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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ingénieux ou farfelu ? Je n'arrive pas à trancher.

Nul besoin de relire le roman auparavant (mais bien sûr, c'est d'autant plus intéressant si on prend le temps de le faire) car Pierre Bayard résume l'intrigue et en restitue l'atmosphère en citant d'abondants extraits. Puis il reprend le fil de l'enquête, s'attachant à en montrer les manquements, pointant les incohérences voire les contradictions dans les conclusions de Sherlock Holmes, rien de moins !

S'appuyant sur le concept de « l'autonomie des personnages », Pierre Bayard démontre que l'auteur ne contrôle pas tout et que ceux-ci peuvent mener une vie propre à l'intérieur du récit.

« Ceux-ci ne sont pas, comme le croit trop souvent, des êtres de papier, mais des créatures vivantes, qui mènent dans les livres une existence autonome, allant parfois jusqu'à commettre des meurtres à l'insu de l'auteur. » C'est une hypothèse assez séduisante qui me fait penser à l'univers de Jasper Ffforde et à la saga Thursday Next dont je lis le tome 3 en ce moment, où les personnages s'apparentent à des acteurs, doués de vie et d'intentions. Pierre Bayard recourt aussi à la psychanalyse pour montrer que les personnages peuvent acquérir un certain degré de réalité, au moins dans notre inconscient, et donc jouer un rôle dans nos vies…

Et puis Pierre Bayard se fixe pour objectif de réhabiliter ce pauvre chien, injustement accusé de meurtre depuis une centaine d'années, alors on ne peut que saluer l'initiative !

C'est aussi une réflexion au sens large sur l'acte de lecture et sur la place du lecteur quant à la construction du sens de l'oeuvre : « C'est le lecteur qui vient achever l'oeuvre et refermer, d'ailleurs temporairement, le monde qu'elle ouvre, et il le fait à chaque fois d'une manière différente. »

C'est parfois un peu tiré par les cheveux, mais j'ai aimé me replonger dans l'univers de Conan Doyle et découvrir les failles de l'enquête, qui sautent aux yeux maintenant qu'elles ont été pointées du doigt ! Il définit ainsi ce qu'il appelle la critique policière : « Celle-ci vise à tenter d'être plus rigoureux que les détectives de la littérature et les écrivains, et à élaborer des solutions plus satisfaisantes pour l'esprit. »
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Après avoir démontré pourquoi Oedipe n'a peut-être pas tué Laïos, pourquoi Claudius n'est peut-être pas l'assassin du père de Hamlet ni le docteur Sheppard celui de Roger Ackroyd, Pierre Bayard - psychanaliste et fondateur de la critique policière - se penche sur l'aventure la plus célèbre de Sherlock Holmes.

Il suffit de lire le Chien des Baskerville d'un oeil un peu attentif - comme je l'ai fait juste avant d'ouvrir ce livre-là - pour réaliser que la narration est truffée d'invraisemblances et de conclusions approximatives. Si Pierre Bayard les relève dans le détail, ce n'est pas pour en conclure que Conan Doyle a cafouillé dans son scénario et aurait mieux fait de porter un peu plus d'attention à ce qu'il écrivait au lieu de rêver à ses projets de romans historiques. Non. Il va beaucoup plus loin que ça, et sur des voies bien plus intéressantes.

D'une part, il prend en considération le contexte d'écriture du Chien des Baskerville, premier texte à faire réapparaitre Holmes après sa disparition dans les chutes de Reichenbach, et la relation complexe, tissée de haine et de dépendance, que l'écrivain entretenait alors avec sa créature. Il prend en considération, surtout, le statut ambigu du personnage mythique, qui par son poids dans l'imaginaire collectif finit par brouiller les frontières entre fiction et réalité, jusqu'à échapper au contrôle de son créateur et acquérir une forme de vie propre, quasi autonome. de cette dépossession de l'auteur part justement le principe de la critique policière, qui « vise à tenter d'être plus rigoureux que les détectives de la littérature et les écrivains, et à élaborer des solutions plus satisfaisantes pour l'esprit » (p. 61)

Partant de là, Pierre Bayard reprend l'enquête dans le détail, jusqu'à faire apparaître l'existence dans le roman d'un autre assassin, bien plus retors, à côté duquel Sherlock Holmes passe totalement à côté. Un assassin qui aurait commis ses meurtres à l'insu de l'auteur lui-même... ou depuis les profondeurs de son subconscient.

