Tonino Benacquista - "
Malavita" - Gallimard, 2004
Un roman de type déjanté, humoristique, faisant dans la démesure et le choc des extrêmes sans trop se soucier de crédibilité.
Histoire d'une famille nord-américaine loufoque qui s'installe dans un paisible village de Normandie, Cholong-sur-Avre : le père est en réalité un des caïds de la mafia sicilienne new-yorkaise qui – après avoir accepté de témoigner et de dénoncer – est sous la protection rapprochée du FBI, lequel tient absolument à protéger la vie de ce triste sire repenti pour que d'autres membres de la mafia en viennent aussi à se confesser. L'épouse, le fils et la fille de ce sombre personnage sont tout aussi typés, et ce quatuor infernal va semer une belle panique en France.
Les contrastes fournissent à l'auteur une belle occasion de souligner les hénaurmités du système à la française : l'un des points culminants est la visite du plombier (pp. 100 à 104 puis 123 à 127 – quelques pages, beaucoup plus convaincantes que le “
Vous plaisantez monsieur Tanner” de
Jean-Paul Dubois) aux conséquences inattendues largement bénéfiques pour les uns comme pour les autres, et même pour l'artisan. Citons aussi
- les remarques typiquement franchouillardes sur l'alimentation états-unisienne (pp. 83- 85),
- la présentation synthétique de l'américain de base (p. 132),
- l'importance d'un (mauvais) jeu de mots (Boris Godounov, good-enough – p. 140) pour assoir solidement son pouvoir,
- les mystères des sociétés anonymes sans responsable (pp. 144-149) et la solution radicale imaginée par Fred pour faire revenir une eau limpide,
- les pin-up de Playboy en 1972 (p. 212-213),
- l'exploration des joies pures de la charité par Maggie (p. 234)
et bien d'autres choses encore, bien senties.
Quant à la découverte des charmes et maléfices de l'écriture autobiographique par un mafiosi repenti, ça relève bien sûr de la bonne métaphore sur l'écriture littéraire.