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Critiques de Éric Pessan (650)
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La plus grande peur de ma vie

Une jolie petite surprise se dissimule derrière cet ouvrage à la couverture pas forcément attirante ! Ainsi, je ressors assez bouleversée est touchée par cette lecture qui saura certainement plaire aux jeunes adolescents. L’ouvrage est présenté comme un journal intime/un témoignage de David, un collégien. David fait partie d’un groupe d’amis : il y a la belle Lalie dont il est amoureux, Jordan et Norbert. Ce dernier va être le pilier du récit. Son physique rondouillard et ses difficultés à l’école font qu’il est bizuté par l’ensemble du collège. Il est sans arrêt humilié, n’est pas systématiquement soutenu par ses amis et se fait toujours réprimander par son père. À la maison, il enchaîne punition sur punition. Il ne semble n’y avoir aucune communication, si bien que l’on se retrouve face à un ado mal dans sa peau, les nerfs à vif et le désespoir comme seconde peau. J’ai trouvé le personnage vraiment attachant et réaliste. Cette notion de harcèlement, d’intolérance et d’humiliation poussant une personne à bout est vraiment crédible et bien retranscrite… J’espère ainsi que certains lecteurs, bizutés ou harceleurs, prendront conscience de ce sujet difficile qu’est le harcèlement.



Le onze novembre, le groupe d’amis profite du jour férié pour sortir ensemble. Ils optent alors pour visiter en douce un manoir abandonné… Là, ils trouvent une grenade de la Seconde Guerre mondiale encore goupillée, prête à sauter. Avec sagesse, les ados optent pour la laisser là… Seulement, en secret, Norbert l’emmène avec lui. Et, le lendemain, une scène de trop éclate ! À la cantine, Nobert est de nouveau humilié et doit faire face à une nouvelle injustice. C’est la goutte qui fait déborder le vase : il dégaine alors la grenade et la brandit au-dessus de lui, prêt à tout faire péter ! Le jeune narrateur arrive très bien à faire monter la tension au fil des pages et annonce, dès le premier chapitre, que son ami est sur le point de passer à l’acte avec une grenade dans la main… Le style d’écriture est simple, direct, léger et avec un bon rythme. Que l’on soit un lecteur ado ou un adulte, on rentre facilement dans le récit et la curiosité nous pousse à savoir ce qu’il va advenir. (C’est pourquoi, en grande méchante, je ne vous dévoilerai pas la fin, ni ce que j’en ai pensé ! Nah !) Par ailleurs, l’utilisation de calligrammes dans quelques chapitres est à la fois jolie, poétique et originale. C’est une bonne manière de mettre en valeur les moments importants ou certains mots remplis de sens. Cela retranscrit également des sons comme la pluie qui tombe ou le brouhaha du mot « grenade » lors de la scène du self.



En plus de pousser à la réflexion, ce roman ado aborde énormément de thèmes importants à cet âge-là comme l’amitié, le harcèlement, la tolérance, la famille, la vie au collège, le soutien d’autrui, … Le tout est saupoudré d’une sacrée tension et d’un rythme efficace donnant toujours envie au lecteur d’en savoir plus ! La seule chose qui me chiffonne, c’est le manque de consistance des personnages. Hormis Norbert et un peu Lalie, les héros ne sont pas bien décrits. On les découvre par leurs actes ou leurs dialogues. C’est un peu dommage… Mais je chipote et vous encourage à découvrir ce récit écrit avec une grande justesse…


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Dans la forêt de Hokkaido

« Les médecins n’expliquent rien parce qu’il n’y a rien à expliquer. Un garçon se perd, appelle à l’aide et c’est moi qui le trouve. Point. » Enfin, tout n’est pas si simple. Julie s’est réveillée un matin en hurlant. Elle avait fait un rêve. « J’étais un petit garçon. J’étais dans la forêt d’Hokkaido. J’étais seul. J’étais perdu. Pire que perdu. Abandonné. » Très vite la collégienne comprend que ce rêve n’en est pas vraiment un. Que ce garçon existe. Qu’à des milliers de kilomètres de la France, il est entré en contact avec elle. Ou l’inverse. Et à chaque fois qu’elle s’’endort, elle se retrouve dans son corps. Elle le guide comme elle peut. Affronte avec lui le froid, la faim, la peur des ours qui rôdent. Et plus le garçon faiblit, plus Julie sombre dans une fièvre qui la met en grand danger.



