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EAN : 9782352893417
144 pages
MEMO EDITIONS (15/06/2017)
4.25/5   2 notes
Résumé :
Ce classique de la littérature tchèque a été publié pour la première fois en 1932. Depuis, il n’a pas cessé d’être réédité en République tchèque, la dernière édition datant de 2008. En France, il est pourtant depuis longtemps épuisé.
Nous proposons aujourd’hui une édition de cinq de ces neuf contes : le conte des oiseaux, le conte des génies de l'eau, le conte du vagabond, un conte postal, le grand conte médical. Des cancans à un souci de noyau coincé dans l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
L'an dernier, j'avais été charmé par « Histoires de chien et de chat » de Josef Čapek et en cette fin d'année-ci, j'ai choisi de récidiver avec ce genre, avec ces « Cinq contes pas comme les autres » de son frère Karel Čapek. C'est toujours un plaisir de se plonger dans ces histoires fantaisistes !

Dès le premier conte, « le conte des oiseaux », j'ai retrouvé cette expression que les frères Čapek utilisent souvent dans leurs histoires destinées aux enfants : « nom d'un petit bonhomme », et j'ai appris que cela correspond à « nom de Dieu ». Comme beaucoup de jurons, il s'agit d'une allusion détournée à la religion pour éviter le blasphème. Au fil de ma lecture des autres contes de ce livre, j'ai trouvé d'autres expressions du même registre, comme « nom d'un p'tit Jésus », « Crénom de Crédié », « A Dieu ne plaise », ou encore « Ventre-saint-gris » (une expression qui était chère paraît-il à notre cher Henri IV !). Ces expressions bibliques et évangéliques nous paraissent bien anciennes aujourd'hui, mais ces contes ont été écrits dans les années 1930, et Karel Čapek croyait à des vertus comme la compassion et la délicatesse envers autrui, des vertus qui étaient transmises par la religion.
Il y a beaucoup d'imagination dans ce premier conte, « le conte des oiseaux », sous la forme d'un récit à sketchs, où interviennent à tour de rôle plusieurs oiseaux dont une hirondelle américaine qui veut montrer aux autres comment on construit chez elle un nid en béton ! Dans un des récits de ce conte, il y a une merveilleuse histoire d'oeufs d'or qui tombent du ciel, des oeufs d'anges !
On y trouve aussi une drôle expression ancienne : « dès potron-minet », qui signifie « dès que l'on voit poindre le derrière de l'écureuil » ! (J‘aime beaucoup les écureuils !)

Dans « le conte du vagabond », il y a énormément de noms français écrits dans le texte, des noms de lieux, de personnages français connus. Vous me direz que c'est un peu bizarre pour un auteur tchèque ! Eh bien non, car Karel Čapek voyageait beaucoup et en 1911, il passait déjà l'été en France où il découvrait les jeunes poètes, le cubisme et Bergson. Vers 1920 déjà, il se faisait un nom en Tchécoslovaquie comme à l'étranger et possédait alors sa place en littérature. Il a traduit les poèmes de Baudelaire et d'Apollinaire, c'est dire s'il maîtrisait bien la langue française !
Dans l'écriture de ce conte-ci en particulier, « le conte du vagabond », on retrouve tout l'humanisme et la bienveillance à l'égard d'autrui, dont Karel Čapek a toujours fait preuve dans ses écrits.
Ce conte qui met en scène un vagabond honnête m'a particulièrement touché.
Karel Čapek saisit la vie ordinaire des gens simples et il arrive à nous étonner avec un mélange de fantaisie et d'humour, avec de l'ironie et un peu de mélancolie aussi.

J'ai bien aimé également « le conte postal », dans lequel un facteur doit mener une enquête tout à fait étonnante. Il y a une lettre qui a été postée sans adresse et il lui faut trouver le destinataire, mais aussi l'expéditeur ! Des petits lutins qui ont plus d'un tour dans leur sac vont l'aider.

L'image de la 1re de couv. du livre représente le magicien Magias. On le reconnaît une fois que l'on a lu l'histoire qui nous est contée dans « le grand conte médical ». Un bien étrange nom pour un conte ! Etrange comme la mixture que son apprenti mélange dans un chaudron à potions, une mixture faite de poisse, de poudre infernale, de fiel-de-terre et de rage-de-mémé (liste non exhaustive !), enfin tout un tas d'ingrédients diaboliques !
Dans « le grand conte médical », plusieurs docteurs discutent entre eux de cas particuliers complexes qu'ils ont rencontrés dans leurs patientèles.
Ce conte comprend plusieurs parties, dont l'histoire de la princesse « solimanesque » qui embarque un simple bûcheron dans une histoire abracadabrante. Un incroyable quiproquo l'amènera comme par magie, à sauver de son mal apathique la fille d'un sultan !
Il y a aussi « l'histoire du heïkal », c'est celle d'un fantôme brailleur qui terrorise tout le monde dans les bois jusqu'au jour où il perd littéralement la voix !
Dans « L'affaire des ondines », il est question d'une
« roussalka », une fée de l'eau, qui a trébuché sur un rayon de lune, qui s'est fait mal à la gambette, et qui a besoin des soins urgents d'un docteur, mais pour le médecin, soigner la jambe d'une roussalka, c'est un « fichtre de fouchtra de turbin » ! Y arrivera-t-il ? En tout cas il va lui donner le conseil, ainsi qu'à ses copines les fées, d'émigrer à Hollywood et de se faire actrices ! Car « les fantômes et autres apparitions merveilleuses n'ont plus de place dans notre monde d'aujourd'hui ».

