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4,13

sur 604 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce billet concerne uniquement la nouvelle « La quête d'Averroés », de l'Aleph de Borges, nouvelles lues il y a trés longtemps. Suite au billet de Pecosa sur « Averroés ou le secrétaire du diable » et son commentaire sur cette nouvelle, j'ai repêché le livre du tréfonds de ma bibliothèque, n'en ayant plus aucun souvenir et son billet m'étant trop intrigant.
Averroés , médecin arabe, philosophe, vivant à Cordoue a l'époque de l'Andalousie musulmane ( XIIe siècle), se consacre dans son oeuvre Tahafut-ul-Tahafut ( Destruction de la Destruction) à la pensée d'un homme dont quatorze siècles le sépare, Aristote. Il est à la recherche du sens de deux mots tragoedia et comoedia de l'oeuvre du philosophe grec..... en faites il est en quête de l'évident, mais....
Borges prenant la parole à la fin de la nouvelle que je vous laisse découvrir, s'identifie à Averroés, « Je compris qu'Avarroés s'efforçant d'imaginer ce qu'est un drame, sans soupçonner ce qu'est un théâtre, n'était pas plus absurde que moi, m'efforçant d'imaginer Averroés sans autre document que quelques miettes de Renan, de Lane et d'Asin Palacios..... ».
Brillant !
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J'ai écouté la nouvelle L'Aleph interprétée par l'inoubliable Michel Bouquet.
Le narrateur qui s'appelle Borges se consacre depuis des années à la mémoire de Beatriz Viterbo, sa bien aimée, morte en 1929. Quand elle était en vie Borges aimait sa Béatrice seulement en imagination. Depuis qu'elle est morte, il se sent plus libre, il peut pénétrer chez elle, toucher les objets qui lui ont appartenu et contempler les portraits multiples qu'on a fait d'elle. A chaque anniversaire de sa mort, le 30 avril, Borges se rend chez elle et fait la connaissance de son cousin germain, Carlos Argentinos Daneri qu'il méprise à cause de ses gesticulations et de son accent italien. On sent quand même une proximité certaine avec le narrateur car le cousin est bibliothécaire subalterne et se pique de faire des vers . Carlos Daneri veut que Borges le mette en relation avec un écrivain reconnu mais Borges s'abstient de le faire.
Cependant plusieurs mois plus tard Daneri lui téléphone très agité. La maison de ses parents et de Beatriz va être démolie ! Cette fois le narrateur compatit à sa douleur. Tout l'univers imaginaire du narrateur sera enseveli et Daneri ne pourra retrouver l'Aleph sous la salle à manger.
L'Aleph ? Vous vous demandez ce que c'est. Ah ! Ah ! Vous vous dites que le cousin est un peu dérangé comme toute la famille. Vous voulez en savoir plus, je vous connais. Et vous oubliez Beatriz. le narrateur aussi...


L'interprétation de l'inoubliable Michel Bouquet est formidable. du grand art.
J' ai lu la nouvelle, je l'ai relue, elle me fatigue un peu trop la cervelle et m'émeut seulement à la fin…L'aurais-je déjà oubliée demain ?
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Voici une lecture dont il faut mériter le plaisir. Je veux dire par là qu'elle n'est pas des plus simples, qu'elle requiert parfois quelque support culturel philosophique ou théologique. Ces nouvelles, en tout cas, permettent d'entrer dans l'univers littéraire de Borgès. Ainsi nous retrouvons-nous comme Ariane dans un dédale dont il nous faut trouver l'issue. Dédale de mots, de référérences mythologiques et de légendes sud-américaines. La nouvelle dont je me souviens après 20 ans, et qui remplit parfois encore mes songes tant elle m'a frappée, c'est "L'écriture du Dieu". Tzicacan est emprisonné depuis des années à côté d'une cage où se tient un jaguar. Il voue tout son temps à la recherche du symbole que Dieu a choisi pour divulguer la formule magique qui sauvera les hommes de la fin des temps. Il comprend alors que ce symbole se trouve dans les taches du pelage des jaguars. Nous oscillons entre le rêve et la réalité, la conscience de soi et la perte de l'identité. C'est un texte à la fois simple et puissant, qui ouvre de multiples perspectives de réflexion, à l'instar de ces autres nouvelles "La demeure d'Astérion", "l'Aleph" ou encore "L'immortel". Cette lecture nous enrichit, véritablement!
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L'Aleph est le dernier texte, éponyme, du présent recueil de récits du type fantastique si cher à Borges. Ce volume se distingue par une grande variété d'approche de cet univers protéiforme  : biographie, rêve, glose, méditation, récit légendaire, spéculation sur un épisode de la vie d'un personnage historique. L'auteur oeuvre sans cesse sur des rapports de correspondance : le fini s'inscrit dans l'infini, 
 l'avers répond à l'envers, l'antonyme se dresse sur le chemin du synonyme. Les constructions narratives prennent souvent la forme de labyrinthes qui ne conduisent nulle part.