Quel bonheur de retrouver la plume délicate d’Éric Pessan. Il y a dans son écriture un charme indéfinissable qui m’emporte à chaque roman. Ici il met en scène Julie, un personnage déjà présent dans « Plus haut que les oiseaux » et « Les lumières dansaient dans le ciel ». Une Julie frappée malgré elle par un don de télépathie qui lui fait ressentir les maux de celui dont elle est devenue l’ange-gardien, sans le vouloir ni le choisir. On vit intensément le désespoir du petit garçon, on écoute avec lui les bruissements, cris et craquements de la forêt, tout sonne juste quand les esprits de Julie et de l’enfant partagent le même corps, tout s’imbrique parfaitement, même lorsqu’une histoire parallèle concernant les migrants vient se greffer à l’intrigue principale.



Un roman jeunesse entre rêve et réalité où les passerelles reliant les deux mondes se tissent avec un naturel et une limpidité qui forcent l’admiration. La partition est sans faute, le plaisir de lecture immense.
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Plus haut que les oiseaux

Dans ce roman bref et percutant, Éric Pessan nous raconte à la fois la vie dans la cité et la succession de hasards, d’actes plus ou moins réfléchis et de pures inconsciences qui façonnent notre chemin et nous induisent dans une certaine direction, parfois tragique.



Le narrateur habite le troisième étage de la plus haute tour du quartier. De sa fenêtre, il ne voit que le parking et l’immeuble d’en face. S’il lève la tête, il aperçoit le ciel. Alors, pour s’en rapprocher, il monte sur le toit. Ce lieu interdit élargit son horizon : il ne voit plus le ventre mais le dos des oiseaux, le monde est à ses pieds et ses amis jurent que par très beau temps on peut voir la mer. En tout cas, là-haut – plus haut que les oiseaux – on est libre. Mais en ce lundi 21 avril, ils sont trois sur le toit : ils parlent, ils rient, ils profitent, et ça tourne mal. Aucune méchanceté, aucune mauvaise intention, aucune préméditation. Seulement de l’inconscience.



L’auteur parvient parfaitement à nous faire ressentir la culpabilité et la peur des personnages : si la bêtise devenait irrémédiable, s’ils étaient mis en cause… A plusieurs reprises ils souhaitent parler, mais la panique et la honte leur lient la langue. Personne ne comprendrait. Tout le monde jugerait. Le silence est roi, il s’empare des êtres et les enferment dans leurs douleurs et leurs regrets.



Plus haut que les oiseaux touche par la profondeur, la candeur et la sincérité des sentiments. L’erreur est humaine, il est parfois primordial de s’en souvenir. Mais comment faire pour les réparer ? Le regard des autres peut être terrible, mais notre regard sur nous-mêmes est encore pire, intransigeant. Et c’est ceci qu’Éric Pessan parvient à nous transmettre avec brio.
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Plus haut que les oiseaux

ATTENTION SPOILER DES LES PREMIERES LIGNES /// Plus haut que les oiseaux est le récit d'un jeune lycéen, Thomas, qui culpabilise d'avoir jeté des bouteilles de bière du haut de son immeuble avec deux de ses amis. En effet, l'une des bouteilles a blessé un jardinier qui se retrouve dans le coma.

