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EAN : 9782707322777
158 pages
Editions de Minuit (17/01/2013)
3.9/5   93 notes
Résumé :
Quatrième de couverture:
Pour quelqu'un de ma génération, né après la Seconde Guerre mondiale et désireux de savoir comment il se serait comporté en de telles circonstances, il n'existe pas d'autre solution que de voyager dans le temps et de vivre soi-même à cette époque.
Je me propose donc ici, en reconstituant en détail l'existence qui aurait été la mienne si j'étais né trente ans plus tôt, d'examiner les choix auxquels j'aurais été confronté, les d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (26) Voir plus Ajouter une critique
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Pierre Bayard est un auteur particulier. Professeur de littérature et psychanalyste, Il écrit des essais où il se pose des questions inattendues, étonnantes.

Dans ce livre il s'imagine être à la place de son père pendant la durée de la guerre (18 ans en 1940) : élève de l'École normale, délocalisée à Bordeaux. Basculerait-il du côté des bourreaux ou des résistants ?

Il est facile, après la fin de la guerre, de critiquer les collaborateurs et admirer les résistants. À l'époque, moins : on ne connaissait pas ni l'issue de la guerre ni sa durée.

Il commence par rappeler les expériences psychologiques de Milgram dans les années 60 à Yale où on essayait de pousser les participants à appliquer des choques électriques à des élèves auxquels on posait des questions. Puis, on rappelait le cas due 101ème bataillon de police (livre de Christian Browning). Cette partie analyse ce qui pourrait pousser quelqu'un à basculer du côté des bourreaux.

Puis une série d'analyses, par thèmes, de caractéristiques pouvant faire basculer, ou pas, du côté des résistants : le conflit éthique, l'empathie, la peur, indignation, désaccord idéologique, ... A chaque fois il prend un exemple parmi des résistants connus : Daniel Cordier (secrétaire de Jean Moulin), Romain Gary, La Rose Blanche (résistance allemande), Aristides de Souza Mendes (consul de Portugal en France) etc et se positionne lui-même par rapport à ces thèmes.

Il est question aussi des Justes (en opposition aux héros ou combattants de la Résistance, les premiers étaient des anonymes tandis que les derniers se battaient avec des armes à la main. D'autres génocides, avec les dilemmes des résistants et bourreaux, sont aussi mentionnés : au Rwanda, Yougoslavie et Cambodge.

Finalement, il serait sûrement indigné par l'envahisseur mais resterait dans la position neutre à suivre sa formation supérieure. Sauf événement qui pourrait déclencher en lui une bifurcation capable de le faire basculer dans le côté des résistants. S'il dit qu'il n'aurait probablement pas été résistant, il faut saluer le courage qu'il a eu de le dire.

C'est une question étudiée dans le détail avec des nombreuses références. Un livre qui mérite largement la lecture.
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Ce livre est une réflexion historique sur l'attitude que l'auteur aurait pu adopter lors de la seconde guerre mondiale.
Cet érudit s'appuie sur plusieurs livres-témoignages.
Les bifurcations de la vie sont un peu son dada.
Cependant, j'ai beaucoup mieux apprécié ce livre que celui (du même auteur) que j'ai lu auparavant ("Il existe d'autres mondes"), comme quoi il est parfois nécessaire de ne pas s'arrêter à une seule lecture...
Par ailleurs, je ne supporte absolument pas ceux et celles qui sont persuadés qu'à cette époque ils auraient été des héros (des résistants, des justes, etc.).
A cette époque ou d'autres circonstances (cf. par exemple la vieille imbécile qui était dans le Thalys, qui n'a rien pu voir de ce qui s'est passé, mais qui a dit à un journaliste qu'elle aurait bondit sur le terroriste). Enfin, à sa décharge, disons que le journaliste a peut-être forcé ses paroles.
Non, durant la sombre période du milieu XXème siècle, rien ne me permets de dire ce que j'aurais fait, attitude médiane et ironique de la plupart des français, collaboration, résistance, résistance, collaboration ?? Impossible de le savoir ou cela serait trop facile, connaissant l'histoire.
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Aurais-je été résistant ou bourreau ?

