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sur 1706 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
En commençant "Retour à Killybegs", j'ai immédiatement été plongée dans l'atmosphère de mon enfance, quand tous les jours, les journaux, la radio ou la télévision annonçait que l'IRA avait frappé ou entamait un processus de paix, cette atmosphère de terreur qui entourait l'idée même de l'Irlande, de Belfast, d'armée révolutionnaire.
Car effectivement, ce livre nous fait pénétrer au coeur de l'Armée Révolutionnaire Irlandaise, cette IRA qui défrayait la chronique quotidiennement, faisant passer ses acteurs pour des dangereux fous furieux ou des héros, c'est selon, et déclenchait les répliques sanglantes des britanniques. C'est donc tout un pan de l'histoire irlandaise que l'auteur rappelle ici, la misère des années noires, le déchirement de l'Irlande en deux pays, l'édification d'une frontière et la création de l'Ulster, l'oppression britannique et la résistance irlandaise, puis plus tard les grèves de la faim et les prisons encombrées de prisonniers qui voulaient se voir reconnaître le statut de prisonniers politiques que les britanniques leur refusaient.
Et ce qui m'a frappée, c'est d'abord l'extraordinaire solidarité qui unit tous ces soldats de l'Ira, qui pousse un jeune type de 20 ans à continuer une grève de la faim jusqu'à la mort, relayé par un autre jeune type de 20 ans... La solidarité, la fraternité, et soudain au milieu de ces frères, un traître ! Un traître qui, à la veille d'être démasqué, était salué et connu de tous, chéri par sa famille, ses frères d'arme, leurs femmes et leurs enfants, et qui du jour au lendemain, devient l'Ennemi. Je n'ai pas lu les précédents livres de Sorj Chalandon, mais dans Retour à Killybegs, il décortique avec pertinence les ressorts qui transforment un patriote acharné en marionnette des britanniques. Et ce "retournement" permet de revenir sur les motivations de l'IRA, des britanniques et de déjouer tout manichéisme : il n'y a pas de bon ou de mauvais patriote, la cause de l'IRA n'est pas que juste et bonne et les britanniques ne sont pas que des enfoirés : la guerre, c'est sale et les idéaux n'y ont pas leur place...
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L'IRA ? Tous des terroristes !
C'est ce que j'ai entendu durant toute ma jeunesse, et à vrai dire, je ne me suis jamais posé la question de savoir si c'était vrai. La politique m'intéresse assez peu…et ceci est un euphémisme !

Donc, au départ, je n'avais pas choisi ce roman de Sorj Chalandon pour son thème : l'histoire d'un Irlandais pur sang qui se bat pour son pays, pour sa cause, pour la liberté. Mais l'auteur m'avait émue, avait touché une corde sensible dans un autre de ses romans : « Une promesse ».
Eh bien, je l'avoue, cette fibre a encore vibré en moi à la lecture de « Retour à Killibegs ». Oui, j'ai suivi avec grand intérêt la trajectoire apparemment très droite de Tyrone, engagé dans l'IRA très jeune, emprisonné dans des conditions ignobles, populaire et admiré. Mais surtout, j'ai frémi lorsqu'il a trahi….Oui ! Il a trahi ! Mais cette trahison, je la comprenais ! « Personne n'a jamais été dans mon ventre, personne », clame le héros, personne ne pourrait jamais le comprendre. Mais moi, je dis que si ! L'auteur s'est tellement bien fondu dans son personnage qu'il a réussi ce tour de force de me faire admettre la trahison et même de me faire complètement adhérer au traître.

Je ne veux pas en dire plus. J'ai vécu une semaine dans la guerre puis dans les arrangements, les compromissions, et c'est assez. Comme le héros, « je n'en pouvais plus de cette guerre, de ces héros, de cette communauté étouffante. J'étais fatigué. Fatigué de combattre, de manifester, fatigué de prison, fatigué de clandestinité et de silence, fatigué des prières répétées depuis l'enfance, fatigué de haine, de colère et de peur, fatigué de nos peaux terreuses, de nos chaussures percées, de nos manteaux de pluie mouillés à l'intérieur. »

Fatiguée, oui, mais totalement, indéfectiblement conquise par la poésie de Sorj Chalandon, par la beauté de ses mots, le diamant de ses phrases.

Et en Irlande, oui, j'irai un jour, poursuivie par ses fantômes à l'envie si légitime de liberté…

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Mon traître m'avait bouleversée mais m'avait laissée sur ma faim. Cette histoire m'avait pris aux tripes et avait éveillé l'envie de connaître les vraies raisons qui ont mené le traître à commettre cet acte impardonnable.
Pour moi il était surtout question de comprendre ses motivations afin de pouvoir l'accepter.