Une histoire racontée sur un ton très triste et morne. Je reconnais que ce que Thomas a fait est mal mais le ton utilisé nous donne l'impression de lire les dernières confessions d'un condamné à mort. Sans parler du début du livre où l'auteur ne révèle pas immédiatement l'erreur de Thomas : ce dernier s'adresse au lecteur en se repentant d'une manière très grave et on s'attend alors à un meurtre, à quelque chose de vraiment horrible.

Tout cela contribue à nous détacher de l'histoire et de son personnage principal, on a juste envie de le secouer pour le réveiller et on n'éprouve aucune pitié pour lui.

Enfin, certains détails m'ont gênée. Sous prétexte que le jardinier sort du coma, l'enquête de police est stoppée et Thomas et ses amis n'ont plus aucun souci à se faire. Et la fin me paraît un peu trop rapide et facile : du jour au lendemain, Thomas devient un fils exemplaire et accompagne son père aux réunions de quartier où il tente d'améliorer les conditions de vie des citoyens.
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Ma tempête

Pendant que la tempête se déchaîne au-dehors, David, metteur en scène, joue la pièce de Shakespeare pour sa fille de deux ans, avec ses poupées, nounours et playmobils.

J'ai aimé la manière dont David, le metteur en scène, met à la portée de sa fille la pièce élisabéthaine en lui donnant une résonance contemporaine et en l'éclairant de sa connaissance du texte et du dramaturge. J'ai moins apprécié la manière dont l'auteur semble régler des comptes à travers son personnage et le conflit qui l'oppose à son frère, conseiller général (de droite) qui refuse de subventionner le théâtre s'il n'est pas populaire et ne remplit pas les salles. Les passages décrivant la tempête la rendent particulièrement vivante et féroce, et le temps de la lecture est proche de celui de l'action racontée ; on a ainsi l'impression d'assister à un spectacle rien que pour nous, tempête dans la tempête, en attendant que l'orage passe et que reprenne la vie réelle.
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Aussi loin que possible

« Cours, Forrest, cours ! » Cette phrase, on pourrait l’adapter à Tony et Antoine, les deux personnages principaux d’« Aussi loin que possible ». En effet, sans se concerter, ces deux ados de treize ans ont un jour décidé de tout plaquer et de courir ensemble, le plus loin possible. Une longue course d’environ une semaine que le lecteur va suivre dans une ambiance poétique, sombre, douce et haletante. Une fois encore, Éric Pessan propose un récit qui aborde des thématiques sensibles, difficiles et d’actualité. Cette fois-ci, il s’attaque à la violence physique, aux enfants battus, à la politique, aux gens reconduits aux frontières et à la famille en général. Le tout est joliment traité et ne parait pas lourd durant la lecture. Au contraire : on est transporté par cette fugue qui a d’abord pris l’allure d’un jeu, puis d’un besoin, d’un défouloir, d’un message et d’une échappatoire… L’atmosphère de cet ouvrage m’a rappelé « Jonas dans le ventre de la nuit » d’Alexandre Chardin qui met également en scène deux garçons fuyant leur quotidien. Leur avancée va leur permettre de se dévoiler, de faire une introspection et de se comprendre… Les deux récits ont également pour point commun de judicieusement alterner descriptions de la nature environnante et les pensées des deux fugitifs.



J’ai été très touchée par cette épopée incroyable et dynamique. Même si la narration est vue du côté d’Antoine, on ne ressent pas de manque concernant Tony. Très vite, on comprend et on s’attache aux deux garçons. On partage ce qu’ils voient, ce qu’ils vivent ainsi que leurs échanges. Le texte est très aéré, comme si chaque mot était leur souffle pendant la course. On est dans l’émotion. Les dialogues sont en italiques, encrés dans les descriptions et les réflexions d’Antoine. Ainsi, on cerne les pensées de ces jeunes, leurs peurs et leurs espoirs. C’est vraiment un récit simple et bien écrit. L’auteur a une belle plume que l’on prend plaisir à suivre ! Cela dit, j’ignore si la sauce prendra avec tout le monde et surtout, à partir de quel âge. Même si la course est ponctuée de rencontres ou d’événements, le rythme peut paraître répétitif. C’est un roman qui peut facilement plaire aux adolescents cependant, j’ai du mal à donner un âge idéal pour cette lecture… D’ailleurs, les adultes comme moi pourront être autant émus par cette aventure qu’un lecteur moins âgé…. Honnêtement, je bloque. Je serais vraiment curieuse d’avoir des retours d’adolescents ! Quoi qu’il en soit, c’est un roman vibrant aux messages forts et à la plume aérienne qui se lit d’une traite, mais surtout avec plaisir…
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Dans la forêt de Hokkaido

