescence et à nous faire ressentir sa peur et sa colère. Percutant !
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Tenir debout dans la nuit

Eric Pessan sait écrire, il n'y a pas à en douter. L'écriture est sobre, sèche, efficace. Les chapitres s'enchaînent avec des longueurs et des intensités différentes. On sent dans les mots la violence, la perdition et la lutte. On suit avec angoisse l'errance de Lalie dans les rues de New York, sa marche dans la nuit.

C'est fort, ne laisse certainement pas indifférent.
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Dans la forêt de Hokkaido

Julie, 15 ans, se réveille en hurlant après un cauchemar dans lequel elle se retrouve dans la peau d'un petit garçon japonais abandonné sciemment par sa famille et perdu dans une forêt. Malade, elle sombre dans le sommeil et reprend le rêve encore et encore. Elle est avec le petit garçon... Et si ce n'était pas un rêve ?



Un roman extraordinaire qui a évidemment beaucoup résonné chez moi qui suis une rêveuse forcenée. Habilement construite, l'histoire oscille entre fantastique et réalité, entre rêve et réalité. Le personnage de Julie, hypersensible à son environnement et aux émotions des autres, est très attachant. On entre dans cette histoire par le suspense et on finit par tourner les pages de manière quasi hypnotique jusqu’au dénouement. C'est très bien fait et superbement écrit. Du grand art. Il y avait bien longtemps que je n'avais pas lu un roman jeunesse aussi réussi.
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Aussi loin que possible

Un roman profondément étrange et riche en réflexions.
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Le démon avance toujours en ligne droite

L'an dernier, j'avais adoré "Muette" d'Eric Pessan. Comme souvent dans ces cas-là, on redoute d'être déçu avec le roman suivant. Quand celui-ci commence par une citation d'un de vos écrivains préférés ("Personne ne nait sans héritage", Laura Kasischke, Esprit d'hiver), vous vous dites que vous êtes bien partie pour vous laisser embarquer encore une fois par cet auteur. Vous rendez les armes quand il vous assène ces mots si justes du maitre de la littérature fantastique américaine contemporaine, j'ai nommé Stephen King : "La réalité est une mince couche de glace sur un profond lac d'eau noire".



David, 40 ans, travaille dans une radio étudiante. Quand sa compagne de longue date avec laquelle il avait convenu de ne pas avoir d'enfant, lui dit vouloir un enfant de lui, il ne sait quoi dire, se sent perdu. Il a besoin d'éclaircir son histoire familiale pour démêler le désir de la peur avant de lui donner une réponse. Il quitte alors la France pour Lisbonne sur les traces de son père et commence l'écriture d'un livre. Il croise un clochard qui pourrait bien être lui...



Le roman est placé sous le signe du démon, démon fantastique ou démon intérieur, celui-ci dévore le corps et l'âme des hommes de la famille de David, depuis son grand-père. Les femmes voudraient faire croire à une malédiction touchant les hommes, malédiction liée à l'alcool et à l'abandon. David, enfant, y a cru, aujourd'hui il refuse cette idée et cherche la vérité.



Un livre à l'écriture très maitrisée et baigné par l'amour de la littérature et de la musique de son narrateur - et de son auteur très probablement. Les villes de Bordeaux et de Lisbonne ont une présence incroyable sous la plume d'Eric Pessan : qu'on les connaisse ou non, on arpente leurs rues avec le narrateur grâce à la magie de l'écriture.



Un très bon roman sur les comptes que l'on doit régler avec notre passé pour être vraiment nous-mêmes. Et cette phrase qui revient en boucle : "La vie n'est pas possible sans littérature".
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Muette

Parce que les mots assénés sont parfois plus violents que les coups, parce que l’indifférence, l’humiliation permanente et le manque d’amour creusent des abîmes, Muette fugue. A 17 ans, la jeune fille a prémédité son départ. Pas très loin de la maison parentale, ce lieu où les petites phrases assassines, mesquines fusent sur elle comme des balles. Les mots, des situations blessantes la lestent. Pour se débarrasser de ce fardeau, elle va se cacher dans la nature.



Muette ne parle pas par choix « Manier les mots, Muette sait le faire ; ouvrir la bouche, arrondir les lèvres et tordre la langue pour articuler des phrases, elle y parvient si bien que beaucoup se leurrent et ne voient pas qu'au fond d'elle, elle est Muette ». Ne pas répondre aux provocations, aux méchancetés de sa mère. Muette enfant non désirée , élevée par des parents pour qui elle ne compte pas et qui se contentent de leurs vies restreintes. La nature lui offre la paix, le silence. Cette harmonie qu’elle ne trouve pas dans sa famille. Elle n’a pas de quoi tenir longtemps. Juste quelques provisions qui ne lui permettront pas de vivre plusieurs semaines. Elle le sait. Elle se demande si ses parents vont s’inquiéter ou être contents. Muette profite de cette parenthèse dans cette grange abandonnée pour faire corps avec la nature, se couper du reste du monde.

