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Michel Lafon (II) (Traducteur)
EAN : 9782742768011
88 pages
Actes Sud (11/05/2007)
3.82/5   17 notes
Résumé :

Le jour se lève, le ciel est encore gris, un homme est en larmes. Il n'a pas pleuré depuis son enfance et le voilà presque plus surpris qu'affecté. Pourquoi pleure-t-il donc ? S'en souvient-il seulement ? II se rappelle : sa femme l'a quitté... Le narrateur est poète, en panne d'inspiration, au tournant de son art sans doute. Cet épisode lacrymal éveille en lui le besoin de se raconter. Voici donc l'histoire d'un m... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Une nuit, réveil en sueur, je contemple les étoiles. Il ne me reste plus qu'elles depuis que le monde s'est effondré, mon monde. Se retrouver seul, dans le noir, silence absolu, j'entends mon coeur battre. Battre pour une femme, une femme qui est partie. C'est un peu de mon âme qui a disparu, s'est envolé au milieu de ces étoiles. Alors des larmes coulent, celles d'un homme perdu, sans repère, sans envie, dans une putain de vie.

Il est écrivain, au devenir prometteur, mais l'inspiration n'y est plus, sa muse partie. La télé est allumée. Ou pas. Elle grésille, lueur grise dans la pénombre. On dirait un vieux Rintintin qui est diffusé. Un oiseau me parle, un cactus me répond, enfin, je ne sais plus trop. Hallucinations d'un insomniaque. D'ailleurs, que croire. Les images se confondent, de la réalité ou du rêve. J'invente, j'imagine, je rêve, je fabule, je divague. Ma vie, mon âme, mon oeuvre. Des larmes, des vagues, mon vague à l'âme. le jour se lève, ma vie est derrière moi. Il y a les larmes d'un homme qui ruissellent comme la pluie le long de la vitre. J'ouvre la fenêtre, vois le vide sous moi, le vide de ma vie, un chien aboie, le cabotin, pendant que le ciel vire à l'orange.