Mais il n'y pas que cela dans Retour à Killybegs.
Sorj Chalandon veut nous expliquer le contexte, c'est donc tout un pan de l'histoire de la lutte pour l'indépendance nationaliste irlandaise qui sera décortiqué. Un pays coupé en deux, déchiré, miséreux, opprimé et face à la menace permanente de la terreur.
La résistance a un visage, des motivations, des hommes forts et courageux prêts à mourir pour la cause, prêts à subir les pires ignominies en prison, pourchassés par les anglais mais aussi par les irlandais « de l'autre côté »

Des années de lutte, de dévotion et d'espoir broyés par le temps qui passe, par les défaites, par la fatigue et par le désespoir. Une armée en déroute, un mouvement en lambeaux… On comprend les tourments et les afflictions d'une âme pure rendue grise par la contingence, la fatigue et la soif de paix.

On comprend mieux l'engrenage fatidique qui a conduit le traître à mourir seul face aux fantômes de son enfance et à ses mensonges, face à une cause trop lourde à porter.
Dans mon traître la phrase : « Personne ne naît tout à fait salaud, petit Français. le salaud, c'est parfois un gars formidable qui renonce » prend ici tout son sens.

À travers le récit poignant d'une trahison, Sorj Chalandon rend hommage aux Irlandais du Nord qui menèrent une guerre sans concession pour retrouver leur liberté et leur dignité.

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Le Retour à Killybegs pour Tyrone Meehan, c'est le retour aux sources, dans la modeste maison sans confort du père, Patraig Meehan. Là où il a reçu en héritage l'amour de l'Irlande, la violence, l'engagement pour l'indépendance de l'Irlande , coute que coute. Mais aussi les coups du père. C'est dans cette maison que la mort va le délivrer de la honte.
le 24 décembre 2006, au cours d'une conférence de presse, il s'est libéré d'un secret, il a trahi son camp depuis vingt-cinq ans en donnant des renseignements aux anglais, lui l'homme respecté et admiré de tous, l'un des leaders de l'Ira. A ses côtés, Sheila, sa femme, toujours là pour lui.

« Sa voix. Une souffrance de voix
Qu'as-tu fait, petit homme ? » Mais elle n'attend pas de réponse.

Trois ans après avoir écrit « Mon traitre » Sorj Chaalndon donne la parole à Tyronne. Retour à Killybegs est un récit sans concessions, sans apitoiements, c'est la confession douloureuse d'un colosse aux pieds d'argile. Un homme courageux en prison, un homme piégé, un homme à la vie sans répits. Vingt-cinq ans de trahison, vingt-cinq ans de nuits sans sommeil.
On comprend mieux l'engrenage fatidique qui l'a conduit à mourir seul face aux fantômes de son enfance et à ses mensonges. Qu'as-tu fait, petit homme ?
C'est un livre qui laisse des traces, bouscule, dérange, bouleverse, admirablement écrit.
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À travers le récit poignant d'une trahison, Sorj Chalandon rend hommage aux Irlandais du Nord qui menèrent une guerre sans concession pour retrouver leur liberté et leur dignité.

Décembre 2006, Tyrone Meehan, 81 ans, attend la mort. Il ne sait ni quand ni comment elle le frappera mais il sait avec certitude qu'elle viendra, alors autant que ce soit à Killybegs, le village de ses aïeux. Celui où son père lui enseigna la haine des anglais et que sa famille a dû fuir avec l'humiliation de la misère. Mais avant de mourir, il veut dire sa vérité afin que le silence se fasse après lui. de fait, Tyrone Meehan a été assassiné le 5 avril 2007. Sorj Chalandon dont l'Irlande du Nord est la patrie de coeur et qui connaissait très bien celui dont par respect il a changé le nom, veut lui rendre justice en lui donnant la parole. Et Tyrone Meehan de raconter sa vie: Belfast sous les bombes allemandes, son engagement dans les rangs de l'IRA, la prison, l'amour de Sheila, le combattant devenu un héros adulé de sa communauté, jusqu'à ce jour de 2005 où les anglais dénoncèrent sa trahison à leur profit. Pourquoi et qui avait-il trahi ? Terribles et douloureuses questions auxquelles Sorj Chalandon tente de trouver les réponses les plus justes.

