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EAN : 9782130833857
Presses Universitaires de France (13/09/2023)
4.3/5   5 notes
Résumé :
À l'été 1794, une fois Robespierre et ses proches éliminés, la Convention dite « thermidorienne » change d'orientations politiques. Persistant à siéger à gauche, les derniers Montagnards, stigmatisés sous le sobriquet de « Crêtois », mènent d'ultimes combats pour défendre les idéaux d'une République démocratique et égalitaire - entre autres la Constitution de 1793 - face à la montée en puissance des députés de la « réaction ». Cette attitude, jugée extrémiste par l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Et pourtant que la Montagne était belle !

J'ai emprunté ce titre à Michel Biard dans un de ses textes écrits dans le journal L'l'Humanité.

Un ouvrage très intéressant de cet auteur sur la vie et la mort des derniers Montagnards en 1794-1795.

Non ce n'est pas l'histoire de bûcherons dans le nord du Canada (!) mais celle des hommes membre de la Montagne : un groupe politique de la Révolution française à la Convention nationale (1792-1795).

Que sont-ils devenus, après l'arrestation et l'exécution de leurs collègues le 10 et 11 Thermidor an II, ces hommes fidèles à leur groupe parlementaire que l'on nomme "Les Crêtois" car de la Montagne il ne reste plus que la crête…

Michel Biard aborde aussi une réflexion sur des questions toujours sensibles :
-qu'est-ce que la radicalité à gauche ?
- que signifie la fidélité en politique ?
- quel rôle peuvent jouer des dénonciations dans la perte d'une réputation politique ?
- la question de la tolérance ou non d'une opposition politique
- les risques impliqués par un engagement politique : sacrifier sa vie pour la Liberté.

Le plan de l'ouvrage :
- Chapitre 1 : L'érosion de la Montagne
- Chapitre 2 : Prendre encore la parole depuis le sommet de la Montagne
- Chapitre 3 : Les derniers Montagnards : des cibles à abattre
- Chapitre 4 : Les purges politiques au sein de la Convention
- Chapitre 5 : La Liberté ou la mort
- Chapitre 6 : "Il a osé marcher sur la crête de la Montagne sans que sa tête ait tourné"


Dans le premier chapitre, l'auteur pose les définitions du mot Montagne (symbole de liberté au XVIIIe siècle), procède à une comptabilisation de ces Montagnards avant et après Thermidor.

Dans le deuxième chapitre, il narre la situation politique :
Le 22 brumaire (12 novembre 1794), les comités suspendent les séances du Club des Jacobins.
Ce club était un point d'appui essentiel, il a servi de relais auprès des sans-culottes.

Mais l'absence de soutien à Robespierre dans la nuit du 9 au 10 thermidor a nuit à l'image du Club, et il est moins fréquenté par les représentants à la Convention. Alors sa fermeture se provoque pas de réactions…

Les Montagnards sont discrets lorsque deux mesures majeures de 1793 sont supprimées :
- les décrets de Ventôse : liés à Saint-Just et nuisant à la propriété foncière
- le Maximum : la limitation des prix.

Mais ils s'opposent aux nouvelles orientations de l'Assemblée (comme le projet de grande police de Sieyès) et réclament l'application de la Constitution de 93;

Pendant que les Conventionnels (les girondins exclus ont été rappelés) créée une commission chargée de préparer une nouvelle Constitution sur "le gouvernement des meilleurs" (discours de Boissy d'Anglas)

Les derniers Montagnards deviennent des cibles à abattre, dans le troisième chapitre ; les Conventionnels adopte le principe d'une Commission chargée de procéder à l'étude des lettres de dénonciation des représentants en mission.

Une amalgame des faits et des positions politiques, une exagération entraînent des assimilations à Carrier et ses carnages en Vendée, écartent volontairement certains membres, comme Fouché, Barras ou Fréron et permettent l'anéantissement de la Montagne au sein de la Convention.

L'envahissement de la Convention les 1er et 2 prairial et la mort du député Féraud confirment les Conventionnels dans leur volonté d'exterminer les Montagnards et la procédure de "mise hors la loi" comme arme de dissuasion est rétablie : 74 Montagnards sont écartés.

Les 21 et 22 thermidor a lieu l'arrestation des 9 derniers Montagnards.

