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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
"Tchernobyl... C'est une guerre au-dessus des guerres. L'homme ne trouve son salut nulle part. Ni sur la terre, ni dans l'eau, ni dans le ciel."

Dix ans après la catastrophe, Svetlana Alexievitch a rassemblé les témoignages de ceux qui l'ont vécue de l'intérieur. Elle retranscrit fidèlement leurs mots, leurs tentatives d'explications, leurs souvenirs et les silences de leurs récits. Elle livre un tableau de sentiments humains, et non de faits.

C'est une lecture éprouvante. Réellement. Justement parce que la catastrophe prend un visage, dix, cent...

Il y a les vies sacrifiées, les maisons abandonnées, les vies déplacées, l'exil.
Il y a le déchirement des deuils, des agonies, de ceux qui ont ramené la mort chez eux, des enfants nés après.

Mais il y a aussi ce qu'on ne sait pas, ou peu : la vie dans la zone interdite. Ceux qui sont restés, incrédules. Ceux qui sont revenus, lassés d'être pointés du doigt ailleurs. Et ceux qui, quelques années après, y ont trouvé refuge, fuyant la guerre dans leur pays.
La vie reprend, une vie en communauté, paisible, coupée du monde...

Il y a le spectre de la guerre, omniprésent. La comparaison, souvent. Ils avaient vécu la seconde guerre, ils ont vu la chute de l'union soviétique, dont les mensonges ont fait tant de victimes autour de Tchernobyl... L'Histoire s'imbrique dans le récit.

C'est l'humain qui est mis en lumière, révélant le pire comme le meilleur. Des gens qui ont dispersé la mort pour en tirer bénéfice, d'autres qui ont donné leur vie.
L'entraide et la compassion, la douleur, la peur... Les sentiments sont palpables. Oui, c'est une lecture éprouvante. Mais nécessaire, à bien des niveaux.
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J'ai lu La Fin de l'homme rouge avant de me plonger dans celui-ci. Passionné par Tchernobyl, j'étais sûr de faire face à un livre aussi monumental que ma précédente lecture. Il m'a un peu fait l'effet de la suite d'un film qu'on adore (bien que datant d'avant) : on y retrouve avec plaisir certaines thématiques, mais avec une impression de moindre virtuosité (au point parfois d'avoir l'impression d'y lire la gestation de son opus magnum, en frisant parfois le hors-sujet avec certains témoins)


Ce bémol mis à part, on ne peut qu'admirer l'héroïsme des liquidateurs, la grandeur de ce peuple soviétique... tout comme on ne peut qu'être pris de vertige face à certains témoignages, face à l'absurdité de cet apocalypse, face à la bassesse des pillards. L'ouvrage se clôt d'ailleurs sur une publicité qui invite à venir voyager à Tchernobyl pour connaître le grand frisson. Un Pompéï moderne, dont j'ai déjà souvent rêvé... mais qui est un caprice bourgeois donnant la nausée.


Le tour de force de Svetlana Alexievitch est de réussir à saisir l'esprit d'une époque révolue, sous son versant humain, sans chercher à tomber dans l'image d'Epinal. Je ne vais pas m'étaler sur ces témoignages qui peuvent parfois émouvoir aux larmes et donner des frissons, littéralement prendre aux tripes... mais dans cet ouvrage se cache une donnée essentielle pour comprendre l'âme russo-soviétique : chaque culture a tendance à se définir et à se lire par ses productions culturelles. L'Empire et l'art de la Renaissance pour l'Italie. L'Histoire et son lustre pour la France. La littérature pour le peuple soviétique : la manière que l'on a de s'incarner dans un rêve et dans une fictionnalisation de la réalité. Un fait que l'on trouvait déjà dans La Fin de l'Homme rouge, mais qui prend ici un tout autre tour.


