La sage femme arriva hors d'haleine et rien qu'à la voir, elle dit :
- Mais elle morte !
- C'est pas possible ! répondit la tante Aimée.
- Eh bien, regardez là, elle est violette, pour moi, c'est tout sûr, elle s'est étouffée au passage !
- C'est pas possible ! dit la grand-mère.
Elle prit par les pieds le minuscule corps et le secoua comme une montre qui vient de s'arrêter.
- Mon Dieu, mère, vous allez la tuer !
- Tu as entendu l'accoucheuse ? Morte, elle l'est déjà ! Alors, un peu plus, un peu moins !
Jamais on n'avait autant parlé de mort qu'autour de cette naissance.
A Eourres, dans les Hautes-Alpes, nul n'avait connu un tel courage chez ce petit être qui ne pesait que 750 grammes à la naissance . Sauvée in extrémis d'une mort certaine, la petite Laure, souffre douleur de sa mère Marlène, s'épanouie grâce à l' amour que lui portent son grand-père paternel et sa tante Aimée.
Qui aurait cru qu'une fillette âgée d'à peine un an, puisse sidérer son entourage en lançant " Bonjour la compagnie ! ", propos qu'elle entend à chaque visite du facteur. Qui aurait imaginé qu'à l'âge de trois ans, elle veuille apprendre à lire et qu'à six ans, mène seule un troupeau sur les collines.
La précocité de Laure ne cesse de surprendre le lecteur. Dotée de facultés inouïes , pratiquement imperméable aux épreuves qui jalonnent sa vie depuis sa naissance, on peut se demander si le regretté
Pierre Magnan n'a pas exagéré le cheminement exceptionnel de cette petite Laure que rien ne semble pouvoir arrêter pour assouvir sa soif d'apprendre. le récit authentique d'une fille de paysans, bravant le froid, la faim, le rude labeur de la terre, les blessures du corps et de l'âme, capable de soulever des montagnes pour étudier sans relâche.
Après avoir grandement apprécié "
La maison assassinée " du même auteur,
Laure du bout du monde m'a littéralement subjugée.
Un roman puissant et poignant. Les termes ne manquent pas pour les éloges que j'attribue à ce récit. On ne peut qu'admirer la bravoure de Laure qui nous met la larme à l'oeil plus d'une fois. Pierre Mangnan décrit avec justesse une campagne qu'il connait bien et moults détails du labeur de cette période, y compris la culture de lavande, mais surtout la hargne d'une Laure qui, dès le début, nous entraîne loin, de plus en plus loin, jusqu'au bout du monde...
J'ai tellement apprécié ce roman emprunté à la médiathèque de ma ville, que je compte bien l'acheter, c'est dire !