Voilà une excellente question à laquelle Pierre Bayard ne répond pas. Même transporté par « uchronie » en 1941 à la place de son père dans la zone libre près de Bayonne il ne se donne à aucun moment le choix de décider d'être l'un ou l'autre en n'imaginant pas un seul instant qu'il aurait pu être autre chose que résistant.

C'est donc assez inutile de se raccrocher à la détestable expérience de Milgram à l'université de Yale où il est vérifié que 60% des individus dans le rôle du bourreau ont appliqué la peine maximale (une décharge de 450V) à des individus dans le rôle de la victime censés répondre correctement aux questions qu'ils leur posaient, bourreaux et victimes ne se connaissant pas. (Les victimes étaient des acteurs jouant ce rôle et des scientifiques poussaient les bourreaux à agir leur promettant l'impunité).

C'est également inutile, du moins pour répondre à la question éponyme, de digresser vers le Cambodge, le Burundi ou la Bosnie Herzégovine dans la mesure ou Pierre Bayard ne s'y rend pas, par uchronie, par métalepse où par un quelconque moyen de transport freudien.

Non, finalement le brillant professeur de littérature est entré au milieu des années 70 à Normal Sup pour « faire plaisir à ses parents » (sic), prestigieuse école devant laquelle papa Bayard a échoué. Et transporté en 1941 Pierre aurait préparé Hypokhâgne à Bayonne ou à Bordeaux et poursuivi ses études tranquillement dans l'établissement délocalisé sous Vichy et même trouvé un boulot de bibliothécaire dans les murs pour éviter les STO (même pas besoin de se planquer comme l'avoue tristement Jean Lacouture qui se considère lui-même comme un résistant par défaut et regrette de n'avoir pas rejoint le maquis).

L'acmé d'une vie bourgeoise a dans ce contexte un côté particulièrement dérangeant. Et la référence à Lacombe Lucien de Patrick Modiano (et Louis Malle 1974) montre d'où viennent certaines inspirations …aurais-je été quelqu'un ou quelqu'un d'autre ?

On a l'impression que le prologue a été écrit à postériori en constatant à la relecture que la question était restée sans réponse et qu'il fallait malgré tout justifier les 150 pages d'illustration magistrale (dans le sens scolaire) qui a sa place dans la réserve d' un amphithéâtre plus que dans ma bibliothèque.

Très déçu par ce livre je comprends mieux ce sentiment de frustration ressenti à la lecture de « aurais-je sauvé Geneviève Dixmer » qui échoue sur le même obstacle sans le franchir.

Pierre Bayard semble fasciné par le chemin qu'il a pris avec ces deux essais dans la collection « paradoxe » - Un bon titre- des éditions de minuit et se prend les pieds dans une racine.

Un gros valdingue s'ensuit.
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Pierre Bayard, universitaire à Paris VIII s'interroge sur les agissements qu'il aurait pu avoir lors de la Second Guerre Mondiale?Combien de fois, cette question a t-il été posé? Combien de fois, lors de mes années d'études n'ai-je pas entendu ou même dit Mais comment ont-ils bien pu faire cela? Moi, j'aurais fait ça..." On se rêve résistant, on se veut défenseur des droits de l'homme, oui mais voilà... On n'invente pas l'histoire.

Pierre Bayard choisit la Seconde Guerre Mondiale. Il avance qu'il aurait pu choisir n'importe quels autres conflits. Mais la Seconde Guerre Mondiale a mobilisé tous les fronts. La période 39-45 a été édifiante par sa Crise des valeurs humaines.

Trois voies s'offraient alors: celui d'être un bourreau, s'engager en résistance ou bien celui du milieu: j'emploie le terme "passivité" mais il n'est pas à prendre au péjoratif.

Bayard aurait-il été un résistant ou un bourreau? C'est la question qui se pose. Issu de la génération du baby boom. L'auteur tente de répondre à cette question en prenant en modèle de référence: son père. Pourquoi son père? Parce-qu'ils sont semblables sur de nombreux points: même parcours universitaire et même caractère.

