Les cartographies du numérique se suivent mais ne se ressemblent pas. En 2021,
Tristan Mendès France et le graphiste
Quintin Leeds faisaient paraître "
Internet, une infographie" au CNRS édition. Un atlas d'une centaine de pages illustrées compilant des données assez générales sur les usages de l'internet. Un petit livre détaillant les grands chiffres de l'internet (le trafic, les câbles, les usages…) sous une forme simple et lisible, mais peu problématisée. Une synthèse faite de camemberts, de diagrammes tentant de nous faire comprendre l'évolution des réseaux sociaux, la puissance des acteurs du numérique, l'évolution de la musique en ligne, la montée du cybercrime… le petit livre livrait une synthèse très convenue, assez illustrative, réservée aux plus jeunes.
Ce n'est pas le projet de "L'Atlas du numérique" dirigé par Dominique Cardon,
Sylvain Parasie et
Donato Ricci qui paraît ce jour aux Presses de SciencesPo. Dans un format parfaitement identique, les deux livres ne se ressemblent pas du tout. Dans le livre de SciencesPo, le choix des micro-sujets est plus circonscrit (46 seulement), mais chacun est livré avec une analyse précise et des représentations souvent complexes, inspirées de la recherche, signées de l'Atelier de cartographie de SciencesPo. Ici, les visualisations originales servent la réflexion. Si toutes ne sont pas toujours réussies, elles puisent au meilleur de la recherche et se lisent parfois, comme des micro-essais. Ici, plus qu'un panorama, les cartes augmentent le propos, lui apporte de la complexité, comme par exemple, la carte du coût mensuel d'accès à internet dans le monde, les diagrammes de l'emploi du numérique, ou celles sur le genre et la notoriété des chaînes youtube ou sur le signalement et la suppression des contenus. Derrière sa promesse de simplicité, "L'Atlas du numérique" se révèle un objet étrange, composite, complexe, sophistiqué, dont la lecture n'est pas si simple - et pas seulement parce que la police de caractère est bien souvent trop petite. Un outil d'analyse qui part dans beaucoup de directions... Et qui montre que la représentation peut venir soutenir la réflexion plus que la synthétiser.