Ce roman est étrange... Quand Julie s'endort, dans son lit, en France, elle se retrouve dans la tête d'un petit garçon, perdu dans une forêt à Hokkaido. Rêve étrange vous me direz. Mais c'est plus que cela. Ce "rêve" l'épuise, la rend malade. Et c'est loin d'être un rêve, car cet enfant est réellement perdu à l'autre bout du monde. On assiste alors à une course contre la montre, la raison et l'espace.

Frontière entre rêve et réalité, présence de la magie dans le monde, accueil des migrants en France (pardon Papa de Julie pour ce terme), épuisement des parents face à un enfant difficile, engagement politique local... Ce court roman ado ne fait que 140 pages mais il aborde beaucoup de choses, fait tilt et reste en tête, et cela avec une jolie maîtrise de la langue.
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Le poème de Fernando

Ce livre, ce texte, est un petit bijou !!!

A lire à voix haute, à partager...

Il m'a fait penser à des albums pour enfants comme "Frédéric" de Léo Lionni ou "Ceci est un poème qui guérit les poissons" pour tenter d'expliquer l'inexplicable : la poésie.

Mais il aborde aussi, à travers le personnage de Fernando, la question de la lecture, du rapport au livre et à l'écrit qui peut faire peur mais qui apporte tant de bonheur "superflu" quand on s'y plonge.

J'ai adoré la personnification du livre-Poème.

Et l'engagement final contre l’illettrisme.
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La plus grande peur de ma vie

Lorsque l'on est enfant trouver une grenade enterrée peut avoir la valeur d'un trésor. Mais ensuite que faire ? En parler ? Se taire ?



Lorsque Norbert ramène l'objet en classe caché dans son sac c'est la panique pour Lalie, Jordan et David. Faut-il le dénoncer ?



Un roman court et percutant sur la dynamique de groupe. Chacun a sa vision des événements et de ce qu'il faut faire. Et pourtant ils attendent tous qu'un autre agisse. Le silence les fige.



Entre passé et présent, le récit alterne en donnant progressivement les clés au lecteur d'une situation complexe d'un enfant en souffrance. Et parler c'est enfreindre la loi de la solidarité.



La grenade devient le symbole d'une défense possible, contre le harcèlement mais aussi face à une vie familiale compliquée et violente.



L'écriture vive et les mots qui jouent par instant sur la page pour figurer et renforcer des scènes à la manière des calligrammes renforcent l'histoire.



Un livre fort sur l'amitié, les choix et les responsabilités à partager !


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Ma tempête

Un père qui s'occupe de sa fille toute une journée, vous me direz que ça n'a rien d'extraordinaire!

Mais ce père est metteur en scène et il va jouer pour sa fille, en bas âge, la pièce de théâtre de Shakespeare -> "Tempête".

Ça met beaucoup de rythme dans l'histoire, j'avais peur de m'ennuyer, mais pas du tout.



Je recommande ce court roman bien rythmé.
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La gueule-du-loup

Dans la gueule du grand méchant loup.



Une maison isolée en pleine campagne, où commencent à se produire d'étranges phénomènes. Est-elle hantée ? Le grenier habité par un monstre ? Ou la bâtisse vibre-t-elle sous la résonance d'un sombre passé décidé à sourdre par les pores de ses tapisseries vieillies, à gratter aux creux des murs, à faire craquer les planches du grenier ?



