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EAN : 9782701164977
688 pages
Editions Belin (01/10/2019)
4.35/5   13 notes
Résumé :
En 212, l'empereur Caracalla accorde la citoyenneté romaine à tous les habitants libres de l'Empire. Cette mesure couronne une évolution séculaire vers un empire politiquement unifié et culturellement universel.
Près de trois siècles plus tard, l'avènement du roi ostrogoth Théodoric marque la fin d'un processus au terme duquel les les provinces occidentales et l'Italie elle-même ont échappé à l'administration impériale. En Orient, Constantinople est la capita... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Les derniers siècles de l'empire romain, ou sa chute, sont un sujet d'actualité au début du XXI°s. On se plaît à chercher des échos, des reflets, des exemples de notre propre fin dans celle de cet empire occidental, et les plus politiquement corrects parmi les "penseurs" aiment à rappeler que les Barbares apportèrent un sang neuf à Rome, qui, dans un louable esprit d'ouverture, étendit à tous la citoyenneté, etc ... Mme Sotinel va même jusqu'à mentionner en bibliographie un Ministre de la Culture d'on ne sait plus quel gouvernement, Aillagon, qui voyait dans les Barbares, à qui une exposition était dédiée, les figures des Migrants. Le risque de l'anachronisme est donc accru par l'idéologie et la propagande, comme d'habitude.

L'ouvrage, paru dans l'excellente collection "Mondes anciens" de Belin, évite beaucoup d'écueils de ce genre en se bornant à une histoire strictement politique, militaire et institutionnelle, de ces trois siècles. En cela, le travail est honnêtement fait, mais je me suis demandé parfois ce que Mme Sotinel ajoutait aux travaux de Michel de Jaeghere, d'André Chastagnol ou de Paul Veyne. On trouvera de magnifiques et nouvelles illustrations, stèles, monnaies, médailles expliquées, car l'auteur ne néglige pas les apports de l'archéologie récente ; ou par exemple ce très beau commentaire du mausolée de Galla Placidia à Ravenne : l'iconographie a été choisie pour servir de support à de passionnantes observations détaillées, qu'on aimerait rencontrer plus souvent. Il faudra recourir pour cela à Ranuccio Bianchi Bandinelli ("Rome, la fin de l'art antique") ou à Bernard Andreae ("L'art romain, d'Auguste à Constantin"). Quelques passages interprétatifs sont réellement bien venus, comme cette mise en relation évidente mais inattendue entre l'extension de la citoyenneté à tous les hommes libres de l'empire, et celle des persécutions religieuses. La mondialisation des droits s'accompagne de celle des devoirs. Mais il est rare que l'auteur se départisse de sa réserve universitaire, vertu qui devient une forme de soumission silencieuse à la doxa et se traduit par un récit historique qu'on peut trouver partout.

De Robert Turcan sur Constantin, aux livres innombrables sur Julien l'Apostat, jusqu'aux ouvrages cités plus haut, le lecteur risque d'avoir l'embarras du choix s'il s'intéresse à cette période. Ce beau livre se recommande particulièrement comme oeuvre de synthèse bien faite, mais pas très innovante.
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Ce tome de la collection sur les mondes anciens n'est pas celui que j'ai préféré. La période est très complexe et cela complique les choses quand on cherche à donner une vision un peu macro des événements. C'est un ouvrage essentiellement consacré à la dimension politique, bien que la religion soit aussi très présente, mais toujours en lien avec cette dimension politique. le dossier de l'historien à la fin permet de recentrer le discours sur quelques éléments centraux comme la place des barbares dans l'Empire, celle du christianisme et insiste sur la notion de continuité plus que de décadence de l'Empire. C'est toute la notion d'Antiquité tardive qui est mise en avant.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
(249, édit de persécution des chrétiens par l'empereur [Trajan]-Dèce.)
Peu d'historiens croient aujourd'hui que l'édit de Dèce fut un acte de politique religieuse, expression anachronique pour le monde romain (si tout acte politique avait une ou plusieurs dimensions religieuses, la religion au sens moderne du terme n'était pas une catégorie autonome, ce qu'elle ne devint que bien après la fin de l'Empire romain). On a renoncé à comprendre l'édit de Dèce comme une mesure spécifiquement destinée à ranimer le culte des dieux et à arrêter l'irrésistible progression du christianisme : le culte des dieux était très vivant, il n'avait nul besoin d'être revivifié et l'influence du christianisme était encore très marginale.

L'édit de 249 ne fut donc pas un acte de "politique religieuse", mais un geste religieux de politique. Pour autant, il ne fut pas un simple décret de routine : la centralisation de la décision et le caractère universel de la célébration religieuse étaient profondément originaux. On peut y voir une conséquence de la Constitution antonine* : si tous les habitants de l''Empire étaient citoyens romains, l'édit traditionnel que prenait autrefois le Sénat pour ordonner des sacrifices devait désormais être adressé à tous les habitants libres de l'Empire. Le conservatisme même de Trajan-Dèce (imiter les édits du Sénat) l'aurait conduit à une innovation (instituer un geste religieux commun dans tout l'Empire). Que l'empereur prît la décision pour les cités de l'Empire et imposât une modalité commune (jour fixé, sacrifice, certificats de sacrifice) à une manifestation de loyalisme représentait un geste inédit. Ses conséquences allaient être importantes pour les chrétiens et pour les successeurs de Trajan-Dèce.