Second roman de l'argentin César Aira que j'ai l'occasion d'approcher, ce petit livre a rempli toutes ses promesses. Même plus, submergé par l'émotion et la folie. Les larmes se déversent, d'une tristesse latente, les hallucinations me plongent dans un univers parallèle alors que Rintintin continue d'aboyer sans que personne ne semble l'écouter. Livre irrésistiblement onirique. Il ne plaira peut-être pas à tout le monde, mais moi j'ai adoré, tout simplement, cette fantasmagorie d'un écrivain. Un putain de bon bouquin, de la littérature comme je l'aime, argentine au plus près de la pampa.
Lien : http://memoiresdebison.blogs..
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« Les Larmes » est un petit roman de César Aira, traduit de « El Llanto » par Michel Lafon (2000, André Dimanche, 82 p.). Peut-être même, plus qu'un roman, mais quasiment un manifeste littéraire, bien qu'il ne s'intitule pas ainsi. Pourquoi ? On y découvre un auteur, écrivain à ses heures, la quarantaine, marié à la belle Claudia, et un chien naturellement appelé Rintintin.
Tout commence de façon presque normale, écrit à la première personne par l'écrivain. « Je suis écrivain, poète et essayiste. A l'approche des quarante ans ». On comprend qu'il s'agit de César Aira, né en 1949, alors que le livre « El Llanto » sort en 1992. Jusqu'ici tout va bien. Quelques vicissitudes, mais « quatorze livres publiés ». Et à ce point, il demande et accepte une bourse « pour résider un an à Varsovie, tous frais payés, à écrire et à étudier sans préoccupations matérielles ». La vie comme un long fleuve tranquille, la Vistule par exemple « un après-midi à la fin de l'été ». Sauf qu'il n'a pas un sou, qu'il n'est pas attendu, que dehors il fait quinze degrés en dessous de zéro » et qu'il ne parle pas un mot de polonais. On bascule alors dans un roman de César Aira.
On est alors embarqué, avec Claudia, un terroriste japonais, le chien, le premier ministre, une actrice célèbre et deux poissons vivants, dans des évènements qui s'échelonnent au cours de la soixantaine de pages qui suivent.
Tout débute dans « un restaurant de grand luxe ». C'est normal. Il est « plein de miroirs, d'acajou et de plantes ». le narrateur est accompagné de Laura Premondini, la star encore plus belle que Claudia. Repas d'affaires, pour interview. Il y a, entre autres commensaux, le premier ministre et sa femme, et dans une aile Claudia qui accompagne Isso Hokkama. le premier ministre fait offrir le champagne, ce sont les contribuables qui règleront la note. Laura a commandé des poissons crus. En fait ils sont encore bien vivants et sautent au cou de l'actrice. « Il était en train de lui mordre les seins avec toute la férocité que l'on peut attendre d'un ressuscité ». Isso, qui ne perd pas le nord, en profite pour « vider son chargeur avec l'assurance d'un professionnel ». Confusion du sang de l'actrice empoissonnée et de l'élu assassiné. Il faut dire que cet épisode est un cas particulier de la vie mouvementée des protagonistes. Manipulation exemplaire de leur expérience de la réalité, pourrait-on assigner à cet épisode, en conformité avec les idées littéraires de César Aira. Bref, le début du commencement de probable liaison avec la star doit faire face aux faits. le japonais tueur fait face aux policiers en ne se faisant pas arrêter, ni même remarquer. Claudia fait la tête à la maison, la fête avec son japonais et s'occupe de Rintintin, le chien. L'écrivain médite. « Et dire que pendant des années j'avais vécu dans la crainte que Claudia ne soit lesbienne ! Maintenant, la peur qui me paralysait, c'était que, lorsque nous aurions enfin une explication, Claudia, en proie à la folie où je la voyais s'enfoncer, me jetterait à la figure que le membre d'Isso était plus grand que le mien… qu'il restait dressé des nuits entières… Je pris la décision de me suicider, en me jetant du balcon ». de sombres idées. Pour varier le quotidien, le chien se met à parler. Et de plus un merle, « gros oiseau noir, au bec jaune » l'insulte « Merde, crapule, fils de pute ». On est passé à la sur-réalité.
« La Fin de l'Histoire » ? C'est facile à dire, moins facile à comprendre, car on se retrouve à Rennes, face au Parlement de Bretagne. « Au-dessus, le ciel où glissent des nuages lourds entre des trouées d'un bleu magnifique ». Heureusement c'est expliqué la page d'après. C'est « la monstrification. Je crois que la Révolution française fut la fin des monstres ». Déjà que dans « La Guerre des gymnases », il y avait l'apparition du « lièvre légibrérien, dont la naissance devait coïncider avec la fin de l'Argentine »….
Et l'or des anges du Parlement de Bretagne s'enflamme au soleil couchant. « C'est la surprise de l'heure. Et il y a toujours des heures. Il y en a même eu à Varsovie. Si je ne l'ai pas dit plus tôt, ce n'est pas pour cacher quoi que ce soit, c'est parce que je ne me souvenais pas, ou faute d'occasion ».

