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4,1

sur 3391 notes
Terrible histoire… Philippe Claudel excelle dans la pratique de ce genre de récit. le rapport de Brodeck est un témoignage de la dénonciation, de la vie dans les camps, du rejet, une peur de l'autre poussant à l'innommable. Brodeck se retrouve au mauvais endroit au mauvais moment, il va devoir écrire le rapport de la disparition de de Anderer, cet homme arrivé dans le village et dont on ne sait rien. L'impossibilité d'exprimer les choses avec netteté dans cet écrit est extrêmement pesant, provoquant une atmosphère lourde qui ankylose dès le début de la lecture. La lenteur du rythme est difficile à supporter mais nécessaire à la narration. L'horreur se lie à l'horreur, des pans de vie du village se mêlent à ceux de Brodeck dans une atmosphère troublante et monstrueuse. Pas moyen de tourner la tête, c'est un face à face avec les pires cruautés dont l'homme est capable, la lecture pousse à la nausée. L'imaginaire de l'auteur est supplanté par la possibilité d'une vérité d'un réalisme intolérable.
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Brodeck vit dans un village où le curé est devenu un ivrogne : obligé de boire pour «oublier» tout ce qu'on est venu lui confier sous le sceau du secret de la confession.
Très vite, on a bien sûr une vague idée du tableau d'ensemble et l'on se doute que le lynchage de l'Anderer cache en réalité un drame encore plus sombre, comme si l'on disposait du modèle pour notre puzzle.
Mais cela ne suffit pas à la démonstration et tout l'art de Philippe Claudel est bien de nous amener, pièce par pièce, à prendre conscience de cette mécanique infernale et sous une apparence anodine de fable philosophique, il nous entraîne au plus noir de l'âme humaine.
Si certains croyaient encore que le rire est le propre de l'homme, ils découvriront que Brodeck est d'un tout autre avis : pour lui, c'est de lâcheté qu'est pétrie l'humanité.
Brodeck nous laisse nous introduire dans sa tête, et fouiller comme on fouine dans un vide-grenier. Les idées viennent a priori sans logique, comme des bribes de souvenirs qui surgissent au hasard... Mais la logique est là, et le talent d'écriture est pour moi non négociable! Claudel arrive à transmettre au lecteur la confusion et l'état de perdition de Brodeck rien qu'à sa manière d'écrire.
Les phrases s'enchainent, les idées fusent, et caché sous cette rivière de souvenirs, Claudel nous transporte dans un récit noir et tristement trop réel avec une logique et un savoir-faire plein de subtilité.

Vous l'aurez compris, j'ai adoré! le rapport à Levi (Primo hein, pas l'autre!^^) se fait forcément, et pourtant, ce livre me semble unique
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Après la sublime adaptation en BD par Larcenet… Quel choc !

Il est difficile de reprendre son souffle après une telle lecture. Magnifique et pourtant d'une noirceur abyssale.

Un livre sur les pires vomissures dont les hommes sont capables, sur la guerre et la haine de l'autre, les fascismes, les compromissions et les exactions.

Mais aussi par effet de miroir, un conte sur la beauté simple de l'amour qui tente sans jamais perdre espoir, de survivre dans toute cette saleté.

Bouleversant
Lien : https://www.noid.ch/le-rappo..
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J'ai lu ce livre il y a quelques années, mais son empreinte est toujours là.

Je me souviens de la honte et de l'humiliation de Brodek dans le camp de concentration, de son mutisme lors de son retour face à la vérité vomie par les villageois, de la peur d'Emélia face à ses bourreaux, de la noirceur des âmes des villageois, mais aussi de la joie de vivre de l'Anderer et de Poupchette.

Je me souviens aussi d'avoir pleuré quand Brodek et sa famille quittent leur village. J'avais peur pour eux, peur qu'une fois de plus L Histoire ne recommence ailleurs. Car Claudel, par ce roman, rend ces sinistres évènements universels et intemporels.

Étranges étrangers...