L'un des drames du XXe siècle repose dans la création de cataclysmes inédits, qui ne dépendent plus de la Nature... et qui, outre les cancers de la thyroïde et les stigmates, laisse des marques que le passé ne nous permet pas d'appréhender et de comprendre. Une béance face à un sarcophage et à l'éternité... Il en ressort ce leitmotiv étrange : "nous n'avons jamais lu ça... nous ne pouvons donc pas savoir comment le comprendre"... qui pourrait d'ailleurs être une belle manière de résumer l'effet Alexievitch pour tout lecteur.
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Des interviews, des témoignages de ceux qui ont vécu la catastrophe quelque soit leur profil (enfants, femmes de liquidateurs, paysans, agriculteurs; professeurs, militaires…). Des récits pouvant être des fois sur les faits ou sur l'amour, la politique, les croyances… démontrant la catastrophe humaine mais aussi le régime soviétique et les moeurs de l'époque. Un livre pour ne pas oublier mais qui ne peut laisser indifférent par des témoignages quelques fois insoutenables.
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5 étoiles pour ce texte, difficile de dire un coup de coeur vu la gravité du récit mais je dirais 5 étoiles pour le fait de dénoncer, de donner la parole à toutes ces victimes.
J'avais 4 ans au moment du drame donc j'ai appris bien plus tard la catastrophe de Tchernobyl. Au-delà de l'accident nucléaire qui a impacté le monde entier, il y a toutes ces vies bouleversées à qui on n'a pas laissé le choix où pire qu'on a laissé vivre sur une terre complètement irradiée.
Ces témoignages montrent avec une certaine pudeur la méconnaissance de la population mais également les manipulations du gouvernement pour minimiser la gravité de la situation. le narration permet aussi de comprendre la mentalité des soviétiques et l'attachement au "parti".
C'est une nécessité que de lire ce livre.
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Il est très difficile de mettre des mots sur ce livre et je n'ai personne à convaincre de la nécessité de le lire.
Dix ans après l'explosion nucléaire qui a bouleversé le monde, l'autrice interroge celles et ceux qui sont restés ou qui sont (re)venus : les liquidateurs, leurs épouses, les enfants, les hauts gradés comme les gens simples. Leurs lettres, dialogues ou monologues dressent en trois parties un tableau de la manière dont leur vie a été déchirée.
Alors que je suis plutôt bien informée sur la catastrophe et que je connaissais Alexievitch pour l'avoir vue dans des documentaires sur Tchernobyl et la fin de l'URSS, j'ai été surprise d'à quel point j'étais ignorante de certaines réalités, tellement effrayantes qu'elles sont encore tues.

C'est très souvent le registre de la guerre qui est utilisé : "Grande Guerre Patriotique" des anciens qui ont transmis la mémoire, guerre d'Afghanistan dont revenaient à peine de nombreux liquidateurs, guerre de Tchétchénie qui se déroule à l'époque des témoignages. C'est la seule comparaison possible, mais qui est à chaque fois repoussée car Tchernobyl, c'est pire. Depuis 1986 et pour des millions d'années.

Il y a évidemment le contexte de déliquescence de l'Union Soviétique, puis celui de son implosion, mais cet ouvrage pose une question plus large sur ce que nous sommes capables de faire et d'accepter en tant qu'êtres humains.
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Que dire ?

Que dire, qu'écrire après un tel livre constitué de dizaines de témoignages de (presque) survivants de l'apocalypse de Tchernobyl ? Devant un tel désastre humain, scientifique, politique, économique, sanitaire, social, environnemental, mondial, on reste humble et apeuré. On peine à se représenter l'horreur et son étendue, ses conséquences à long terme sur les espèces humaine, animale, végétale et minérale.

L'explosion du réacteur n°4 de la centrale de Tchernobyl, le 26 avril 1986 (j'avais six ans), a signé l'arrêt de mort d'un nombre incalculable de victimes mais aussi celui d'un régime, quelques années en amont de la chute du Mur de Berlin.

Les témoignages des témoins, liquidateurs, familles évacuées, etc. sont plus que touchants, ils sont hurlants, cauchemardesques et fascinants. Ils décrivent l'indescriptible, l'ennemi invisible, l'atout d'hier, l'atome.

Ce qui m'a le plus frappée dans "La supplication", c'est la description de la mentalité soviétique et ses manifestations dans les décisions des autorités et le traitement du désastre. Son absurde quête d'héroïsme jusqu'au sacrifice, son abnégation inutile jusqu'au ridicule, l'ineptie de sa gouvernance, la violence de sa politique et de ses moeurs.

