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EAN : 9782847202250
160 pages
Gaïa (07/03/2012)
3.73/5   22 notes
Résumé :
Paris, juillet 1942.
Un jeune étudiant provincial est prêt à quitter Paris pour rejoindre la Gironde et la maison familiale. Sa valise est presque bouclée et la chambre est rangée. Mais la visite d’un camarade de classe, d’ordinaire distant, va tout changer. Le jeune homme se voit proposer une mission : une rafle va avoir lieu, ici, à Paris, contre les Juifs. Il faut agir. La marche à suivre semble simple. Pourquoi refuser ? Il ne peut pas ne pas agir contre ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Peut-on réellement qualifier Les guichets du Louvre de roman lorsque le récit est celui d'une journée tristement célèbre imprimée dans la mémoire du narrateur, qui s'avère être celle aussi de l'auteur ?
L'élégance de la plume, l'esthétisme des phrases, le reflux des images claires et précises du passé à peine trahies par les vingt années qui séparent cette journée de la rafle du Vel' d'Hiv du récit plaident en faveur du roman.
Mais l'écriture visuelle qui saisit les couleurs, les lumières, les instants dépouillés, la difficulté à raconter ce qui s'est passé née de la vivacité des émotions dévoilent avant tout le témoignage.
Un témoignage dans lequel le narrateur se cramponne à la volonté d'aider ceux dont il peine à dire le nom tant ils sont ostracisés, à savoir les juifs, en ce jour où des autobus bleus de flics, gendarmes et réservistes barricadent les quartiers populaires de Belleville, du Temple ou encore de Poissonnière. Mis dans la confidence la veille, le jeune étudiant tente maladroitement d'aborder dans la rue ceux qui portent une étoile jaune et de les convaincre de le suivre en-dehors du périmètre encerclé.
C'est un texte captivant. On découvre un récit introspectif riche d'images scellées dans les souvenirs mais aussi de questionnements, de colère sourde, d'indignation face à la distance de ceux qui ignorent ce qui se passe. L'auteur explore aussi tous les niveaux de sa conscience entre élans avortés, maladresses, hésitations, résignations et témérités stupéfiantes, le texte prenant la forme d'un aveu avec toutes ses bonnes intentions et ses renoncements.


Le témoignage n'est pas un exercice aussi simple qu'il pourrait le laisser croire : il est difficile de restituer les faits sans trahir les images du passé par la connaissance ultérieure de ce qui s'est déroulé ou de la portée de l'évènement dans l'Histoire. Les Guichets du Louvre n'échappe pas à cet écueil, le récit est envahi d'introspections lourdes de sentiments fragiles et intenses mais aussi d'orgueil et de solennité mêlés. Comme le dit la chanson c'est peut être un détail pour vous, mais pour ma part le témoignage doit revêtir une certaine candeur pour restituer l'imperfection du moment.
Les fragments introspectifs aussi sincères soient-ils ralentissent par ailleurs le récit. le rythme est lent, accablant, comme la chaleur qui frappait cette journée du 16 juillet 1942. le temps semble figé par l'ignominie de l'action.
Toutefois, ces défauts n'altèrent pas la valeur documentaire de ce récit-témoignage qui refuse la complaisance et l'indulgence en relatant des faits et des comportements que les autorités ont longtemps passés sous silence.

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"Madame, je suis étudiant, je ne suis pas juif, et je peux vous aider à passer les barrages : ils ne demandent pas leurs papiers aux femmes accompagnées. Voulez-vous ? ..."
C'est l'une des accroches auxquelles Roger Boussinot a réfléchi en ce matin du 16 juillet 1942 afin d'essayer de sauver ne serait-ce qu'une personne de la grande rafle en cours sous Paris désignée par le nom de code "Vent printanier" mais que L Histoire a retenu sous celui de "Rafle du Vel d'Hiv".

