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EAN : 9782907681926
224 pages
Tristram (05/04/2012)
5/5   1 notes
Résumé :
A l'heure de l'accélération technologique et de tyrannie de l'immédiat, comment encourager la vision longue et la prise de responsabilité à long terme?
Pour répondre à cette question, les chercheurs et créateurs réunis au sein de la "Long Now Foundation" ont lancé, en 1996, le projet d'une Horloge monumentale capable de fonctionner pendant les 10000 prochaines années.
"Alimentée par le changement des températures saisonnières, elle avance d'un cran par... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Quel rapport entre Daniel Hillis et Brian Eno ? Quelle étrange projet lie ce brillant ingénieur issu du MIT qui a propulsé le calcul informatique à des vitesses inouïes et cette rock star internationale devenue adepte des musiques d'aéroport saturée d'éternité? Réponse ; The Clock of the Long Now, l'Horloge du Long Maintenant. Daniel Hillis a créé le concept ; Brian Eno lui a trouvé son nom et Steward Brand, l'auteur de ce livre, en est l'évangéliste. Il préside une fondation dont le projet est de construire l'horloge la plus lente du monde qui avancera d'un cran chaque année, sonnera une fois par siècle et dont le coucou sortira à chaque nouveau millénaire.

Le Moyen-Âge européen avait placé le beffroi au coeur de la Cité ; on assistait alors à la naissance de ce qu'on n'appelait pas encore le capitalisme. Ce beffroi, souvent indépendant dans les villes du nord, était le plus souvent clocher d'église mais il dominait toujours la halle centrale et la place du marché. Véritable coeur de la ville, il rythmait l'économie.
Mais depuis longtemps la lourde horloge d'antan s'est faite menue; devenue montre elle se porte au poignet telle un fer. La miniaturisation de l'électronique - désormais à l'échelle microscopique - arrivera-t-elle à nous faire oublier que les horloges qui règlent désormais l'activité humaine se sont disséminées dans notre environnement en milliards de petits quartz piézoélectriques qui rythment le travail des microprocesseurs et à travers eux, rythment notre propre travail, notre pain quotidien. Les modes de production ainsi que les modes de consommation s'accélèrent avec une montée en puissance technologique inédite. Jusqu'à quelle limite ultime la fameuse « loi de Moore » qui a prédit sans faille depuis 1965 l'accroissement exponentiel de la puissance de calcul de microprocesseurs (doublement annuel) va-t-elle continuer à mettre en tension le temps humain et le temps technologique ? Y-a-t'il une limite?

Les concepteurs de l'Horloge du Long Maintenant l'affirment: cette limite existe mais ce n'est celle qu'on croit – celle qui interdit toute miniaturisation au-delà de l'échelle d'un seul atome ; nous n'y sommes pas encore. La limite en question est humaine et elle est imminente ; elle porte un nom ; Singularité. le concept est emprunté à l'astrophysique (on le connait mieux sous le nom de Trou noir) ; dans ce contexte, il désigne ce point de non-retour de l'évolution technologique où celle-ci ne procèdera plus de l'activité humaine mais de celle de machines autonomes avec tous le risque de voir l'humanité perdre la maîtrise de son destin.

Tel est le diagnostic. La Long Now Foundation propose un remède pour offrir à l'humanité un instrument de redécouverte du « bon usage de la lenteur » si chère à Pierre Sansot (qu'une telle idée aurait laissé pantois). Responsabiliser les consciences devant le temps lent, celui des générations qui s'engendrent au fil des siècles, celui des cultures qui mutent au fil des millénaires, celui des continents qui dérivent sur les millions d'années. Pour garder la « mesure de l'homme » selon l'expression consacrée du credo humaniste, la Fondation du Long Maintenant s'est donné pour mission de construire une horloge monumentale, à l'instar du beffroi de jadis. Mais quand celui-ci battait le rythme du marché et de la satisfaction des besoins immédiats, l'Horloge du Long Maintenant voudrait donner le pouls lent de l'écologie, de la responsabilité collective dans le long terme.