La psychanalyse - ou art de projeter ses propres fantasmes sur le cerveau des autres - est loin d'être ma tasse de thé, et les analyses de cet ordre que propose l'auteur pour expliquer l'anéantissement de Sherlock Holmes dans le roman ne me convainquent qu'à-demi. En revanche, ne pourrait-on pas imaginer que Conan Doyle, obligé de faire renaître ce personnage qu'il en est venu à haïr, ait très volontairement pris sa revanche en concevant ce scénario qui, en apparence, donne satisfaction aux lecteurs et au personnage lui-même, mais ridiculise ce dernier aux yeux d'un lecteur plus pointilleux - ou tout au moins de lui-même ?

Comme Sherlock Holmes, son entourage et le lecteur lui-même, projettent leur imaginaire personnel sur l'oeuvre jusqu'à se convaincre de l'existence du meurtrier au chien, le psychanalyste projette sa propre subjectivité professionnelle sur les intentions de l'auteur, jusqu'à voir irruption du subconscient où il n'y a peut-être que volonté de mystification.
Si cette dernière hypothèse conviendrait mieux à ma propre subjectivité, nul doute que l'ouvrage de Pierre Bayard ouvre sur l'oeuvre - et la littérature en général - des portes passionnantes.
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
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Après la lecture de cet essai, je me suis sentie plus qu'idiote. Comment en effet passer à côté de tout cela. L'avoir lu en VO n'excuse rien.
Cependant, la lecture en est réjouissante et stimulante, elle oblige à revoir sa manière de lire.
Bien que Pierre Bayard égratigne le mythe "Sherlock", il donne plus de profondeur et de richesse à l'oeuvre. Comment en effet un meurtre a-t-il pu se produire à l'insu de Conan Doyle. Etait-il à ce point en colère contre son personnage qu'il s'est laissé abuser par un autre des personnages ?
Une analyse, qui malgré la complexité des notions se lit sans difficulté majeure.
Un bel ouvrage sur la littérature et ses multiples implications dans la réalité. du moins dans notre réalité.
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Dès les 50 premières pages, on en prend plein la face, et on se dit que Watson et Sherlock sont peut-être de vieux croûtons qui ont fait leur temps, et ne sont pas du tout les maîtres de rigueur qu'ils veulent bien nous faire croire, d'ailleurs Watson n'est vraiment pas "une lumière", je l'avais bien repéré dans l'original relu la veille.
le nombre de bourdes ou de mystères irrésolus par le célèbre détective laisse songeur. Je ne me souvenait pas d'autant de faiblesses de raisonnement quand j'ai lu les aventures étant gosse. En fait, même si c'étaient des types infaillibles, je suis d'accord pour dire qu'entre ce que veut bien dire Watson, de ce que veut bien lui révéler Holmes, il y a fort possiblement place à l'erreur judiciaire, et que tout compte fait, quand tout ce petit monde se fourvoie, il peut tout à fait se passer autre chose en coulisse que jamais personne ne révèle à l'écrit. Croire sur parole ce que nous dit le narrateur, qui lui-même prend pour argent comptant de potentiels faux témoignages, c'est vraiment très con de lui, et de nous.