Dans ses contes, Karel Čapek laisse parler ses personnages, qui racontent des histoires vraies ou des mensonges. Leurs histoires, ils les disent avec un tel aplomb et une telle éloquence qu'elles sont franchement invraisemblables, et qu'elles nous font rire !
Et il arrive souvent que les personnages se lancent dans des énumérations qui n'en finissent pas et c'est évidemment jubilatoire ! Par exemple dans le « conte du facteur » où s'enchaînent pas moins de trente synonymes d' « imbécile » !

Karel Čapek a une attitude à la fois critique et bienveillante envers « le merveilleux ». Je trouve que ce livre de contes est bien plus que de la littérature enfantine, car au travers de ses textes, Karel Čapek, sans en avoir l'air, nous tient un propos sur la société contemporaine et sa modernité.
Un exemple pour illustrer cela : le dénouement du « conte postal » qui montre les performances d'une Bugatti qui bat des records de vitesse et va s'envoler ! C'est une histoire d'amour qui se termine bien grâce aux avancées de la technologie.
Dans « le conte des oiseaux », les pigeons déplorent que les voitures aient remplacé les charrettes, car les voitures en roulant vite, font envoler les graines qui se trouvent sur la route et de ce fait ils n'ont plus rien à manger !

Et il faut remarquer aussi que dans ces histoires, le plaisir s'accompagne aussi d'un souci.
On sent Karel Čapek préoccupé de vouloir conserver un lien entre un univers enchanté et un monde contemporain qui est loin d'être paisible. Dans le « conte des génies de l'eau », ondins tchèques et ondins allemands cohabitent, mais souvent ils ne se comprennent pas. Il faut certainement y voir des allusions à des sujets politiques qui touchent à des questions nationales !
Les génies des eaux sont bien connus de toutes les cultures slaves, où ils sont présentés comme des créatures fascinantes mais en même temps dangereuses. Par exemple, la « roussalka », l'ondine, avait un corps diaphane et n'hésitait pas à tuer les hommes qu'elle séduisait.
Les ondins, eux, qui vivaient dans les étangs, capturaient les humains qui se risquaient sur leur rive et les enfermaient dans des petits pots.
Et dans ces contes de Čapek, les ondines tout comme les ondins, sous leurs allures obsolètes et charmantes en même temps, posent des questions légèrement angoissantes de leur époque puisqu'ils se trouvent contraints de changer de lieu de vie pour survivre !

Il faut noter aussi que toutes ces histoires sont ponctuées par de nombreux dessins en noir et blanc.
Ce sont des illustrations de Josef Čapek, (le frère de Karel Čapek), des dessins naïfs, qui sont faits de lignes très simples, des dessins expressifs qui vont à l'essentiel, des dessins qui ressemblent à des caricatures de presse. Je trouve que leur aspect enfantin et burlesque s'accorde parfaitement au type de personnages et aux situations des récits de ce livre.
Voici donc des contes qui sortent bien de l'ordinaire et qui portent bien leur nom de « contes pas comme les autres » !
Un beau livre à s'offrir, à offrir aux enfants, et aux grands-enfants que nous sommes restés ! 5/5 !
Commenter  J’apprécie          1922
Comme son titre l'indique il s'agit de cinq contes, destinés à priori pour un jeune public, et joliment illustrées par des dessins de Josef, le frère de l'auteur. Nous retrouvons le ton habituel de Karel Čapek fait d'un mélange d'humour, de second degré, mais en même de profonde bienveillance et humanité.

Les contes se placent résolument à l'époque à laquelle ils ont été écrits : la science a fait des progrès et prétend expliquer le monde. Pour se déplacer plus de tapis volants, mais des automobiles. Mais survivent quelques représentants des anciennes espèces : ondins, rusalka, lutins, magiciens...Qui s'adaptent comme ils le peuvent au monde moderne, qui ne croit plus qu'à moitié en leur existence. Alors pour subsister, ils doivent s'adapter, faire de la politique, ou devenir starlette à Hollywood.