Jorge Luis Borges est un maître du cours récit spéculatif. Il allie érudition, inventivité, finesse de conception, espièglerie dans la mise en oeuvre. Ce n'est pas un pédant, il ne vous écrase pas d'un fatras pseudo scientifique, tout au contraire, il vous salue d'un clin d'oeil complice. Sans doute la plus grande figure de la littérature argentine. 
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L'Aleph est un recueil de nouvelles ecrites dans les annees 40-50 (?). Plutot que nouvelles, je devrais parler de contes fantastiques voire metaphysiques. On y retrouve des thematiques deja presentes dans d'autres recits, comme les variations sur le theme de l'infini, du temps, des labyrinthes. Chaque conte est tisse avec style, erudition (ou pseudo erudition, on ne sait jamais ce qui est vrai de ce qui est invente) et doigte. On ne sait jamais ou le chemin des mots nous mene mais on arrive souvent a bon port. le port qui donne sur la mer avec au loin la ligne d'horizon. Apres le point final, on reste la, le regard visse sur cette ligne qui separe l'ecume salee des idees et le ciel du mystere.

On pourrait poser des critiques a ces nouvelles, comme l'utilisation recurente du sceau de l'authenticite pour donner force au fantastique, la surabondances de references erudites (je ne suis pas tres erudi et j'en rate donc beaucoup !), le style parfois un peu hautain, … mais ces critiques n'ont pas annules mon plaisir de lecture. Je sais que j'y reviendrai. Je sais aussi que je ne conseillerais pas ces nouvelles les yeux fermes. Je vois milles raisons de ne pas rentrer dedans … mais chez moi, la magie a trop souvent opere. de nombreuses fois j'ai ferme ce livre, et je regardais autrement. Mon esprit etait autre, mon regard sur les choses etait eveille … un peu comme si ce livre etait l'Aleph, ce point de l'Univers ou on voit tout l'Univers de tous les points de vue …
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L'Aleph est le troisième recueil de nouvelles de Borges que je lis ces derniers temps. Publié initialement en 1949, il est chronologiquement beaucoup plus proche de Fictions (1944) que du Livre de sable (1975), et cela se sent un peu à la lecture. J'ai retrouvé des sensations que je n'avais pas eues avec ce dernier. le style, la malice de Borges sont bien là, avec ce côté érudit, parfois authentique, parfois complètement imaginaire, cette fascination pour les labyrinthes, les jeux de miroirs, le rêve et tout ce qui relève d'un infini souvent circulaire, d'un éternel recommencement. Les textes de ce recueil sont très centrés sur les personnalités qui les habitent, Averroës, Emma Zunz, Astérion, Droctulf... tous sont d'une façon ou d'une autre malmenés par un destin hors du commun. Je profite de cette chronique pour encourager à lire Borges : je vois ici et là des commentaires de lecteurs que ce nom seul intimide, qui pensent qu'une grande érudition est nécessaire pour percevoir le sel de ces nouvelles, qu'il est difficile d'y entrer. Honnêtement ce n'est pas le cas. Borges est un grand écrivain et un érudit, oui, mais il s'amuse et n'a d'autre but que se (et donc nous) distraire. Oui, ses textes se prêtent à l'analyse savante, mais non, elle n'est en aucun cas nécessaire pour prendre plaisir à la lecture !
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On ne relit jamais deux fois le même livre.
L'aleph est la première lettre de l'alphabet hébreux et des alphabets qui en sont dérivés c'est donc le commencement mais aussi la fin de toutes choses par conséquent l'Aleph c'est quelque chose de circulaire comme on peut le voir dans les nouvelles qui suivent. le temps est circulaire dans «l'immortel». Cela fait que, partir à la recherche des immortels c'est revenir à son point de départ et ce, parce que celui qui cherche erre lamentablement dans un labyrinthe, labyrinthe qui est le domaine du Minotaure, le taureau et celui-ci est
représenté dans l'alphabet phénicien par une tête de taureau: l'Aleph. Cela fait aussi que le narrateur, le romain et Homère ne sont qu'une seule et même personne
Difficile de comprendre Borges sans explications car Borges c'est de la métaphysique et ça, ce n'est pas tout le monde qui apprécie alors il vaut mieux prendre le texte comme on peut et y voir ce qu'on veut cela évite de s'arracher les cheveux et on arrive a y trouver du plaisir. Pour ma part si autrefois j'ai pris du plaisir a essayer de suivre Borges dans ses pérégrinations métaphysiques aujourd'hui je me prend moins le but avec ces états d'âmes et j'essaye d'apprécier les nouvelles pour ce qu'elles sont: des histoires mais des histoires érudites.
Otalora est gaucho il a de l'ambition et comme Iznogoud veut devenir chef à la place du chef mais il va trouver rapidement la mort car il a cru marcher dans le monde des vivants mais il était déjà mort et ne le savait pas.
