Un beau livre aux dimensions hors normes et au toucher rugueux consacré à Jacques-Armand Cardon « Cathédrale » (sans s).
En absence de pagination, le livre est constitué d'un dessin unique pleine page aux dimensions rectangulaires respectables.
Ceux qui ont lu « Accident de chasse » peuvent se faire une idée précise des dessins noir et blanc constitués de lignes droites hachurées au service de vastes perspectives géométriques.
Si de cathédrale il est question, celle-ci ne laisse découvrir que ses coursives et ses perspectives architecturales infinies. C'est cette perspective de l'infini dans un contexte exclusivement minéral que la cathédral s'offre au regard comme pourrait le faire toute architecture monumentale telles que pyramides. L'ordonnancement des pierres y est parfait. Aucune référence théologique n'est suggérée.
L'empilement des pierres se voit comme le résultat du génie et de la vanité humaine. le rendu en est glaçant.
Ces toiles de fond figées accueillent des scènes dépouillées et fantomatiques où l'homme semble écrasé par ses propres réalisations et le poids de l'histoire. Don Quichotte perché sur son cheval, Charlot raccompagné par la grande faucheuse, des poilus de 14-18, des anneaux, une tour Eiffel, un galion, une trompe d'éléphant ou des langues, le christ en perfusion, les morts de la Commune de 1870 snobes par les bourgeois…
Dali ou Magritte ne sont pas loin de ces représentations surréalistes sans titre et légende.
La longue introduction de Cardon relatant sa jeunesse sous occupation allemande est nommée « Fondations ». Elle éclaire et donne du sens aux obsessions que l'auteur développera tout au long de sa vie.
Les dessins subliment une violence souvent sous-jacente. Superbe.
Je ne résiste pas à colporter le petit coup de gueule dont on prend connaissance en dernière page : « Contrairement au Conseil Régional d'Ile de France qui s'en branle, ce livre est publié avec le soutien de la région Occitanie »