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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je n'avais jamais entendu parler d'Ivo Andrić (1892-1975) avant que mon stagiaire ne me parle du livre qu'il était en train de lire. Auteur yougoslave, Ivo Andrić a reçu le prix Nobel de littérature en 1961.

Le pont sur la Drina' (1945) est un roman historique qui raconte les événements qui se sont succédés aux abords du pont Mehmed Pacha Sokolović à Višegrad (aujourd'hui en Bosnie-Herzégovine) dont la construction a été achevée en 1571.

Incursion dans l'histoire tourmentée des Balkans (fin 16e jusqu'à la Première Guerre Mondiale), j'ai trouvé intéressant que l'auteur s'attache plus à montrer les effets de l'Histoire sur la vie quotidienne des habitants plutôt que d'entrer dans des détails de contexte.

J'ai été particulièrement conquise par l'écriture d'Andrić que j'ai trouvé sublime. Comme l'a écrit Pascale Delpech, l'auteur « déroule le fil des légendes pour démêler le vrai et l'inventé, brosse des portraits, raconte des histoires édifiantes gravées dans la mémoire collective, montre dans son inébranlable continuité la lutte de l'ancien et du nouveau. »

Plus de quatre siècles se sont écoulés et le pont est « toujours là, égal à lui-même, arborant l'éternelle jeunesse des grandes oeuvres conçues avec génie, lesquelles ignorent ce que vieillir ou changer veut dire et ne partagent pas, du moins semble-t-il, le destin des choses éphémères de ce monde. »

Le pont est un personnage à part entière, il a été inscrit en 2007 au patrimoine mondial de l'Unesco (https://whc.unesco.org/fr/list/1260/).






Challenge XXe siècle 2023
Challenge multi-défis 2023 (61)
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La littérature comme levier de perception de nouveaux mondes : voilà ce que m'inspire ce riche roman de Ivo Andric, auteur nobelisé en 1961 dont je n'arrive pas à saisir s'il est bosniaque, croate ou serbe puisque yougoslave n'a plus cours, en tout cas un auteur qu'on pourrait qualifier de pan européen par son oeuvre et son action diplomatique, bien qu'il ait fui toute publicité et reste méconnu de ce côté de l'Europe.

Au coeur de ce roman, un pont, construit sur la Drina à la frontière de l'Orient et de l'Occident. Et sur ce pont immuable, quelques générations d'hommes qui ne font que passer au cours de quatre siècles.
Une trame romanesque simplissime, mais brillamment exécutée dans un récit vibrant qui raconte l'histoire à hauteur d'homme, depuis la construction du pont par la puissance ottomane au 16ème siècle jusqu'à l'effondrement de l'empire austro-hongrois qui lui a succédé.
Par une succession de scènes construites comme de magnifiques peintures vivantes, l'auteur éclaire la destinée de cette ville du bout d'un monde aux cultures et religions mêlées, serbes, croates, musulmans, juifs, chrétiens cohabitant en bonne intelligence sous les dominations successives, vivant les joies et les drames de la vie autant à l'échelle de la ville qu'à celle de l'histoire qui au fil des siècles accélère le rythme et les aspirations nationales.
Même si le rythme du récit ne permet pas de s'attacher véritablement à des personnages qui à peine évoqués disparaissent au profit de la génération suivante, je n'ai pas lâché ce roman passionnant, qui m'aura beaucoup éclairé sur une région dont l'histoire et la géographie sont, plus qu'ailleurs, intimement liées.
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Voici un livre dont le héros n'est ni un valeureux guerrier, ni une belle princesse, ni une pauvre orpheline, ni un gamin des rues débrouillard et facétieux, ni même un animal, comme parfois, mais un pont.

Le pont sur la Drina est un livre difficile à défendre quand on l'a bien aimé - ce qui est mon cas - même si cela peut paraître complètement paradoxal.

En effet, le pont sur la Drina est l'exemple typique du "livre dans lequel il ne se passe rien" : pas de passion amoureuse contrariée, pleine de larmes et de sanglots déchirants, pas de grande épopée guerrière retentissante du fracas des armes et des cris des blessés, pas de récit fabuleux peuplé de créatures étranges et fantastiques.

Son auteur, Ivo Andric, nous raconte l'histoire d'une bourgade de Bosnie depuis le milieu du XVIè siècle jusqu'aux années de la première guerre mondiale.

Il commence son récit alors que la région est sous la domination des Ottomans et que, afin de contrer les caprices de l'unique passeur permettant de traverser la rivière - la Drina - les autorités turques décident de la construction d'un pont qui permettra de relier les deux rives et sera ainsi le trait d'union entre la Bosnie et la Serbie, entre l'Orient et l'Occident.

C'est la construction de ce pont qui nous est d'abord contée. Pas un simple pont de bois, mais d'emblée un immense pont de pierre, solide et majestueux, au centre duquel un espace - la kapia - tient lieu de place du village : les habitants s'y retrouvent pour flâner, bavarder, rêvasser, profiter de la tiédeur du crépuscule ou de la douceur d'une nuit d'été.