De jolis textes, poétiques et drôles, qui ont gardé les structures en cascade des contes, un certain nombre de détails aussi. Ils dégagent une nostalgie d'un monde où la magie était possible, ou tout au moins d'un monde dans lequel on pouvait encore y croire. Avant que la raison ne se mette à vouloir tout expliquer, et réfuter beaucoup de choses qui donnaient du charme à l'existence. Parce que l'imagination, qui habille le monde avec des couleurs chatoyantes est peut être aussi indispensable que les objets ayant une utilité bien définie.
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critiques presse (1)
Liberation
02 juillet 2017
Des contes tchèques des années 30, écrits dans une langue vive, joyeuse, riche et amoureuse.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Alors comme ça, les enfants, vous ne comprenez pas ce que les oiseaux racontent ? (..) Vous savez que certaines nuits on voit filer des étoiles ?
Eh bien, certaines de ces étoiles filantes ne sont pas du tout des étoiles, mais des œufs d’ange, des œufs en or. Et comme ils tombent du haut du ciel, ils s’enflamment dans leur chute et deviennent incandescents et brillent comme le feu. Et c’est la pure vérité, puisque c’est le corbeau du Danemark qui l’a dit.
Seulement les hommes appellent ça différemment, quelque chose comme
« mètre », ou « météo », ou « moto », je ne sais plus.
-Météores, dit monsieur Merle, qui en avait entendu parler sur
Radio Bleu-ciel.
-Précisément, acquiesça l’étourneau. Et donc, à l’époque, les oiseaux ne savaient pas voler, ils courataient par terre, comme les poules. Mais quand ils virent tomber du ciel les œufs d’ange, ils se dirent qu’ils feraient bien de les couver, pour voir ce qui allait éclore (..)
Tous les oiseaux du monde vinrent couver l’œuf. Puis ce fut le tour de la poule. Et la poule protesta : « Faut pas me prendre pour une oie ! » Et elle refusa de couver.
Et à force de couver les uns après les autres, ils virent de l’œuf éclore un ange du Bon Dieu. Et quand il se fut dégagé de sa coquille, au lieu de pépier et gazouiller comme font les autres oiseaux, il s’envola au ciel en chantant
« Alléluia ! Hosanna ! » Et il leur dit : « Chers oiseaux, je vais vous faire un cadeau pour m’avoir couvé. Voici qu’en récompense, vous aurez le pouvoir de voler comme des anges. Vous agiterez des ailes et vous verrez -hop !
hop ! hop ! vous vous retrouverez dans les airs.
A mon commandement : un, deux, trois ! » Et à trois, tous les oiseaux se mirent à voler, ce qu’ils font jusqu’à aujourd’hui. La poule est la seule à ne pas savoir voler, car elle n’a pas voulu couver l’œuf d’ange. Et c’est la vérité pure et dure, car c’est le corbeau qui me l’a dit.
Alors tous les oiseaux ballotèrent de la queue et agitèrent des ailes : et, comme le leur avait appris l’ange, chacun chantant à la recherche du bonheur, ils s’envolèrent.
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François Leroi ne jouissait pas d’une très bonne réputation et il n’était, en vérité, rien d’autre qu’un vagabond ; il ne volait que le temps du Bon Dieu
(or le Bon Dieu en a tant, du temps, qu’il n’en a rien à faire). Pour le reste il ne pouvait que « danser devant le buffet ». Vous savez ce que ça veut dire,
« danser devant le buffet » ? Cela veut dire qu’on a l’estomac vide le matin, l’estomac creux à midi, et l’estomac dans les talons le soir. Et quand on passe devant des maisons prospères, on aperçoit un buffet bien garni, l’estomac gargouille, et on n’a plus qu’à danser sur cette musique. A ce compte, François Leroi aurait dansé tout un ballet. Sinon, c’était la bonté jusqu’à la moëlle des os -des os sur lesquels il n’avait hélas que la peau. Quand on lui donnait un morceau de pain, il l’avalait, et quand on le servait d’une injure, il l’avalait aussi. Tant il avait faim ! Et si personne ne lui donnait rien, il s’allongeait derrière une clôture, se recroquevillait dans la nuit et priait les étoiles de veiller à ce qu’on ne lui vole pas sa casquette.
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Alors comme ça, les enfants, vous ne comprenez pas ce que les oiseaux racontent ? Mais c'est vrai ! Ils ne parlent le langage des humains qu'au petit matin, quand vous dormez encore ! Quand le jour avance, ils n'ont plus beaucoup de temps de parler, c'est qu'ils en ont, du travail : picorer un grain par-ci ; par-là extraire de la terre un petit lombric ; plus loin, en l'air, gober une mouche. Les parents oiseaux s'en vont chasser à tire-d'aile, et à tire-d'aile reviennent au nid s'occuper des enfants. C'est la raison pour laquelle les oiseaux ne parlent que le matin, dès potron-minet, quand dans les nids ils ouvrent les fenêtres, aèrent leurs édredons de plumes et préparent le petit-déjeuner.
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