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Renée Vavasseur (Traducteur)Marcel Duhamel (Traducteur)
EAN : 9782070376186
320 pages
Gallimard (11/01/1985)
4.12/5   82 notes
Résumé :
Un livre précurseur sur la question noire aux États-Unis. Un nègre ne cesse de brailler, or il est jeune, il est fort, il a une Buick, un bon emploi sur un chantier naval, une fiancée à peine noire. Il pourrait être tranquille, heureux même, s'il acceptait de rester à sa place. Mais il veut être reconnu pour un homme comme les autres. Au premier incident qui l'oppose à une Blanche, on l'accuse de viol, il n'échappe au lynchage que pour être envoyé à la guerre : c'ét... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Il est pas jouasse, le Bob.
Le problème c'est qu'il se lève pas content, va au taf pas content et semble avoir adopté cette humeur comme composante unique et durable de tout son être.

Faut dire qu'être noir en Amérique, en 1943, (même si la date importe peu au regard de certains esprits, voir dirigeants chagrins essaimant encore et toujours cette petite planète) n'est pas franchement gage de plénitude absolue.

Alors oui, Bob a un travail.
Alors oui, Bob semble être à la colle avec une régulière même si le doute reste permis.
Alors oui, de par son boulot, Bob est un heureux sursitaire en ces temps guerriers.
Seulement voilà, tout ces petits bonheurs du quotidien ne suffisent pas à lui voiler la face : il est un moins que rien pour les blancs, tout au plus un fantasme finalement repoussant pour les blanches et ça, ça commence sérieusement à entamer son quota de patience à la jauge frôlant dangereusement la panne sèche. Il s'fait d'la bile, Bob, un truc vraiment pas fait pour réaligner tous ses chakras.

Photographie d'une époque pas si lointaine et toujours lamentablement d'actualité, ce Chester Himes détonne de par son phrasé argotique et la justesse de ton usité pour souligner les affres sans fond d'un être miné au dernier stade, rongé jusqu'à l'os par une rancoeur tenace et inaltérable.

Difficile, pour ce sanguin, de courber l'échine journalièrement.
Compliqué d'encaisser la servilité de ses proches.
Inimaginable de se laisser salir, insulter, avilir sans piper mot.
Bob est une cocotte minute qui n'attend qu'une seule chose, l'ultime persiflage pour laisser exploser toute sa rage.

S'il braille, chantez-lui une berceuse, on sait jamais, sur un malentendu...
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1943, Californie. Deux ans après Pearl Harbor, les Etats-Unis sont pleinement engagés dans la seconde Guerre-Mondiale. C'est pourtant le cadet des soucis de Bob. Lui il a sa propre guerre à mener. Son problème à Bob c'est qu'il est noir. Traduisez toujours sur le qui-vive, ravalant sa fierté à longueur de journée et constamment soumis à la soi-disante supériorité des blancs. L'esclavage a été aboli, oui, la connerie, non. La ségrégation bat son plein et les affronts des petits blancs prétentieux sont le quotidien quand on est noir.
A bien y réfléchir, le problème de Bob ce ne serait pas plutôt les blancs ?

Le tour de force de ce livre c'est l'immersion. Chester HIMES ne vous raconte pas l'histoire de Bob il fait de vous un homme noir aux Etats-Unis dans les années 40. le lecteur est malmené, bousculé, persécuté, dans sa vie, dans ses rêves. Partout, tout le temps. L'ambiance est anxiogène, inconfortable. La peur, le stress omniprésents. Quand on est noir c'est 24h/24 et les persécutions aussi. Pas de répit, pas d'issue de secours.
N'espérez pas vivre, au mieux vous pourrez survivre. Comment ? En vous aplatissant jusqu'à ne plus pouvoir vous regarder dans une glace sans que la honte ne vous étreigne. Ne comptez pas être accepté, au mieux vous serez toléré tant que vous saurez rester à votre place. Bob sait que les blancs gagnent toujours alors il a essayé de rentrer dans le moule. Mais on ne va pas contre sa nature et celle de Bob c'est d'être un homme à part entière quoi qu'il en coûte.

Ce livre est un cri d'indignation, de rage et de fierté. Il n'est pas question de combat idéologique, de théorie, ou de réflexion sur le manque de fondement de tout ceci. Rien n'est intellectualisé, l'injustice on la ressent dans les tripes, dans les mâchoires contractées, dans les poings serrés, dans la gorge nouée et dans l'envie de hurler qui fait battre les tempes.
Quand les choses en arrivent à ce degré d'absurdité, de cruauté et de non-sens il n'est même pas besoin d'en appeler à la raison et aux arguments. L'évidence créée le malaise jusque dans nos veines. Essayez et vous verrez.