Autant la connaissance scientifique nous avait rendus capables d'appréhender le temps long avec la géologie et l'astrophysique ; autant nous n'avons jamais su nous approprier ces échelles dans l'intimité de notre sentiment individuel des choses. Enfin, il n'est pas anodin que les concepteurs du projet aient voulu associer à l'horloge une bibliothèque comme autrefois, la grande halle l'était au beffroi de la ville; les échanges matériels laissent la place aux échanges intellectuels. C'est ici que s'affirme le plus clairement l'identification des promoteurs du projet avec les humanistes De La Renaissance. Et comme au temps des Borgia et des Medicis, l'argent de riches bienfaiteurs comme Jef Bezos (Amazon) ou Warren Buffet à beaucoup aidé à l'avancement de ce projet au demeurant assez somptuaire (http://longnow.org/clock).
Plusieurs horloges du Long Maintenant seront construites. L'une a déjà été bâtie dans une montagne au milieu d'un désert texan. D'autres sont en chantier pour être installée dans des villes. Ce livre raconte l'histoire et la philosophie de ce projet étonnant, quasi religieux, mégalomaniaque peut-être mais qui est sans aucun doute l'expression d'une culture nord-américaine dans toute sa paradoxale singularité nourrie d'universalisme.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Je faisais de la chute libre autrefois - jusqu'au jour où mon parachute m'a lâché -, et peux donc me porter garant du témoignage qui suit. J'ai demandé à Rosalind Picard, professeur au Media Lab du MIT, s'il existait une dimension temporelle dans les émotions. Voici sa réponse:
"Je me souviens qu'en chute libre - ou plus exactement "en vol" pendant la chute libre -, quelques minutes dans le ciel équivalent mentalement à une journée d'aventure. Les parachutistes qui sautent caméscope sur la tête pour enregistrer les évènements une fois en l'air sont obligés de filmer deux fois plus vite que la vitesse à laquelle ils comptent lire la vidéo. C'est la seule solution pour tout ait l'air "normal". Le cerveau, émotionnellement sous adrénaline, tourne beaucoup plus rapidement pendant la chute libre que lorsqu'on visionne la séquence après coup. En fait, la vidéo ainsi "normalisée" tend à recréer cette montée d'adrénaline chez la personne qui la regarde.

