Après le premier volume qui s'intéressait davantage à sa vie personnelle, le deuxième à la vie publique de Napoléon, Chateaubriand a consacré l'essentiel de ce troisième volume à sa carrière politique qui s'est déroulée sous la Restauration, principalement pendant le règne de Louis XVIII. Il était un monarchiste convaincu, mais la monarchie était elle-même divisée en multiples factions, parfois en concurrence. Chateaubriand faisait partie des monarchistes constitutionnalistes et légitimistes, prit entre deux feux, celui des ultra-royalistes et celui des libéraux. Pour faire simple, il voulait l'application de la Charte de 1814 dans toute son étendue, elle lui convenait parfaitement. Pour lui, la Restauration était l'alliance de l'ancienne monarchie et des nouvelles libertés.
Voici les principaux tournants de sa carrière mouvementée : Il est nommé ministre de l'intérieur par intérim pendant les Cent-Jours et l'exil de Louis XVIII à Gand. Après la chute de Napoléon, il entre à la chambre des pairs mais il est écarté du pouvoir exécutif en 1816 pour avoir critiqué la dissolution de la Chambre introuvable. Il recommence à avoir de l'influence en 1820 après l'assassinat du duc de Berry. Il est d'abord ambassadeur à Berlin, puis à Londres. Il est ensuite ministre des affaires étrangères pendant l'intervention française pour rétablir le roi d'Espagne en 1823, son grand fait d'arme : il était très fier d'avoir redoré le blason de l'armée royale française. Mais cette guerre était impopulaire et il est mis à l'écart. Après le sacre de Charles X, il prend des positions qui le rapprochent des libéraux, notamment sur la liberté de la presse. Il est ensuite nommé ambassadeur à Rome en 1827. Enfin, il démissionne de cette dernière fonction lorsque Polignac, un ultra-royaliste, arrive au pouvoir en 1829.
La fin de sa carrière politique coïncide avec la révolution de juillet 1830. Evidemment, Chateaubriand ne donne jamais à cette révolution le nom des Trois Glorieuses mais simplement « les trois journées ». Il en fait un récit plus captivant que celui de la Révolution de 1789. Entre reportage sur le terrain et article d'investigation, il suit de près l'organisation et le développement de la révolte dans les rues de Paris ainsi que ses conséquences politiques et réunions des différentes factions. C'est très instructif. Avec une certaine ambiguïté, il parait moins critique sur le déroulement de cette révolution que celle de 1789, les mouvements populaires lui paraissent plus sages, il est même acclamé par les révolutionnaires comme le défenseur de la liberté de la presse. Quand il arrive à Paris le 28 juillet, après avoir pris connaissances des ordonnances qui ont déclenchées les émeutes, il écrit : « J'aperçus le drapeau tricolore flottant ; je jugeai qu'il ne s'agissait pas d'une émeute, mais d'une révolution. J'eus le pressentiment que mon rôle allait changer : qu'étant accouru pour défendre les libertés publiques, je serais obligé de défendre la royauté », ce qui résume à peu près toute sa carrière entre défense de la liberté et de la monarchie. A nouveau, après la parenthèse de la Restauration, il se place du côté des perdants, toujours par fidélité aux Bourbons, sans occulter non plus la responsabilité de Charles X et en prévoyant un avenir républicain à la France.
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Fasse le ciel que ces intérêts industriels, dans lesquels nous devons trouver une prospérité d'un genre nouveau, ne trompent personne, qu'ils soient aussi féconds, aussi civilisateurs que ces intérêts moraux d'où sortit l'ancienne société ! Le temps nous apprendra s'ils ne seraient point le songe infécond de ces intelligences stériles qui n'ont pas la faculté de sortir du monde matériel.
Bien que mon rôle ait finit avec la légitimité, tous mes vœux sont pour la France, quels que soient les pouvoirs à qui son imprévoyant caprice la fasse obéir. Quant à moi, je ne demande plus rien ; je voudrais seulement ne pas trop dépasser les ruines écroulées à mes pieds. Mais les années sont comme les Alpes : à peine a−t−on franchi les premières, qu'on en voit d'autres s'élever. Hélas ! ces plus hautes et dernières montagnes sont déshabitées, arides et blanchies.
Mais je m'évertue à démontrer l'honneur de la Restauration ; eh ! qui s'inquiète de ce qu'elle a fait, surtout qui s'en inquiétera dans quelques années ? Autant vaudrait m'échauffer pour les intérêts de Tyr et d'Ecbatane : ce monde passé n'est plus et ne sera plus. Après Alexandre, commença le pouvoir romain ; après César, le christianisme changea le monde ; après Charlemagne, la nuit féodale engendra une nouvelle société ; après Napoléon néant : on ne voit venir ni empire, ni religion, ni barbares. La civilisation est montée à son plus haut point mais civilisation matérielle, inféconde, qui ne peut rien produire, car on ne saurait donner la vie que par la morale ; on n'arrive à la création des peuples que par les routes du ciel : les chemins de fer nous conduiront seulement avec plus de rapidité à l'abîme.