Il s'appuie sur de nombreux travaux menés par des psychanalystes. Notamment l'expérience de Milgram. Organisée par l'Université de Yale, elle visait à comprendre les agissements collaborationnistes durant la Seconde Guerre Mondiale. Il y-a des dizaines de témoignages, notamment ceux de gendarmes lors de la Rafle du Vel'd'hiv qui se sont levés pour dire qu'ils ne voulait pas obéir mais qu'ils avaient peur. Et qu'un ordre doit être exécuté.
Cette expérience visait donc à évaluer le degré d'obéissance chez individu. En bref, l'expérience de Milgram c'est trois entités: celui sur qui/quoi l'ordre est donné, celui qui doit répondre à cet ordre, et celui qui donne l'ordre (l'instance moral). le sujet évalué est celui qui doit répondre à l'ordre. Une émission passée sur France 2 a reconstitué l'expérience de Milgram:

- La victime (un comédien) voulait gagner de l'argent. Il devait apprendre par coeur une série de réponses. Il était attaché sur une chaise électrique. A chaque mauvaises réponses, il recevait des décharges électriques. Il n'avait aucuns pouvoir sur le jeu. L'arrêt du jeu était donné par celui qui infligeait les décharges et posait les questions. (le piégé, le sujet) Il n'y a aucuns liens visuels entre les deux protagonistes (le piégé et la victime).Ils communiquent seulement par la voix.

- le sujet celui qui reçoit les ordres. Il est derrière une machine et pose les questions. A chaque mauvaises réponses, il délivre une décharge éléctrique. A mesure que le jeu avance, les décharges se font plus fortes. le but qu'il lui a été donné est d'aller le plus loin possible et de faire gagner de l'argent à la victime. Des premières décharges, on entend le rire de la victime mais au fur et à mesure que le jeu et que les nerfs sont à cran: les rires sont remplacés par les supplications.

- Là intervient l'instance supérieur, ici le Public et l'animatrice. Son rôle est de rendre le plus vulnérable possible le sujet. Il doit sentir que ses actes ne lui appartiennent plus. Il le dépénalise. Qu'il ne porte pas en lui le poids de la responsabilité. En l'occurrence dans ce jeu, on lui dit que la Production a prit toutes les mesures nécessaires et que le jeu est sans risque pour la victime. Il est également poussé par la masse, par le public qui le pousse à continuer.

Ce qui en a résulté: certains sujets ne sont pas arrêtés malgré les supplications de la victime. Ils ont nié la douleur, ils ont nié jusqu'à l'existence de l'autre parce-que l'ordre émanait d'une instance supérieure. D'autres se sont arrêtés quand bien-même tous les rouages derrière. Pierre Bayard dit qu'aucuns être n'est prédestiné à choisir une voie d'une autre. C'est également une question de circonstances, de vécu personnel, de coïncidences.Il a donc pour but comme Milgram de comprendre la bifurcation d'un homme à un instant donné par sentiment d'indignation, d'empathie, de conformisme, d'argument d'autorité..

Il s'appuie sur la personnalité potentielle. Celle qui surgit à un moment donné lors de situations extrêmes. Un homme qui semble avoir une sympathie pour la violence ne deviendra pas forcément un tueur de masse. Il se peut qu'à un instant X, un trait de sa personnalité qu'il ignorait lui-même se révèle. Il prend l'exemple très juste, de Cordier, nationaliste et royaliste. Fervent de Pétain qu'il considère comme son père spirituel. Il e sentira trahira lors de la signature de l'armistice et se ralliera à De Gaulle.

