Histoire de la Bibliothèque nationale de France

Institution prestigieuse, connue de tous, la BNF a une très longue histoire, que ce volume présente. Il a été rédigé par un certain nombre de spécialistes, qui semblent y travailler ou y avoir travaillé et se veut un ouvrage de référence, écrit à un moment où les bibliothèques, et plus largement les documents sur support papier, sont de plus en plus questionnés par l'essor du numérique.

Nous commençons donc par une brève histoire des bibliothèques médiévale, jusqu'à la naissance de la bibliothèque royale. Qui a un mythe fondateur, celui de la bibliothèque de Charles V. Plus qu'une première étape réelle, c'est un point de départ quelque peu subjectif, retenu par la postérité pour des raisons pas complètement justifiées. La collection de Charles V sera en effet largement dispersée après sa mort, elle ne sera pas le noyau d'une bibliothèque en construction. L'idée d'une bibliothèque royale pérenne, accessible à ceux qui auraient besoin de la consulter, et non pas liée à un souverain, qui en dispose, et qui disparaît en grande partie après sa mort, naît progressivement, et François I marque une étape importante. Mais cette bibliothèque royale dont l'idée émerge petit à petit reste mobile, sans lieu attitré, sans modalités précises de consultations, sans objectifs très clairs.

Colbert va avoir un rôle très important. Il installera l'institution rive droite, et lui donnera des moyens conséquents, permettant des acquisitions importantes, et créant des postes pour y travailler. La fin du XVIIe et toute une partie du XVIIIe sera une période faste, développant les collections et les services. C'est une entreprise de prestige : il s'agit de briller parmi les autres pays européens, d'être la première structure de ce type. La fin de l'Ancien Régime aux finances pauvres sera moins généreuse, mais des dons vont arriver, des collectionneurs passionnés transmettront leurs collections. La révolution va rabattre les cartes, les administrateurs et le personnel vont quelque peu changer, parfois très rapidement au gré des changements politiques du XIXe, mais personne ne va remettre en cause l'importance de l'institution, même si ses objectifs vont quelque peu varier. le second empire se montrera particulièrement faste.

Mais des constantes semblent se dessiner : un manque de place, car on produit de plus en plus de documents et la règle du dépôt légal, si elle permet d'enrichir les collections, pose le problème de stockage des documents, dont le nombre croît de manière exponentielle pendant un bon moment. Et il faut aussi accueillir le public, de plus en plus nombreux. Ce qui pose la question de ceux qui peuvent prétendre être accueillis, et pour pouvoir consulter quoi.
Il y a aussi un manque de moyens : par rapport à des structures comparables à l'étranger, la bibliothèque nationale est sous dotée, peut moins acquérir, a moins de personnel. Les dons permettent de combler en partie, l'investissement du personnel aussi, mais c'est une sorte de combat permanent pour rester dans la course des grandes bibliothèques.
Sans oublier les objectifs de la structure, conservation et communication des documents peuvent entrer en conflit. Il y a aussi la question de ce qui est conservé. Ce ne sont pas seulement les livres, la presse, mais les estampes, les affiches, les images, les pièces, les médailles, les objets etc. La question de transférer une partie des collections à d'autres institutions sera régulièrement posée. le choix de ce qui va être conservé, car on ne peut pas conserver l'ensemble des productions de l'esprit humain. Ainsi les sciences seront progressivement sacrifiées en partie.

Enfin, il y a l'étape essentielle, la construction de la BNF sur son nouveau site de Tolbiac, dans des locaux modernes et d'une taille comme la bibliothèque ne l'a jamais connue. Les anciens locaux de la rive droite conservent une mission patrimoniale et complémentaire. Car l'installation dans les nouveaux lieux s'accompagne d'une large ouverture à de nouveaux publics. Ce ne sont plus seulement les chercheurs qui ont le droit d'utiliser ses services et consulter ses collections, elle devient un lieu d'accueil du plus large public possible, avec des activités de plus en plus variées, qui dépassent largement une simple consultation de documents.

Enfin le numérique change la donne : il s'agit de mettre à disposition à distance, de proposer des supports. N'importe qui n'importe où dans le monde peut avoir accès à un certain nombre de ressources, les plus larges possibles.

Le livre s'achève sur des perspectives, qui comme toutes perspectives, sont hypothétiques et risquent d'être rapidement démenties par les faits. Mais qu'importe, nous avons fait un beau voyage, dans le temps, dans le savoir, dans le livre. Comme toujours dans ce genre d'ouvrages collectifs, certaines parties sont plus réussies que d'autres, certains passages peuvent être un peu anecdotiques, mais l'ensemble est de haut niveau, et visiblement écrit non seulement par des spécialistes qui connaissent leur sujet, mais aussi par des personnes impliquées dans l'activité qu'ils évoquent.