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EAN : 9782378561970
176 pages
Verdier (01/02/2024)
3.79/5   33 notes
Résumé :
Imaginez une histoire, une belle histoire, avec des héros et des traîtres, des îles lointaines où gîtent le doute et le danger. Imaginez une épopée, une épopée terrible, avec deux océans où s’abîment les nefs et les rêves, et entre les deux un détroit peuplé de gloire et de géants. Imaginez un conte, un conte cruel, avec des Indiens, quelques sultans et une sorcière brandissant un couteau ensanglanté. Un conte, oui, mais un conte de faits : une histoire où tou... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
« Qui a fait le tour de quoi ? », un titre volontairement un brin provocateur de la part de Romain Bertrand pour son essai sur le voyage de Magellan.

Une vraie question quand on sait que l'Histoire n'a longtemps associé que le nom de Magellan à la première circumnavigation. Et pourtant Fernão de Magalhães n'a jamais réalisé de tour du monde (il est mort à mi-chemin), il n'a pas non plus montré que la Terre était ronde (on le savait déjà) et il n'est peut-être pas le navigateur visionnaire et héroïque que l'histoire a retenu (une image idéalisée sans doute en grande partie due à l'admiration que le chroniqueur Pigafetta lui portait).

Avant de parler de cette incroyable expédition, il faut donc replacer le projet de Magellan dans le contexte historique de l'époque. Loin des idéaux de découvertes de nouvelles terres, de nouvelles cultures, de recherches ethnographiques ou naturalistes, Romain Bertrand nous rappelle bien que le nerf de la guerre à cette époque était plutôt : gloire et richesse. Avec en plus dans le cas de Magellan un petit désir de vengeance qui l'amène à délaisser son Portugal d'origine pour partir naviguer pour le compte de la couronne espagnole. Au temps pour le romanesque de l'aventure !
Une remise en perspective intéressante et bien documentée, notamment grâce à plusieurs témoignages d'époque.

L'expédition lancée, la question se pose de savoir qui a finalement réalisé la première circumnavigation de l'Histoire. L'auteur rappelle à juste titre que l'Histoire justement à tendance à ne retenir qu'un seul nom, là où finalement ils sont nombreux à prétendre à ce titre honorifique. En premier lieu, Enrique, l'esclave malais de Magellan, qui est très probablement le premier à avoir fait le tour du monde (même si cela n'a pu être prouvé). Et qui se souvient du nom des dix-huit marins arrivés à Sanlúcar de Barrameda le 6 septembre 1522 à bord du seul navire rescapé ?
Un voyage, plusieurs candidats.

Autre point intéressant abordé dans cet essai, la vision très occidentale que nous avons de cette fameuse période des grandes découvertes et avec elle l'impression que ces audacieux marins ont ouvert des voies jamais naviguées et découvert de nouvelles terres inhabitées. Erreur !
Les commentaires de Pigafetta sont bien la preuve du contraire. Des endroits reculés comme le détroit de Magellan étaient déjà habités et toute l'Indonésie était une zone d'échanges commerciaux établie.

Si le livre n'apporte pas de nouvelles connaissances à ceux qui ont déjà lu « le voyage de Magellan » d'Antonio Pigafetta édité par Chandeigne, j'ai trouvé qu'il permettait de faire un pas de côté et d'avoir un regard plus critique sur cette aventure, et plus généralement sur les grandes découvertes.
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Ce livre est une tentative de remise en perspective du voyage de Magellan autour du monde, pour une vision moins enjolivée, plus réaliste.
Malheureusement, les textes ne sont pas nouveaux et leur réinterprétation (Le journal de bord de Pigafetta en particulier) ne permet pas d'apporter de véritables avancées sur ce qu'a véritablement réalisé Magellan.
On y découvre certains aspects de sa personnalité, et la place qu'ont pu prendre les personnage secondaires, notamment domestiques, qui ont réellement fait ce tour du monde.
Les tentatives d'interprétation économiques et culturelles manquent de profondeur.
C'est bien écrit, bien documenté, mais ça ne remet pas véritablement en cause l'histoire, sauf si on considère que le grand voyage autour du monde s'est terminé avant d'avoir été bouclé, par la mort du grand capitaine.
Peu de chose sur la découverte du passage qui porte son nom, mais la confirmation que c'est bien grâce à sa persévérance, au risque de la vie des marins, qu'il fut découvert.
