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EAN : 9782490501380
156 pages
Editions du Typhon (05/04/2024)
4.22/5   16 notes
Résumé :
En 1853, Oreste, Bigorne, José et d'autres jeunes Galiciens veulent sortir leur famille de la misère. Quand un ancien compatriote les invite à partir travailler dans des plantations de canne à sucre à Cuba, se dessine l'espoir d'une vie enfin meilleure. Mais dès le premier pas sur le bateau, ils sentent qu'une terrible épopée les attend. Arriveront-ils à reprendre en main leur destin ?

À partir d'un terrible fait historique, la vente comme esclaves à ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
« Prenez garde, vous qui quittez les confins pour une terre inconnue, à l'instar des Romains, parce que vous n'êtes pas des légionnaires et que personne ne racontera votre histoire, vous n'êtes que des gamins. »

Et pourtant, la voilà cette histoire – vraie - des 315 de la Corogne qui quittèrent l'Espagne à bord du Villa de Neda, un Jeudi Saint, pour aller quérir fortune de l'autre côté de l'océan en cultivant la canne et son sucre.

Dans Azucre, Bibiana Candia – traduite par Claude Bleton et Émilie Fernandez – ravive la mémoire d'Oreste, Bigorne, Bordenface, le Tubard, José le Croqué et les autres.

Des hommes fuyant la misère, abandonnant un frère, une mère, une épouse dans l'espoir d'un avenir meilleur, d'une fortune assurée et d'un retour dans la gloire de celui qui a réussi. Des hommes résistant à une traversée durant laquelle la mer leur fait payer leur naïveté.

Et un matin, la terre promise : « Voici Cuba, mes chers petits, maison de Dieu. » Et un accueil prometteur qui fait d'un coup oublier les tempêtes, la faim, la maladie. « Incroyable l'effet que peuvent avoir quelques vêtements propres sur un pauvre. » Un répit, avant l'horreur…

Azucre est un livre hommage à tous ceux qui croyant l'herbe plus verte ailleurs, ont tout lâché pour quitter la misère ou sauver les leurs, avant de tomber au mieux dans la désillusion, au pire dans les entrailles de l'esclavagisme.

Dans un style épique et sensible, Bibiana Candia réussit à trouver le ton juste pour glorifier la quête des tous ces hères, sans tomber dans le pathos misérabiliste. Ses héros sont nus, battus et malades, mais ils sont beaux, fiers et respectables dans leur tragédie.

« Nous sommes d'un coin qui ne nous aime pas, qui nous maltraite et nous refuse tout, peut-être que notre terre nous déteste ? Et Dieu ? S'il existe, il y a belle lurette qu'il ne nous écoute plus. »
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On ne juge pas un livre à sa couverture. Il faut bien une exception à la règle, et elle s'appelle Nicolas Badout. La couverture d'Azucre, magnifique, rouge sang, crayonnée, annonce l'aventure maritime dans son âpreté, sa force. le mouvement de vie. D'une vie.

Si le texte n'avait pas été à la hauteur de cette image, j'aurais été déçue. Comme je le suis depuis un moment. On me vante des romans d'aventure qui, à peine commencé, me tombent des mains. Des romans "vraiment romanesques"... sans aucun souffle. Une escale et je prends le large vers d'autres horizons, portée par des vents peut-être moins "vraiment romanesques" mais plus favorables.

Azucre, c'est une littérature dans un souffle. Les mots sont justes, pesés, comme les émotions, comme les personnages. C'est oeuvre d'une autrice qui a une véritable empathie pour ces jeunes Galiciens, remplis du rêve d'une autre vie. Pas meilleure, juste autre. Cuba comme un autre monde. Peut-être meilleur. Mais peut-on imaginer une terre si lointaine quand l'horizon d'une vie ne tenait qu'entre les ruelles d'un village quelques jours plus tôt ?
Ces jeunes gens embarquent pour Cuba et nous avec. le bateau craque, grouille, vomit, ça suinte, ça transpire. le chaud, le froid, la peur, les rats (saloperies de rats...). Je n'ai arrêté ma lecture qu'en apercevant la côte. Je l'ai repris, sans pouvoir m'arrêter, moi aussi, prisonnière de ces champs de cannes à sucre. J'en suis sortie par une danse, presque une transe, celle qui nous laisse sur les genoux mais irrémédiablement libre.

J'ai pensé à Attaquer la terre et le soleil de Mathieu Belezi. La même force, l'incapacité à lâcher le roman malgré l'horreur. Une langue qui vous tient. Une histoire qui vous malmène, vous pousse vers le plus noir. La religion omniprésente qui ne sauve rien ni personne. Il faudra bien plus d'un Pater Noster pour guider ses âmes errantes. Je n'oublierai pas ma découverte d'Azucre autant que celle d'Attaquer la terre et le soleil me poursuit.