Une écriture sensible à l'ambiance oppressante, qui en appelle aussi à la poésie, où le fantastique affleure, à moins qu'il ne soit que la métaphore de secrets de famille et de traumas oubliés (qui pourraient trigger certain·e·s, attention l'auteur aborde ici des thématiques difficiles).



Encore un excellent texte de l'auteur.
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Dans la forêt de Hokkaido

Avec ce titre tout récent, je découvre Eric Pessan et son univers, sa voix vraiment particulière. Il a été interpellé par un fait divers qui s’est réellement passé en 2016 : excédés par leur fils ingérable, des parents japonais l’ont fait sortir de la voiture avec l’idée de le récupérer quelques minutes après ; le temps de faire demi-tour, le gamin avait disparu dans les bois. On ne l’a retrouvé que six jours plus tard dans une base militaire désaffectée, il avait survécu grâce à un robinet d’eau potable.



Eric Pessan interprète ce fait-divers en l’associant à un personnage déjà vu dans un autre roman, Julie, adolescente apparemment fragile mais surtout hyper-sensible, dont les parents vibrent aussi aux drames du monde et de leurs contemporains, particulièrement la situation des « migrants ». En quelques jours, à travers l’histoire d’une famille française et d’une ado attachantes, l’auteur nous ouvre au monde, fait se côtoyer des gens par des canaux subtils, souvent inconscients. Le message, pas du tout moralisant, est évidemment que nous ne pouvons être indifférents à tout ce qui se passe autour de nous et aux gens que nous croisons, de près ou de loin dans cette société connectée sur le monde. Et si cette parole, derrière une couverture mystérieuse à souhait, est portée par une belle écriture fluide et évocatrice, nous ne bouderons évidemment pas notre plaisir.
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Aussi loin que possible

Ils sont partis un lundi matin, sur un coup de tête, sans en avoir discuté au préalable. Zéro préméditation. Tony a compté jusqu’à trois et s’est élancé. Antoine l’a suivi. En baskets et survêtement, rien dans les poches. Ils ont quitté la cité en courant en ne se sont pas arrêtés. Ils ont couru du matin au soir, couvrant près de 400 kilomètres en cinq jours. Ils ont chapardé leur nourriture dans les supérettes, ont couché dans des maisons de vacances à l’abandon. Ils ont pris la clé des champs sur un coup de tête, l’un fuyant ce père qui le frappe et l’autre refusant de quitter la France pour l’Ukraine suite à un arrêté d’expulsion.



Un magnifique roman, ode à la liberté, fuite nécessaire pour profiter d’un présent faisant fi du passé et de l’avenir. Une course de fond motivée par la tristesse et la colère, loin d’une quelconque recherche de performance. « La course, on l’a gagnée tous les deux, ensemble, on ne saura pas lequel court le plus vite, et on ne veut pas le savoir, puisque l’on courait l’un avec l’autre, en équipe. »



Dans la tête d’Antoine, le lecteur partage la fatigue, la peur, la douleur physique, la soif, la faim, l’entraide, les silences, le danger permanent. Il partage aussi cette incroyable sensation de lâcher prise, ce champ des possibles où l’utopie prend forme à chaque mètre parcouru.



Le texte est aérien, il respire au rythme des foulées, allie réalisme et poésie dans une langue puissante et délicate. Magnifique, vraiment.
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Le démon avance toujours en ligne droite

David, fils et petit-fils de clochard, est pris de panique lorsque sa compagne lui réclame un enfant. Comment s'imaginer être père quand on n'en a pas eu un soi-même ou alors si peu?

