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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Dans La vie de ma mère, Magyd Cherfi, ex-chanteur de Zebda, raconte l'émancipation d'une femme de quatre-vingt ans et la reconquête d'un amour parental, trop malmené précédemment. C'est enlevé, savoureux et caustique, et parfaitement réussi !

Huit mois que ce fils, cuisinier au chômage, Slimane Kaoui, nouvellement célibataire, n'a pas vu sa mère ! Après un éloignement de sa femme, il héberge ses deux grands fils de temps en temps, Les paroles aigries entre le fils et la mère ont laissés des rancoeurs qui ont poussé chacun à prendre ses distances.

Il faut dire que la fameuse mère a de la ressource : ses mots sont des balles qu'elle envoie pour blesser afin d'éviter d'être atteinte par ceux des autres.

En s'associant avec un ami, dont sa famille lui reproche d'être juif, il a ouvert le premier Food Truck qui a vulgarisé une cuisine issue de ses deux origines comme cet hamburger aux épices du soleil, sorte d'Hallal Burger, comme le suggère la couverture. Une façon de présenter sa préférence qui a fondé tout son engagement, sa vie durant : être français avant d'être Kabyle.

Tendre et drôle
La vie de ma mère est le cheminement d'un fils et de sa mère pour qu'ils s'apprivoisent, se détestent et se redécouvrent afin de permettre à la sincérité de pousser les mots de la tendresse au bord des lèvres. Mais, c'est aussi le récit du chemin que mène une femme, dans les dernières années de sa vie, pour trouver sa liberté et pour développer son libre arbitre afin de l'imposer à ses enfants.

Magyd Cherfi introduit dans le récit de son narrateur suffisamment de truculences, de traits d'humour et de traits acerbes pour que ce duo prennent vie et nous retiennent dans leurs récits. Évidemment, ce narrateur ressemble un peu à son créateur lui-même : la soixantaine bien sonnée, l'embonpoint bien installé et le drapeau français en étendard.

Magyd Cherfi, après avoir poursuivi une nouvelle carrière après le groupe Zebda autour du groupe Toulouse Contour, se consacre aussi à l'écriture. Ses premiers écrits sont des nouvelles. le troisième Ma part de gaulois bénéfici d'un accueil remarqué du public et des critiques puisqu'il figure dans la première sélection du Goncourt 2016. Son adaptation cinématographique sortira en fin janvier de cette année.

En conclusion,
Dans la description des situations vécues, observées et décryptées, les personnages deviennent vivants et terriblement sympathiques. Ces boomers français aux prises avec tous les tiraillements culturels, politiques et sociaux subis sont très intelligemment décrits. Les portraits des frères et soeurs s'entrechoquent dans ce microcosme intime. Associant tirades acides et humour, on frise le burlesque. Les chapitres courts s'enchaînent. Et, le temps passe agréablement !
Lien : https://vagabondageautourdes..
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C'est un joli texte sur la relation mère-fils mais également sur le désir d'émancipation d'une femme, avec tout ce que cela comporte de défis vis à vis de la société mais également de sa propre famille. Comment se libère-t-on du poids des traditions et des douleurs du passé ? Est-ce que posséder veut dire aimer ?
Famille kabyle, père violent, illetrisme, manque d'amour dans l'enfance et Flaubert ... Une belle réussite pour un 1er roman.
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Je ne sais pas comment évoquer ce roman qui m'a tant émue, parce-que l'histoire est merveilleusement bien écrite, avec des mots choisis minutieusement, des mots qui font des ricochets entre eux. le langage oscille entre un ton soutenu et populaire. Les précautions sémantiques sont délicieuses.
L'auteur, Magyd Chérif, est le parolier du groupe Zebda, son écriture est d'un rythme assumé et entraînant. J'ai lu chaque phrase avec un entrain particulier, la suivante ne pouvant se faire attendre, comme une frénésie à chanter chaque mot.

La vie de ma mère ! C'est l'histoire d'une famille Kabyle, le père n'est plus mais sa violence demeure dans les esprits des cinq frères et soeurs. La mère, elle, s'est laissée absorber par le temps, les événements. Alors quand Slimane décide, après 8 mois de silence, d'aller sonner à sa porte, c'est une mère aux mille maux qu'il trouve avachie sur son fauteuil, la colonne courbée. Et si à travers ses maux, sa mère disait ce qu'elle n'arrive pas à verbaliser ? Cette mère a la carapace dur, aussi coriace que celles de ses enfants. Les chiens ne font pas des chats, il paraît.

