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EAN : 9782267031799
173 pages
Christian Bourgois Editeur (17/10/2019)
3.5/5   29 notes
Résumé :
Un célèbre auteur de romans gothiques décide d'arrêter d'écrire. Lassé de se plier aux exigences du genre et aux lois du marché éditorial, frustré d'y avoir sacrifié ses ambitions littéraires, il amorce un virage radical : sa vie sera désormais consacrée à l'opium. Encore faut-il en trouver. Commence donc pour notre héros une errance dans les rues de Buenos Aires jusqu'à une boutique, l'Antiquité. L'Huissier, un étrange dealer, l'y attend. Et lui ouvre très vite les... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Lu en v.o.

J'avais ete decontenance par la lecture des Nuits de Flores. Je m'etais dit que Cesar Aira n'ecrivait decidement pas pour moi. Mais les echos du bruit que fait ce dernier opus dans le monde hispanophone ont eveille en moi des velleites de lui donner une seconde chance.

J'ai lu quelque part qu'Aira a deja publie une centaine de courts livres. A raison de deux ou trois par an. Dans une multiitude de genres. Un forcene. Et comme il doit y avoir dans le tas du meilleur et du moins bon, il est possible que j'aie fait un mauvais choix avec Les nuits de Flores.

Prins (ce titre reste une enigme apres avoir lu le livre) va aussi dans tous les sens. Mais ici les escapades, les digressions de la trame, meme quand elles sont completement detachees les unes des autres, meme si elles peuvent nourrir des trames completement differentes, finissent par se rattacher a un personnage central, ce qui n'etait pas le cas dans Les nuits. Comme si ce personnage (le narrateur), un ecrivain de romans gothiques populaires, pouvait avoir des passes differents ou des interpretations differentes de son passe et de ses actes.

Le narrateur glose beaucoup sur son metier. Cela donne par endroits une reflexion sur l'ecriture, sur les differents genres litteraires et sur leur hierarchie; la hierarchie qu'en font les critiques assermentes et celle qu'en font les lecteurs. “Personne ne sait clairement ce qu'est la literature, ce qui fait un ecrivain”,c'est peut-etre “une mode comme n'importe quelle autre, et une mode d'evasion”.

On sent le grand Borges planer au dessus de chaque phrase. Il y a des allusions au Jardin de sentiers qui bifurquent, aux labyrinthes chers a Borges. Pas que des allusions; tout le livre est un labyrinthe de sentiers qui bifurquent. Au lecteur d'en trouver la bonne direction et la sortie. Plus que cela, dans Prins le narrateur nous revele au bout d'un moment qu'il n'ecrit pas lui meme ses livres mais qu'il a toute une equipe de negres qui ecrivent pour lui. Et quest-ce qu'ils ecrivent? “Le chateau d'Otrante”, “Le moine” et autres “Frankenstein”, s'appropriant ainsi les oeuvres de Walpole, Lewis, Shelley, et touchant leurs droits. Si ce nest pas une reecriture de la celebre nouvelle de BorgesPierre Menard, auteur de Don Quichotte”, qu'est-ce que c'est? Et quand le narrateur, desabuse, meprisant ses “propres” oeuvres, decide de ne plus rien publier, ses negres se reconstruisent en bande de malfaiteurs mysterieux qui sement la terreur dans Buenos Aires, s'inspirant des scenarios de ces celebres romans. La litterature gothique inspire la realite ou l'inflechit? La litterature c'est la vie?

Puis le narrateur, abandonnant la litterature, se met a l'opium. Mais cet opium s'avere etre un grand parallepipede blanc, de la taille d'un refrigerateur, achete a “l'Antiquite”, qui cache dans sa masse une cle, la seule qui peut ouvrir la porte de cette meme Antiquite. Nous tournons en rond. Les Paradis Artificiels sont donc peut-etre une denree antique, romantique (comme la litterature en fait) dont la cle est pratiquement hors d'atteinte. Ou qu'il faut d'abord consommer beaucoup d'opium (litteraire) pour l'atteindre, pour pouvoir s'en servir. Et a quoi sert de s'en servir?

