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Louisa et Romain évoluent dans des milieux qui cohabitent sans se croiser. Elle, originaire de la banlieue, adepte « optimiste » de ce qu'on appelle la « galère », et lui, plutôt de la classe moyenne, intello à tendance bobo, fonctionnaire territorial (un peu désabusé), adepte du milieu culturel et de ses vernissages.

A l'heure où la lutte n'est plus à la mode, Bégaudeau procède à un rapprochement des classes et délimite un territoire commun à travers l'histoire d'amour ( ?) de ces deux personnages.

Car si nous sommes « en guerre », comme l'a martelé, au lendemain des attentats de novembre 2015, un ancien premier ministre français qui brigue actuellement un mandat en terre catalane, l'ennemi est tout désigné. Il ne s'agit plus du capital, du banquier, voire du directeur des ressources humaines. Non, depuis « les évènements » la France doit se battre contre un mal qui la ronge de l'intérieur, le terroriste fraichement converti à un islamisme radical, armé de sa kalachnikov.

Mais ne sommes-nous pas en train de nous tromper d'adversaire ?

Bégaudeau a manifestement envie de remettre les points sur les i et de replacer le combat du « peuple français » sur le champ social, car c'est là que se trouve l'état d'urgence. Il dépeint, assez brillamment d'ailleurs, des maux que nous connaissons tous, à travers le destin (croisé) de ces personnages. Difficile de ne pas s'y reconnaitre.

Alors pourquoi me suis-je tenu à distance de ce récit qui avait tout pour me plaire ? A cause du style qui, parfois, m'a laissé perplexe ? Je ne crois pas. Plutôt parce que j'ai eu l'impression d'avoir déjà rencontré ces situations et ces acteurs dans des bouquins de Houellebecq ou Despentes, surtout dans Vernon Subutex.

Et la repentance appuyée du méchant financier, en fin de roman, m'a laissé un peu dubitatif.

J'ai dû rater un truc, et il me tardait de tourner la dernière page.

Du coup, je ne me suis pas vraiment senti en guerre…plutôt fatigué, un peu courbattu, comme après un bon match de tennis contre la DRH de Moulinex ou d'Orange ou, je ne sais pas, comme si j'avais dû participer à une AG de 48h sans repos.

Je vote « pour »…mais sans plus, un peu par habitude et parce que je n'ai rien "contre"...bien au contraire.
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Il était d'usage en 68, lorsqu'un intervenant demandait la parole dans une AG de lui demander " D'où parles-tu camarade ?". Images d'Épinal, caricatures, clichés de certains milieux ou classes sociales que nous dit l'auteur ?
Roman Praisse est un"bobo" de gauche, médiateur culturel, il vit dans une petite ville de province à une heure de Paris. Louisa Makhloufi est une ouvrière travaillant dans les hangars d'Amazon, vivant dans la banlieue périphérique dans un petit pavillon acheté à crédit avec son homme Christiano. Rien, normalement, ne les prédestinait à se rencontrer, sauf un fait divers que seuls les romanciers savent mettre en scène.
Cette rencontre fortuite permet des confrontations ou plutôt des énoncés de point de vue, car on ne sait pas dialoguer dans certains milieux , on n'a pas appris ; des échanges où "gothique" peut être pour l'un un style architectural et pour l'autre une mode.
Bourdieu, dans ses essais, nous avait déjà bien expliqué cet état de fait et le pourquoi. Ici on est mal à l'aise, entre le rire et la désapprobation. Ce n'est qu'un roman mais il est plus profond que cela, il parle de notre société d'aujourd'hui, de notre désarroi face aux événements, de nous : attentats, chômage, immigration, suicide, élection, au "à quoi bon" où le suicide est une solution plutôt que de se battre quand on a encore quelques convictions. Où chacun doit rester à sa place de peur de dérégler la machine comme le fait Paul à la fin du livre même si la caricature est poussée à l'extrême.
Ai-je aimé ? " Oui mais, non mais", je suis plutôt comme Romain que Louisa, ceux qui auront lu le livre comprendront, mais je reste sur ma question "D'où parles-tu camarade ?"
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Le style de François Bégaudeau, on l'aime où on le déteste. Je ne crois pas possible qu'il y ait un entre deux. Et même si on aime, on est en droit de ne pas apprécier tout ses romans. En guerre a cependant de bonnes chances de figurer parmi les aimés...

Tout commence par une fermeture. Celle des usines Ecolex. Et par Cristiano Cunhal qui perd son emploi. Cristiano retrouve alors Louisa toute la journée et la routine s'installe encore plus. Et par pur hasard, Louisa croise Romain et entame une relation avec lui...