Slimane va bousculer chacun pour faire sortir cette famille de sa prison psychique, de leurs antécédents marquants. Et il le fera avec une pudeur tout à fait divine et émouvante. En libérant sa famille des non-dits, il se libère lui-même dans son rôle de père. Il extrait sa mère d'une condamnation maritale, il fait d'elle une figure féminine forte et émancipée.

La puissance de ce livre demeure dans son féminisme engagé, il représente la mère qui est aussi femme, qui se libère des carcans. Tout cela est mêlé à la forte portée religieuse. Pointant du doigt les amalgames profanés, la difficulté d'être entre deux religions : celle dans laquelle la famille s'est enracinée et celle qui prédomine dans le pays de vie.

Un livre tout aussi tendre que vrai et authentique. Une quête d'identité intergénérationnelle que je ne me lasserai pas d'offrir autour de moi.
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C'est d'une plume tendre, dure et piquée d'humour que nous livre ici Magyd Cherfi sa première fiction qui traite du sujet de l'identité quand on est issu de l'immigration et trace un portrait d'une mère maghrébine, toute puissante, abusive, voire castratrice. Il y développe aussi la question du féminisme sous l'angle novateur de l' émancipation tardive et libératrice d'une mère kabyle sacrificielle et possessive. Cette remarquable histoire peut ,bien évidemment , être celle de n'importe quelle famille toutes origines confondues.
C'est lors de l'enterrement du père de son meilleur ami, en écoutant sa veuve s'épancher sur l'ingratitude de son défunt mari à son égard, sur ce qu'elle a vécu auprès de son bourreau de mari , que Slimane comprend qu'il est temps de faire enfin la paix avec sa mère et d'être à ses côtés pour ce qui lui reste à vivre, afin qu'aucun remord ne lui torpille sa vie. Il ne peut laisser son orgueil boursoufflé de bêtise empoisonner le reste de sa vie non plus. A cinquante ans, il se pense assez sage pour pouvoir accepter de ne pas lui faire entendre raison et de se faire pilonner comme aux plus beaux jours de son adolescence. N'est-il pas capable de reconnaître que quelque chose le lie à elle de plus fort que ses tombereaux d'insultes ? Il tente également de reprendre contact avec ses frères et soeurs, ces étrangers perdus de vue au fil des ans, afin que tout comme lui, ils accompagnent leur mère pour ses dernières années. Dès la première visite, après huit mois de bouderie, il retrouve une vieille femme aux prises avec ses rhumatismes et ses douleurs diverses qui ne lui laissent aucun répit et là encore, il hésite entre peine et méfiance. Rompu au chantage affectif il est incompris de ses fils quand au téléphone il prend de la distance avec le flot de plaintes douloureuses de cette mère qui les essore et les use.
Invité chez sa soeur, Soraya, Slimane pose un regard lucide et désenchanté dont découle une profonde réflexion sur la vie de cette dernière, qui adolescente, se rêvait coiffeuse pour finir esclave de son mari et de ses enfants, à l'image de leur mère. Il se met à haïr leurs racines qui décident du destin des femmes, tableau d'un moyen âge à rallonge.
La fratrie tombe dans un abîme d'incompréhension quand , cette mère percluse de douleurs autant qu'enfermée dans ses rancoeurs, après une intervention chirurgicale qui la soulage et du même coup soulage sa conscience , casse les codes et enfin se libère. Hafida, rencontrée au centre de réadaptation gériatrique fait entrer dans la famille un vent d'émancipation qui sidère et encourage la mère et les filles à ne plus avoir peur et à redresser la tête.
Je me suis véritablement sentie happée par ce roman , lu d'une seule traite, tellement bien écrit, qui nous fait passer du sourire aux larmes. On y rencontre un homme, la cinquantenaire, plein de rancoeur envers cette mère avec qui il va tenter de retisser un lien inédit qui le conduira de surprises en surprises jusqu'à se découvrir lui-même.
Nous avons ici le roman plein d'humanité qui nous livre un portrait de femme explosif doublé d'une déclaration d'amour maquillée en bras de fer.
Je recommande vivement ce livre où chacun , invariablement pourra s'y retrouver.
Lu dans le cadre du « Coup de coeur des lectrices ». Je remercie Version Femina ainsi que les Editions Acte Sud.
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