J'avais prévenu que l'on basculait dans un roman de César Aira.
Pour bien comprendre ce que signifie l'auteur, il faut alors lire un autre de ses livres « Las Tres Fechas » dans lequel il expose quelque unes de ses idées sur la littérature. Il faut alors se reporter à « le Mal de Montano » de Enrique Villa-Matias qui expose dans sa trilogie « Pathologie de l'Ecriture » les idées de ce groupe de la nouvelle littérature hispanisante.
« Las Tres Fechas » (Les trois dates) de César Aira (2002, Beatriz Viterbo, 84 p.) constitue une ébauche ce qu'il dénomme la « raison d'être » d'une oeuvre que son propriétaire ne peut se décider à entreprendre. C'est en fait un « catalogo razonado » (catalogue raisonné) d‘une grande bibliothèque. Il se réfère en cela à la phrase de Nietzsche « du passé déchiffré sortira la lumière du futur »
César Aira commente l'évolution d'un livre en fonction de trois dates, comme l'indique le titre. En effet, selon Aira, la lecture d'un livre change en fonction du moment où il est lu et comment ces trois dates influencent la lecture. Ces trois dates sont la date d'écriture, la date de publication et la date de lecture. Il décline alors une demi-douzaine de cas de lectures qu'il a pu effectuer dont Denton Welch « Soleils brillants de la Jeunesse », Paul Léautaud « le Petit Ami », J.R. Ackerley « Hindoo Holiday », E.M. Forster « Voyage en Indes », Max Beerbohm « Zuleika Dobson » et Edwin A. Abbott « Flatland ». On constate qu'il s'agit essentiellement de livres de voyages plus ou moins initiatiques, jusqu'au « Flatland » qui est lui une exploration d'un autre monde aux propriétés dimensionnelles (2D, 3D). Puis il saute au roman de Stevenson « L'Etrange Cas du Dr Jekyll et Mr Hyde ».
De cette analyse de différents cas de romans, César Aira retient que dans tout roman, l'histoire est plus ou moins occultée sous le discours, parce ce que cette occultation est la condition de l'intérêt pour la lecture. Et cette occultation s'effectue par une manipulation, pas forcément frauduleuse des faits. « Manipuler notre expérience de la réalité ». On dirait que nous ne faisons pas autre chose. Toutefois, avant de terminer, il passe au cas de Julien Green et à la rédaction de journaux intimes, qui ont une origine et vocation différentes du roman. Dans ce cas de journaux intimes, la manipulation est d'origine différente, et bien entendu donne des résultats qui varient drastiquement de celles du roman. « Un auteur use toujours son expérience comme matière primaire, comme stimulant ou comme contexte ».
Sa conclusion est alors que « La manipulation de la qualité de l'expérience obéit à trois causes de base, l'action, la réflexion et la perfection ».
Ces trois dates sont reprises dans l'essai de Enrique Villa-Matas, ou plutôt dans sa trilogie « Pathologie de l'Ecriture » qui regroupe « Bartleby et Compagnie » traduit par Eric Beaumatin (2009, Christian Bourgois, 218 p.), « le Mal de Montano » traduit par André Gabastou (2002, Christian Bourgois, 398 p.) et « Docteur Pasavento » également traduit par André Gabastou, (2006, Christian Bourgois, 429 p.).
C'est surtout « le Mal de Montano » qui fait pendant à « Las Tres Fechas » de César Aira. Sous couvert d'un écrivain nommé José, qui développe une véritable obsession pour la littérature, Enrique Villa-Matias expose les siennes, notamment l'impossibilité de distinguer entre la vie réelle et la fiction. José va donc parcourir Barcelone, revêtu de son manteau rouge d'espion, afin de passer inaperçu, du moins le croit-il. Et durant ce vagabondage dans toutes sortes de milieu, le lecteur va croiser, par personnes interposées, toute une série d'auteurs fameux. Cervantes, Sterne, Kafka, Musil, Walser, Gide, Gombrowicz, Kertesz, Bolano, Coetzee et Sebald. A la fin on aura Montaigne et Perec en prime. Cela en fait du beau monde dans Barcelone, ou incursions à Nantes (c'est pour y voir son fils, libraire), Lisbonne, Prague, Budapest, Valparaiso, en y incluant les Açores. Comme quoi la littérature fait voyager (souvent à peu de frais).
Résultat « celui qui écrit avec le sens du risque marche sur un fil et en plus de marcher dessus doit tisser son propre fil sous ses pieds […] de la même manière que chaque vol porte en lui la possibilité de tomber, chaque livre devrait contenir en lui-même la possibilité d'un échec ». On découvre alors à trois aspects de la littérature. le premier est effectivement la mort d'une certaine littérature de description. Mais en contrepartie, une vie littéraire, autre, peut se développer. C'est déjà ce qui était en prémisses dans « Les Larmes » (2000, André Dimanche, 76 p.), dans les mots de Claudia, « Commencer à vivre » que le narrateur ne comprend pas. Et pour faire écho au livre de César Aira « Les Larmes » Enrique Villa-Matas ajoute « Ce qui m'intéresse […], ce sont les traces des larmes et non les larmes ».
On aura donc affaire à un auteur malade, qui n'aura rien fait d'autre dans la vie que de continuer et reproduire ce qu'il a vécu. Qui ne se résigne pas à vivre après avoir vécu, et sans doute être déjà mort. « Peut-être est-ce cela la littérature : inventer une vie qui pourrait fort bien être la nôtre, inventer un double ». Il faut donc que le romancier en termine avec l'écriture de romans avec introduction, milieu et fin. A la clé, la solution finale « Mourir écrasé sous le poids de la grande Bibliothèque, voilà l'idéal auquel doivent tendre les auteurs contemporains ».
On pourra également (re)lire le petit livre de Roberto Arlt « L'Ecrivain raté » traduit par Geneviève Adrienne Orssaud (2014, Editions Sillage, 64 p.). Ecrit à la première personne par un écrivain quelque peu mégalomane, qui pourrait être Roberto Arlt lui-même, et qui connaît à présent une passe durable et profonde de doute. « Je me souviens » et « Mes vingt ans n'étaient pas abimés et laids comme certains lutteurs impitoyables. Mes vingt ans promettaient la gloire d'une oeuvre immortelle ». Une première phase d'insultes envers tous les autres « écrivassiers répondant au qualificatif de pondeuses ou larbins de la littérature », ou encore « engrossés de la littérature ».
Puis, c'est la phase « Tous des mauvais, il n'y a que moi…. », phase classique du rejet des autres et du déni, et la phase de résistance. « Si nous, nous ne sauvons pas l'art, qui le sauvera ? ». Et Roberto Arlt conclut par un « Et je sais que j'ai raison ».
« La vie, ça n'est pas de la littérature. Il faut vivre... Ensuite écrire ». Voir les auteurs s'intéresser au devenir de la littérature est différent. Pour Borges, on a les digressions sur les « Bibliothèques de Babel », reprenant les volumes sur « Les Etres Imaginaires » ou « L'Auteur ». Puis vint Roberti Arlt avec « L'Ecrivain Raté » (2014, Editions Sillages, 64 p.) alors qu'il passe, comme chacun, par une phase durable et profonde de doute. « Mes vingt ans n'étaient pas abimés et laids comme certains lutteurs impitoyables. Mes vingt ans promettaient la gloire d'une oeuvre immortelle ». Après lui, Roberto Bolaño écrira sur « La littérature nazie en Amérique du Sud » (2006, Christian Bourgois, 278 p.), faux manuel de littérature ou bibliographies fictives, mais qui interrogent sur leur possible équivalent. Ou du même Bolaño « Entre Parenthèses » (2011, Christian Bourgois, 477 p.)