Du reste de la ville, Ivo Andric ne nous dira pas grand chose au fil du roman ; c'est par le biais du pont et de la kapia, qu'il nous narre comment la bourgade devenue ville au fil du temps, et surtout sa population, ont vécu les soubresauts de l'Histoire dans cette région au coeur de l'Europe.

A travers son récit et la vie des habitants les plus singuliers, on découvre comment les communautés (chrétiens, musulmans, juifs) cohabitent - ou se heurtent - et s'adaptent aux évolutions politiques mais surtout culturelles qui impactent le territoire.

Le pont sur la Drina est un livre calme, qui nous change de la fureur de certains ouvrages, pleins des horreurs de la vie et des tourments et du désespoir de leurs personnages.

Cependant, ne vous y trompez pas, le pont sur la Drina n'est pas un livre soporifique pour autant, mais un livre pour se reposer des émotions brutales, peur comme passion, que souvent suscite en nous l'écriture des auteurs de nos lectures habituelles. Un répit bienvenu.




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Le pont sur la Drina, construit par un vizir de l'empire ottoman, constitue à la fois une frontière et un lien entre la Bosnie et la Serbie, et entre un occident chrétien et un orient musulman.

Tout au long du roman, de son édification, vers le milieu du 16e siècle, jusqu'à sa destruction, lors de la 1ère guerre mondiale, il est le lieu central où tout se joue.
Les empires ottomans et autrichiens, musulmans contre chrétiens, se sont affrontés pendant des siècles, par-dessus la tête des populations locales, qui ont cohabité tant bien que mal en dépit des différences de religions, pour essayer de vivre en paix et préserver leurs traditions.

La petite histoire de personnages hauts en couleur permet d'évoquer la grande Histoire dans cette région compliquée des Balkans.Ce récit prend des allures de chronique, de galerie de portraits des différents habitants, personnages savoureux et ô combien vivants, tantôt tragiques, tantôt grotesques. Et au milieu de tout ça, le pont demeure immuable, indifférent à cette folie, comme l'eau qui coule sous ses gigantesques arches.

J'ai ressenti parfois un certain manque de liant et eu l'impression de lire un recueil de nouvelles plutôt qu'un roman unique.Pas forcément facile à lire car la langue est dense.
Il me manquait aussi une connaissance de l'Histoire de cette région pour bien comprendre ce qui se passait par moment en dehors de Visegrad et replacer les événements dans leur contexte.

Il n'empêche que cette oeuvre nous permet de toucher du doigt les plaies des Serbes, des Croates et des Bosniaques et on ne peut s'empêcher de penser à la guerre en Yougoslavie dont on comprend bien mieux les origines et les ressorts.

Challenge ABC 2020
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Un important roman du 20e siècle.
Le pont sur la Drina raconte l'histoire d'un pont, traversant la rivière Drina, à hauteur de la ville de Visegrad, à la frontière entre la Bosnie et la Serbie, entre sa construction au 16e siècle et le début du 20e siècle. Ce n'est pas seulement l'histoire du pont, ce sont surtout des histoires d'hommes et de femmes qui ont vécu à proximité et l'importance qu'il a eu pour eux.
Au centre du pont, un espace plus large, la 'kapia', avec l'inscription de fondation en turc, un café, lieu de rencontre et de repos. L'auteur raconte de façon très vivante la vie des différentes communautés installées à Visegrad: turcs musulmans, musulmans convertis, Serbes, Juifs, Tsiganes, puis au 19e siècle les différentes nationalités de l'Empire austro-hongrois: Allemands, Autrichiens, Hongrois, Tchèques, Croates. Les mentalités et les convictions religieuses peuvent être source d'incompréhension mais le plus souvent c'est le pouvoir dominant, turc ou autrichien, ou les événements internationaux qui entraînent les vrais conflits, violents et cruels. La vie des communautés est celle d'une coexistence souvent pacifique, parfois tendue, mais parfois amicale aussi. Les mentalités évoluent aussi au fil des siècles.
Écrit pendant la 2e guerre mondiale et publié en 1945, ce livre est un plaidoyer pour l'unité de la Yougoslavie, mais offre aussi quelques clés pour comprendre les guerres yougoslaves des années 1990. Il est en tout cas un décentrement salutaire pour éviter nos jugements trop rapides d'Européens de l'Ouest.
Avec tout cet intérêt historique, le livre est pourtant loin d'être ennuyeux. Les personnages ont de la consistance et les descriptions sont évocatrices sans longueurs. C'est un vrai et beau roman.
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Roman historique qui fait renaître "une des histoires les plus tourmentées de l'Europe" comme l'indique la postface.
Et en effet.
Au bord de la Drina, le bourg De Višegrad a une population cosmopolite, on y entend de multiples langues, surtout depuis l'édification du pont au 16è siècle qui a fait affluer des personnes de toutes origines. Nous sommes dans une région périphérique de l'Empire ottoman, avant que cette zone ne devienne une province de l'Empire austro-hongrois, puis le siège des guerres balkaniques.
Le coeur de la ville est la "kapia", terrasse aménagée au milieu du pont, où les hommes se réunissent pour discuter lors des longues soirées d'été. Ivo Andrić est comme un conteur installé sur la kapia, charmant son public par son talent à restituer ces quatre siècles au fil d'épisodes marquants, mêlés de légendes locales.
Pourtant l'auteur ne se fait pas d'illusions lorsqu'il décrit cette société commerçante, patriarcale, où la paix est synonyme de prospérité et de bonne entente, mais où les nationalismes sont prêts à exploser : ainsi qu'un pont de pierre qui semble inaltérable, mais est pourtant tragiquement miné.
Traduction sans faille de Pascale Delpech.