Le terme de chute libre décrit assez bien notre époque. Il évoque le frisson du danger, l'accélération, la glorieuse sensation de liberté, et la chute. L'autre raison pour laquelle j'ai arrêté le parachutisme en chute libre est d'avoir un jour vu ce que ça donnait de l'extérieur. Quand vous regarder quelqu'un sauter du même appareil que vous, la personne est debout sur le seuil, sourit farouchement dans le souffle des hélices, puis se jette dans le vide et devient minuscule et lointaine. Quand vous êtes la personne qui saute, en revanche, c'est vous qui repoussez l'avion, c'est lui qui devient minuscule et lointain, et votre combinaison crépite violemment dans le vent à 200 km/h. Dans le vif de l'expérience, ce que vous voyez est excitant, mais pas effrayant. Puis j'ai regardé quelqu'un sauter d'un autre avion à proximité. En spectateur, j'ai vu la scène comme elle est réellement: le type tombe comme une pierre.
Alors, en plus du super-pied que j'ai pris en pratiquant la chute libre, j'ai retenu trois choses au niveau viscéral. Un, ne jamais compter entièrement sur le matériel. Le défaillance de mon parachute était statistiquement inévitable. Deux, toujours avoir un système de secours. Je me souviens m'être fait la remarque en tirant la poignée du deuxième parachute, "pourvu que celui là fonctionne, je n'en ai pas d'autre." Je n'aurais vécu que huit secondes de plus s'il ne s'était pas ouvert. Trois, chercher un cadre de référence extérieur. Ceci explique peut-être mon intérêt pour le projet Horloge/Bibliothèque: l'Horloge est le cadre de référence extérieur, la Bibliothèque est le système de secours.
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Selon Kevin Kelly, "Isaac Asimov disait que la science-fiction était née lorsqu'il est devenu évident que le monde changeait en l'espace d'une vie humaine, et donc que penser l'avenir devenait une question de survie individuelle." Le futurologue de la nanotechnologie Eric Drexler en convient: "avec le temps je me suis rendu compte que les gens qui connaissaient les classiques de la science-fiction ont bien plus de facilités à penser l'avenir, les technologies de demain, les retombées politiques de ces technologies, etc." Au Global Business Network (GBN), la société de planification par scénario qui m'emploie, nous expédions régulièrement des livres de science-fiction aux adhérents du "réseau", et lorsque des écrivains tels que Williiam Gibson, Bruce Sterling, David Brin ou Vernor Vinge acceptent de venir participer à des ateliers de planification avec nos clients, cela enrichit la qualité du travail. La planification par scénario suppose d'explorer l'environnement d'une organisation dans la grande variété de ses avenirs possibles, en profondeur, et de manière convaincante. Une compétence en science-fiction accroît cette profondeur.
Pourtant, explique Freeman Dyson, les écrivains comme les prévisionnistes ne cessent de passer à côté des développements futurs les plus importants: "la prévision économique passe à côté par manque d'imagination."
Par manque d'imagination? Oui, pour une raison structurelle presque jamais prise en compte. En tout temps, les différents évènements "probables" dans l'avenir restent infiniment moins nombreux que la multitude d'éventualités quasi impossible - si nombreuses et individuellement si peu probables, que futurologues comme furitimistes [néologisme crée par SB pour désigner des pseudo-futurologues qui associe un programme à leur prévisions] ne prennent pas la peine d'en examiner ni d'en envisager la moindre petite fraction. Or l'une de ces innombrables éventualités aura probablement bien lieu. Ainsi la réalité finit-elle statistiquement par être toujours extraordinaire. La fiction n'a pas cette liberté. La fiction doit être crédible; pas la réalité.
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Quelle quantité d'information existe-t-il aujourd'hui dans le monde, et à quoi correspondrait-elle sous l'angle des capacités du stockage numérique? Michael Lesk, de chez Belle Communications Research, en a effectué le recensement détaillé. Le contenu de la Bibliothèque du Congrès est communément évalué à vingt-millions d'ouvrages, soit deux téraoctets de données texte ("de quoi remplir vingt mille disques ZIP de 100 mégaoctets", pour utiliser les critères pittoresques de 1998 [année où fut écrit ce livre]. En comptant toutes ses archives graphiques, vidéo et sonores, la bibliothèque du Congrès totalise trois pétaoctets, soit trente millions de disques ZIP du 100 Mo. (...) Lesk estime que le contenu global du World Wide Web a dépassé celui de la bibliothèque du Congrès en 1998, et il continue de doubler tous les 3 ou 4 mois.
Lesk estime la quantité totale d'information dans le monde - en comptant chaque carte postale, chaque appel téléphonique, chaque hyperlin, chaque publicité télévisée - à vingt mille pétaoctets: cent vingt miliards de disques ZIP de 100 Mo, quatre mille fois la bibliothèque du Congrès. Une grande étape du franchie (en toute discrétion) en 1998: les capacités de stockage disponibles ont dépassé la quantité d'information contenue dans le monde. Nous avons aujourd'hui plus d'espace de rangement qu'il n'existe de choses à ranger. Autrement dit, concluait, Lesk, "Nous allons pouvoir tout sauvegarder - nous n'aurons pas à jeter d'informations - et l'information de base ne sera jamais consultée par l'être humain." La plupart de ces informations se contenteront de circuler d'un ordinateur à un autre.
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Le corps de la plupart des animaux est configuré sur l'avenir, nos visages tournés vers où nous allons. Notre mental a ce que le philosophe Derek Parfit décrit comme une "tendance à l'avenir". Une douleur future, comme la perspective d'une visite chez le dentiste, mobilise plus d'attention qu'une douleur passée. On va parfois retarder provisoirement un plaisir futur simplement pour le savourer plus longtemps, mais on est moins intéressé par ce même plaisir dans le passé. "Nous allons d'anticipation en anticipation, disait Samuel Johnson, et non de satisfaction en satisfaction."
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C'est un professeur d'histoire des religions, James P. Carse, de l'université de New York, qui eut l'idée du "jeu infini". Son bijou de littérature, Jeux finis, jeux infinis (01986), s'ouvre par ces mots: "Le but d'un jeu fini est de gagner, celui d'un jeu infini est de continuer à jouer."
Le football, les élections et l'essentiel du business sont des jeux finis; on gagne ou on perd. La famille, le jardinage et les pratiques spirituelles sont des jeux infinis: perdre n'a pas de sens. Les jeux finis, souligne Carse, ont besoin de règles fixes afin que gagnant et perdant soient déterminés de façon juste; les jeux infinis se nourissent de changements ponctuels dans les règles (d'un commun accord entre les joueurs) afin que le jeu s'améliore en permanence. Les joueurs finis entendent contrôler le futur; les joueurs infinis s'arrangent pour que le future ne cesse de surprendre. Les joueurs finis, défiant la mort, visent l'immortalité à travers leurs victoires fameuses; les joueurs infinis "offrent leur mort comme une façon de continuer le jeu - ils ne jouent pas pour leur propre vie, ils vivent pour le jeu leur survive."
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