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EAN : 9782916275628
96 pages
Dilecta éditions (01/10/2015)
3.5/5   1 notes
Résumé :
Seconde oeuvre magistrale de Bellmer autour de la fameuse poupée (son premier livre Die Puppe fut publié en 1936). Les images des Jeux de la poupée mettent en scène une nouvelle poupée articulée, plus abstraite que la première. Éluard travailla les textes à partir de 1938 et l'ensemble devait être publié chez Zervos, l'éditeur des Cahiers d'art (voir la vente Filipacchi dans nos locaux). Ce n'est finalement qu'en 1949 que le livre verra le jour grâce au marchand Hei... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Hans Bellmer (1902-1975) est un artiste allemand, né à Kattowitz, en Silésie, qui n'était pas destiné à devenir un des artistes majeurs du surréalisme. On ne peut l'oublier si on parle de Unica Zürn (1916-1970), qui fut son égérie. Il découvre la caricature à travers l'oeuvre emblématique de son ami George Grosz (1893-1959) « Les Funérailles d'Oskar Panizza » (1917). Et surtout le dessin provocatif, satire de la société bourgeoise allemande d'après la première guerre. « L'artiste d'aujourd'hui, s'il ne veut pas tourner à vide, être un raté passé de mode, ne peut choisir qu'entre la technique et la propagande pour la lutte des classes. Dans les deux cas, il doit abandonner l'art pur ». Hans Bellmer fréquente les dadaïstes et les surréalistes lors d'un séjour à Paris en 1925-1926. Il confectionne alors « La Poupée » (1936), une sculpture de bois, papier mâché, collé, et peinte qu'il présente dans la revue « le Minotaure ». Son sous-titre « Variations sur le montage d'une mineure articulée », représente une poupée, schématise et désarticulée. Selon Bellmer, « la femme serait comme une anagramme, dont il varie à l'infini les variations et métamorphoses, selon le moteur du désir ». Ce travail est très vite qualifié d'« art dégénéré » par les nazis. En 1953, il rencontre Unica Zürn (1916-1970), qui travaille avec lui sur les anagrammes, mais souffre de grave dépression. Ils vivent ensemble à Paris, mais leur relation est perturbée par la santé mentale d'Unica, qui fera des tentatives de suicide et sera internée plusieurs fois.
Hans Bellmer « Les Jeux de la poupée ». Avec des illustrations de Paul Éluard. (1949, Éditions premières, 82 p.) réédité récemment (2015, Dilecta, 96 p.).

Hans Bellmer confectionne en 1934 son oeuvre la plus connue, « La Poupée », qui subira plusieurs variations majeures. Il s'agit d'une sculpture représentant en grande taille (1.40 m) une jeune fille multiforme. C'est une grande poupée composée de nombreux membres articulés les uns aux autres par des boules, ce qui permet les variations avec les différents éléments de son corps, comme le nombre ou la position des membres. Les photographies de la poupée séduisent les surréalistes qui les publient dans la revue « Minotaure ».
De fait, Hans Bellmer a commencé bien plus tôt un travail de photographie et de montage, sous l'impulsion de George Grosz. Il illustre la couverture du livre de Paul Althaus « Jack der Aufschlitzer » (Jack l'éventreur) (1927, Klaus G. Renner, 49 p.) par une juxtaposition de corps, ou plutôt de parties de corps nus de femmes. Entre 1934 et1939, il fabrique un premier mannequin, bricolé au papier mâché, à l'étoupe et à la colle à bois. Modèle qu'il perfectionne ensuite, en lui adjoignant un mécanisme interne qui permet de varier les articulations. Il photographie alors les divers assemblages, évitant ainsi de refaire à chaque fois une poupée « statique ». Ce n'est pas un montage, ni un scénario que cette « mineure articulée ».
En résulte sa plaquette « Die Entstehung der Puppe » (La Création de la Poupée) parue à compte d'auteur à Karlsruhe. Deux mois après, sa plaquette est reprise dans la revue « le Minotaure » (1934, le Minotaure #6, p. 30-31), avec 18 photos, donc presque le double. Il n'y a pas de mise en scène, c'est-à-dire d'ordre dans la succession des photos. On pourra suivre l'évolution de ses modèles dans le livre de Céline Masson, « La Fabrique de la Poupée chez Hans Bellmer » (2000, L'Harmattan, 492 p.).
Puis, il perfectionne encore le modèle qui devient « plastique » et peint en rose. Des billes de bois permettent de monter et démonter toutes les parties du corps, en variant les combinaisons du nombre de jambes, de bustes, de bassins, protubérances avec abondance de seins, alors que la tête et une main restent uniques. Ce mannequin est ensuite photographié dans diverses situations et contextes, en intérieur ou dans des décors extérieurs. « L'ensemble des images du corps tendant à rester intact, même après des amputations réelles, nous pouvons penser que les parties situées à l'intérieur du cadre de notre discrétion - le menton, l'aisselle, le bras - se chargent en plus de leur signification propre des valeurs de la jambe, du sexe, etc., qui sont devenus disponibles juste par leur refoulement ».