Je vais arreter la. Comme souvent, je crois que c'est la faute aux francais si ce texte est un peu deroutant et nous fait tomber, le nez dans le ruisseau. Pas a Voltaire et Rousseau cette fois-ci mais a Lyotard et son post-modernisme et a Derrida et son deconstructivisme. Aira deconstruit le roman classique tout en s'y referant sans arret. Il parodie les genres mineurs comme pour se detacher de toutes les fratries litteraires ambiantes. Comme s'il ne voulait s'adresser qu'a des lecteurs cultives mais legerement decadents. Serais-je decadent? Cette fois-ci la lecture (et qui sait? Peut-etre le propos de l'auteur) m'a ete plus accessible que celle de Les nuits de Flores. Il est possible que je m'habitue. Je commence meme a apprecier Aira. Malgre cela je ne pourrais pas le conseiller a tous, je manque de courage pour cela. Surement mon cote decadent.

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Quel drôle de livre que celui-ci ! Pas qu'il ne ressemble pas à son auteur, que du contraire. On y retrouve l'absurde à l'hispanique, mais avec en plus cette touche surréaliste ou fantasmagorique chère aux auteurs sud-américains. Un mélange détonnant, déstabilisant et déroutant.

Si le personnage de Aira, au nom d'un architecte argentin ayant construit une maison palais biscornue, comme celle qu'habite le héros du livre, prend à son compte tous les romans gothiques célèbres du 19e siècle anglais, c'est dire que, pour cet auteur, la réalité est élastique mais également fondée sur des référentiels connus, qui sont ou devraient être notre base culturelle commune.