Sans doute les ministres depuis 1814, à quelque opinion qu'ils aient appartenu, ont été harcelés par les journaux ; sans doute la presse tend à subjuguer la souveraineté, à forcer la royauté et les Chambres à lui obéir ; sans doute, dans les derniers jours de la Restauration, la presse, n'écoutant que sa passion, a, sans égard aux intérêts et à l'honneur de la France, attaqué l'expédition d'Alger, développé les causes, les moyens, les préparatifs, les chances d'un non−succès ; elle a divulgué les secrets de l'armement, instruit l'ennemi de l'état de nos forces, compté nos troupes et nos vaisseaux, indiqué jusqu'au point de débarquement. Le cardinal de Richelieu et Bonaparte auraient−ils mis l'Europe aux pieds de la France, si l'on eût révélé ainsi d'avance le mystère de leurs négociations, ou marqué les étapes de leurs armées ?
Tout cela est vrai et odieux ; mais le remède ? La presse est un élément jadis ignoré, une force autrefois inconnue, introduite maintenant dans le monde, c'est la parole à l'état de foudre ; c'est l'électricité sociale. Pouvez−vous faire qu'elle n'existe pas ? Plus vous prétendrez la comprimer, plus l'explosion sera violente. Il faut donc vous résoudre à vivre avec elle, comme vous vivez avec la machine à vapeur. Il faut apprendre à vous en servir en la dépouillant de son danger, soit qu'elle s'affaiblisse peu à peu par un usage commun et domestique, soit que vous assimiliez graduellement vos moeurs et vos lois aux principes qui régiront désormais l'humanité.
J'ai peur maintenant des sensations : le temps, en m'enlevant mes jeunes années, m'a rendu semblable à ces soldats dont les membres sont restés sur le champ de bataille ; mon sang, ayant un chemin moins long à parcourir, se précipite dans mon coeur avec une affluence si rapide que ce vieil organe de mes plaisirs et de mes douleurs palpite comme prêt à se briser. Le désir de brûler ce qui regarde Charlotte, bien qu'elle soit traitée avec un respect religieux, se mêle chez moi à l'envie de détruire ces Mémoires : s'ils m'appartenaient encore, ou si je pouvais les racheter, je succomberais à la tentation. J'ai un tel dégoût de tout, un tel mépris pour le présent et pour l'avenir immédiat, une si ferme persuasion que les hommes µ désormais, pris ensemble comme public (et cela pour plusieurs siècles), seront pitoyables, que je rougis d'user mes derniers moments au récit des choses passées, à la peinture d'un monde fini dont on ne comprendra plus le langage et le nom.
Tout à coup une porte s'ouvre : entre silencieusement le vice appuyé sur le bras du crime.Monsieur de Talleyrand soutenu par Monsieur Fouché
Mémoires d' Outretombes
INTRODUCTION :
« Il est assez probable que les pages intitulées Pensées, Réflexions et Maximes seront une révélation pour bien des gens, — même pour ceux qui connaissent très suffisamment leur Chateaubriand [1768-1848]. de cela il y a de fort bonnes raisons. Ces pages sont assez courtes ; elles n'ont jamais été publiées, que je sache, séparément ; elles ont paru, pour la première fois, très tardivement, entre 1826 et 1831, quand l'auteur donna chez le libraire Ladvocat, la première édition de ses Oeuvres complètes. […]
Et cependant, ces Pensées, — dont l'origine exacte nous échappe, — sont pour la plupart fort remarquables ; et il est évident, pour qui sait lire, qu'il n'eût tenu qu'à Chateaubriand d'en grossir considérablement le nombre, et de se faire une juste place, à côté, et probablement au-dessus de son ami Joubert [1754-1824], parmi les Moralistes français.
[…] » (Victor Giraud.)
« Le chant naturel de l'homme est triste, lors même qu'il exprime le bonheur. Notre coeur est un instrument incomplet, une lyre où il manque des cordes, et où nous sommes forcés de rendre les accents de la joie sur le ton consacré aux soupirs. » (Oeuvres complètes de M. le Vicomte de Chateaubriand, tome XVIII, Paris, Pourrat frères, 1836, p. 119.)
CHAPITRES :
0:00 — 1. ;
0:45 — Introduction ;
1:09 — 7. ;
2:11 — 18. ;
2:46 — 20. ;
3:10 — 27. ;
3:23 — 30. ;
3:38 — 31. ;
3:51 — 36. ;
4:06 — 38. ;
4:25 — 49. ;
5:09 — 62. ;
5:40 — 64. ;
5:55 — 68. ;
6:48 — 69. ;
7:05 — Générique.
RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE :
Chateaubriand, Pensées, réflexions et maximes, suivies du Livre XVI des Martyrs, édition nouvelle par Victor Giraud, Paris, Bloud & Cie, 1908, 68 p.
IMAGE D'ILLUSTRATION :
https://ia800109.us.archive.org/23/items/EST95RES_P8B/BSG_EST95RES_P8B.jpg
BANDE SONORE ORIGINALE : Carlos Viola — Immortal Beloved
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