Pour David , traumatisé par une mère et une grand-mère qui l'ont élevé dans la haine des hommes de la famille, ces ivrognes qui abandonnent femme et enfant, la question provoque de violentes perturbations. Il ressent une terreur enfouie dans les tréfonds de son esprit, celle d'être maudit et de reproduire les mêmes comportements.. Cette terreur ravive l'angoisse d’être dévoré par le démon tapi en lui, de devenir la proie du prédateur crée par les deux femmes à force d'imprécations et de malédictions stupides. Il ne sait de son géniteur que ce qu'elles ont bien voulu en dire, c'est à dire quasiment rien. Il doit donc partir à la recherche de ses racines pour se comprendre lui même. Il pense que seule l'écriture pourra l'aider à mettre ses idées au clair et surtout aura le pouvoir de conjurer le mauvais sort. En décidant d'écrire un roman sur son histoire, il part sur les traces de son grand père puis de son père avec le peu d'indices qu'il possède. Sa quête le méne brièvement à Weimar puis à Lisbonne où il va errer longuement en laissant remonter les souvenirs et en se confrontant à ses peurs. Eblouissements, vertiges, insomnies, crises d'angoisse, visions, paranoïa: les démons sont bien là qui le traquent sans relâche. A la limite de la folie, David se dédouble, devient celui qu'il cherche. Insidieusement il se laisse contaminer par l'idée de se laisser couler, d'accepter l'héritage empoisonné en buvant, buvant, buvant et disparaître lui aussi.

Vous l'aurez compris l'atmosphère de ce roman introspectif n'a rien de gai. C'est très sombre, parfois oppressant.

On y retrouve les mêmes ingrédients que dans Muette mais en version masculine et urbaine. Comme Muette, David fuit, ressasse les phrases empoisonnées assénées pendant son enfance, se met en danger et la fin du récit laisse le lecteur dans le doute. C'est comme si pour Eric Pessan, Muette avait été une esquisse avant d'écrire Le démon avance toujours en ligne droite.

J'avoue avoir préféré Muette à laquelle j'ai pu m'identifier facilement, d'autant plus qu'elle incarne un rêve d'enfance, celui se se réfugier dans un cabane au fond des bois. Avec David le lecteur plongera plutôt dans un cauchemar....
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Un matin de grand silence

Ce récit, paru en 2010 aux éditions Le Chemin de fer et illustré par le peintre Marc Desgrandchamps, est comme une bulle de mots enveloppée de silence.



«C’est un matin de grand silence, comme recouvert comme par une épaisse couche de poussière.»



Un jeune garçon se réveille un matin tardivement dans son appartement, ou pas un bruit ne se fait entendre : le réveil n’a pas sonné, ses parents se sont volatilisés, l’immeuble lui-même semble entièrement vide.



«Ce matin, le monde a une fragilité nouvelle.»



Dans ce silence que presque rien ne vient troubler, l’adolescent développe une nouvelle conscience de son environnement, des horizons entourant son immeuble jusqu’aux détails de son propre corps. Pris entre un sentiment d’abandon pénible mais repoussé aux marges, et la volonté de prolonger ce retrait du monde, il s'immerge dans cette chape insonore, perdant contact avec la réalité.



«L’absence de ses parents, ce matin, contamine toutes ses perceptions. L’appartement est silencieux inodore insensible creux, l’appartement est un trou.»



Flirtant par moments avec l’idée d’une apocalypse ayant éradiqué le genre humain, il tient l’angoisse à distance et se prépare à tenir un siège, et pousse cette situation dans ses retranchements ultimes en débranchant un téléphone aux sonneries perturbatrices et en rationnant sa nourriture. L’appartement, lieu familier se transforme, comme un vaisseau qui s’éloigne du monde avec l’absence des parents, tandis que le temps qui s’étire en longueur, «contaminé lui aussi par la mollesse du silence»



Comme dans Muette, Eric Pessan parvient à incarner avec une grande justesse l’incertitude, la volonté de fuite et les paradoxes de l’adolescence.



«Les immeubles de nos jours sont plus sombres et insondables que les jungles, on peut s’y perdre, on peut y abandonner cinq ans une enfant, on peut y vivre comme un animal, on peut ne jamais en ressortir.»