J'ai tout aimé dans ce premier roman de Bibiana Candia. Si mon année s'arrêtait ici, il en serait ma plus belle lecture. Je fais me faire évangélisatrice et vous le mettre dans les mains, d'office. Sachez-le.


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"Prenez garde vous qui quittez les confins pour une terre inconnue [...] personne ne racontera votre histoire, vous n'êtes que des gamins."

Les premiers chapitres de ce récit ont la saveur suave de l'aventure : nous sommes en Galice, fin du XIXè siècle, au nord-ouest de l'Espagne, et une centaine de jeunes garçons sans le sou, attirés par l'ailleurs et une fortune facile, embarquent pour les Antilles, recrutés par un riche Galicien qui possède une exploitation de cannes à sucre (azucre) à Cuba.

Tout est neuf et excitant à leurs yeux, le trajet en mules jusqu'à Saint-Jacques-de-Compostelle, l'idée de prendre la mer pour la première fois, et surtout la perspective de se remplir les poches et de revenir riche à la maison.

Mais Oreste, Bigorne et les autres vont rapidement se heurter aux premières déconvenues : le voyage en mer s'avère chaotique et extrêmement long, entre les roulis incessants, les odeurs pestilentielles, et les rats qui infestent le navire entre autres joyeusetés. Puis une fois passée la joie et l'émerveillement qui les submergent à l'arrivée à La Havane, ils vont vite découvrir que ce n'est pas le travail qui les attend, mais un esclavagisme simple et brutal.

Dans les courts chapitres qui rythment le récit, Bibiana Candia ne parvient pas seulement à restituer avec un réalisme percutant les conditions ignobles dans lesquels ces jeunes gens sont transportés, puis livrés à la plantation comme autant de pièces de marchandises, elle excelle aussi à nous raconter la tristesse, la douleur, l'incompréhension des hommes qui se retrouvent pris au piège d'un rêve qui tourne au cauchemar, d'une brutalité dont on ne revient pas.

Pour évoquer cet épisode historique méconnu, B. Candia s'est inspirée des lettres que certains des garçons réussirent à faire parvenir à leurs familles en Espagne. Ainsi elle redonne voix et dignité à ces oubliés du bout du monde, grâce à une écriture sensible, qui sait rendre compte avec une force saisissante leurs sensations, leurs émotions. Un premier roman passionnant qui m'a fait l'effet d'une claque!

Bravo à @leseditionsdutyphon d'avoir publié ce texte d'une grande force, dans un écrin absolument sublime.
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En deux mots : "Azucre" de Bibiana Candia est une petite pépite de style, un petit bout d'archive d'histoire galicienne et un hommage poétique aux émigrés/immigrés, à leur courage dans la misère et l'incertitude.

En plus de mots ;
On a parfois tendance à ignorer ou oublier la partie peu reluisante de l'histoire des Européens. Par là, non pas les horreurs ou les crimes etc mais simplement l'histoire “banale” des Européens. le récit fictionnel ou documentaire de l'existence de la population européenne pauvre, laborieuse, sans terre, historiquement dotée de sa seule force de travail n'intéresse personne ou si peu de monde.

Dans "Azucre", Bibiana Candia s'inspire d'un fait réel et historique. Il s'agit de la tragédie vécue par une poignée de Galiciens partis travailler à Cuba au milieu du XIXème siècle et trompés sur la nature de leur emploi. Avec "Azucre", Bibiana Candia nous donne ainsi accès à une “anecdote” historique très éclairante sur la période.

Ce court roman est une petite pépite de style, un petit bout d'archive et un hommage poétique aux émigrés/immigrés, parce qu'ils sont forcément les deux, à leur courage dans la misère et l'incertitude, à leur opiniâtreté et à leur envie de vivre et d'être libres.

_ Ecrire le corps des Galiciens meurtri par l'histoire

"Azucre" parle des Galiciens à l'époque où la Galice, un peu comme la Bretagne il y a un siècle encore, était une terre pauvre où l'on souffrait de la faim. La situation des Galiciens dépendait alors beaucoup de conditions « extérieures », économiques, climatiques, sanitaires et leur vie comptait peu.

Ces conditions de vie sont directement évoquées dans Azucre, décrites sans misérabilisme et sans pathos, mais avec le souci de transmettre le sentiment de fatalité que les Galiciens partageaient à l'époque. (alors que la peste sévit !)

Elle y parvient avec brio, et cela n'en est même pas désespérant, car ce côté "fatal" a quelque chose de beau. Il est beau grâce au fait que la "cause" des personnages finit par être entendue d'une part et d'autre part, parce que la "preuve" historique de l'existence de leur cause nous est parvenue à travers les archives à partir desquelles Bibiana Candia a construit son récit.