Pour moi il n'y avait pas matière à en faire un livre,
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France Culture avait éveillé ma curiosité pour ce livre et les Cafés littéraires de Montélimar m'ont permis de rencontrer son auteur et renforcé mon intérêt pour l'ouvrage . Après la lecture , aucune déception : c'est un remarquable travail d'historien consacré à la remise en perspective (je préfère ce terme à déconstruction) d'un évènement mythifié . Excellente utilisation des rares sources et attention portée aux « seconds rôles » et « petites mains » de cette aventure , éclipsés par l'aura (en partie injustifiée) du personnage principal. Mise en évidence du rôle de l'européocentrisme et des nationalismes dans l'élaboration de la légende. Mais ce que montre aussi l'auteur c'est que la réalité est bien plus passionnante que le scénario retenu par l'histoire traditionnelle :l'esclave Henrique ,par exemple offrirait matière à un fabuleux roman d'aventure . Enfin, je soulignerai la qualité du style de Romain Bertrand qui fait de la lecture de ce travail rigoureux un plaisir.
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Quel livre ! Romain Bertrand, historien spécialiste de la domination coloniale en Asie, réalise en tour de force : écrire la véritable histoire de Magellan et de son expédition dans des terres "inconnues" - terres qui en fait n'ont pas attendues d'être "découvertes" par ce portugais opportuniste pour être au coeur du commerce des épices mondiales. Roman Bertrand écrit avec ironie, sarcasme et rythme, reléguant pour cela la finesse de sa solide enquête historienne dans les notes de bas de page en fin de livre ou dans des morceaux choisies de sources édifiantes qui parsèment le récit. Il écrit surtout cette histoire, ce voyage à la manière d'un roman d'aventure, retraçant les déboires, les avidités, les rouages diplomatiques, la fin peu glorieuse, en dressant le portrait de simples hommes à la recherche de gain. Il écrit pour rétablir la vérité derrière la légende dorée de Magelan, de son "tour du monde" et des soit-disantes "grandes découvertes" de l'Europe. Un ouvrage accessible à tous, rythmé et drôle qui a le mérite de lier la rigueur et la méthode historienne au souffle romanesque en 100 pages. Bravo.
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Une version de plus du voyage de Magellan. Rien de bien nouveau sur le sujet en ce qui concerne les faits si l'on connait déjà bien le sujet. Tout y est, c'est concis, bien écrit et agréable à lire. Par contre il y à un biais idéologique très dans l'air du temps qui consiste à déboulonner les idoles. L'auteur à choisis un point de vue qui se veux un peu plus critique vis à vis des Européens et minimisant leurs supériorité technique sur les peuples Asiatiques du sud-est. La figure de Magellan est écornée, malmenée pourquoi pas, mais il ne faudrait pas oublier les crimes commis par le "camp" d'en face ni tomber dans le mythe du bon sauvage ce que Romain Bertrand ne fait pas dans ce court ouvrage mais laisse craindre qu'il pourrait le faire dans d'autres. A voir.  
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critiques presse (2)
LeMonde
20 février 2024
Ce monde où l’épice-reine enfièvre le monde, où la figure de proue détrône la tête de gondole, Romain Bertrand y plonge à pleins bras, nous offrant une tonitruante évocation des gestes de Magellan (1480-1521) et d’Elcano (1487-1526) ; les premiers, entre 1519 et 1522, à « ceindre le monde » – à effectuer une cir­cumnavigation.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Liberation
16 avril 2020
Romain Bertrand montre que le Portugais et son équipage ont joué un rôle moins déterminant que ce que les manuels d’histoire nous ont enseigné.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
L’épopée des Indes, c’est cela : l’idée que durant près d’un siècle, toutes les navigations sont pensées et accomplies dans un seul et même but – rallier l’Inde, puis, surtout, l’empire du Grand Khan, dont Marco Polo a vanté les merveilles.
Et pour prouver la continuité de cette ambition, les chroniqueurs lisboètes transforment l’un des fils du roi Jean Ier de Portugal, l’infant Henri, en un personnage truculent : « Henri le Navigateur ». Mais « Henri le Navigateur » n’a jamais vraiment navigué. Tout au plus a-t-il traversé le détroit de Gibraltar puis financé, une fois devenu gouverneur de l’Algarve, certaines expéditions sur la côte ouest de l’Afrique. Et ce non pas pour remplir les blancs des portulans, mais simplement parce qu’il avait obtenu du pape le droit d’en tirer bénéfice. Son frère Pierre, lui, a voyagé loin – mais pas en direction de l’Asie : jusqu’au Danube, en passant par l’Angleterre.