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Dans ce roman qui a bien mérité le Goncourt des Lycéens, Philippe Claudel reste aussi très imprécis sur les lieux où se déroule l'histoire. Nous sommes au coeur des montagnes, vraisemblablement en Autriche, près de la frontière allemande et Brodeck est désigné par les autres habitants pour rédiger un rapport après l'Ereigniëis, la chose qui s'est passée… « J'ai appris à ne pas trop poser de questions. J'ai aussi appris à me parer de la couleur des murs et celle de la poussière des rues. Ce n'est guère difficile. Je ne ressemble à rien. »
Au début de l'automne dernier, juste un an après la fin de la guerre, est arrivé celui que tous ont appelé l'Anderer, l'autre, un étranger, venu s'installer dans la seule auberge du village. Il était accompagné de son cheval, Monsieur Socrate, et de son âne, Mademoiselle Julie.
Dans ce village difficile d'accès, tous les drames causés par la lâcheté humaine se sont concentrés et l'histoire nous en révèle une cascade. Brodeck raconte et ses souvenirs, même les plus terribles remontent. Pourtant, le village s'était cotisé pour lui payer des études à la Capitale où il assiste aux premières manifestations pour réclamer du pain et du travail. le sang est versé devant le Parlement. C'est là qu'il rencontre Emélia qui deviendra sa femme. S'enchaînent pillages et massacres car la haine envers les étrangers et l'antisémitisme poussent aux crimes les plus abjects.
Brodeck a fui à temps, son meilleur ami, Ulli, étant passé dans le camp des bourreaux. Hélas, les soldats du pays voisin arrivent et s'installent dans le village et le discours du capitaine Buller ne laisse aucun doute : « Notre race est la race première, immémoriale et immaculée, ce sera la vôtre aussi si vous consentez à vous débarrasser des éléments impurs qui sont encore parmi vous… »
Brodeck est livré aux bourreaux : « C'est bien la peur éprouvée par d'autres, beaucoup plus que la haine ou je ne sais quel autre sentiment, qui m'avait transformé en victime. » Son récit de sa déportation est terriblement réaliste et très émouvant. Il raconte aussi son retour et enfin le sort de ce fameux rapport sur cet Anderer dont la fin a été tragique.


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Connaissez vous l'expérience de Milgram?

Au sortir de la seconde guerre mondiale, plusieurs scientifiques se sont posé la question du "pourquoi" et "comment" un individu qui dit simplement obéir aux ordres, peut aller jusqu'à torturer une personne. Entre 1960 et 1963, le psychologue américain Stanley Milgram a évalué le degré d'obéissance d'un individu devant une autorité qu'il jugeait légitime, et il analysa le processus de soumission. Et le problème de conscience?

Malgré la controverse, les tests montraient des résultats troublants....

Ce livre aurait pu être un témoignage d'un rescapé de la seconde guerre Mondiale. Ce livre est un témoignage, imaginé, mais assez réaliste pour se dire que cela aurait bien pu se passer.

Le génie de Claudel, c'est de ne pas nommer : ni la seconde guerre, ni le pays où il se trouve, ni même le mot Shoah ou Juif. Permettant de tisser large dans les esprits, on se détache alors de la guerre et on s'intéresse plus particulièrement à l'histoire d'une vie, d'un village. Les répercussions des souffrances engendrées par la guerre sont aussi terribles que la guerre elle même.

L'auteur ne travail pas de façon linéaire, et au début de la lecture, les mises en abime ou les flash back étaient difficiles à dresser sur une frise chronologique. Mais plus on entre dans le récit, et mieux on comprend la raison de la confection de grand puzzle : une réalité aussi lourde et pesante est difficile à relater en une traite, l'esprit fait des détours pour mieux appréhender les choses. J'ai même eu l'impression à divers moments que le fait de "recoller" les morceaux éparses de sa vie était un moyen de se donner ou de se redonner une identité : un travail à la fois psychologique, mais également un devoir de mémoire . Car tout au long du livre, on ne saura pas le prénom de Brodeck. Il est Brodeck, de cela il est sûr.