PS : si vous voulez profitez pleinement de votre lecture zappez la quatrième de couverture beaucoup trop loquace…
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Les États-Unis, début des années 40 : la ségrégation, le racisme, la guerre, l'antisémitisme, la violence, l'injustice, tout y est. Tout pour préparer un bon cocktail bien explosif et c'est réussi.

C'est une histoire presque banale, celle d'un Noir, Robert Jones, chef d'équipe dans un chantier naval, qui vit dans un monde de Blancs, fait pour les Blancs, pensé pour les Blancs.
Le malaise de Bob, palpable à chaque page du roman, paraît au début presque démesuré. À l'instar de sa petite amie Alice, métisse à la peau très claire, on se dit qu'il devrait composer, faire avec, réussir à faire son chemin malgré tout ça, malgré les embûches semées volontairement ou pas un peu partout sur son chemin par tous les Blancs bien pensants et sûrs de leur bon droit. Et pourtant, comme on le comprend Bob, c'est incroyablement difficile ce qu'on lui demande, inhumain même. Pourquoi devrait-il composer après tout ? Pourquoi devrait-il se soumettre aux Blancs pour avoir le droit de vivre sa vie ? Pourquoi accepter de ne pas dîner dans un restaurant réservé aux Blancs ? Pourquoi accepter de ne pas pouvoir donner d'ordres à un subalterne blanc ? Pourquoi accepter d'être sans cesse rabroué, repoussé, évincé, surveillé, de devoir faire ses preuves, de montrer qu'on peut exister sans déranger, dans le respect des règles des Blancs et sans pouvoir attendre la moindre égalité de traitement ?

Alors quel choix Bob va-t-il faire ? Va-t-il ruer dans les brancards, tenter de renverser l'ordre établi, se rebeller ou va-t-il choisir d'écouter sa raisonnable et raisonnée petite amie pour rentrer dans le rang ? À vous de le découvrir mais avec Chester Himes on n'est pas dans un roman d'Enid Blyton, essayez seulement d'échapper cinq minutes à la réalité et vous verrez à quelle vitesse elle vous rattrape.
Un roman poignant à lire de toute urgence si ce n'est déjà fait ;-)

N.B. : Carton Rouge pour l'édition Folio que je détiens qui dévoile l'intégralité de l'histoire sur la quatrième de couverture.
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Robert Jones est jeune, il a un bon boulot, une petite amie dont il est fou et s'est enfin payé la voiture de ses rêves, bref tout irait pour le mieux si Robert Jones n'avait pas un gros problème. Un seul mais malheureusement, par l'entremise de celui-ci, c'est tous les problèmes du monde qui pèsent lourdement sur ses épaules. Son souci a Bob c'est qu'il est noir. Noir dans une Amérique où la ségrégation ne constituait pas un un problème moral et encore moins un délit, au contraire, aux yeux d'une majorité de blancs.
Malgré cela, Bob Jones peut être heureux d'une chose : il vit en Californie et pas sous la ligne Mason-Dixon mais ça, même s'il en a conscience, ça ne change pas grand chose pour lui, toutes ses rencontres avec les blancs se finissent immanquablement par un sentiment de haine exacerbée et des envies de meurtres qu'il n'est jamais loin de réaliser. Ça l'obsède d'ailleurs tellement que toute sa vie finit par ne plus tourner qu'autour de ça, être un homme noir qui veut garder sa dignité face à des blancs qui ne pensent qu'à l'asservir.
Arrive un moment où on pense fatalement que s'il a raison sur le fond, la paranoïa dont il semble faire preuve à chaque instant aggrave son sentiment d'être traqué, méjugé, rejeté et humilié. Mais la perte de son boulot, les passages à tabac et les "notre seule table libre est malheureusement celle située au fond de la salle entre la cuisine et les WC, voilà, fallait pas faire la réservation par téléphone, si on avait su tout de suite que vous étiez noir, on vous aurait refoulé direct" des restaurants un poil chics dans lesquels il tente d'impressionner celle dont il aimerait faire sa femme nous montre que finalement, tout grande gueule et plein de morgue qu'il est, Bob Jones n'est pas loin du compte quand il nous assure que l'Amérique entière le déteste pour une bête histoire de pigmentation cutanée. Dommage qu'en sachant cela, il n'ait pas su en tirer la leçon et ainsi éviter de se frotter à une blanche aguicheuse qui n'aura aucun mal à faire de sa vie un enfer, pire encore que ce qu'il croyait déjà vivre au quotidien.