La fatalité et la dureté du vécu des personnages Oreste, Bigorne et José sont aussi transmises par l'incarnation des personnages qui est très poussée. Bibiana Candia dans Azucre, réussit à faire sentir combien les corps subissaient, combien les esprits aussi dans l'exact même temps, et combien ils étaient marqués par la violence de l'histoire.

A la lecture, l'on sent quelque chose d'assez nerveux, une tension qui reflète le contenu de l'histoire : la faim, l'attente, la maladie, le mal de mer et le travail forcé. L'on perçoit aussi le contraste entre la violence et le désir car tous ces corps sont tendus vers la destination finale, la terre promise qu'est Cuba.

_ Azucre ou le sucre : le lointain Cuba

Les Galiciens de Bibiana Candia partent à Cuba pour y travailler dans les cultures de canne à sucre aux côtés des esclaves. Toute cette histoire est intéressante pour différentes raisons, d'abord ce que cela apprend à certains qui, comme moi, n'avaient pas forcément connaissance de l'existence de vagues de travailleurs espagnols à cette époque et encore moins connaissance des conditions dans laquelle ils devaient faire la traversée de l'Atlantique. L'autrice s'est indubitablement documentée pour retranscrire l'enfer de ce voyage mais aussi pour témoigner d'autres aspects comme le poids de l'église sur les Galiciens dans les différents aspects de leur vie et jusque dans la cale du bateau.

A cela s'ajoute que Bibiana Candia nous incite, en partageant avec nous sa vision de la chose, à nous demander ce que ce devait être que de découvrir un nouveau pays, très lointain, différent en tout point, aux moeurs, aux couleurs et aux odeurs nouvelles. Cet exotisme extrême, alors que nous sommes saturés d'images de tous les coins de la planète, nous est inconnu et même difficilement imaginable.

Enfin il est très appréciable d'avoir le fin mot de l'affaire et de pouvoir consulter les extraits des lettres envoyées depuis Cuba. Cela ajoute quelque chose à l'histoire d'Oreste Bigorne et José, la rendant plus tangible.

Pour conclure, l'on retiendra le style très efficace et reconnaissable de Bibiana Candia : la dimension oral et incantatoire, les répétitions bien dosées et la maîtrise des contrastes. Mais aussi l'intérêt évident et souligné par Bibiana Candia, que représente l'exploitation d'archives exceptionnelles ou irrégulières pour la fiction.
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Ils sont des hommes animés par l'espoir, d'une autre vie, d'une autre fortune, prêts à quitter leurs attaches en Espagne pour partir à Cuba. Là-bas, paraît-il, l'espoir est permis grâce au travail dans les plantations de canne à sucre.

L'espoir commence déjà à s'effriter quand ils doivent se rendre à Cuba à bord du Villa de Neda. Sur ce bateau, l'eau chahute, le sommeil est moindre, le confort inexistant, les tempêtes renversent le temps, les seaux se remplissent avec les estomacs des uns et des autres et déjà la mer leur donne un avant goût de ce qui les attend. Sur ce bateau, ils vivent un véritable supplice. Malheureusement, une fois arriver sur terre, la suite est tout aussi édifiante. L'esclavage est leur destination, la sueur se mêle au sang qui gicle sous les coups de fouet.

Cette histoire est vraie, elle est celle de ces Galiciens qui ont été vendus à Cuba en 1853. L'injustice domine, l'optimisme n'a pas sa place. Il y a dans l'écriture une forme de puissance évocatrice, qui détaille à merveille la misère et le malheur qui deviennent alors parfaitement palpables. L'embarquement a été immédiat pour moi, les fulgurances se sont enchaînées.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Plus d'une vie s'est écoulée depuis ce jour-là. Qu'importe si le calendrier la mesure en jours, il y a des vies entières qui contiennent moins que ce que nous avons vécu ces derniers temps, il y a plus d'une vie que nous avons quitté la maison, nous étions alors d'autres personnes.
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Des gars qui ont déjà les mains et les pieds raboteux, car pour travailler on ne peut pas être tendre.
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Les pierres vivantes, elles, ne s'intéressent jamais aux propos des gens, elles ont déjà bien trop à faire à contenir la mer, à s'accrocher au sol, à incarner la stabilité qui maintient tout en place.
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Jésus-Christ Notre-Seigneur n'est qu'une sculpture en pierre, morte sous les coups du burin.
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Il y a toujours des serfs pires que les maîtres, ils ont ainsi le sentiment de les honorer en offrant leur cruauté pour permettre à ces derniers de vivre sans souci.
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