Le récit de la fugue de Muette est entrecoupé des paroles de sa mère comme « Tu es empotée ma pauvre fille, Elle nous en donnera du souci, Epargne-moi la honte ».



la suite sur : http://fibromaman.blogspot.fr/2013/10/eric-pessan-muette.html
Lien : http://fibromaman.blogspot.f..
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Muette

Ce superbe roman est construit autour de Muette, seule. Les autres intervenants se dévoilent dans les pensées de la jeune fille : son père et sa mère, autoritaires, fuyants, colériques, totalement dénués de tendresse envers elle -l'amour, n'en parlons même pas-, qui l'assaillent de réflexions du matin jusqu'au soir :"jusqu'au bout elle nous fera chier", "Putain de gamine, tiens.", "Arrête de mentir", "ne raconte pas n'importe quoi", ... Ces réflexions entrecoupent le cours des pensées de Muette, coupant parfois la phrase en son mitan, qui reprend ensuite comme si elle n'avait pas été interrompue. Muette fuit des parents pas aimants trop encombrés de leurs propres soucis, de leurs propres vies et trop englués dans leurs vies actuelles pour s'occuper de leur fille. C'est un roman très lent, qui s'attarde avec bonheur sur la nature, la faune et la flore et sur Muette et ses pensées. Elle veut prendre son temps, celui d'admirer le monde qui l'entoure de le vivre intensément sans adulte qui la brime ou l'empêche de profiter. Elle ne veut plus assister au spectacle du monde à travers les journaux télévisés, car Muette vit dans son corps et son esprit les malheurs des autres, elle ne peut passer d'informations dures telles les guerres, les émigrés -futurs immigrés "Ces hommes [qui] marchent vers l'endroit exact que Muette souhaite fuir. Ils risquent leur vie pour trouver ce dont Muette souhaite se délester" (p.69)- aux sorties cinéma du jour. Les thèmes du langage, de la solitude qu'Eric Pessan évoque longuement, ne serait-ce que dans le titre du livre, nom de la jeune fille, font déjà une grande partie de l'un de ses romans précédents, l'excellent L'effacement du monde et il ajoute un petit clin d'œil à la fin à son roman précédent "Incident de personne, indiquera la SNCF, et les gens râleront à cause du retard, [...]"

C'est un roman bourré d'émotions, de passages plus beaux les uns que les autres. Profonds, le roman ainsi que le personnage de Muette. Eric Pessan écrit très bien, colle au plus près des sentiments, des émotions de Muette et parvient à nous les faire ressentir. Une écriture fine, délicate, poétique, exigeante et accessible. Un livre qu'on lit lentement, j'ai même ralenti mon rythme habituel de lecture pour profiter de tous les mots, de toutes les phrases et pour passer un moment le plus long possible avec Muette, dans la grange. En tout bien tout honneur, bien entendu elle est une jeune fille que l'on a envie de protéger, de réconforter, de soutenir. Elle est un personnage formidable, une jeune fille qui vit là son passage vers le monde des adultes, mais pas celui de ses parents, son monde à elle en osmose avec la nature, avec elle-même. C'est tout le mal qu'on peut lui souhaiter.

Assurément un des très grands romans de cette rentrée.
Lien : http://lyvres.over-blog.com/
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Un matin de grand silence

Le Garçon se réveille.

Mais que se passe t-il ?

Il est 9 heures 30.

Pourquoi ses parents ne l'ont-ils pas réveillé comme d'habitude ?

Pourquoi cet immense silence ?

Le Garçon doit se rendre à l'évidence ses parents ont disparu.

Le Garçon doit se débrouiller seul pour la première fois de sa vie, sans faire de bruit, sans attirer l'attention de qui ou de quoi que ce soit.

La journée se termine.

Le Garçon s'endort jusqu'à demain…..ou peut-être pour des milliers d'années…..



Entre le superbe texte de Eric Pessan et les très jolis collages de Marc Desgrandchamps, le lecteur doit se livrer au difficile exercice de garder l'équilibre entre réalité et fantastique.

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Untoten

Le roulis d'un train vous balance. Encore une journée accomplie. Une répétition à l'infini, sans que vous n'ayez jamais l'impression de pouvoir un jour assurer la présentation officielle de cette vie. Naviguer entre efforts et frustrations, dans un climat de peur tellement partagé qu'il en devient rassurant. C'est votre lot quotidien.



Puis la machine s'enraye. Le train stoppe. 



Et un rideau tombe : vous étiez déjà sur la scène officielle, pour la présentation de la pièce de votre vie. Et vous n'aviez pas saisi que le public, votre public, suivait votre progression depuis les toutes premières minutes.



Le rideau tombe, avec vous ; vous êtes mort. Ou du moins dans les coulisses de la mort, puisque vous entendez ces hommes qui vous parlent, et que visiblement, ils suivent vos pensées. 





Se pourrait-il, alors que nos marches mécaniques dans des vies mornes ne sont plus que de purs réflexes, que tout s'arrête au beau milieu d'un chemin ? Cette belle nouvelle allégorique replace au centre, le sens même de nos vies, et nous ouvre à plus d'humanité. La plume d'Eric Pessan vous pique dès les premiers mots, et vous envoûte, le corps d'un côté, l'esprit de l'autre, et je sais déjà que son nom seul suffira dès lors seul à captiver mon attention.





Untoten = non-mort en allemand



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