Huit monologues de femmes a été écrit en 2002 (j'ai eu un mal fou à trouver l'info, vu que Zulma ne l'indique nulle part, ce qui m'énerve) par le metteur en scène tadjik
Barzou Abdourazzoqov, que je ne connaissais absolument pas avant de tomber sur ce livre en bibliothèque. le titre en russe, c'est plutôt "Confessions", et vu la nature de ces monologues, il est bien plus adapté que sa traduction française. Seulement, on n'a pas forcément eu tort chez Zulma d'utiliser le terme "monologue", qui renvoie au théâtre. Il se trouve que ça ressemble beaucoup à des nouvelles, mais que ces huit textes forment un ensemble dramaturgique : bref, c'est bel et bien une pièce de théâtre, qui a bel et bien été jouée sur scène et continue à l'être, contrairement à ce qu'on pourrait croire à la lecture.
Je parlais de la ressemblance avec des nouvelles. En effet, j'ai trouvé ici pas mal de résonances avec les recueils de nouvelles de
Bulbul Sharma, ou encore avec
Comme tous les après-midi de
Zoyâ Pirzâd, par exemple. Mais je n'y ai pas retrouvé le même charme, ni la même émotion. Ce sont pourtant huit confessions de femmes qui ont été marquées par la vie, certaines plus que d'autres. Les unes sont des épouses et des mères de famille désabusées dans une société misogyne, l'une est mendiante et oblige ses enfants à mendier, une autre se prostitue, une autre, plus jeune, a subi un viol collectif, le rejet de la société et a sombré dans l'alcool. Ce sont ces trois-là qui d'ailleurs se montrent les plus confiantes en la vie, s'y accrochant plus que les autres, qui elles ont baissé les bras. Ce qui fait un peu cliché, maintenant que j'y pense.
Le souci, c'est que ces confessions sont trop courtes pour que les histoires de ces femmes soient approfondies, et trop longues pour en faire un bref instant méditatif . On jette un oeil rapide sur elles, et puis on passe à l'histoire d'une autre, et encore une autre. Et puis je ne suis pas une grande adepte de la forme en monologue. Ce qui passe bien dans le cadre de la nouvelle perd en intensité, à mon sens, dans cette confrontation des personnages avec le public. Scéniquement, j'avoue que je ne vois pas bien ce que ça peut donner de particulièrement intéressant. On est à une époque parfois difficile à cerner (une des femmes raconte que pendant sa grossesse, vingt ans auparavant, elle voulait absolument boire du jus d'un fruit inconnu qui se révélera être un ananas, c'est pourquoi je me demande quand se déroule son histoire), dans un espace neutre, qu'on ne peut pas identifier et d'où surgissent ces femmes un instant, un bref instant où elles se livrent en toute intimité. Il y a bien un jeu avec le public, ces huit femmes s'adressent directement à lui, s'inquiètent parfois d'être entendues par d'autres personnes, mais rien d'autre. Je l'avoue, ça ne m'a pas semblé "d'une surprenante modernité" comme les éditions Zulma le proclament. Je crois avoir lu plus original, plus "moderne" et plus "surprenant" comme pièce de théâtre.
Voilà, je ne suis pas emballée plus que ça par la forme dramaturgique, et pas tellement plus par le fond ; je n'ai pas eu l'impression de pouvoir les approcher tant que ça, ces huit femmes, tout simplement.
Challenge Théâtre 2020