Plus que jamais - c'est dit et redit tout au long du récit - la vie de l'homme soviétique (comprendre russe car l'homme russe d'aujourd'hui est toujours l'homme soviétique) ne compte pas. La dissection de l'état d'esprit soviétique/russe est très fine et rejoint parfaitement ce que j'ai moi-même pu en découvrir lors de mes trois séjours chez l'habitant en Russie.

Il faut lire Svetlana Alexievitch, non seulement parce qu'elle a reçu le Nobel de littérature, non seulement parce qu'elle est née en Ukraine et qu'elle est biélorusse, non seulement parce que son approche documentaire est saisissante, mais parce que son oeuvre éclaire avec réalisme et crudité la réalité slave.

"La supplication" est un livre bouleversant, renversant ; il va me hanter longtemps.


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Svetlana Alexievitch nous relate toute l'horreur de la catastrophe de Tchernobyl sous la forme de chroniques, forme chère à l'auteure. Il s'agit en quelque sorte d'un documentaire écrit, d'un reportage.
La force des témoignages est remarquable, essentiellement fataliste: « Nous - les Russes -avons toujours vécu dans l'horreur… ».
Les liquidateurs, les officiers de l'armée ou du NKVD, les membres du partis, les ouvriers, les ingénieurs, les médecins, les professeurs, et les femmes et les enfants nous transmettent des témoignages édifiants.
S'il fallait en retenir un, je retiendrais celui de Nesterenko le directeur de l'Institut de l'énergie nucléaire de Biélorussie. Tout la mécanique du désastre y réside.
La souffrance physique, physiologique et psychique est le dénominateur commun avec la Grande Guerre patriotique.
Il faut vaincre la peur, combattre le réacteur, combattre Tchernobyl.
« Tchernobyl…c'est une guerre au dessus des guerres. L'homme ne trouve son salut nulle part. Ni sur la terre, ni dans l'eau, ni dans le ciel. »
Le tragique et le ridicule du système soviétique tiennent une bonne place dans ce recueil: exécuter les plans de production alimentaire tout en évacuant des zones irradiées, au découpage aléatoire.
On retrouve la souffrance, le sacrifice, la vodka et le saucisson de l'homo sovieticus de « La fin de l'homme rouge » de la même auteure.