Les théologiens : Pour les théologiens Aurélien et Jean de Pannonie rivaux qui, en fait, disent la même chose combattent les thèses des monotones et des histrions pour qui le temps est circulaire ou qui fini lorsqu'il n'y a plus rien à faire ou même dont on ne sait pas grand-chose et ou chacun a son avis. Leur rhétorique rivale va les amener à défendre les doctrines hérétiques auxquelles ils sont opposés avec la mort pour l'un deux et l'absence de regrets pour l'autre toutefois teintée d'une impression de n'avoir pas été à la hauteur. Mais Dieu dans tout ça qu'en pense-t-il?
Histoire du Guerrier et de la Captive : nous raconte qu'un barbare s'est laissé séduire par la civilisation et à l'inverse une captive anglaise s'est accoutumé aux moeurs des indiens qui l'on enlevé.
Biographie de Tadeo Isidoro Cruz: de gibier de potence il devient sergent de la police rurale mais là n'était pas sa vocation. Un loup ne devient jamais un mouton.
Emma Zunz : une histoire de viol qui couvre un assassinat vengeur
La Demeure d'Astérion: Un minotaure solitaire et bien attachant.
L'Autre Mort : Une mort et un sursis donné par dieu pour sa rédemption à un lâche et une deuxième histoire du même personnage
Deutsches Requiem : la mort était son métier pour régénérer l'Allemagne
La Quête d'Averroès nous plonge dans un monde d'érudit l'écriture est telle qu'on a l'impression de participer. Il y a une érudition profonde qui ne ressemble en rien à celle que procure les encyclopédies libres du web utilisée par nos écrivains contemporains, c'est une immersion dans l' ambiance médiévale de l'Andalousie d'autrefois et l'art éternels des salamalecs philosophiques et de la rhétorique fleurie orientale. Borges nous enveloppe avec «onction» dans une douce torpeur littéraire
Un véritable raffinement. Excellent.
Et encore… le Zahir, L'Écriture du dieu, Aben Hakam el Bokhari mort dans son labyrinthe, Les Deux Rois et les Deux Labyrinthes, L'Attente L'Homme sur le seuil, L'Aleph
L'Aleph toutefois reste pour Borges un point qui contient tout l'univers… du moins c'est ce qu'il dit
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L'Aleph est un recueil de 17 courtes nouvelles publiées par JL.Borges dans les années 1944/1952. Sortes de contes philosophiques, souvent situés dans un passé lointain, dans des contrées diverses. le niveau est élevé, la matière est complexe. Il faut parfois lire deux fois certains passages pour ne pas en perdre le fil. On en tirera des leçons d'humilité et de sagesse, ... au prix d'un certain effort.
Pour bien profiter du livre, peut-être ne faut-il pas chercher à le lire d'un trait, mais le poser, y revenir de temps en temps: entre d'autres lecture, lire au compte gouttes une de ces puissantes nouvelles, et s'en tenir à cela.
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C'est un drame en France : d'une part l'Imaginaire est méprisé (et dès lors qu'un livre fait trop de vues, il est recatégorisé en classiques) alors qu'il n'est pas forcément hostile ou éloigné de la littérature blanche ; d'une autre en bons gros chauvins on jette par la fenêtre tout ce qui n'est pas Imaginaire ou De-Notre-Mère-Patrie-America (et plus largement tout ce qui est littérature). C'est d'ailleurs pour ça que je vais autant à la librairie L'Une et l'Autre de Saint-Étienne (excellente adresse, soit dit en passant) alors qu'elle officie si peu dans mes genres de prédilection : il y a de tout, aussi bien de la littérature japonaise passablement à la mode en ce moment que de l'arabe, complètement oubliée, de l'anglaise, de l'hébreu, de l'altermondialiste. Et c'est pour ça aussi que je vous recommande (pour l'instant) le label L'Imaginaire Gallimard, qui tente de lever ces deux injustices en proposant non seulement des ouvrages du monde entier mais aussi de la littérature de genre lavée plus blanc que blanc façon Aux Forges de Vulcain.
Ainsi la voilà donc qui publie L'Aleph de Jean-Louis Borges, écrivain argentin célèbre pour des publics de niche tels que l'Imaginaire très alternatif et rétro ainsi que les mathématiciens à cause de sa bibliothèque où seraient entassés tous les bouquins imaginables même ceux qui ne voudraient rien dire (on en a calculé qu'il faudrait un terrain supérieur à la surface de l'Univers). On ignore pour autant que c'est justement cette obsession pour le gigantisme voire l'infini des probabilités qui le guida durant toute son oeuvre, mêlant ainsi dans ses nouvelles et d'un côté le réalisme froid des sciences et des comportements humains, de l'autre le vertige de la philosophie dès lors que le surnaturel fait son apparition. Inutile de vous dire qu'avec tout ça ça devait donner des recueils pas piqués des hannetons… Ce qu'on va vérifier tout de suite.