Un roman servi par une magnifique écriture où l'intime et le politique ne cessent habilement de se croiser. Sorj Chalandon campe à merveille ce personnage qui va vaciller, reclus chez lui n'attendant stoïquement qu'une seule chose depuis la révélation de sa trahison : la mort. Son livre est un hommage vibrant à cet homme Tyrone Meehan alias Denis Donaldson à qui, malgré tout, il voue une amitié sans borne. Ce texte tout de dignité, de violence et de tendresse, laisse ouverte la voie de l'indulgence. Un très beau roman, fort et bouleversant.
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Avec ma co-lectrice Nadou38 nous n'avons pas résisté, après la lecture de Mon traître, à continuer le périple irlandais avec Retour à Killybegs.
Bien qu'il s'agisse de la suite logique, les deux volumes peuvent être lus de manière indépendante. Mon traître pose plutôt un regard extérieur, celui d'un Français sur l'Irlande, l'IRA et Tyrone Meehan, son traitre. Retour à Killybegs pose un regard intérieur, celui de Tyrone lui-même sur son Irlande, l'IRA, ses combats et…ce qui l'a amené à trahir. Deux regards dissociés et néanmoins complémentaires. J'ai malgré tout une préférence pour ce livre-ci, plus intense, plus trouble aussi.

Dès le prologue, le ton est donné :
« Maintenant que tout est découvert, ils vont parler à ma place. L'IRA, les Britanniques, ma famille, mes proches, des journalistes que je n'ai même jamais rencontrés. Certains oseront vous expliquer pourquoi et comment j'en suis venu à trahir. Des livres seront peut-être écrits sur moi, et j'enrage. N'écoutez rien de ce qu'ils prétendront. Ne vous fiez pas à mes ennemis, encore moins à mes amis. Détournez-vous de ceux qui diront m'avoir connu. Personne n'a jamais été dans mon ventre, personne. Si je parle aujourd'hui, c'est parce que je suis le seul à pouvoir dire la vérité. Parce qu'après moi, j'espère le silence. Killybegs, le 24 décembre 2006, Tyrone Meehan. »

Mais c'est avec parcimonie qu'il révèle ce qu'il a dans le ventre et cette vérité, sa vérité, comme une écharde qu'il rechigne à arracher. Chaque fois qu'on pense l'atteindre, pfiou, elle se carapate derrière une barricade. Jusqu'au dernier chapitre qui m'a laissée pantoise… Sa personnalité n'est pas aisée à cerner. Mais j'ai apprécié qu'elle ne soit pas nimbée de morale. Chacun est libre de se faire son opinion.

Ce livre puissant et émouvant retrace le parcours d'un homme coincé entre plusieurs feux. Son combat commence dès l'enfance, dans les années trente, avec son père et va se poursuivre jusqu'en 2007. Il nous plonge au coeur de l'IRA, de son organisation et du quotidien des habitants, une vie de misère, de lutte sans merci, de solidarité et d'espoir. Certains passages tout en pudeur sont bouleversants.
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J'ai traversé ce livre comme un spectateur de vies glorieuses, de vies illustres, mais aussi de vies gâchées, de vies bafouées.
Je me suis senti comme un témoin de la lutte, de l'engagement politique, mais aussi de la trahison, de la chute.
J'ai lu ce roman comme un « tuto » : j'ai appris l'IRA, le Sinn Fein, le MI5.
J'ai tutoyé la franchise, la loyauté mais aussi la fourberie et le mensonge.
Je me suis senti combattant, fier, adulé mais traître aussi, haineux, amer, détestable.
De retour à Killybegs, avec Tyrone Meehan, j'ai bu de la Guiness, c'est bon pour la tristesse.
Repentir trop pénible cependant, j'ai feint l'allégresse.
Ce livre englue, manipule, piège. Tu comprends mais tu n'acceptes pas. Traître malgré lui, retourné, brisé.
« Alors, j'ai renoncé à mourir. A vivre aussi. Je serais ailleurs, entre ciel et terre. Je les emmerdais tous ! Je n'en pouvais plus de cette guerre, de ces héros. J'étais fatigué, fatigué de combattre, de manifester, fatigué de prison, fatigué de clandestinité et de silence, fatigué des prières, fatigué de colère, de misère et de peur… »

Par instant, ce roman m'est apparu comme un reportage, une chronique, un rapport.
Il faut du talent pour y rajouter la fibre, celle qui t'émeut, qui fait passer les sentiments les plus subtils d'apathie, de compassion. Tu comprends l'engagement, l'appartenance.
Tu es quelqu'un, de quelque part, tu sens ton sang, ta caste, ta terre.
J'ai eu mal pour Meehan, mais aussi pour sa femme, son fils, son ami français (voir Mon Traître).

