Petit essai (147 pages sans les références) qui étudie le marché du luxe en Asie, plus particulièrement au Japon, en Chine et en Inde.
Sujet qui a suscité – et suscite toujours- bien des fantasmes chez les Occidentaux, et ce d'autant plus que cette région du monde est en passe de devenir l'endroit où se concentrent le plus de richesses et le plus de riches.
Une petite précision : il est surtout ici question de luxe, et non d'une étude socio-économique ou politique sur l'apparition de ces nouveaux riches, ni de la représentation symbolique de l'argent dans ces trois pays. Même si en parlant du luxe, on peut - dans une certaine mesure - deviner ce que l'argent signifie. le titre de l'ouvrage est donc un chouia trompeur.
Le luxe comporte trois dimensions : la première rationnelle et compréhensible de tous basée sur des critères objectifs, la deuxième émotionnelle, basée sur des critères subjectifs et la troisième sociale, basée sur des critères statutaires. Ces deux dernières dimensions diffèrent d'un pays, d'une culture à l'autre et donc il est tout à fait naturel et logique de traiter le cas des trois pays de façon indépendante.
Ainsi, pour chaque pays, un expert différent se penche sur l'approche lexicologique du mot « luxe » (parfois il y a plusieurs mots) dans les langues des pays, approche très révélatrice. Par exemple, en Inde, les mots « aishwarya » (dérivant du sanscrit « ish » qui signifie dieu) et « vilas » (qui évoque une vie aussi belle que celles des dieux) ont une très forte connotation … religieuse (ben oui, c'est l'Inde quand même). Ensuite ils passent en revue l'évolution du luxe dans l'histoire du pays et les perspectives pour les 20 prochaines années.
En bref, esthétisme et traditions au Japon. Argent roi et luxe tapageur comme marqueur de position sociale en Chine. Et le luxe comme subterfuge pour ne jamais livrer son intimité à l'autre (puisque ce qu'on offre ce n'est pas soi, mais l'image de soi) en Inde.
En conclusion, cet ouvrage propose une approche originale de l'Asie, et surtout des hommes, des femmes et des sociétés qui la font aujourd'hui et la feront demain. Et pose aussi en filigranes la question « qu'est-ce que le luxe aujourd'hui ? ». Et j'aime assez la définition qu'en ont les Japonais : le vrai luxe est invisible, la perfection est l'objectif final ….
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Si l'on demande à un occidental où se trouve le siège de son moi, il montrera sa poitrine, symbolisant un moi intérieur, intime et caché au regard des autres, dont il n'a pas besoin pour exister. Un chinois montrera son visage (sa face), symbolisant un moi qui n'existe que dans le regard des autres.
L'aristocratie ne vit pas dans le luxe: il est le luxe dans son corps même. Sa volonté de se distinguer du commun peuple est radicale: si les dames de la cour passent la majeure partie de leurs journées à leur toilette et se peignent les dents en noir, c'est pour se différencier des esclaves et des animaux.
Pour Confucius, qui comparaît les vertus de l'homme de bien à celles du Jade, ce minéral est porteur d'une idée de perfection.
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Livre du jour: "Les leçons du Japon: Un pays très incorrect" (Éd. Fayard)