Parce que l'une de ses connaissances est venu chez lui en ce matin du 16 juillet 1942 et lui a demandé de l'aider, Roger Boussinot décide d'ajourner son départ pour la maison familiale.
Sa mission est d'essayer de sauver un maximum de gens possibles, femmes et enfants notamment, arrêtés en cette journée du 16 juillet 1942 par la police française pour le motif qu'ils sont juifs, et pour cela les faire passer sur la rive gauche en leur faisant franchir les guichets du métro Louvre.
En se préparant, Roger Boussinot envisage différentes phrases qu'il pourra dire pour essayer de convaincre les gens de le le suivre, lui, un parfait inconnu : "La démarche est très simple. Avec un enfant, ce serait plus compliqué : un enfant ne suit pas n'importe qui, à moins qu'il n'ait conscience du danger réel. Je commencerais alors par : "Ecoute, petit ...", mais je n'ai aucune chance s'il n'a pas au moins une dizaine d'années."
Pour lui, "Il me semble que cela serait le plus dur : demander d'enlever l'étoile. Prononcer le mot juif, aussi. C'est-à-dire faire remarquer ce qui pour certains est aujourd'hui une tare, une marque, presque une infirmité."
Mais le plus difficile, ce sera tout cela, mais par dessus tout d'aborder les gens dans la rue, de les mettre en confiance, de leur expliquer ce qui est en train de se passer et qu'il ne faut surtout pas rentrer chez soi, surtout pas se fier à la police française.

Roger Boussinot revient avec "Les guichets du Louvre" sur sa propre histoire qui a croisé celle de la grande Histoire en ce jour de juillet 1942.
De façon très pudique, il raconte cette journée, la façon dont il l'a vécue, et quels sont les sentiments qui l'ont habité tout au long de cette journée et en fonction des évènements qui la jalonneront.
Il sera tenté de tout laisser tomber vers le milieu de la journée, puis il se ressaisira.
Quand enfin il réussira à convaincre une jeune fille de rester avec lui, il n'en pourra plus à la fin de journée : "Eh bien oui, je me l'avouais : qu'elle s'en aille maintenant où elle voudra, qu'elle me laisse. J'en ai marre. Marre d'elle. Marre de décider, de marcher, de discuter, d'avoir peur. Marre de la chaleur, de la police, de me trouver encore à Paris, de n'être pas à l'aise dans ma peau. Marre des Juifs ...", mais il le précisera lui-même : "N'oubliez pas combien nous étions jeunes.", comme si quiconque pourrait lui jeter la pierre d'avoir eu de telles pensées.
C'est l'une des forces de ce témoignage, la franchise de Roger Boussinot.
Il n'a pas peur de mettre des mots sur les pensées qui lui ont traversé l'esprit en ce jour et cela rend cette lecture encore plus humaine et ne fait jamais perdre à l'esprit du lecteur que le narrateur est un homme, un simple homme qui ce jour-là a essayé de faire quelque chose, d'agir au nom d'un idéal.

J'ai apprécié la lecture de ce témoignage qui offre une nouvelle vision sur la première journée de cette rafle.
Ce livre a un petit quelque chose de bien particulier, de bien à lui, sans doute parce qu'il a été écrit par une personne ayant vécu l'évènement de l'intérieur, mais pas avec les yeux de personne victime de cette rafle ou de policier, simplement avec les yeux d'un jeune étudiant qui s'est un peu trouvé malgré lui emmené dans le tourbillon de cette grande rafle.
Le style narratif n'a rien de particulier, il s'agit d'un récit et à aucun moment il n'est possible au lecteur de penser le contraire, puisque l'auteur intervient régulièrement, faisant ainsi part de ses sentiments au moment de la rédaction de son propre vécu.
Il a sans doute eu du mal à coucher sur papier son récit et il ne s'en cache pas.
Tout comme il a eu du mal ce jour-là à aborder des inconnu(e)s dans la rue, car il était à l'époque un jeune homme timide, pas forcément très sûr de lui, et il se retrouvait à devoir trouver en quelques instants les mots nécessaires pour convaincre une personne de le suivre et résumer la criticité de la situation.
A noter la note en post scriptum, très intéressante, de Roger Boussinot qui revient sur la genèse de ce récit et qui rappelle les différentes censures auxquelles a été soumise son histoire : tout d'abord la sienne, celle de revenir sur ce tragique évènement; celle de l'Histoire qui pendant près de deux décennies ne voudra entendre parler de rien; et enfin celle des maisons d'édition pour rééditer cet ouvrage.
Je précise d'ailleurs à cet effet que cela faisait longtemps que j'attendais la réédition de ce livre et je commençais à ne plus trop y croire.
J'ai énormément de mal à concevoir qu'une maison d'édition ne veuille rééditer un récit d'une telle qualité et d'une telle importance.