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Ce n'est certainement pas la couverture qui m'a vendu ce livre (je la trouve affreuse) mais bien la critique de Bison. C'est le premier livre que je lis de cet auteur que je connais de nom pour avoir mis "Le Magicien" dans mon pense-bête.

Le narrateur raconte son histoire mais il ne sait pas si c'est la vérité ou s'il est en train de l'inventer... J'ai beaucoup aimé le style de l'auteur même si une fois ou deux j'ai eu l'impression d'avoir manqué un épisode (conversation entre un merle, un chien et un pot pour citer un exemple ^^ ).

L'histoire est, à mon avis, pour le narrateur d'accepter son divorce et d'aller de l'avant. Que reste-t-il de toute la place que l'on prenait dans la vie de quelqu'un qui a coupé les ponts? Il n'en reste rien ou pas grand chose.

J'ai beaucoup aimé la scène du restaurant.

Merci donc à Bison pour cette belle découverte!

Challenge multi-défis 2017 (32)
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Me voilà perplexe et démunie pour écrire cette critique. Je ne sais que penser de ce petit livre plein de larmes, de souffrance et de sensations douloureuses.
Le narrateur, abandonné par l'amour de sa vie, nous entraîne dans un tourbillon d'émotions envahissantes, bouleversantes et souvent stériles, tandis que sa folie - seul moyen adapté de survie en ces jours de trouble - nous embarque dans une réalité onirique, peuplée de fleurs, d'animaux, d'écriture et de couleurs. Le délire impose, s'expose et explose au fil des phrases, jetant son rythme étrange et décalé sur ce court roman du bout du monde.
Et j'ai eu de la peine à suivre, vacillant entre deux mondes parallèles, ne sachant plus très bien la marche à suivre pour apprécier ces lignes à leur juste valeur.
Car elle est belle l'écriture de César Aira !