Un livre très agréable, une écriture soignée, un plan structuré. Une belle réussite!
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Mystères de la liberté intérieure.
Aurais-je été résistant ou bourreau? C'est le genre de titre racoleur qui me fait fuir! pour deux raisons. D'abord, quelle que soit la réponse, elle n'a aucune valeur puisque seule l'expérience peut la valider (ou non) et que celle-ci est impossible vu que nous situons l'hypothèse dans le passé. Ensuite, l'option choisie nous apparaît seulement comme une mise en scène, une représentation du caractère que l'auteur veut donner de lui-même et le recours à la guerre comme un moyen de séduire le lecteur. Mais alors pourquoi avoir lu ce livre dans son intégralité? Malgré une quatrième de couverture peu engageante, il y avait aussi le nom de l'auteur: Pierre Bayard dont je connaissais déjà un certain nombre de livres et qui m'avait habitué à un certain décalage entre les intitulés et le contenu de ses ouvrages. Et c'est encore ici effectivement le cas: ce qui compte, ce n'est pas la réponse mais le chemin qui est censé y mener.
Pierre Bayard nous parle en fait de la liberté humaine et surtout de la façon dont on l'exerce et la manifeste dans la pratique. La Seconde guerre mondiale n'est là qu'à titre d'exemple concret qui organise la fiction du livre et de la vie imaginée par l'auteur s'il était né, comme son père en 1922. En bon psychanalyste, il nous montre que cette liberté est contrainte et limitée par les autres (soumission à l'autorité, conformisme de groupe) autant que par soi-même (conflits intérieurs: éthiques, religieux, philosophiques, …). Mais surtout il constate que, la plupart du temps, cette liberté ne nous pousse pas à nous engager dans des actions protectrices des victimes (comme les Justes) voire dans des actions de rébellion (comme les Héros). Ce qui conduit Bayard à s'interroger sur les “bifurcations” de notre vie et les “points de bascule” qui, grâce à un saut dans l'inconnu, permettent à certains individus privilégiés de mettre concrètement en accord leurs convictions profondes avec leurs actes.
Le but de l'essai de Bayard apparaît bien comme une tentative de”penser ce que je suis en profondeur” (p.15). Vu sous cet angle, le livre prend toute sa dimension psychologique et son intérêt devient patent. de plus, la démarche de l'auteur s'avère accessible et originale associant de façon vivante et documentée une recherche théorique et une fiction personnelle. Encore un livre de Pierre Bayard que je recommande chaudement!!
NB: 3 livres à ajouter à ma PAL:
Milena de Margarete Buber-Neumann.
Un Si Fragile Vernis d'humanité de Michel Terestchenko.
Des Hommes ordinaires de Chritopher Browning.
ainsi qu'un film à revoir: Lacombe Lucien de Louis Malle
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critiques presse (7)
LeMonde
13 mars 2022
Pierre Bayard offre, à travers un dilemme impossible et vraisemblable, un moyen de nous interroger sur notre place en tant que sujet – un sujet fragile, incertain, mais impliqué.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LaPresse
03 avril 2013
Question délicate qui remue des émotions troubles, particulièrement en France, où la littérature ne cesse de s'attarder à la Deuxième Guerre mondiale. C'est peut-être l'essai où Bayard se dévoile le plus, en imaginant ce qu'il aurait pu être s'il était né à la même époque que son père.
Lire la critique sur le site : LaPresse
NonFiction
15 février 2013
Aurais-je été résistant ou bourreau ?, se révèle tout aussi jubilatoire que les précédents, à cette différence près, toutefois, que l’auteur se donne ici un sujet apparemment plus philosophique.
Lire la critique sur le site : NonFiction
Bibliobs
28 janvier 2013
C'est à un exercice de haute voltige, périlleux mais réussi, que cet acrobate de la fiction, spécialiste de la théorie freudienne, se livre dans cette vraie-fausse autobiographie.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Lexpress
24 janvier 2013
C'est [l'] approche psychologique, fouillant toutes les ambiguïtés de notre âme, qui fait le sel de l'ouvrage. On ne pourrait expliquer l'engagement par ses seuls ressorts idéologiques.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Telerama
23 janvier 2013
L'essai de Pierre Bayard gagne en intensité et en profondeur : lorsque quittant le terrain de la psychologie il se place sur celui de la philosophie, de la métaphysique.