J'attendais depuis longtemps de pouvoir enfin lire "Les guichets du Louvre", le témoignage de Roger Boussinot sur son action en cette journée du 16 juillet 1942.
Son récit offre une vision nouvelle et intéressante de cet évènement tout en restant très pudique, une vraie réussite et un témoignage rare qu'il est utile de connaître, de lire et de faire connaître.
Lien : http://lemondedemissg.blogsp..
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Que d'émotion avec ce récit que je n'ai pas lâché.
Publié en 1960, Roger Boussinot "Les guichets du Louvre" raconte ce qu'il a vécu le jour de la rafle du Vel d'Hiv à Paris, le 16 juillet 1942.
Il est étudiant et ce jour-là, il s'apprête à prendre le train pour rejoindre sa famille et sa fiancée en province pour les vacances. Un camarade vient frapper à sa porte et sans que l'on sache ce qu'il lui a dit on comprend vite que c'est suffisamment important pour qu'il décide de rester à Paris.
Averti de la rafle, il se joint à une cinquantaine d'étudiants investis de la mission de sauver quelques personnes juives. Il va se rendre dans le quartier du Marais mais sa tâche va s'avérer compliquée car la méfiance est de mise et personne ne veut le suivre en lieu sûr, rive gauche, en franchissant les guichets du Louvre.
Un vieil homme juif qu'il aborde va se suicider en se jetant sous les roues d'un car de police. D'autres, même inquiets, vont préférer se laisser embarquer par la police française, ne se rendant pas compte de la gravité de ce qui se passe.
Ce qu'ils ne savent pas c'est que treize mille personnes, dont près d'un tiers d'enfants, vont être arrêtées et détenues au Vélodrome d'Hiver avant d'être envoyées par le train de la mort vers le camp d'extermination d'Auschwitz.
Alors qu'il désespère de trouver quelqu'un à aider, Roger va croiser le chemin de Jeanne, une adolescente juive qui travaille dans la fourrure, retardée par l'orage. Il va l'accompagner dans les rues de Paris durant tout l'après-midi de ce jour sinistre, jusqu'aux guichets du Louvre. Elle ne croît pas ce qu'il dit mais va se rendre compte elle-même de la situation en assistant à des scènes terribles.
Pourtant, il aura beaucoup de mal à lui faire retirer son étoile jaune, comme si cela lui donnait une identité, une appartenance à une famille, plus forte que le danger d'être raflée. Elle la gardera dans son sac.
Roger Boussinot réussit à décrire les événements avec beaucoup d'humilité et c'est ce qui fait la grande force de ce texte dont il faut noter que l'adaptation au cinéma par Michel Mitrani est particulièrement réussie.


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Alors qu'il s'apprête à regagner Bordeaux pour les vacances, un jeune étudiant parisien accepte une mission confiée par Favard, une vague connaissance. D'après celui-ci, en ce 16 juillet 1942, la police française a décidé d'arrêter massivement les juifs dans quelques quartiers de la rive gauche. Il doit tenter d'en sauver quelques-uns, tout faire pour les emmener passer la journée sur l'autre rive de la Seine, les éloigner pour leur éviter l'arrestation.

Dès son arrivée dans le quartier qui lui a été assigné, l'étudiant est témoin des arrestations mais il ne sait comment aborder les personnes qu'il veut sauver, tellement peu sûr de lui qu'il se sent incapable de les convaincre du danger qui les menace et de l'aide qu'il peut apporter.

