De même qu'aucune nouveauté ne vient au monde en une seule fois, aucune utopie ne peut être réalisée d'emblée ; le rationnel étant séparé du réel, l'un et l'autre doivent s'attirer mutuellement et se rapprocher toujours davantage dans une réconciliation imparfaite, jusqu'à leur coïncidence organique finale. Mais il ne faut pas se figurer que l'un puisse rejoindre l'autre d'un mouvement unilatéral.
La beauté de la vie, son perfectionnement et la réintégration de la nature étaient notre première exigence ; la seconde exigence que nous formulons pour l'avenir porte sur la vérité de la vie et la solution véritable des contradictions sociales au sein de la réalité.
On peut aller jusqu'à prétendre que tout futur, même s'il n'est pas encore suffisamment rationnel et cohérent, n'a peut-être aucune influence sur ce qui existe, mais qu'il doit être déjà un existant avant même de devenir un existant.
Ainsi, après que la pratique immédiate de l’art ait cessé d’être la chose la plus éminente et que ce prédicat ait été dévolu à la théorie en tant que telle, il se détache à présent de cette dernière, dans la pratique synthétique post-théorique, laquelle a d’abord pour mission d’être le fondement et la vérité de l’art comme de la philosophie.
Aussi, devons-nous affirmer qu'aucun des éléments unilatéraux et exclusifs qui se sont épanouis jusqu'à présent ne peut suffire à l'humanité précisément à cause de ce caractère unilatéral, séparé, exclusif. Au contraire, fuyant cet état de séparation, ils tendent vers une unité concrète supérieur.
L’être et la pensée doivent donc disparaître dans l’action, l’art et la philosophie dans la vie sociale.