L'Immortel

Un vieux récit est retrouvé, celui d'un ancien romain disant avoir su trouver la source de l'immortalité. On y retrouve un net parfum antique, notamment avec une inspiration de Pline l'Ancien, ainsi qu'un léger côté lovecraftien par la découverte d'une cité déserte rongée par la folie. Mais la question qui prime reste la suivante : si vous aviez l'éternité, vous feriez quoi ? Est-ce que vous seriez seulement la même personne au bout d'un moment ?
Un thème qui pourrait sembler classique dans un premier temps, mais moins si on le mesure à l'échelle des probabilités mathématiques : telle oeuvre peut exister, or si vous avez l'éternité (et donc le temps de tout faire), tôt ou tard vous l'écrirez. de même, votre caractère et vos savoirs, mis à l'épreuve du temps et de l'oubli, se modifieront sans cesse… Vertigineux et dépaysant, on notera le fameux twist qui fait basculer de simple récit d'aventure à réflexion spéculative.

Le mort

Un récit noir sur le milieu des gauchos (avant de devenir les cauchemars de Sarkozy, il s'agit d'un terme désignant à la base des cavaliers vagabonds, bandits en Argentine, plutôt bien vus au Chili), usant du procédé classique d'annoncer la fin dès le départ pour donner une sensation d'inéluctable. Sans doute pas révolutionnaire dans son genre, mais qui possède le mérite de nous révéler un milieu criminel peu connu en Occident.