Alors que la nouvelle Constitution impose 2/3 d'anciens conventionnels, elle exclut les Montagnards qui sont décrétés d'accusation ou d'arrestation…

Les Thermidoriens excluent donc les deux extrêmes (royalistes et jacobins) afin de gouverner à "l'extrême centre" (voir Pierre Serna sur cette notion).


Que deviennent ces derniers Montagnards ?

Ils sont exilés à l'île d'Oléron, au fort de Ham dans la Sommes, au Mont Saint-Michel, à Besançon ou à Sedan dans des prisons ; leur transfert se fait dans la confusion.

Leurs conditions de détention sont très difficiles : j'ai été particulièrement émue par ce sous-chapitre où les blessures, les affres de l'enfermement sont bien décrites…

Enfin Michel Biard étudie les témoignages : certains très fiables comme ceux de Baudot, Choudieux, Levasseur. Ils dénoncent le rôle joué par le Comité de Législation qui effectue un tri politique, en écartant certains représentants comme Barras ou Fouché…

Le suicide collectif des Martyrs de Prairial qui se percent le coeur en se passant le stylet après leur condamnation à mort. Les blessés et mourants sont exécutés…

L'étude de la postérité est très intéressante avec le destin (un peu sommaire) des enfants des Montagnards : comme Auguste Blanqui, fils d'un girondin, Eugène Delacroix, fils de Montagnard.

Mais aussi Louis-Eugène Cavaignac, qui réprime dans le sang la révolution de juin 1848...

Pour finir Michel Biard liste les brumes des Montagnards en citant les mesures et actions issues des idées montagnardes :

Le bel hommage de François Sicard (en 1913) dans le choeur du Panthéon aux représentants du peuple qui, en dépit de leurs divisions fratricides et de trois années marquées par les violences, parvinrent à abattre un travail colossal et à élaborer une législation dont les héritages restent omniprésents dans notre démocratie actuelle : l'enseignement élémentaire, obligatoire, gratuit, laïque, accessible à tous les enfants masculins et féminins ; la création des "grandes écoles" (Ecole Normale supérieure, Polytechnique, Langues Orientales) ; les écoles centrales qui ont ouvert la voie aux lycées créés sous le Consulat ; la création des musées ; l'unification des poids et mesures, le calendrier républicain…

Il est toujours très agréable de lire Michel Biard car son style est clair, sourcé, et dynamique !

Un ouvrage vraiment très intéressant, érudit et qui m'a fortement ébranlée.
Je ne savais pas que l'exclusion et les procès des Crêtois étaient basés sur des lettres de dénonciation reçues et examinées par le Comité de Législation ! Quelle honte !

Cela démontre la volonté de la Convention de s'auto-amnistier de ses propres responsabilités dans le vote des décrets qui ont permis la répression contre les adversaires de la Révolution...
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Hier, des femmes et des hommes se sont fait tuer pour obtenir des droits et le suffrage universel, et tout un chacun comprenait comment un suffrage restreint favorisait les dominants ; aujourd'hui, avec la progression de l'abstention dans les milieux dits "populaires", le suffrage semble redevenu de facto censitaire sans même besoin d'une mise en place officielle. Tant de douleurs et de sang versé pour en arriver là ?
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L'exagération qui vient de la folie plus ou moins furieuse, le vin qui rend fou ou au moins enclin à la violence, ce sont autant de clichés aussi éculés que pourtant pérennes, puisque repris lors d'autres révolutions et soulèvements populaires aux siècles suivants. Des sans-culottes armés et des "furies de guillotine" de la Terreur aux "pétroleuses" de la Commune de 1871 puis aux "casseurs" du XXIe siècle, d'aucuns persistent à analyser les "violences populaires" avec des idées reçues qui ont décidément une utilité durable quand il s'agit de stigmatiser des forces de gauche.
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"Mon père éprouvait dans son exil un vif regret de voir l'histoire de la Révolution défigurée par l'esprit de parti ; "
Francis Levasseur parlant de son père René Levasseur de la Sarthe
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Si la Révolution française a fait naître la gauche, mais aussi la droite, par l'émergence d'un "côté gauche" et d'un "côté droit" au sein de l'Assemblée constituante (1789-1791) puis de l'Assemblée législative (1791-1792), ce sont les années de la Convention nationale (1792-1795) qui constituent un indéniable premier temps fort pour "la gauche" en France.
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