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sur 1283 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Civilization est certes une uchronie mais encore et surtout un fabuleux hommage à la littérature, la peintures, les arts, la diplomatie de la renaissance. Tous et toutes sont remis à pieds, rois, empereurs et grands personnages du seizième siècles sont ramenés à leur condition d'individus aussi peu maître de leur destin que le premier paysan venu. Certes l'humour et la distance créée par la perspective de ces découvreurs du “nouveau monde” (en fait celui que nous appelons l'ancien) permet la remise en perspective de la notion même de progrès, et de civilisations. Pourtant la lumière est surtout mise sur la condition humaine, nos désirs, nos pulsions, nos machinations, nos traits d'esprits. Cette ode à la grandeur des esprits de ce temps est rendue encore plus grandiose par l'universalité que lui donne la conquête du “cinquième quartier”, nom donné à l'Europe et la Méditerranée par les Incas.
Civilizations est dans le droit fil de “la septième fonction du language” qui jouait déjà avec l'histoire et la fascination amusée pour la “French theory”.
Civilizations est le livre le plus à la fois distrayant et profondément intelligent que j'ai lu ces dernières années.
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Et si l'Histoire avait eu un autre cours ? Si les vaincus du XVe siècle avaient été les vainqueurs, les conquérants les conquis, les colonisateurs les colonisés ? Laurent Binet, qui avait déjà montré dans les deux livres précédents sa passion pour réécrire l'Histoire, élargit dans « Civilizations » (à paraître très prochainement chez Grasset, avec ce « z » très aztèque du titre, mais aussi comme un rappel d'un fameux « S/Z », petit clin d'oeil barthesien à son précédent roman ?) considérablement son horizon, puisqu'il imagine rien moins que la découverte de l'Europe et sa conquête… par les Incas au XVIe siècle ! le roman débute, sous la forme d'une vraie-fausse saga islandaise – et ce n'est pas le moindre charme du récit que cette facilité de l'écrivain à apprivoiser les règles des différents genres qu'il parodie, saga, journal, chronique, à inventer ailleurs des « Incades » célébrant la geste d'Atahualpa et de ses troupes sur le modèle des « Lusiades » de Camões, avec vers et rimes !, à imaginer et à décrire de possibles et crédibles tableaux de Cranach, de Véronèse ou du Gréco – racontant le voyage d'une reine groenlandaise vers Cuba et les côtes de l'Amérique centrale et du Sud, son installation mouvementée dans ces parages, évoquant les cadeaux considérables qu'elle leur fait sans s'en douter, ce cheval, cet usage du fer, et cette possibilité de résister, par les anticorps, aux maladies, susceptibles d'enlever aux futurs conquérants leurs meilleures armes, semant les graines du renversement de l'Histoire… Puis, après avoir évoqué dans un imaginaire Journal de Christophe Colomb sa déception à n'avoir pas découvert les Indes promises, mais à avoir perdu hommes et navires en cours de route, et son retour piteux dans la Péninsule hispanique, Laurent Binet nous offre le meilleur de l'histoire avec ces Chroniques d'Atahualpa, l'épopée glorieuse et formidable d'un empereur Inca chassé du pouvoir et de ses territoires par son frère, mais destiné à devenir le futur chef du Saint-empire Romain Germanique, après s'être débarrassé de Charles Quint… Débarquant dans une Europe à feu et à sang, minée par les guerres de religion, les rivalités royales et les épidémies, en pleine évolution sociale et luttes des classes sur fond des premiers développements du capitalisme, l'écrivain fait, de manière assez crédible, du grand Inca un champion de la tolérance, acceptant l'existence des différentes croyances à côté de son propre culte du Soleil, mais aussi un grand réformateur, très vite respecté par les anciens opprimés. Et le roman devient le creuset d'une vraie relecture de l'Histoire, tant matérielle que spirituelle (on se réjouit des petits romans d'amour courtois ou plus charnel tissés dans le cours du récit, autant que d'une correspondance, aussi intellectuellement stimulante que savoureuse, entre Erasme et Thomas More !), en même temps qu'un appel à la justice et à la bienveillance en politique, très évidemment destiné à nos oreilles contemporaines… Quand finalement Cervantès tombe amoureux de l'épouse de Montaigne, avant de gagner un petit paradis cubain, on n'est pas très loin du « jardin à cultiver » cher à Candide. Ah, ce Binet-Voltaire (qui nous avait un peu déçu avec « La septième fonction du langage », à cause de certain mauvais coup de griffe donné à Michel Foucault), on se prend à rêver que le monde en germe qu'il invente ait pu enfanter le nôtre, une autre Terre que celle que nous connaissons !
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J'aurais souhaité apprendre cette histoire du monde lorsque j'étais à l'école.
Ce n'aurait pas été incongru et peut-être plus humain malgré la violence qu'on y trouve quand même.
Atahualpa me semble une personne consciente de son pouvoir, mais également souhaitant le bien de son peuple, dans la mesure du possible
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Il est des « si » qui mettent Paris en bouteille.
Ici Binet nous apporte les Incas en Europe en lieu et place des conquistadors en Amérique du Sud.
Et c'est passionnant.
D'abord parce que Binet mêle à la perfection la « vraie » histoire du XVIème siècle en Europe avec cette nouvelle version.
Ensuite parce que l'on (re)découvre une société latino américaine ambivalente, avec ses rites sacrificiels barbares d'un côté et sa très grande tolérance à toutes autres formes de cultures et religions d'autre part.
Et enfin, Binet saupoudre l'ensemble d'un humour fin et discret qui rend la lecture de ce roman amusante en plus d'être passionnante.
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"Civilizations" de Laurent Binet.

Et si......Et si Christophe Colomb n'était jamais revenu de son voyage. Si ses soldats avaient été décimés par les maladies et par les guerriers Incas. Et si ces derniers, poussés par une guerre civile, avaient eu l'idée de chercher le port d'attache des trois caravelles. Et si, dans une Europe tiraillée entre Charles Quint, François 1er, l'empire Ottoman, le Pape, Luther , les Incas avaient fait figure de libérateurs
Idée de roman très originale et magnifiquement bien contée par L. Binet qui profite allègrement de la situation pour égratigner la religion Catholique .
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Aïe Aïe Aïe ! voilà un roman qui ne manque pas de toupet ! Civilizations est un récit passionnant qui revisite L Histoire et donne une nouvelle nationalité aux conquérants : les incas. Il arme ce peuple d'un bon système immunologique, de chevaux et de fer pour leur permettre d'envahir l'Europe en force. J'ai adoré cette lecture pleine d'humour. L'auteur nous a adressé de nombreux clins d'oeil qui m'ont beaucoup fait rire. C'est néanmoins une construction précise et bien documentée qu'il nous livre. Certes, c'est une invention mais pas sans fondement. Il y a un très bon équilibre entre la farce, le géni et le scientifique. Malgré quelques petites longueurs, je vous recommande fortement ce livre.
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