Une histoire comme on en a déjà entendu mais qui prend ici une autre dimension. En fait, les premiéres pages rappelle largement le film... En guerre de Stéphane Brizé. Au point que je me suis posé des questions au début de ma lecture. Puis en avançant, l'histoire bascule vers celle de Romain et Louisa, mais toujours sur fond de lutte sociale, même masquée. L'écriture de Bégaudeau a, en effet, tendance à volontairement tout ramener sur ce plan. le but étant clairement d'inscrire cette histoire (mais est-elle d'amour ?) au sein de notre réalité. Ce qui donne une résonance toute particulière à cette histoire dans laquelle l'humour "mine de rien" de l'auteur fonctionne à merveille.

Par de petites touches, il permet de sourire, pour ensuite faire retomber son histoire sur un sentier plus dur, et ainsi de suite. Tout ce récit est d'ailleurs parfaitement représenté par les 3 allumettes de la couverture, tant chaque personnage semble être le maillon, l'élément d'un tout qui, en se consumant, va peut-être faire bouger certaines choses. Tout du moins à son modeste niveau...
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En guerre. C'est la déclaration faite par les hommes politiques après les attaques terroristes subies par la France ! Et si la guerre, dans notre pays, se situait ailleurs, à un autre niveau. C'est le parti pris par François Bégaudeau dans cet opus.
Louisa et Romain n'aurait jamais dû se rencontrer… Ils ne vivent pas dans la même ville, ne fréquentent pas les mêmes milieux, n'ont pas d'intérêt communs. Si on veut aller vite on peut dire que Romain est d'un milieu plutôt aisé et cultivé alors que Louisa évolue dans un milieu pauvre, collectionne les boulots précaires et n'est pas particulièrement cultivée.
Louisa vit avec Cristiano, tout semble aller pour le mieux. Louisa travaille dans un entrepôt d'Amazon, Cristiano travaille depuis plus de vingt ans à Ecolex. le fragile équilibre est rompu lorsque l'usine où travaille Cristiano est vendue et tous les salariés licenciés.
C'est un coup dur pour la région mais surtout pour Cristiano. L'oisiveté le ronge, il n'envisage pas un autre emploi que celui qu'il avait et peu à peu la dépression s'installe…
Bégaudeau nous fait partager la vie de ce couple qui est lentement détruit par la violence de cette vie devenue difficile, précaire. Il nous immerge dans ce qui est la vraie guerre de notre société, dans un monde violent qui ne respecte pas l'être humain.
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Par-delà le social, par-delà les classes, par-delà leur éloignement géographique, politique et culturel, Romain et Louisa s'aiment. le corps à ses raisons que la raison n'a pas : le sexe et le désir brouillent les frontières ou alors excitent la frontière.

Les premières pages m'ont fait penser, en moins bien, à l'univers de Mordillat mais dans ce roman il y a la place pour la rencontre improbable. A lire.
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C'est une lecture qui réconcilie le réel et la fiction, la sociologie et les aléas de la vie. C'est un cri de rage énoncé calmement, comme le combat syndical qui ouvre le récit avec placidité, parce que la lutte se heurte à l'indifférence du réel.
C'est le flux de conscience d'un narrateur omniscient et désabusé, qui ne s'embarrasse de mettre son récit en forme, car le lecteur est de toute façon saisit d'emblée par la familiarité des situations, des coïncidences qui n'en sont pas, des lieux que nous investissons au quotidien de la même façon que le font ces personnages de papier à chaque page.
C'est une description sociologique de ce qui est pourtant intranscriptible scientifiquement, car la vie est une somme indivisible de déterminismes et d'impondérables.
Et cette musique si familière se déploie dans une langue incisive, qui résonne immédiatement en nous et se fait élégamment économes en effet. Une langue musicale pourtant, propre à saisir la beauté de gestuelles banales, à sublimer la mécanique du quotidien. de la même façon que les dialogues sont à la fois triviaux et si parlants, criants de réalisme et donc emplis de sens, celui qu'on dissimule dans le débit des conversations mais que la lecture accorde au rythme de la pensée.
C'est un talent pour les associations de faits, entremêlements de gestes et de contradictions que l'on dissèque avec un peu de dérision, un peu de pitié, un zeste de colère qui n'est finalement que le reflet de celle éprouvée par le lecteur confronté sans atours à la condition prolétarienne, au mépris du système social et la brutale indifférence du monde. Et à nos renoncements individuels, qui sont autant de choix collectifs.
Une tragédie personnelle aussi violente qu'elle est banale.
C'est une science des affects qui permet de faire communier deux esprits si spontanément différents, magistralement exprimés dans des dialogues sans artifices, très efficaces pour caractériser les personnages. Pourtant leur parole se fond dans le récit, comme si au fond cette omniscience de la narration n'était que la somme des pensées qui nous traverse chacun, puis disparaissent au loin.
Pour le temps d'un roman, les voilà saisit un peu plus durablement dans notre mémoire.
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Dans cette ville où nul ne sait bien pourquoi il reste, il y a Romain, travailleur culturel bobo, nonchalant, mais sûr de sa mission, un homme qui parle, qui pense, sûr de ses certitudes comme de son incapacité à agir dans leur sens. Et il y a Louisa, jeune femme que seul le combat maintient à flot, scannant des articles à l'entrepôt d'Amazone, qui voit partir à la dérive la petit bonheur pavillonnaire quand son conjoint, aimablement éjecté d'une multinationale qui a mieux à faire en Slovaquie, endosse le rôle du perdant.