Puis, il rencontre une jeune fille, d'un âge voisin du sien et cette proximité lui donne plus d'assurance et d'autorité. Grâce à elle, il a l'occasion d'entrer chez des gens, qui prévenus par la police, ont préparé leurs valise et attendent qu'on vienne les chercher. Après qu'elle a accepté d'enlever son étoile jaune, il tente de la persuader de passer la Seine, d'aller au delà des guichets du Louvre.
Ce récit de Roger Boussinot est un témoignage précieux sur cette journée de la rafle du Vel d'hiv, vue avec les yeux naïfs d'un jeune homme, qui n'a pas immédiatement compris l'importance de l'évènement. Par la suite, son témoignage eut à subir plusieurs censures. D'abord la difficulté pour lui de retracer ce qu'il avait vécu, puis la première publication dans les années 60, alors qu'il était surtout question dans ces années-là d'oublier certains épisodes de l'occupation et enfin la chute dans l'oubli, alors que l'éditeur refusait de rééditer ce livre, malgré l'intérêt que commençait à susciter cette période.
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C'est grâce à Babelio et à la Masse Critique que j'ai pu découvrir ce livre de Roger Boussinot. Une biographie, un moment de vie, son histoire dans l'Histoire. On entre dans la peau du jeune Roger Boussinot et on découvre le rôle qu'il a joué durant la « Rafle du Vel d'Hiv » le 16 Juillet 1942.
On découvre comment un petit jeune qui cherchait à rejoindre sa famille dans le Sud a finalement décidé de rester à Paris et de prendre part à la lutte contre la déportation des Juifs en France.
L'intérêt de cette lecture, c'est qu'elle permet de voir un nouveau point de vue. La plupart du temps, les récits sur ces évènements tragiques sont vus du point de vue des Juifs déportés survivants. Ici, ce qui donne une dimension particulière, c'est que c'est une personne « protégée » (entendre, sans raison d'être déportée ou arrêtée) et qui aurait pu tout bonnement choisir de continuer sa vie sans se préoccuper du destin d'inconnus qui décide de s'engager et d'agir, à son échelle.
Nous sommes donc dans les souliers de ce jeune homme, qui nous montre ce Paris menaçant malgré sa beauté, cette dichotomie entre la vie des non-juifs et celle des juifs. Une seule journée couchée avec douleur, avec ardeur, sur cette centaine de pages. On y sent la difficulté et en même temps la nécessité de raconter, de retransmettre cet événement de l'histoire qui l'a personnellement bouleversé mais qui a bouleversé tant de vie. Un récit d'une honte française, un hommage poignant à ces personnes qui n'ont pu être épargnées.
En ce 70e anniversaire de la Rafle, et parce que les années passent, je trouve que ce genre de récit est nécessaire, important. Il ne faut pas que les générations présentes et futures puissent avoir l'impression que cette guerre rasciste fait partie de l'Histoire ancienne au même titre que le règne de Louis XIV. Ces horreurs ont existé, il y a 70 ans seulement. Transmettons ces témoignages pour ne pas l'oublier.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Et moi, là-dedans, […] au gré d’un monstrueux hasard, le miracle qui ne s’est pas encore manifesté, la main qui ne s’est pas encore tendue. J’ai le pouvoir d’arracher un être humain au cauchemar, sinon de lui rendre la vie, d’interrompre au moins son agonie. Je suis celui qui peut bloquer le déclic, mettre le cran de sûreté, ne serait-ce que jusqu’à demain : celui qui peut en sauver au moins un, comme a dit Favard, dérisoire et pourtant quelle victoire !
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Eh bien oui, je me l'avouais : qu'elle s'en aille maintenant où elle voudra, qu'elle me laisse. J'en ai marre. Marre d'elle. Marre de décider, de marcher, de discuter, d'avoir peur. Marre de la chaleur, de la police, de me trouver encore à Paris, de n'être pas à l'aise dans ma peau. Marre des Juifs ...
N'oubliez pas combien nous étions jeunes.
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Chaque regard porté sur eux, même innocemment comme les miens, et qui les identifiait comme Juifs, les poignardait; chaque fois qu'ils lisaient le mot juif sur les murs, dans le journal, ils mouraient un peu plus: on les a lentement égorgés, leur sang a coulé goutte à goutte.
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La démarche est très simple. Avec un enfant, ce serait plus compliqué : un enfant ne suit pas n'importe qui, à moins qu'il n'ait conscience du danger réel. Je commencerais alors par : "Ecoute, petit ...", mais je n'ai aucune chance s'il n'a pas au moins une dizaine d'années.
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"Vous savez, dis-je - et je ne souris plus, ma gorge est serrée - qu'ils arrêtent tous les Juifs, même les femmes, les enfants..."
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