« Oui Monsieur, je prierai pour tous les braves qui font leur devoir selon ce qu'ils ont compris de la vie. J'ai relu cette phrase, en prononçant chaque mot à voix haute. »

Moi aussi.
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Après avoir fini 'Mon traître' il me semblait logique de poursuivre avec ce titre pour connaitre le pourquoi du comment. L'auteur donne la réponse à la trahison de Tyronne, on retourne en arrière avec le père de Tyronne, puis on le suit dans ses premiers pas dans ce combat, et là, on découvre le grain de sable qui a fait que la machine s'est enraillée. Comment faire machine arrière ?
Ce volet est beaucoup plus dans le conflit, les conditions inhumaines des détenus, la guerre dans tous ses états. Il y a beaucoup moins de place à la poésie et donc plus "dur" sur ce sujet tout aussi dur.
J'ai apprécié cette lecture comme une réponse à "Mon traître" car en refermant le livre on se sent frustré tout comme Antoine De ne pas savoir pourquoi cette trahison. Puis comme un miroir, on revoit les scènes commentées par Tyronne et tout devient différent.
Un bon livre sur le sujet de l'IRA pour tenter de comprendre ce conflit sans fin.
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Mon traître m'a bouleversée.
Alors, dans la lignée, pour rester connectée à l'univers de Sorj Chalandon, de l'Irlande du Nord et de cette guerre fratricide qui a ravagé tant d'Irlandais, j'ai entamé - et dévoré - Retour à Killybegs.

J'ai terminé ma lecture il y a quelques jours déjà et je ne m'en remets pas de ce voyage au coeur de l'histoire tragique de ce coin d'Europe. J'ai été secouée, balancée, j'ai partagé le quotidien des combattants, les conditions de détention des rebelles, les préparations d'attentats. J'y étais vraiment. Au coeur du conflit, au coeur des choix. Et j'ai tremblé.

Retour à Killybegs raconte la vie de Tyrone Meehan, activiste nord-irlandais devenu traître "pour la bonne cause". Au seuil de sa vie, c'est lui-même qui prend la parole pour dire la vérité, pour tenter d'expliquer ses choix et trouver un semblant de rédemption.
Tyrone Meehan, simple traître ou héros national ? Machine de guerre et de violence ou simple humain en quête de justice ? Menteur opportuniste ou politicien hors pair ? Epoux et père de famille indigne ou modèle pour un peuple ?
A chacun de se forger sa propre opinion.
Une chose est sûre : le parcours de Meehan est singulier. Il ne ressemble en rien à celui de la petite Helvète que je suis. Mais par ses regards sur les hommes et sur le monde, par son engagement, par le lien qu'il entretien avec ses frères d'armes, par son jusqu'au boutisme, par l'amour qu'il porte à ceux qu'il a choisis, par son courage, il m'a appris beaucoup.

Le talent de romancier et d'écrivain de Sorj Chalandon m'a permis au long des pages de m'attacher profondément à cet homme pourtant si imparfait. J'aurais dû prendre parti, détester Meehan dès les premières pages.
Mais ce livre est une invitation à ne pas juger et à tenter de comprendre la complexité d'une vie, d'une histoire, d'une guerre et de deux pays.
Même si ce livre est un roman, j'en ai appris plus sur l'histoire de l'Irlande du Nord que dans de nombreux livres d'histoire.

Avec Mon traître, Retour à Killybegs fait partie de mes grands coups de coeur de cette année 2019.
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A plus de 80 ans, Tyrone Meehane, ancien combattant de l'IRA vit ses derniers instants. Il sait sa fin proche car il a trahi trop de gens. Mais avant que tout se termine, Meehane veut rétablir la vérité sur sa vie, pour que personne ne puisse la déformer.

Avant la lecture de ce roman, je ne connaissais que très peu de choses sur le conflit en Irlande. Je ne suis pas sûre d'en avoir compris plus (les tenants et les aboutissants de tout ça restant encore flous), mais ce livre a eu le mérite de m'y faire m'y intéresser. Ce roman passionnant est basé sur la vie réelle d'un combattant de l'IRA. de son engagement à ses différents séjours en prison, Chalandon ne nous épargne aucuns détails de la vie de Tyrone Meehane. J'ai trouvé certains passages difficilement supportables. J'ai retrouvé dans le roman la même atmosphère noire et oppressante qui m'avait déjà frappé lorsque j'ai visité Belfast et Derry il y a quelques années. Ce roman, aussi glaçant que passionnant, a été dévoré en quelques jours.
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