Avant de l'ouvrir j'ai pensé (espéré? craint?) que ce livre pourrait être un genre de labyrinthe plein de miroirs déformants, de fausses perspectives, de fumées hallucinogènes, destiné à acculer le lecteur devant un paradoxe dangereux (comme peut-être le livre qui rend fou (que je n'ai pas lu non plus)). Peut-être un surpassement de
Borges, peut-être une route vers l'envers du satori? Je n'ignorais pas qu'il devait avoir un rapport avec l'
Oulipo, j'en attendais des jeux de langue et de culture.
Peu après le début, j'ai surtout craint qu'il ne soit pas à la hauteur de son titre ambitieux, et pendant longtemps je redoutais un long parcours insuffisamment narratif, suivi d'une chute trop plate. Je vous rassure en deux mots : lisez-le.
Je crois n'en dire pas trop en révélant qu'il s'agit d'un livre. Et d'un lecteur. D'un lecteur essayant de comprendre pourquoi l'auteur ordonne au lecteur de jeter son livre.
Outre la qualité discrètement humoristique de l'écriture, j'ai bien aimé retrouver un peu de l'esprit de la "bande à Perec" : j'ai apprécié cette recherche permanente de ce que peut cacher un texte (mais je n'ai pas fait d'effort pour deviner quelles contraintes oulipiennes régissaient les chapitres). Les allusions littéraires nombreuses (en particulier à
Raymond Roussel) font partie du plaisir de la lecture, et, oui, il y a aussi un fil narratif ténu mais bien mené jusqu'à une fin logique qui claque.