Alors oui, ce sont peut-être les deux infants qui ont persuadé leur père de la nécessité de la conquête sabre au clair de l’enclave de Ceuta, sur les côtes marocaines. Mais il n’en allait de rien d’autre, semble-t-il, que de leur soif de titres. Ce que jeunesse veut…
Car pour les chroniqueurs de l’expansion portugaise, tout commence par la prise de Ceuta, en 1415, et tout s’achève avec l’arrivée de Vasco de Gama à Calicut, en 1498. Madère en 1419, les Açores en 1427, le cap Bojador, au sud du Sahara, en 1434, le Sénégal en 1441, la Guinée en 1450 : une progression par sauts de puce, en bordure de l’Atlantique Nord, à la lisière de ce que l’on appelle encore la « mer des Ténèbres ». Les caravelles ondoient le long des côtes, se faufilent dans les estuaires. Un peu d’or, beaucoup d’ivoire – des esclaves, déjà.
Pourtant, cette idée d’un grand plan, d’un dessein univoque obstinément poursuivi quatre-vingts ans durant, cette idée ne tient pas. La prise de Ceuta et des places fortes côtières du Maroc n’est en aucune façon la « phase 1 » d’un projet de conquête de l’Asie.
Quand on va voir les sources de près, comme les historiens l’ont fait, la prise de Ceuta n’est qu’un épisode parmi d’autres dans la rivalité séculaire entre la couronne portugaise et les pouvoirs musulmans nasride et mérinide. Il y est bien question du contrôle du détroit de Gibraltar, mais parce qu’il commande le négoce maritime entre la Méditerranée et la façade atlantique de l’Europe : pas parce qu’il ouvre sur le Grand océan qui conduit en Asie.
La conquête de Ceuta, d’ailleurs, c’est un surprenant point de départ, quelque chose comme l’Iliade à l’envers : la grande bataille qui décide de tout, mais placée en début de récit. Achille qui tue Memnon en lever de rideau – presque une bévue de scénariste.
Puis, c’est un carnage, pas une guerre en dentelles. Un mercenaire français, Antoine de La Sale, raconte qu’une fois les portes de la ville enfoncées, les soldats portugais combatirent dans les faubourgs « jusqu’au coucher du soleil, sans pièce de harnais désarmer ». Gomez Eanes de Zurara – le chroniqueur officiel de la cour – écrit encore qu’au terme de la bataille, les rues étaient jonchées de cadavres d’hommes, de femmes et d’enfants, et que Jean Ier les fit tous jeter à la mer. Il faut beaucoup d’imagination – et pas mal d’indécence – pour y voir le prologue glorieux d’une odyssée planétaire.
Et si la morale peinait à se faire entendre, comme il lui arrive souvent, il suffirait de donner la parole au portefeuille pour prendre la mesure du désastre. La prise de Ceuta coûte à la couronne la bagatelle de 280 000 dobras, soit une fois et demie le revenu annuel du royaume ! Même en admettant que les nobliaux aient de temps à autre besoin de tirer l’épée, ça fait quand même très cher la tuerie.
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Plus personne, des décennies durant, ne se risqua à la traversée du détroit qui porte son nom - trop longue, trop dangereuse.
Pire encore : la réalité même de son exploit commence très vite à s'estomper. Dans La Araucana - poème martial en trente-sept chants composés dans les années 1560 - le conquistador Alonso de Ercilla, grand massacreur de Patagons, se fait gloire d'avoir été le premier, en 1558, à découvrir le détroit de la mer du sud "avec seulement dix compagnons, dans une petite barque allégée de son ballast".
A la fin du XVIe siècle, certains, en Espagne et aux Amériques, en viennent même à douter de l'existence de ce fameux passage. Dans son Histoire naturelle et morale des Indes, publiée à Séville en 1590, le jésuite José de Acosta écrit : " Le détroit que Magellan trouva dans la mer du sud, certains pensaient qu'il n'existait pas, ou bien qu'il s'était refermé."
A quoi bon, en somme, avoir fait le tour de tout ça?
Peut-être pour que les écrivains aient quelque chose à dire lorsque viennent les temps mauvais où chaque mot compte, où, dans les termes de Bertold Brecht, "parler des arbres est presque un crime, puisque c'est faire silence sur de tant de forfaits".