Je me suis donc laissée bercer par cette histoire hautement improbable mais qui manie à ce point l'illusion de manière talentueuse, que ce soit le roman gothique ou l'opium, l'essentiel n'est-il pas dans ce voyage vers un ailleurs intangible mais qui nous sort du quotidien.
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Un court roman hallucinant avec des moments de lucidité. Dans une prose impeccable servie par une excellente traduction, César Aira raconte l'histoire d'un auteur lassé d'écrire des romans gothiques à succès d'une nullité crasse. Immensément riche, mais pas franchement sympathique, il décide un jour de prendre sa retraite et d'occuper son temps à fumer de l'opium. Mais trouver de l'opium à Buenos Aires n'est pas chose facile et cette quête conduira le narrateur à vivre d'étranges expériences, réelles ou imaginaires, on ne le sait pas, mais qui constitue le noyau dur du roman. Prins m'a offert une lecture rare, une expérience littéraire inédite grâce à un récit loufoque et absurde, drôle et réjouissant. Construite de façon très ordonnée, l'histoire n'a pourtant ni queue ni tête. Elle essaie d'expliquer avec sérieux et logique des phénomènes incohérents en les égayant de réflexions littéraires ou philosophiques convaincantes et subtiles. le délire proposé par César Aira est audacieux même s'il m'a semblé parfois difficile à comprendre, redondant et lourd. Il demandera plusieurs lectures tellement il est riche de détails et il ne conviendra peut-être pas à ceux qui privilégient la vraisemblance dans leur lecture. Quant à moi, je recommande cet ouvrage qui rend hommage à une littérature libre et imaginative.
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Merci à l'équipe de la Dispute sur France Culture de m'avoir fait découvrir cet auteur et ce roman complètement hallucinant et décalé dans lequel on se perd agréablement dans les méandres de cette histoire. Cheminement, drogue, hallucination, rêve, réalité, tout est fait pour nous faire perdre le fil mais avec humour et une belle écriture. S'il fallait un bémol ce serait pour les dernières pages.
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Comme d'autres lecteurs, j'ai entendu parlé de ce roman dans l'émission La Dispute de France Culture. Tous les critiques étaient très enthousiastes. le thème (autour du roman gothique) ne m'intéresse pas a priori mais le fait que le protagoniste principal soit un écrivain m'a conquis et je me suis lancé dans la lecture. Il est clair que l'univers ne laissera pas indifférent. Malheureusement, il ne m'a pas accroché.
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critiques presse (2)
LeMonde
19 novembre 2019
Dans des brouillards opiacés, le romancier raté imaginé par César Aira tente de s’extirper de sa médiocrité. Un texte fou mêlant policier et fantastique.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeFigaro
14 novembre 2019
Le romancier argentin brosse le portrait d’un écrivain à succès qui abandonne tout pour se consacrer à l’opium. Truculent.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Le roman gothique tel que je le pratiquais n'était qu'une combinaison éculée des mêmes ingrédients à n'en plus finir. Je les connaissais par coeur : le manuscrit médiéval retrouvé au fond d'un coffre dans le grenier d'un couvent, écrit en grec ou en araméen et traduit par un moine errant providentiel ; le château en haut de la montagne, encerclé par une fosse profonde, avec son pont-levis, ses pièces délabrées, ses arches à l'abri desquelles les chauve-souris allaient se cacher ; le méchant comte, seigneur et maître des lieux, si possible après avoir usurpé le domaine ; la belle demoiselle orpheline enfermée dans un cachot tant qu'elle refuse de céder aux avances lascives du seigneur féodal ; le jeune garçon élevé par des paysans qui l'ont trouvé abandonné dans une forêt, la chevalière en or gravée d'un dessin étrange posée à côté de lui, si possible également une marque de naissance à l'épaule, en forme de flèche, de croix ou d'étoile ; le vieux prêtre qui a gardé quarante années durant le secret qui lui a été confié par la reine ou la duchesse sur son lit de mort ; le spectre qui ne cesse de déambuler en haut des tours tant que n'aura pas été versée la dernière goutte de sang du dernier descendant des usurpateurs ; la statue qui prend vie, la rose qui saigne, les catalepsies prolongées, les bruits inexpliqués ; et, pour circuler parmi toutes ces fadaises, les sempiternelles portes dérobées, passages souterrains, tunnels, couloirs interminables éclairés par une seule bougie qu'un courant d'air intempestif vient éteindre à minuit ...
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On ne devient pas écrivain du jour au lendemain. C'est un processus si long que plusieurs vies successives ne peuvent en venir à bout. Des mondes remplis d'expérience doivent s'accumuler dans la mémoire et dans l'oubli avant qu'on ose mettre un mot sur la page. Avant cela, il faut avoir laissé mûrir la volonté de s'asseoir devant cette page, en faisant provision de courage et de confiance ; bref, parvenir à se croire écrivain. Et ce n'est que le commencement, car une fois que l'estime de soi a fait son travail et que l'expérience a conclu sa dernière leçon, reste le plus difficile : savoir quoi écrire.
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La littérature de genre pousse, voire force à la quantité. Pour commencer, on exige d'elle une faible qualité, car la densité de la qualité littéraire rend la lecture malaisée, or la littérature de genre est conçue pour une lecture sans effort, avec plaisir. (...) Dans ces conditions, on peut écrire vite. Les lecteurs, à leur tour, lisent vite, parviennent rapidement au bout du livre, en veulent un autre.
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J'avais l'impression de lui avoir sauvé la vie. Pour l'en convaincre, je lui ai montré le journal : fusillade dans la rue Hong Kong, des morts, des blessés, un gratte-ciel s'effondre. Il a violemment repoussé mes bonnes intentions, et m'a fait remarquer, avec un mélange d'ironie et de rage, que ce que je lui montrais était une publicité pour la sortie du film 'King Kong' : j'ai fermé les yeux pour essayer de mieux distinguer les lettres imprimées ; l'opium me faisait légèrement divaguer, mais tout de même pas à ce point.
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Cesser d'écrire, pour toujours, liquider la dette pérenne de l'écriture, voilà qui me laissait la liberté de m'organiser, dans un seul but : me sentir bien. Il ne me restait qu'à trouver la bonne occupation de substitution ; problamement était-elle à portée de main cachée dans la grande encyclopédie du monde ; je n'avais qu'à tourner les pages une à une, et en profiter pour me distraire en regardant les images.
Après y avoir sobrement mais consciencieument réfléchi, je me suis décidé pour l'opium.
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