Chester Himes qui rejetait l'étiquette d'écrivain noir nous livre pourtant avec S'il braille, lâche-le..., un récit pile dans la grande lignée des prestigieux "écrivains noirs" : Toni Cade Bambara, Iceberg Slim, Ralph Ellison, Richard Wright et autres magnifiques Gil Scott-Heron, et, derrière son personnage de sympathique effronté, c'est tout le racisme des années 40-50 qu'il dépeint (cette précision chronologique uniquement parce que Chester Himes publie ce livre en 1945, mais il aurait pu l'écrire aujourd'hui qu'il n'aurait sûrement pas eu grand chose à retoucher) avec une certaine virtuosité et beaucoup de désespoir, ne se targuant pas de trouver, ni même de proposer une solution à cette haïssable situation à laquelle il semble n'y voir qu'une impasse, il conclut au contraire sur une note encore un peu plus décourageante un livre déjà bien sombre mais si cruellement réel.
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L'un des livres parmi les plus puissants sur la discrimination . Un ouvrage coup de poing , que ceux qui votent le pen devraient lire pour comprendre ce que l'exclusion d'autrui fait comme mal . Himes est un auteur trés important , qu'il fautdécouvrir dans son intégralité . Sa prose est sans pitié et prend aux tripes le lecteur pour ne plus le lacher durant toute cette histoire que l'on devine trés réaliste . Un chef d'oeuvre .
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Être Noir n'aurait pas dû être un secret pour moi mais je l'avais appris d'une autre façon. J'avais appris le même baragouin que les Blancs. Tous ces boniments à propos de la liberté, de la justice et de l'égalité... Tous les hommes sont nés égaux... Tout être né aux États-Unis est un citoyen... J'avais appris cela dans les mêmes livres, dans les mêmes écoles que les Blancs. J'avais appris l'hymne aussi : "... à travers le pays de l'homme libre et la patrie du brave..." Moi aussi, je pensais que Patrick Henry était un héros quand il s'était dressé pour dire : "Donnez-moi la liberté ou la mort !" tout comme les gosses blancs qui avaient lu son histoire. J'étais un admirateur de Charles Lindbergh étant gosse, et je pensais que George Washington était le père de notre pays -- aussi longtemps que je m'étais imaginé avoir un pays.
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Donc, ce n'était pas parce que Marge était blanche ; c'était la manière dont elle s'en servait. Elle portait une pancarte devant elle, aussi large que la place de l'Hôtel-de-Ville : "Arrière, nègres, je suis blanche !" Et sans avoir à dire un mot, elle parvenait à faire croire à tous les Blancs qu'ils devaient la défendre contre les violeurs noirs. Ça la rendait doublement dangereuse parce qu'elle pensait aux Noirs. Je m'en étais aperçu tout de suite, la première fois que je l'avais vue. Elle voulait qu'ils lui courent après. Elle attendait cela comme son dû. Je l'imaginais les excitant avec son corps, exhibant ses cuisses et sa poitrine nue. Puis les faisant lyncher ensuite parce qu'ils avaient regardé.
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"Ainsi, moi, par exemple, j'ai continué. J'ai un boulot de chef d'équipe dans un chantier naval. Je suis supposé commander à un certain nombre d'ouvriers. Mais j'ai peur de demander un travail quelconque à une femme blanche. Il lui suffit de dire que je lui ai manqué de respect pour qu'on me renvoie."
Leighton avait l'air troublé. "Est-ce possible ? il a demandé. Je n'imaginais pas que les relations entre Blancs et Noirs étaient si tendues dans l'industrie.
(...)"
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C'est à ça que je pensais en rigolant comme un fou; et je pensais que pendant toute ma vie j'avais eu peur des Blancs parce qu'ils étaient blancs et que c'était du plus haut comique de découvrir que les Blancs avaient peur de moi aussi, parce que j'étais noir.
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J’ai franchi la porte et me suis arrêté. Le grand blond a relevé la tête au même moment et nos yeux se sont accrochés. Lentement, il a tendu la main vers un marteau à tête ronde sur son établi. C’est à ce moment là que j’ai décidé de le descendre de sang-froid sans lui laisser aucune chance. Qu’est ce que je venais foutre la à le provoquer ? Je songeais. Pourquoi est-ce que je voulais me battre avec lui ? Je voulais crever ce bon dieu d’enfant de salaud et continuer à vivre. Je voulais qu’il se sente aussi épouvanté et impuissant et menacé que moi, chaque vacherie de matin que Dieu fait. Je voulais qu’il sache quel effet ça fait de se voir mourir sans rémission ; ce que ça fait de regarder la mort arriver, de savoir qu’elle arrive et qu’il n’y a rien à faire, rien d’autre qu’à s’asseoir et encaisser, comme il fallait que j’encaisse de Kelly, de Hank, de Mac et de cette salope, parce que personne ne viendra l’aider, personne ne pourrait l’arrêter, personne n’y pourrait rien .
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« La reine des pommes », de Chester Himes, c'est à lire en poche chez Folio.
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