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Un matin de grand silence

En flanant devant l'étal de mon libraire, j'ai fait une superbe découverte.

"Un matin de grand silence" de Eric Pessan vu par Marc Desgrandchamps dont j'aurais l'occasion de vous reparler tant ses oeuvres me touchent.

En ouvrant le livre, je me suis dit : " Oh ! Quel bel objet ! "

Les pages sont contenues par un rabat qui se glisse sous la première de couverture, donnant au livre l'aspect d'un écrin. Sur ce rabat, la présentation de l'éditeur et l'affreux code barre, qui ainsi caché, ne dénature pas la représention de l'oeuvre de Marc Desgranchamps sur la quatrième de couverture. Et à ce stade là, on a déjà envie de remercier chaleureusement l'éditeur, "les Éditions du chemin de fer", d'avoir par son souci du détail, autant d'attentions délicates pour ses lecteurs. Mais son plus grand talent est d'avoir eu la perspicacité de mettre en raisonance le très beau texte, original et poétique, d'Eric Pessan avec la grande sensibilité des peintures de Marc Desgrandchamps.

C'est du cousu-main au propre comme au figuré.

Quand on a eu un tel plaisir, on a envie d'y regoûter. Plusieurs titres de cette belle collection me font déjà de l'oeil, "là-haut" de Pierre Autin-Grenier vu par Ronan Barrot / " Dieu rend visite à Newton" de Stig Dagerman vu par Mélanie Delattre-Vogt / "Figures, 36 portraits de la comédie humaine" vus par 36 artistes.

À suivre.



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Ma tempête

’ai choisi ce livre dans le cadre du challenge Netgalley, mais je ne vais pas faire durer le suspense, c’est une énorme déception, je me suis mortellement ennuyée durant les trois soirées consacrées à la lecture de cet ouvrage. J’ai vu La tempête de Shakespeare il y a plusieurs années, c’était un magnifique spectacle réalisé avec de grandes marionnettes à fils en costume d’époque. J’étais curieuse de voir comment l’auteur avait traité ce thème.



David devait mettre en scène cette pièce, c’était SON grand projet, sur lequel il a travaillé durant trois ans, sans se soucier que la pièce soit réellement montée. Finalement, entre le Covid et la guerre en Ukraine, elle ne le sera pas, les subventions faisant défaut. Il a négligé sa carrière de comédien pour ce projet, ne s’est plus rendu à aucun casting et a fini par perdre son statut d’intermittent du spectacle. Son épouse, Anne, enseigne le français dans un collège et contribue seule aux besoins de la famille. Elle en a assez, le couple bat de l’aile, elle ne supporte plus la dépression de son mari. La crèche où va leur fille Miranda est en grève aussi son père doit-il la garder durant une journée orageuse. Il décide de lui raconter et de lui faire jouer la pièce durant ce laps de temps.



Le roman suit l’unité de lieu (l’appartement) et de temps (un jour), il n ‘y a pas de chapitre, mais cinq actes. Dans un texte plutôt confus qui mêle l’histoire racontée par la pièce, l’orage réel et surtout les incessantes jérémiades de David sur ses malheurs d’acteur et metteur en scène dépressif et incompris, on suit le déroulement de cette journée. Anne veut une discussion sérieuse le soir sur la passivité de son mari qu’elle ne supporte plus et La tempête préfigure l’orage qui éclatera à ce moment.



Je me suis ennuyée tout au long du livre, David ne m’a pas inspiré de compassion. Ce roman plaira peut-être aux férus de théâtre, mais il m’a juste assommée et donné l’impression d’une perte de temps. Mais j’ai vu que d’autres lecteurs l’ont beaucoup aimé et c’est tant mieux. Merci à Netgalley et aux Forges de Vulcain, maison d’édition que j’aime beaucoup, pour leur confiance.



#MatempêtePessanShakespeare #NetGalleyFrance !