Lire la critique sur le site : Telerama
Liberation
21 janvier 2013
Chic, une nouvelle enquête du professeur Bayard. Avec, comme à l’accoutumée, une question d’apparence débile [...] suivie d’un dépiautage en règle des cheveux en quatre, et de solutions beaucoup moins loufoques que la question elle-même.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Chaque vie est une succession de bifurcations, plus ou moins nettement visibles, qui dessinent devant nous une multitude d'itinéraires virtuels [...]
Et où se seraient révélées peut-être d'autres personnalités potentielles que nous portons en nous et qui nous demeurent à jamais dissimulées.
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Quelle que soit la part essentielle de mystère qui détermine in fine l'engagement, les figures de résistance évoquées ici délivrent par leur exemple un enseignement précieux qui mérite d'être transmis. L'un des thèmes majeurs est la capacité de désobéissance, si bien illustrée par Sousa Mendes, ou, plus largement la capacité à sortir du cadre imposé par l'ensemble de la société.
Cette capacité à sortir du cadre, qui n'est pas seulement un cadre administratif mais un cadre inconscient de pensée, permet d'inventer, par un véritable travail de création, des bifurcations qui ne se dessineraient pas en temps normal. En cela, il y a davantage ici qu'une échapée du cadre, il y a remaniement de l'ensemble de la réalité, un remaniement qui la fait apparaître comme différente de ce qu'elle était, puisque ouverte à des transformations invisibles jusqu'alors.
Cette capacité n'implique pas seulement une re-création du monde, traversé de nouvelles lignes de force qui en remodèlent le paysage, elle signifie aussi une re-création de soi. L'acceptation de perdre implique nécessairement une modification du sujet et de son rapport au monde, et surtout à soi, que seuls certains priviligiés sont en mesure d'assumer.
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« "Pourquoi", demande l'un des tracts de la Rose blanche, "tant de citoyens, en face de ces crimes abominables, restent-ils indifférents ?" Je ne crois pas pour ma part que tant de gens soient indifférents devant les crimes collectifs. Le sentiment qu'ils donnent de l'être et de détourner les yeux tient au fait qu'ils sont figés par la peur et que celle-ci va jusqu'à les empêcher de penser, et de penser de façon personnelle à ce qu'ils pourraient concevoir comme une action minimale de contestation.
Cette méconnaissance de la place de la peur conduit souvent, dans un après-coup réducteur, à diviser de manière artificielle la population des pays sous dictature entre les résistants et les soutiens du régime, en ignorant le nombre considérable de personnes qui désapprouvent ce qui se passe, mais ne trouvent pas pour autant en elles la force, comme l'ont eue les Scholl, de briser les barrières de la peur. » (p. 94)
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Aurai-je été résistant ou bourreau ? de Pierre Bayard
Intrigué par l’image de la couverture ou l’on voit un résistant mettre en place une charge explosive sous le rail d’une voie de chemin de fer. J’ai lu ce livre dont la quatrième page de couverture fait état : « Pour quelqu’un de ma génération, né après la seconde guerre mondiale et désireux de savoir comment il se serait comporté en de telles circonstances, il n’existe pas d’autre solution que de voyager dans le temps et de vivre soi-même cette époque. » C’est ce que propose Pierre Bayard dans cette théorie littéraire. Fictivement, nous le retrouvons à l’âge de 18 ans en 1940, ayant fuit Paris, alors élève d’Hypokhâgne « je choisis donc, pour le temps de cette fiction, de m’installer à Royan, en cette région que l’histoire va bientôt rejoindre d’une manière dramatique et où de nombreux destin, dont le mien, son sur le point de se nouer. » Dans ce livre, Pierre Bayard nous interroge sur les notions d'engagement, de soumission de capacité à désobéir en revenant longuement sur l'expérience de Milgam. Dans ces chapitres la question du point de bascule est posée. Qui, permet à certaines personnes de s'insurger, quand d’autres collaborent ? Pourquoi des individus passent-ils à l’acte ? Répondent-ils à un appel de la désobéissance ? Dieu a-t-il quelque