Les théologiens

Récit historique médiéval avec une touche de fantastique : deux théologiens s'affrontent dans les hautes sphères des pensées, frères ennemis face aux cohortes des pensées hérétiques. Bon, sur le papier, c'est beaucoup moins lyrique, mais vous avez pigé l'idée. Borges sait se montrer ironique, présentant des personnages eux aussi minés par les obsessions métaphysiques que ceux qu'ils combattent, tout autant convaincus du bien-fondé de leur pensée et ne faisant aucune démarche pour adopter un point de vue neutre dans leur philosophie. Alors oui c'est un truc d'intello, mais d'un côté la critique implicite sait se faire fine, et de l'autre les perspectives ouvertes par certaines idées métaphysiques font penser à la démesure d'un Egan.

Histoire du guerrier et de la captive

Deux récits historiques mis en comparaison par l'auteur : une réflexion sur les cultures d'adoption, qu'est-ce qui ferait que d'un coup on aurait envie de laisser tomber tout ce qui faisait nous pour embrasser une identité autre. La réflexion se fait nébuleuse, et est privilégiée à l'histoire qui passe ainsi au second plan. Bref, rien de très mémorable…

Biographie de Tadeo Isidoro Cruz

Encore un récit historique d'intérêt secondaire : un homme passe de soldat de l'État à mercenaire libre de son destin. La nouvelle ne raconte pas grand-chose d'autre et pourtant semble hésiter quant à la direction à prendre ; bref pas un mauvais texte à proprement parler, mais tout à fait dispensable.

Emma Zunz

Récit noir : une jeune fille veut venger la mort de son père et met au point un stratagème tordu mais rigoureusement simple. L'auteur sait se montrer humain en montrant les sentiments complexes de son héroïne ; la froideur de sa vengeance ne s'en fait que plus redoutable…

La demeure d'Astérion

Difficile à classer : si à son époque on parlait tout simplement de fantastique, cette nouvelle détient pourtant tous les critères de la mythic fantasy. le Minotaure s'y confie en effet à nous sans rien qui puisse remettre sa réalité en question, et le lecteur découvre une vérité bien moins manichéenne que ce qu'on pourrait penser croire. Encore une fois l'auteur montre une très bonne compréhension de l'esprit humain et une finesse dans son propos, ne se contentant pas d'un simple renversement des valeurs où Thésée serait le méchant.

L'autre mort

Récit d'enquête saupoudré d'historique : le narrateur (sans doute l'auteur) raconte avoir cherché à comprendre comment au front un soldat avait pu mourir deux fois. La réalité est vite découverte hélas, et s'avère au final assez simple.

Deutsches Requiem

Historique (très) noir. Un ancien nazi confie sa vie, inhumaine et pourtant extrêmement cultivée. Ou comment le Mal peut s'introduire même dans un esprit instruit. On découvre la philosophie de l'homme tortueuse et pourtant redoutablement cohérente ; le seul reproche qu'on pourrait faire est que le tout semble parfois confus, mais la psychologie du narrateur est après tout comme le recueil : labyrinthique.

La quête d'Averroës

Récit historique : un intellectuel arabe cherche à découvrir ce qu'était le théâtre. Une nouvelle érudite nous en apprenant long sur l'Espagne pré-Reconquista, encore une fois critique face à un intellectualisme orienté théologiquement, et pour ce faire pourvue d'un beau jeu sur l'ironie dramatique.

Le Zahir

Nouvelle fantastique : l'auteur se met ouvertement lui-même dans une nouvelle fantastique où il se voit de plus en plus obsédé par une pièce de monnaie, jusqu'à en oublier tout le reste. Un texte curieux : ne s'offrir aucune issue semble masochiste et incohérent avec la réalité, du coup j'ai fait des recherches rapides sur Internet pour voir si la pièce n'était pas une allégorie d'une maladie comme Alzheimer… rien !
Bref, je serais bien en peine de vous dire si j'ai aimé ou si j'ai pas aimé, ni de pouvoir développer aucune forme d'analyse. Disons seulement que la fin se fait assez poétique et pourrait rappeler à certains la transcendance vers l'Un considérée par Socrate.

L'Écriture du Dieu

Nouvelle fantastique : un ancien prêtre maya cherche à déchiffrer une écriture à partir d'aucun indice possible ou imaginable, mais qui contiendrait la clé de l'Univers. Folie ou accumulation de savoirs anciens ? La chute glaçante et terriblement logique vient nous rappeler à quel point nous autres humains nous plaçons dérisoirement au centre de tout.