Ces différentes positions des membres dans le corps sont des équivalents d'anagrammes en littérature. de plus, il colorie ses photos de teintes changeantes, tantôt pastel, chair, rose pâle, mais aussi de couleurs vives, rouge, jaune, bleu canard. La Poupée devient érotique, c'est une « créature artificielle aux multiples potentialités anatomiques ». Cependant, elle reste une enfant mineure, mais victime de perversions sadiques, démembrée, violentée, violée. Il faut voir dans ces expériences, le désir de l'artiste de voir la femme accéder « au niveau de sa vocation expérimentale ». Hans Bellmer a prétendu que ces poupées dérangeantes et inconvenantes étaient pour lui une forme de « compensation », une sorte de remède en réponse à la montée du nazisme, une sorte de conjuration.
Bellmer introduit ensuite l'oeil et le regard dans la scénographie. Il prend toujours des photos. Il « ouvre » aussi le ventre de la poupée pour placer des objets à l'intérieur. Les différents morceaux du corps s'organisent autrement entre eux. le rapport intérieur/extérieur se distribue différemment. La statue devient anagramme. Et effectivement
A cette époque Hans Bellmer s'exerce, avec Nora Mitrani et Joë Bousquet, à cette pratique de l'anagramme. le trio part du demi vers « Rose au coeur violet », tiré de « Arthémis » de Gérard de Nerval dans « Chimères » (1999, 1001 Nuits, 47p.). « Se vouer à toi ô cruel / À toi, couleuvre rose Ô, / vouloir être cause / Couvre-toi, la rue ose / Ouvre-toi, ô la sucrée / Vil os écoeura route/ Coeur violé osa tuer ».
On s'aperçoit que Hans Bellmer a connu une période d'étude des désarticulation / articulation des mots et des objets, bien avant sa production d'anagrammes avec Unica Zürn.
Ce poème n'est pas l'image classique du sexe féminin dans le langage des fleurs, mais plutôt celle du sexe ou de l'anus. L'analogie avec l'expression « faire feuille de rose », la coloration des muqueuses, ainsi que l'association « violet », la couleur épiscopale avec « violé » font penser à la sodomie et pédérastie pratiquées par cette partie du clergé. En effet, chaque ligne de ces anagrammes porte sur un thème érotique plus ou moins déguisé.
C'est alors qu'il rencontre Unica Zürn en 1953. Elle correspond à sa poupée. Plus, elle devient sa poupée. Elle joue à devenir sa poupée. Il la ficèle, la peint, lui fait jouer en réalité son désir de malléabilité du corps.
Que retenir alors de Hans Bellmer, un artiste, certes hors pair et un créateur dans de nombreux domaines. Sur le point affectif et psychologique, on pourrait émettre de sérieuses réserves. Sur ses liaisons quelquefois surprenantes avec des filles beaucoup plus jeunes que lui, ses fantasmes de séduction et de possession souvent limites, ses obsessions jamais assouvies. Il n'est pas sûr que sa liaison avec Unica Zürn ait pu apaiser ses traumatismes.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
L'ensemble des images du corps tendant à rester intact, même après des amputations réelles, nous pouvons penser que les parties situées à l'intérieur du cadre de notre discrétion - le menton, l'aisselle, le bras - se chargent en plus de leur signification propre des valeurs de la jambe, du sexe, etc., qui sont devenus disponibles juste par leur refoulement
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la femme serait comme une anagramme, dont il varie à l'infini les variations et métamorphoses, selon le moteur du désir
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Videos de Hans Bellmer (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Hans Bellmer
https://www.editions-harmattan.fr/livre-exposition_benoit_lepecq-9782343227139-68464.html
Lors d'une exposition en 1962 à la galerie le point cardinal, on assiste au vernissage d'une dessinatrice surréaliste, compagne d'Hans Bellmer : Unica Zürn. Celle-ci, un an plus tôt, a été hospitalisée à Sainte-Anne par le docteur Ferdière, présent au vernissage. La traductrice et journaliste Ruth Henry complète les invités. Son exil de l'Allemagne post-hitlérienne la fait agir comme une enfant aux yeux d'un cénacle d'artistes académiques et d'un pouvoir médical qui vient de découvrir les neuroleptiques. Sa grande innocence subvertit les codes: il est question de savoir si on la ré-internera ou non. Hans Bellmer représente le contrepoint masculin à son vécu désintégré, dont la place dans l'histoire surpasse la muse ou la Poupée qu'on aura retenues d'elle.
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