Enfin, c'est quand même troublant, au moment de refermer ce livre, de me rendre compte que les plus grands élans de ma compassion sont allés vers Rintintin le chien, victime collatérale et déprimée de la séparation de ce couple à la dérive.
L'effet était-il voulu ou suis-je passée complètement à côté de cette lecture ?

Et vous, qu'en pensez-vous ? (Message subliminal au Bison qui lit ce roman en même temps que moi :-)
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Je me lève aux premières lueurs de l’aube, après une nuit d’insomnie et de fantasmagories exténuantes… Je suis si fatigué, si troublé. Je n’en peux plus. Je ne peux plus continuer comme ça. Tous les chemins de l’ombre conduisent à cette certitude atroce : il m’est arrivé ce dont j’avais le plus peur. Et le pire est que je ne sais pas si c’est vrai, si c’est fini ou s’il manque encore quelque chose, causes ou effets… Tout est épars, flottant, incohérent. Je ne sais pas si c’est la vérité ou si je suis en train de l’inventer… J’ai inventé tant de choses, la réalité m’a démenti tant de fois, qu’il m’est impossible de ne pas avoir des doutes… Il n’est pas possible qu’il fasse déjà jour. La nuit se prolonge, elle se balance comme un grand bateau obscur, entre la pensée et le rêve, entre la terreur et le réalisme. Je voudrais attraper une idée, une seule, et la contempler… Mais elles passent toutes hors de ma portée.
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Et mon âme s’élevait irrésistiblement, dans une spirale, vers le rose et le violet… Elle devenait aussi vaste que l’univers, aussi vaste qu’un trou noir ou que le passage du temps, tout en restant clouée à un point minuscule, à l’articulation du nom de l’Argentine. Il y avait autre chose en même temps, qui était et qui n’était pas mon âme : cette chaleur en hiver, ces ciels que ma personne parcourait en quête d’étoiles, cette présence du soleil… n’étaient-ils pas aussi une fable phallique venant s’installer dans ma vie ? Si, bien sûr, et pour être précis je dois en venir à quelques détails plus privés. Les mois qui suivirent ma séparation furent la saison la plus chaste de ma vie. J’étais si déprimés que je n’avais même pas envie de jouir seul. Mais la chasteté, comme tout le monde le sait, est en général une expérience phallique. Toutes les énergies qui auraient pu se perdre (il est vrai que cette perte est aussi une multiplication ; mais ce que personne ne considère, c’est que toute multiplication est une perte), je les conservais en moi, même sous la forme de mélancolie, comme un sculpteur conserve la pierre en lui donnant tel ou tel aspect.
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Et dire que pendant des années j’avais vécu dans la crainte que Claudia ne soit lesbienne ! Maintenant, la peur qui me paralysait, c’était que, lorsque nous aurions enfin une explication, Claudia, en proie à la folie où je la voyais s’enfoncer, me jetterait à la figure que le membre d’Isso était plus grand que le mien… qu’il restait dressé des nuits entières… Je pris la décision de me suicider, en me jetant du balcon.
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Que voulait Claudia ? Je devais reconnaître mon impuissance face à cette question. Et cette impuissance faisait peser de sérieux doutes sur ma propre virilité. On dit souvent qu’un homme qui ne comprend pas les femmes n’est pas un homme digne de ce nom. Qu’est-ce que j’étais alors ? Un faux homme ? Je me sentais emporté dans un tourbillon.
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Dans mes bouquets, chaque fleur était un objet. Un objet très fragile, impalpable, d'une couleur violente et pure. Il y avait quelque chose que l'on pouvait prendre dans la main, dans le poing. Et en même temps, on ne le pouvait pas. Parce que la fleur était objet du regard seul, du regard sans main...
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