Je me laisse boxer jusqu’à l’épuisement , jusqu’à ce que mon cerveau se vide et que mon corp s’efface.
𝚃𝚘𝚞𝚝 𝚕𝚎 𝚖𝚘𝚗𝚍𝚎 𝚊 𝚕'𝚊𝚒𝚛 𝚑𝚎𝚞𝚛𝚎𝚞𝚡. 𝙻𝚊 𝚖𝚎𝚛 𝚎𝚜𝚝 𝚋𝚎𝚕𝚕𝚎. 𝚀𝚞'𝚎𝚜𝚝 𝚌𝚎 𝚚𝚞𝚎 𝚓'𝚎𝚗 𝚊𝚒 𝚊̀ 𝚏𝚘𝚞𝚝𝚛𝚎?
« Si je t’aime, je devrais souhaiter ton bonheur. Mais ce que je veux, c’est le notre, de bonheur. Un bonheur à deux. Sinon autant crever.»
Il a fallu s'y résoudre d'une manière ou l'autre. S'accommoder à l'idée que même si nous étions détruits, morts à l'intérieur, la Terre ne s'était pas arrêtée de tourner pour autant, tout ne s'était pas effondré autour de nous. Que nous n'avions pas été immédiatement réduits en poussière et propulsés dans le noir infini de l'univers. Qu'il nous fallait continuer à respirer malgré tout. Nous nourrir. Nous lever le matin. Survivre. Jour après jour.
Je garde les miens ouverts, à veiller sur le sommeil de ma sœur. Ma grande sœur perdue puis retrouvée , terrorisée, brisée, honteuse, rongée de culpabilité et de colère, ma grande sœur amoureuse qui voit des ombres menaçantes partout dans la nuit.
Je repense à ce que m'a dit Chloé un soir après le surf en parlant de ses propres parents. À quel point ils se révélaient complexes et tortueux à mesure qu'on grandissait.
Bien sûr je ne suis pas dans la tête de mes parents, mais je suis certain qu'il s'y passe la même chose que dans la mienne. Une immense bouffée d'émotion incontrôlable. Un putain de bouleversement intérieur. Un mélange dément de rire et de larmes. On est tous tellement à fleur de peau en cet instant. Sans plus la moindre protection. Toute armure fendue. Juste des boules de sentiments. Les nerfs à vif. Le cœur ouvert.
Comme dans le tambour d'une machine à laver. Je les laisse m'emporter, me malmener. Me brutaliser. Infiniment je chute et bois la tasse, me retrouve la tête sous la flotte sans plus savoir discerner le fond de la surface. Je me laisse boxer jusqu'à l'épuisement, jusqu'à ce que mon cerveau se vide et que mon corps s'efface.
...face à la mer, le silence est moins pesant. Se taire en la regardant n'a rien d'étrange. C'est même une sorte de règle. La contemplation impose de fermer sa gueule.
Je finis par atteindre la promenade. J'étouffe à moitié, je suffoque presque, mais au moins la terre est ferme, mes pas s'allègent un peu.