chose à voir dans tout cela ? Pierre Bayard inscrit cette réflexion dans un cadre historique, celui de la seconde guerre mondiale et revient plus succinctement sur d’autres conflits le Cambodge, la Bosnie, le Rwanda. Ils convoquent des résistants hors du commun que je vous laisse découvrir en s’interrogeant sur leur engagement. Étaient-ils conscients sur le moment de leur positionnement ? Ou est-ce que leur choix a été considéré a postériori à l’étude des faits. Vous remarquerez également que chaque chapitre de ce livre présente si je peux dire un sous chapitre. Aurai-je été résistant ou bourreau dans un concept de personnalité potentielle ; pour un conflit éthique etc… Chaque propos est illustré par des exemples venant du cinéma : Lacombe Lucien de Louis Malle ; dans le désaccord idéologique, avec l’autobiographie de Daniel Cordier ; dans la peur avec le récit de la Rose Blanche ; dans les cadres de pensées avec la désobéissance du consul Aristides de Sousa Mendes ; dans la bascule, avec le film S21 la machine de mort Khmère rouge de Rithy Panh ; par les autres, dans Sarajevo mon amour du Général Jovan Divjak ; dans Dieu avec le massacre des Tutsis rapportée dans le documentaire sur cinq justes Rwandais intitulé Au nom du Père , de tous, du ciel. Je ne vous cacherai pas que c’est un livre exigeant, qui permet de se situer dans une situation donnée ou imposée. Une belle réflexion, aurai-je été résistant ou bourreau ? Il est toujours aisé de refaire l’histoire lorsque les faits sont passés. Chaque jour l’on peut entendre moi, dans telles situations j’aurai été si, ou j’aurai fait cela. En lisant ce livre les questions que l’on peut se poser et que je me suis posée sont celles-ci : Quelles décisions aurai-je pu ou dû prendre ? Quelles sont les erreurs que j’aurai commises et quel aurait été mon destin si j’étais confronté à de tels situations. A quel moment aurai-je perçu ou non ce point de bascule, qui m’aurait conduit a être résistant ou bourreau ? Je vous invite à lire le livre de Pierre Bayard pour ouvrir sans nul doute ces questionnements. Bien à vous.
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« En cela, ces actes d'opposition – qu'ils soient le fait de héros ou de Justes – ne se limitent pas à résister, au sens de dire non. Ils impliquent de frayer à chaque fois une voie originale qui ne se présentait pas comme telle avant d'être inventée et qui fait après coup apparaître que le sujet disposait bien en réalité d'un choix, même si celui-ci était invisible.
Mais cette ouverture des possibles ne peut conduire à rien si le sujet n'est pas prêt à rompre avec soi et à s'extraire du cadre qu'il constitue pour lui-même. » (p. 118)
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Vidéo de Pierre Bayard
Nancy Murzilli invite Pierre Bayard & Yves Citton
Dans l'essai de Nancy Murzilli, la fiction est analysée sous le prisme d'une expérience de pensée. Raconter des histoires, jouer au pirate, interpréter un personnage de théâtre ou un rôle social, faire des projets, mentir, rêver, parler aux fantômes ou aux anges, communiquer avec le règne animal, lire l'avenir dans les tarots ou dans les astres, jeter des sorts, écrire des romans… Souvent perçues comme des échappatoires au réel, ces opérations mentales nous permettent de « savoir » et d'« agir » sans utiliser les moyens ordinaires d'information.
En avril et avec la complicité de la comédienne Anne-Laure Sanchez, Nancy Murzilli tirait les cartes à la Princesse de Clèves. Pour cette deuxième rencontre, elle invite deux « personnages » de son livre, Pierre Bayard et Yves Citton, chercheurs reconnus pour leurs travaux sur les fictions littéraires et sociales.
« Tout écrivain qui a discuté un peu longuement avec un lecteur attentif connaît cette expérience d'inquiétante étrangeté où il se rend compte de l'absence de correspondance entre ce qu'il a voulu faire et ce qui en a été compris. » Comment parler des livres que l'on a pas lus ?, Pierre Bayard
À lire – Nancy Murzilli, Changer la vie par nos fictions ordinaires, Premier parallèle, 2023 – Pierre Bayard, Et si les Beatles n'étaient pas nés ?, éd. de Minuit, 2022 – Yves Citton, Altermodernités des Lumières, Seuil, 2022 – Yves Citton, Faire avec. Conflits, coalitions, contagions, Les liens qui libèrent, 2021.
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