Je n'ai pas atteint le niveau pathologique de non discernement entre le niveau du réel, le niveau de la fiction, et le niveau intermédiaire, mais il est vrai que Sherlock Holmes ou Arsène Lupin ont toujours eu un impact presque magique ou mystique sur moi, si bien que j'ai toujours espéré en secret qu'ils aient existé. Donc maintenant que j'ai lu ça, je suis obligée de m'asseoir dessus, si je veux pouvoir relire leurs aventures sans me dire qu'il y a sûrement boniment et embrouille partout,et qu'on se moque de ma crédulité. Ce sont mes mythes après tout, je ne peux pas les laisser se faire détrôner.
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Le chien des Baskerville est une des créatures les plus célèbres de la littérature policière. Sherlock Holmes, dans une de ses plus célèbres enquêtes, parvient à dénouer le mystère de cette bête légendaire de la lande de Dartmoor. Mais Pierre Bayard n'est pas convaincu par la démonstration du détective. Il reprend donc les éléments de l'enquête, ceux de la vie de Holmes et de l'oeuvre de Conan Doyle pour signer un ouvrage stimulant sur la réflexion littéraire et la littérature policière.

Dès l'entame de l'ouvrage, la thèse de Pierre Bayard est claire : Sherlock Holmes s'est trompé dans son enquête sur la mort de Charles Baskerville, et le coupable désigné n'est pas le bon. Il reprend donc l'ensemble des éléments du roman pour appuyer son raisonnement. Après un résumé détaillé de l'intrigue, il s'applique à décrire les méthodes utilisées par le détective. Pour Bayard, deux éléments sont au coeur de cette méthode, l'observation et la déduction.

Néanmoins, la rigueur scientifique qui entoure les actes et les réflexions de Holmes est remise en cause. Pierre Bayard fouille dans les nombreuses autres enquêtes de Sherlock Holmes pour trouver différentes failles. Il recense de nombreuses aventures où Holmes soit s'est trompé, soit n'a pas résolu l'énigme qui s'offrait à lui. de ce fait, pourquoi ne pas imaginer que pour cette affaire de chien maléfique, Holmes s'est fourvoyé ?
Lien : http://livres-et-cin.over-bl..
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Bayard repère dans le livre de Conan Doyle des indices que son propre héros n'aurait pas vu (l'auteur nous apprend que le livre fut écrit en 1902, sous la pression et que SACD voulait n'utiliser que le personnage de Watson). Ensuite, tout naturellement, il nous oriente vers un autre coupable.

Pierre Bayard chicane sur les détails, ruse, se faufile dans les interstices du texte - la littérature est « un univers troué » -, met à nu la mécanique romanesque de Conan Doyle, lutte au flair avec Sherlock Holmes, met peu à peu en doute la fiabilité du narrateur et sur la culpabilité du chien (pourquoi a-t-il poursuivit Baskerville sur le côté et non derrière? Pourquoi n'a-t-il pas touché au cadavre?).

Sa démonstration ne requiert pas la lecture préalable du roman, mais aussi haletante et implacable.

Au final, à vous de voir si vous suivez l'auteur dans son délire, dans son interprétation du plus célèbre roman de Conan Doyle, celui qu'il a écrit pour l'argent, celui dans lequel il ne voulait pas faire apparaître son détective, qu'il haïssait de tout son coeur...

Moi, je n'adhère pas à la théorie de l'auteur, mais elle avait le mérite d'être soulignée et publiée.
Lien : http://the-cannibal-lecteur...
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Découvert ce livre par hasard à la librairie du cinéma MK2 Bibliothèque.
Ayant lu dès mon plus jeune age le classique de Conan Doyle et vu pareillement son adaptation par la Hammer, je me suis tout de suite procuré l'ouvrage.
Pierre Bayard use de plusieurs approches dans ce livre. Il s'intéresse d'abord au rapport entre l'écrivain et son oeuvre . La matière est riche ici car Conan Doyle était frustré que son talent littéraire soit reconnu surtout pour les aventures du détective. Il "tua" ce dernier dans une aventure avant de le faire réapparaitre sous la pression du public.
Ensuite, il analyse les faits et identifie les angles morts du raisonnement d'Holmes .Et l'on se rend compte que tous les événements clés de l'histoire peuvent être soumis à une autre interprétation,quand pour certains, l'explication d'origine à la lecture de ce livre parait moins crédible.
Il développe aussi une approche psychanalytique , croyant dans l'idée que les personnages peuvent acquérir leur propres vies à l'intérieur d'un récit.
Une approche intéressante et hétérodoxe de ce classique du policier/épouvante, qui apporte un nouvel angle de vue .
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