Abenakhan el-Bokhari mort dans son labyrinthe

Récit d'enquête : un homme raconte à son ami l'histoire d'un monarque qui serait mort dans un labyrinthe de façon terrifiante. L'autre va essayer de démêler le vrai du faux… et ainsi amener une chute où une fois de plus l'individualité est totalement remise en question. Encore un très bon texte, bien que laborieux par instants.

Les Deux Rois et les Deux Labyrinthes

Nouvelle historique qui s'apparente plus à un conte philosophique : deux rois cherchent chacun à perdre l'autre dans un labyrinthe démesuré, le gagnant n'étant évidemment pas celui qu'on croit. Encore une fois, la logique borgésienne frappe fort en reprenant (vaguement) une idée émise dans le texte précédent ; ajoutez à ça que celui-ci tient en deux pages seulement et vous aurez une idée du brio.

L'Attente

Littréature blanche : un homme attend… Attend quoi, au juste ? On en sait rien, et le temps passe jusqu'à la chute. C'est incontestablement bien écrit, mais le fait qu'on ne nous laisse aucun indice sur le dénouement fait qu'il semble arriver de manière impromptue ; bref, une nouvelle qui ne m'a pas convaincu.

L'Homme sur le seuil

Historique saupoudré de fantastique, du temps de l'âge d'or de la colonisation en Inde ; un curieux vieillard raconte à un homme une histoire inquiétante, et pas pour rien. le dépaysement est là, le style toujours aussi ciselé, la chute inattendue ; mais nous sommes très loin des sommets de démesure du reste du recueil.

L'Aleph

Borges se retrouve contraint de supporter un poète minable obsédé par son ego démesuré ; peut-être aussi démesuré que ce qu'il cache dans sa cave… mais ça, faut pas l'dire !
Une nouvelle qui clôture en beauté, bourrée d'humour et de sense of wonder ; la découverte ressemble à celle d'un ouvrage de hard-SF, mais Borges ne s'embarrasse pas des contraintes de réalisme et de causalité : il a un postulat, et il le tient jusqu'au bout. Et ça va loin, très loin !

Conclusion

C'est un recueil riche et faisant profiter d'une grande culture ainsi que d'une philosophie sans compromis que L'Aleph, s'affranchissant de toute contrainte physique ou morale pour pousser son raisonnement jusqu'au bout grâce à la fiction. Brassant un grand nombre de genres et pourtant conservant une certaine cohérence dans ses thématiques, on y découvre la plume d'un écrivain attaché aussi bien à sa culture qu'à celle européenne et plus généralement à n'importe quelle ethnie lui permettant de définir auprès du lecteur la complexité de ses raisonnements métaphysiques ; si a priori Borges n'aimait pas Edgar Poe, on ressent le même parfum dans ses nouvelles, notamment fantastiques, émaillées de références antiques et privilégiant l'introspection à l'action. Ils m'aident à retrouver mes clés, ils sont formidables en soirée, et en plus ils écrivent des livres incroyables : arrêtez de virer les latinos, M. Trump !
Si certains textes sont plus oubliables que d'autres, ils offrent malgré tout la même qualité, portés par un style sec et sans ornement, rendant la forme appréciable de même que le fond aussi bien pour l'amateur de blanche que d'Imaginaire. Il y en a pour tous les goûts, des voyages, de l'historique, de la réflexion, de l'aventure, bref un recueil que je ne saurais que trop vous recommander, car après tout, c'est pour votre culture…
Lien : https://cestpourmaculture.wo..
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Je viens de relire L'Aleph, 15 ans après ma découverte du recueil. Je m'aperçois encore une fois qu'une seule lecture d'une oeuvre littéraire ne permet pas de goûter pleinement toutes les richesses qu'elle contient. Si ma première impression fut essentiellement marquée par l'universalisme dans la variété du monde, j'ai cette fois été séduit par le principe de la recherche du double qui est au coeur de toutes les nouvelles du recueil. Et cette quête prend souvent des couleurs épiques et labyrinthiques. L'extraordinaire érudition de Borges nous transporte dans le temps et l'espace de la pensée et de la création de l'humanité.
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