Rien de commun entre ces deux là, mais les circonstances vont les mettre face à face, puis dans le même lit.
Et les conséquences seront dévastatrice, dans une explosion de violence qui va les remettre en question, mais chacun à sa façon, la rencontre n'a finalement pas changé grand-chose.

Et, après [b]Leurs enfants après eux[/b], me voilà repartie dans un roman social. A ce détail près qu'on n'est plus en Lorraine mais à Amiens, ce qui en matière d'emploi, n'est guère mieux, les héros de Bégaudeau pourraient, si on compte bien, être ceux de Nicolas Mathieu, quelques années plus tard.

Même veine sociale, même idée bien ancrée du déterminisme social, donc, mais pas du tout le même livre, pas du tout.
Ici, quelque chose de plus malin, de plus fin, de plus créatif. Une façon de raconter ce que Mathieu expliquait. La justesse est soutenue par l'humour et par une ironie feutrée, décalée. Et cela autorise une apothéose mi-onirique, mi-visionnaire, mi-poétique. Une improbable, mais délectable et tordante victoire des petits. Cependant Bégaudeau n'est pas dupe, chacun retrouve finalement sa place , comme chez Mathieu. Je n'en dis pas plus, mais le scénario est plein d e bonnes idées, s'ouvrant à d'autres personnages qui enrichissent l'habile description de cette classe moyenne provinciale si multiple.

C'est extrêmement malin, direct, rapide et réfléchi tout à la fois. Il y a cette portée intemporelle: c'est un conte du prince charmant et de la pauvresse. Mais ils ne seront pas heureux et n'auront pas beaucoup d'enfants : on est au XXIème siècle, quand même. le roman s'implante dans une géographique, la ville, les banlieues, les rocades, le McDo, la Halle aux vêtements, qui lui donnent une proximité immédiate. Il s'inscrit dans le temporel, les événements passent au loin, attentas, Nuits debout, Trump, sans envahir, messages furtifs, mais terreau d'une façon de penser et d'agir. C'est donc aussi un roman d'ici et de maintenant, un roman d'aujourd'hui, clairvoyant, qui parle sans concession mais sans jugement, avec une empathie dont le désespoir est voilé par la lucidité, de gens que je connais, de leurs histoires, de leurs vies.
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Une lecture pleine d’actualité en cette période des gilets jaunes.
Louisa et Cristiano ont enfin leur pavillon et sont heureux ; les tours à moto leur suffisent même si Louisa avait peur au début mais maintenant elle a confiance. Mais Cristiano perd son travail à l'usine et s'enferme dans la dépression ; il ne s'occupe plus de Louisa.
Romain lui vit sa vie urbaine dans le domaine culturel.
Romain et Louisa n'auraient jamais du se rencontrer mais l'attirance des corps va modifier la trajectoire du quotidien. Ce roman dit social est assez désespérant mais la lecture est prenante. Il y a souvent des digressions qui n'en sont jamais vraiment ; c'est une façon de présenter chaque nouveau personnage.
Un roman dont on ne sort pas indemne.
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Une écriture rapide qui fait dévorer l'histoire. Des personnages présentés par leur parcours, leur psychologie, saisissant !
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Une banale histoire d'adultère, qui se termine en drame sur fond de lutte des classes et de tensions socioculturelles, bien écrite, bien rythmée et très crédible à part les 20 ou 30 dernières pages totalement hors sujet.
Malgré tout un bon moment de lecture avec deux personnages attachants.
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