Cet ouvrage est exceptionnel de par sa force, je me répète. Il faut le lire pour comprendre. J'ai cru abandonner après le Prologue. C'est dur, très dur et parfois insoutenable.
Je reste cependant gêné par la forme. L'auteure ne prend aucunement parti, elle retranscrit les témoignages. L'écriture consiste alors à les ordonner, les remanier pour aboutir à ce récit essentiel. Mais en procédant ainsi, où est la frontière entre réalité brute et interprétation? On fait dire, mais dans quel but?
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Tchernobyl, dix ans plus tard
Le 26 avril 1986 le réacteur de la centrale nucléaire de Tchernobyl est détruit par une série d'explosions, entrainant l'une des plus grande catastrophe technologique du XXème siècle. Tchernobyl est situé en Ukraine mais à quelques kilomètres de la frontière avec la Bielorussie qui a été terriblement touchée par les retombées radioactives. Comme l'explique l'auteure en préambule de son livre 23% du territoire biélorusse est contaminé… Svetlana Alexievitch est bielorusse, et elle le dit clairement : « Ma vie fait partie de l'événement. C'est ici que je vis, sur la terre de Tchernobyl. Dans cette petite Biélorussie dont le monde n'avait presque pas entendu parler avant cela. Dans un pays dont on dit maintenant que ce n'est plus une terre, mais un laboratoire. Les Biélorusses constituent le peuple de Tchernobyl. Tchernobyl est devenu notre maison, notre destin national. Comment aurais-je pu ne pas écrire ce livre ? », ce livre qui « ne parle pas de Tchernobyl, mais du monde de Tchernobyl. Justement de ce que nous connaissons peu. de ce dont nous ne connaissons presque rien. Une histoire manquée (…) ».
Dix ans après l'accident de Tchernobyl, Svetlana Alexievitch a voyagé et interrogé des dizaines de personnes touchées par la catastrophe : certains travaillaient sur la centrale, d'autres étaient des fonctionnaires du parti (en 1986, c'était encore l'URSS), des paysans contraints de quitter leurs terres, sans explication, des médecins, des femmes (beaucoup), épouses de liquidateurs morts atrocement, ou mères d'enfants condamnés... Ce livre est donc un recueil de témoignages tous plus poignants les uns que les autres… Divisé en trois parties (La terre des morts, la couronne de la création et Admiration de la tristesse) il permet de prendre la mesure de l'immense souffrance de tous ceux qui ont vécu cette apocalypse.
J'ai mis un temps fou pour lire ces « chroniques du monde après l'apocalypse », non pas que le sujet ne m'intéressait pas (bien au contraire, et ce livre est passionnant) mais en raison de l'émotion qui m'a submergée à plusieurs reprises. J'ai même du mal à écrire mon avis (je l'ai terminé il y a près d'une semaine, impossible d'écrire quoique ce soit « à chaud ») même en reprenant toutes les notes que j'ai prises…
Un livre en forme de devoir de mémoire, essentiel, d'une grande humanité, poignant bouleversant, d'une puissance infinie…
En complément, on peut regarder l'excellente série « Tchernobyl » et lire un autre bouquin magistral qui m'a marquée (La nuit tombée d'Antoine Choplin – Il s'est d'ailleurs inspiré d'une anecdote racontée dans la première partie La terre des morts : Monologue sur une vie entière écrite sur une porte).
« Un événement raconté par une personne est son destin. Raconté par plusieurs, il devient l'Histoire. »
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Pour cet essai Svetlana Alexievitch est partie à la rencontre de ceux qui ont vécu la catastrophe de Tchernobyl. Elle en tire un texte bouleversant. La force de ces lignes tient, à mon avis, qu'elle nous livre ces témoignages sans les commenter. Peut-être y a-t-elle ajouté une certaine poésie car, étonnamment, certains passages sont beaux.
Ce que je retiens de ces témoignages c'est la force de ces peuples slaves. Force ou inconscience, on se pose parfois la question. La plupart des gens n'ont pas les clés de compréhension à l'époque mais ils obéissent aux ordres soviétiques et souvent par conviction. Les quelques-uns qui alertent se heurtent souvent à un mur.
J'ai trouvé tout particulièrement marquants et touchants les témoignages des femmes en prologue et en conclusion. de vrais témoignages d'amour.
Un livre à lire même si c'est parfois dur car ce sont des témoignages qui racontent une réalité récente et impitoyable.
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Comment rendre hommage à ces gens ordinaires qui ont vécu cette catastrophe écologique extraordinaire si ce n'est qu'en lisant ce livre de Svetlana Alexievitch, il faut porter une attention particulière à tous ces noms mentionnés et les répéter haut et fort, prendre un verre de vodka et espérer que la contamination ne nous atteigne pas. La vodka aidant à lutter contre les effets des radiations, à ce qu'on dit…

«  Dans la vie, des choses horribles se passent de façon paisible et naturelle…»

L'auteure nous fait voir ce drame de l'intérieur, celui des survivants, des acteurs bien malgré eux d'une grande mascarade soviétique. Ces personnes pieuses qui ont eu une confiance aveugle dans leurs gouvernants.

« Parce que, dès que l'on perd la foi, on n'est plus un participant, on devient un complice et l'on perd toute justification. »

Des personnes témoignent d'un événement pour lequel leurs références ne sont pas bonnes. Ils connaissent la guerre, ils y sont même habitués mais ce qui arrive à Tchernobyl dépasse l'entendement.

« Mais nous avons toujours vécu dans l'horreur et nous savons vivre dans l'horreur. C'est notre milieu naturel. Pour cela, notre peuple est sans égal… »

Cette lecture n'est pas facile. Est-elle nécessaire? Oui, mais cela dépend de chacun. Pour moi, elle confirme que notre connaissance de la radioactivité a évoluée, que les centrales nucléaires ont moins la cote, que nous savons mieux nous protéger mais, que l'humain est toujours aussi fragile. Et que la peur est toujours présente.

« Je n'ai pas peur de la terre ou de l'eau, j'ai peur de l'homme. »

J'ai vu la série que j'ai trouvé excellente. Ce livre de témoignages qui l'a inspirée est tout à fait exceptionnel. Il brasse fort l'émotion c'est certain mais surtout, démontre un univers terrifiant que trop de gens vivent toujours après toutes ces années.
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