Je me recueille dans le fond bleu
des images qui ont traversé tes yeux.
Elles pourraient être des figures féminines de Matisse
dans ses gouaches découpées.
Peut-être la branche de myosotis
que j'ai arrangée dans le vase ce matin.
Peut-être le film de Kieslowski
qui célèbre la liberté de la vie.
Peut-être un oiseau, une pierre,
un papier, un chemisier.
Ou peut-être cette lumière, presque une rivière,
si fragile dans mes yeux, quand les mots
brûlent comme des plaies dans la mémoire.
Graça PIRES, traduction du portugais par Francois-Michel Durazzo
Accepter de laisser entrer en soi la beauté, fermer les yeux pour fixer une image, un moment parfaits, c'est inventer une machine à voyager dans le temps et dans l'espace. Une fois qu'on a vécu cette expérience, on la recherche à jamais, comme le chercheur d'or qui trouve une pépite dans la rivière et remonte ensuite le cours de l'eau inlassablement, jusqu'à en trouver une autre.
Mais la beauté est toujours neuve, c'est son signe. Elle ne se répète jamais.
Catherine Pont-Humbert - Extraits de La Scène
LE TROIS DE CARREAU
Cette fameuse question indiscrète « à quoi penses-tu ? »
quand on a un air un peu pensif
ne me dérange plus comme autrefois
au contraire elle me satisfait
grâce aux possibilités qu’elle offre.
Je peux inventer différentes histoires
racontées avec conviction comme véridiques
je peux présenter la vérité comme douteuse
afin qu’elle ressemble à un mensonge
ou encore je peux découvrir
que je ne pensais absolument à rien.
Très rares, les heures de notre vie
où nous circulons
avec la transparence du verre.
Titos PATRIKIOS, traduction du grec par Marie-Laure Coulmin Koustsaftis