* Constitution antonine : édit de l'empereur Caracalla, qui en 212 accordait la citoyenneté romaine à tous mes habitants libres de l'Empire (pp. 20-21).

p. 132
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La politique de réforme systématique de Julien ne s'enracinait pas seulement dans la violente antipathie qu'il vouait à la maison constantinienne, et plus particulièrement à Constantin, assassin de sa propre famille. Elle était aussi fondée sur une analyse des défauts du gouvernement constantinien, analyse que Julien avait eu le temps d'affiner pendant ses années de formation....
Pour Julien, l'erreur fondamentale des constantiniens était d'avoir rompu la paix des dieux en portant atteinte au culte des divinités gréco-romaines qui avaient protégé Rome depuis sa fondation. Il ne comprit pas à quel point sa propre sensibilité religieuse et philosophique était marquée, dans tous les aspects de ses efforts de restauration des cultes helléniques, par le modèle constantinien. L'édit de tolérance au début du règne, la protection impériale accordée sous forme de restitution des biens et de dons, les mesures envisagées pour limiter les privilèges des uns et augmenter ceux des autres : en moins de deux ans, Julien utilisa presque la totalité des outils de politique religieuse que Constantin avait mis une décennie à élaborer en faveur des chrétiens. Julien alla moins loin que Constantin et ses fils en n'interdisant rien au culte chrétien, mais il alla plus loin en les excluant de certaines fonctions. Le point commun, c'était bien de légiférer à l'échelle de tout l'Empire pour réguler les pratiques religieuses.

p. 362
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Dès l'automne 249, quelques semaines après le début de son règne, Dèce, qui était alors à Rome, publia un édit demandant que, partout dans l'Empire, des sacrifices fussent offerts aux dieux en l'honneur des empereurs (lui et son fils Herennius). (...)
Le texte de l'édit est perdu, mais une série de documents permet d'en reconstituer une partie : dans toutes les villes et tous les villages, des autels devaient être dressés, des commissions nommées, et tous les citoyens devaient venir participer au sacrifice et consommer la viande sacrificielle, soit à un jour fixé, soit avant une date limite. Ce geste accompli, ils recevaient un certificat attestant du sacrifice (plusieurs dizaines de ces certificats ont été conservés parmi les papyrus égyptiens, mais la mesure ne concernait pas seulement l'Egypte).

pp. 130-131
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L'activité de Dioclétien et des tétrarques en matière de culte représenta une étape nouvelle. Jamais au cours de son long règne l'empereur n'adopta le culte de Sol [Sol Invictus, le dieu soleil invaincu d'Aurélien] ; il choisit comme protecteurs des empereurs et de l'Empire Jupiter et Hercule. Là où Aurélien et Probus avaient souligné par le mot de compagnon (comes) la proximité entre l'empereur et la divinité, la tétrarchie cultiva l'idée d'une filiation divine des empereurs. Le culte rendu aux empereurs n'était plus seulement dû à leur "genius", l'étincelle divine qui réside en tout être vivant, mais à la fois à leur dieu protecteur et à leur personne, brouillant de manière nouvelle les frontières entre divinité et humanité. La transformation du rituel impérial accentua la sacralisation de leurs personnes. A la fin du IV°s, Ammien Marcellin rappelait encore comment "Dioclétien Auguste le premier, à la façon d'un roi, et encore étranger, institua d'être adoré, alors que nous savons qu'auparavant les princes étaient toujours salués de la même façon que les gouverneurs." Cette adoration était un protocole de présentation au prince qui consistait à conserver le silence, à avoir les mains voilées, à se prosterner jusqu'au sol devant lui et à baiser le bord de son vêtement de pourpre, couleur exclusivement réservée à l'empereur. La distance incommensurable entre l'empereur et le reste des hommes était aussi manifestée dans l'architecture des espaces de réception que l'on aménageait dans les résidences impériales.

p. 188-189
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L'histoire politique du III°s est riche de rebondissements et d'effets de rupture : l'absence de continuité dynastique à partir de la mort de Sévère Alexandre, l'instabilité du pouvoir impérial à partir de celle de Gordien, l'inadaptation du dispositif militaire aux nouvelles menaces frontalières à partir de 251 sont autant d'éléments qui ont incité les historiens, depuis très longtemps, à identifier le III°s à une "crise de l'empire romain" au cours de laquelle sombra l'Empire conquérant et dominateur des Antonins. Pour les Lumières, le III°s était le moment d'une brutale transition entre le "Haut-Empire", période encore lumineuse d'une Antiquité qu'éclairait le souvenir des institutions républicaines et de la civilisation grecque, et le "Bas-Empire", âge déjà obscur d'empereurs despotes empreins d'obscurantisme chrétien, incapables de défendre la civilisation contre les invasions de barbares sauvages. Pour l'histoire ecclésiastique, la période des "grandes persécutions" mettait en évidence l'incompatibilité entre l'Empire classique et la religion montante. Afin de mieux comprendre cette période à l'histoire politique troublée, il faut s'interroger sur le concept même de crise qui a longtemps dominé les études sur ce III°s.

Introduction au chapitre V, "La crise du III°s", p. 197.
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Table ronde de la revue L'histoire, proposée par le Conseil scientifique
Modération: Valérie HANNIN, historienne et directrice de la rédaction de L'Histoire
Intervenants: Anne CAROL, professeure à l'université d'Aix Marseille, Joël CORNETTE, professeur émérite à l'université Paris 8-VincennesSaint-Denis, Véronique FOURNIER, ancienne présidente du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, cardiologue, Claire SOTINEL, professeure à l'université Paris-Est Créteil
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