Chaque matin, pour me rendre au Petit Maroc, je dois franchir un pont mobile qui se lève et s’abaisse, non pas bien sûr à mon intention mais à celle des bateaux qui ont choisi d’entrer dans un rectangle d’eau, le « bassin » ; or, dès que je pénètre sur cette sorte d’île, je découvre un réseau de cafés – l’un d’eux se nomme le Pont-Levant – qui pourrait boucler l’infime traversée inaugurée par le passage du pont ou bien fermer la parenthèse, pour employer une tournure de langue enfin appropriée. Mais je ne suis jamais entré au Pont-Levant ; je vais plus loin, au Café de la Loire, le dernier, le plus proche du front extérieur de l’île et je m’assieds près des larges baies latérales qui m’offrent une vue sur le fleuve, la Loire, où passent de grands et lents navires sans qu’aucun pont se lève.
Je viens de lire "Le Rivage des Syrtes" de Julien Gracq et je n’ai pas du tout aimé ce livre : voilà un écrivain de la qualité, un écrivain qui écrit bien. Aussi ne fait-il qu’écrire bien. Chaque phrase vous dit : j’écris bien ; et c’est tout. C’est bien monotone... Je trouve la littérature terrifiante quand il ne lui reste plus que la qualité. C’est peut-être, aujourd’hui, le cas de la France. Alors, il lui faut une révolution littéraire.
Entretien de l'auteur avec Bernard Bretonnière
J’imagine volontiers un écrivain sans œuvre, jamais une œuvre sans écrivain.
Entretien de l'auteur avec Bernard Bretonnière
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