De 1935 à 1938, Stefan Zweig travaille à une biographie de Magellan. C'est à sa jeune compagne, Lotte, qu'il confie la tâche de rassembler sur l'homme et son voyage une vaste documentation - laquelle puise d'ailleurs aux meilleurs sources universitaires de l'époque.
Le Magellan de Zweig est un héros sans failles ni faiblesses, l'archétype de l'homme qui abat un à un les obstacles qui se dressent entre lui et on rêve. Mais il est surtout une certaine idée de l'Europe, en laquelle le romancier s'efforce de croire encore, et ce alors même que la nuit monte en lui.
La vraie mort de Magellan - c'est-à-dire la mort de l'idéal qu'on lui fait endosser comme une vêtement trop grand pour lui, la fin du rêve complaisant d'une Europe toute de courage et de curiosité -, la vraie mort de Magellan a donc lieu le 22 février 1942, à Petropolis, à 65 kilomètre de la ville de Rio de Janeiro, lorsque Stefan Zweig et Lotte Altman se suicident.
Car les héros sont comme les fées et les divinités des contes pour enfants : ils ne meurent vraiment que lorsqu'on ne croit plus en eux.
C'est douloureux, ça ne se fait pas sans un pincement au cœur, mais ça s'appelle grandir.
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C’est l’alarme à Lisbonne. Pour tenter d’empêcher Magellan de se lier irrémédiablement à la couronne espagnole, Manuel Ier ne recule devant rien : flatteries, promesses de pardon et de richesses, menaces. Il recourt pour ses basses besognes aux services de son agent commercial à Séville, Sebastiáo Álvares.
À la mi-juillet 1519, Álvares se rend chez Magellan, qu’il trouve occupé à « remplir des coffres et des ballots de bouteilles, de conserves et d’autres choses », preuve de l’imminence de son départ. Sur la demande expresse de son souverain, Álvares manie la carotte et le bâton. Il assure Magellan que son retour au Portugal lui vaudra faveurs et louanges, tandis que seuls le déshonneur et l’infamie l’attendent s’il persiste dans ses intentions : « Et je lui dis qu’il était certain qu’il serait tenu pour traître pour avoir été à l’encontre des États de Votre Majesté. »
« Traître », tredor : le mot terrible, le mot sans retour est prononcé. Mais Magellan, tout à ses bagages, l’écoute d’une oreille distraite – et campe sur ses positions.
L’ire de Manuel Ier à l’encontre de son sujet félon est telle qu’il envisage d’en venir aux dernières extrémités. Le chroniqueur des Indes Antonio de Herrera nous apprend ainsi que « lorsque la nuit surprenait [Magellan et Faleiro] dans la maison de l’évêque de Burgos [le président du Conseil des Indes], ce dernier demandait à ses serviteurs de les raccompagner chez eux ». Les rues ne sont pas sûres : on craint le guet-apens et le coup de surin. Mais le monarque portugais renonce à son noir dessein, peut-être simplement faute d’assassins fiables sous la main. Il envoie toutefois une flotte de renfort aux Moluques pour intercepter l’expédition espagnole.
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Magellan…
Magellan, c’est la statue du Commandeur, une vie majuscule, le nom donné à un détroit du bout du monde et à une sonde spatiale lancée vers Vénus en 1989. Un nom qui dit les confins, les limites repoussées, l’impensable accompli.
Un nom, aussi, qui suffit à faire surgir les « Grandes Découvertes », c’est-à-dire l’idée arrogante que l’Europe s’est longtemps faite d’elle-même, de son excellence, de sa précellence – l’un des premiers maillons de la généalogie à fil tendu de notre orgueil.
Mais qui est vraiment Fernand de Magellan ?
Il est toujours plus facile de poser des questions simples que d’y répondre. Magellan c’est une vie majuscule, oui, mais des archives minuscules, du moins dès qu’il est question de l’homme et pas seulement de son exploit.
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L'homme qui rejoint son désir ,l'homme qui donne à cela même qu'il convoite le nom de sa convoitise -et qui , pour finir, abolit entre son rêve et lui tout écart en baptisant à sa ressemblance un danger en forme de détroit...Tout le mythe Magellan ,pas moins de cinq siècles de légende ,tiennent dans la ridule de ce moment , sont tapis là,dans cette encoignure du temps.
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