Challenge Nobel
Challenge Globe-trotter (Serbie)
LC thématique d'avril 2022 : ''La Nature dans tous ses états”
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Ce roman ne ressemble à aucun autre que j'ai pu lire jusqu'à présent. Il est très particulier puisque son personnage principal est bien ce pont sur la Drina. On suit toute son histoire depuis sa construction au XVIème siècle jusqu'au début du XXème siècle. Il se situe à la frontière entre les mondes musulmans, chrétiens et juifs et entre les différentes communautés qui habitent la région, Serbes, Tsiganes, Juives...

Une bonne partie du livre est constituée de chapitres qui pourraient presque être considérés comme indépendants les uns des autres puisque dans chacun on suit certains habitants de la ville à une certaine époque. On a ainsi une collection d'anecdotes qui mises bout à bout nous donne un aperçu assez exhaustif de l'histoire de cette région au cours des quatre siècles qui sont balayés par le roman. Ce sont des petites histoires qui façonnent la grande Histoire. A travers ces récits, c'est l'universalité du genre humain qui nous est contée.

Le talent de l'auteur tient grandement dans son écriture car malgré le fait qu'il n'y ait que peu de personnages récurrents, j'ai très bien accroché à cette histoire. La langue et le récit sont assez denses avec beaucoup de narration et très peu de dialogues.

Cette lecture m'a également permis d'aborder l'histoire de cette région même si mes connaissances n'étaient pas assez importantes pour bien appréhender tous les éléments du contexte de ce roman.
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Je viens d'écrire quelques lignes pour le challenge Nobel relancé par Meps, tant qu'à faire je les colle ici :
Vraiment un livre au ton (pour moi) original et qui donne à penser, tout en pouvant se lire comme un récit prenant. Un récit, en effet, et non une suite de récits. J'avais écrit ici que j'aimais bien les livres dont le héros était un immeuble (surtout celui de Perec), mais Andric m'a appris qu'un pont pouvait aussi l'être. Et, des décennies avant les dernières guerres balkaniques, il donne des éclairages pour les lire différemment.
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Ce romans est une fresque qui se déroule sur 5 siècles d'histoires au sein d'une Bosnie ou se succède les empires (ottoman et Autriche Hongrie) dans un patchwork d'influences entre les Turcs, les slaves Islamisé ou Chrétiens, les Autrichiens, les Juifs ect.
A l'instar d'un Milorad Pavic ou autres auteurs Yougoslave, ce récit se situe à mi chemin entre le récit historique et la fiction. le fait historique se mêle à la légende et il est vain de tenter de faire la par des choses entre le vrai et faux, ce qui peux déranger un lecture cartésien d'Europe de l'ouest mais qui n'étonneras pas plus que ça le lecteur local, le Balkanique.
D'abord Ivo Andric s'intéresse à la genèse de la construction du pont au 16°siècle. Puis de chapitres en chapitres, qui sont autant de contes, on avance dans le temps avec à chaque fois une nouvelle galerie de personnages, tous atypiques ou caricaturaux et une nouvelle histoire. Point commun de tous ses contes, les lieux, toujours les mêmes : la ville de Visgrad et alentour, et surtout, le pont sur la Drina et sa "kapia", sorte de place au sein du pont ou se déroule une bonne partie des intrigues.

Livre de référence pour quiconque s'intéresse à cette partie d'Europe, il est à lire pour effleurer les débuts d'une compréhension de la culture ex-yougoslave avec toutes ses ambiguïtés. On apprécieras l'absence de manichéisme dans le traitement des divers communautés. A lire en prenant son temps car il est assez épais et comporte quelques longueurs et redondances.
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un prix Nobel comme il y en a eu beaucoup dans l'Europe de l'Est, occasion pour nous, français d'élargir notre horizon littéraire.
Ici, c'est comme souvent une longue histoire qui remonte à la construction de ce pont qui permet de franchir une frontière en évitant le vieux bac peu commode. Il s'en passe des choses sur ce pont à l'implantation critique. Des anecdotes ponctuent le récit lui donnant une respiration.
Les guerres fratricides sont hélas un lieu commun de nos jours, guerres civiles couvant sous la braise: c'est le sort de l'ex Yougoslavie. Les pays sous le régime soviétique ou sous Tito ont gagné leur indépendance, mais à quel prix!
Parfois ils ont regardé du côté de l'Ouest, certains ont été intégrés dans l'union européenne...Fort étrangement la Hongrie qui partage si peu ses valeurs. D'autres attendent, d'autres refusent...
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