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De si beaux uniformes

Merci aux éditions espace 34 et à Babelio pour cette pièce reçue à l'occasion de la dernière masse critique !

Pas sûr que je serai allée vers cette œuvre spontanément, mais le sujet et le traitement "théâtre" m'intéressait.



Au centre de cette pièce une question passionnante : l'habit fait-il le moine ? L'uniforme nazi est-il susceptible de déteindre sur l'acteur qui le porte ?

La séparation insidieuse qui s'installe entre les acteurs "jouant" les soldats nazis et ceux qui incarnent les déportés est intéressante.

D'autant que l'auteur l'entrecoupe de réflexions sur la mémoire et la transmission (ou non) du vécu familial de cette période.



On sent bien qu'Eric Pessan est familier du milieu. Son expérience apporte un côté réaliste bienvenu.

Mais je pense qu'il aurait pu aller un peu plus loin, notamment dans les ressentis des "prisonniers" et dans les tentions entre les deux groupes.
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Dans la forêt de Hokkaido

Julie, une adolescente de quinze ans, est en proie à des cauchemars terrifiants qui n'ont de cesse de la réveiller chaque nuit. Dans le dernier en date, elle se trouve être un jeune garçon, abandonné dans une forêt hostile, et submergé par une peur panique. A son réveil, elle réalise qu'elle est physiquement éprouvée par son rêve, aussi, quand ce dernier continue chaque nuit, elle comprend qu'elle doit chercher une solution si elle souhaite retrouver une vie normale.

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Il ne fait aucun doute pour elle qu'elle est reliée à cet enfant, et qu'elle ressent, comme lui, chacune des émotions qui le traversent. Mais, peut-elle l'atteindre à sa façon, lui transmettre sa force et ses pensées, le guider vers la civilisation ?

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Voilà un roman court et diablement efficace. Je me suis retrouvée totalement prise dans cette histoire, au point d'avoir de véritables coups de frayeur ! Je me suis tellement imprégnée des émotions de cet enfant, de sa peur puissante, de son sentiment d'abandon, que j'en ai eu les larmes aux yeux. J'ai ressenti la forêt avec les yeux de ce garçon, hostile, immense et sombre. La solitude, la faim, la soif, ont accompagné ma lecture.

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En parallèle, l'auteur dénoue petit-à-petit le fil qui relie les deux personnages. J'ai apprécié le passage, bien amené, sur le jugement empressé et les propos hargneux de tout un chacun face à certains évènements.

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Ce livre a beau être un roman jeunesse, il est tout de même éprouvant émotionnellement. C'est un roman empreint de beauté et de tolérance, réellement addictif. La plume de l'auteur est magnifique.

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En temps qu'adulte, j'aurais souhaité que l'auteur approfondisse davantage les personnages qui gravitent autour de Julie, les thématiques importantes qui sont soulevées, mais j'ai bien conscience que le format ne le permet pas.

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Dans la forêt de Hokkaido est sans conteste l'un des meilleurs romans que j'ai lu cette année, l'un de ceux qui m'a fait vivre une merveilleuse expérience de lecture.

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Ma chronique complète est sur le blog.
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La plus grande peur de ma vie

J'ai adoré ce roman, très rapide à lire.



Au début de l'histoire, je pensais que j'allais me retrouver face à des ados qui aiment se chamailler et se faire des blagues, se faire peur "pour rigoler". Mais le récit est rapidement devenu profond, et l'auteur a mis en avant la situation de l'un de ces personnages : il est harcelé à l'école.



Beaucoup peuvent se retrouver dans ce récit, parce qu'il existe beaucoup plus de victimes de harcèlement scolaire que vous ne le pensez.



Ce roman est à lire absolument, et à mettre entre les mains de collégiens et de lycéens pour les sensibiliser à propos du harcèlement, qu'ils en soient victimes, témoins, ou qu'ils soient les bourreaux.
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Thème : Aussi loin que possible de Éric PessanCréer un quiz sur cet auteur

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