Notre rapport à l'autre est malmené : Sartre disait que "l'enfer, c'est les autres". Mais l'autre est également un reflet de moi même. dualité importante entre la peur d'être mauvais et de se voir mauvais. La nuance est fine, certes, mais prégnante dans ce livre. Un village se dresse contre un "étranger" donc un autre que soit qui perturbe et dérange. L'Anderer, l'autre, aura un rôle de révélateur de personnalité enfouie de chaque villageois. Ces derniers, ne supportant pas ce qu'il voit de l'image miroir rendu par l'étranger feront éclore l'incompréhension, le racisme.

Mais peut on être juge et bourreau? Brodeck, doit rédiger son rapport au maire du village. Pourquoi lui et pas un autre? Les raisons apportées par l'auteur sont multiples, et nous pouvons prendre en considération l'une ou l'autre, ou toutes en même temps. Brodeck travaille seul à la rédaction, mais en parallèle, sa mémoire ressasse, et sa vie défile, des moments de joie au moments les plus atroces.

Les témoignages des camps de concentration sont nombreux, celui ci, même s'il ne s'agit pas d'une vraie histoire, dresse tout de même l'horreur de l'humanité envers son prochain. Bien des penseurs et des innocents survivants de ces camps ont écrit et parlé avec coeur de ces abominations. Je n'évoquerais donc pas ce qui se trouve dans le livre.

Les personnages sont exposés avec précision et minutie. On ne connaît pas le passé de tous, mais quelques lignes suffisent pour savoir qui on a en face de soi. La nature, très présente tout au long du livre, est également personnifiée. Se noue avec elle des moments doux et pénibles.

L'écriture est soignée, poétique, mais aussi mélancolique et tragique : l'inhumanité est dépeinte avec force et réalisme : la lâcheté, les crimes sous couvert de la masse et du nombre. Il n'y a ni empressements, ni rapidité, l'auteur ne bâcle ni les détails, ni les faits plus importants : le ton est égal et réfléchi.

Un mot sur la couverture : un visage quelconque, et en même temps un visage marqué, le regard fixe et déterminé. Mais intrigante, à l'image de son contenu.

Lien : http://lecturedaydora.blogsp..
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J'ai lu ce livre il y a pas mal de temps et j'ai beaucoup traîné à écrire une "critique"... Comment critiquer un livre qui m'a bouleversé à ce point? Impossible.

Il a donc fallu que du temps passe et que l'urgence remontre son visage hideux, par la montée des haines et des mesquineries aux conséquences sans nom.

C'est ce que j'ai vu dans ce livre. Des haines quotidiennes, des rancoeurs, des fascismes ordinaires qui s'enchaînent de manière telle que tout un chacun peut dire "je n'ai rien fait, c'est les autres"... On arrive à ces situations où les responsabilités se diluent tellement qu'elles finissent par sembler être évitables, qu'elles peuvent ne plus être assumées. Tout le monde peut se tourner vers son voisin en l'estimant plus coupable que soi.

Cela m'a rappelé Uranus, le film français sur la fin de la guerre, avec ces résistants de la 25è heure, qui ont courbé l'échine pendant 5 ans et se redressent une fois la guerre finie, afin de participer à la curée et faire oublier leur lâcheté. Leur volonté de vengeance est alors proportionnelle à leur démission pendant l'occupation.

Des années après l'avoir lu, j'en reste marqué. C'est dire...
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C'est toujours avec un grand plaisir que je me laisse emporter par Philippe Claudel. Non pas que les endroits où il nous emmènent soient gais, loin s'en faut, mais parce que sa sensibilité transpire à chaque phrase. Son écriture est belle, les mots choisis, son regard sur le monde montre toujours la cruauté, la bêtise de l'homme mais aussi la beauté de l'amour, de l'amitié, des sentiments vrais !
Une fois de plus, Merci Monsieur Claudel !
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Je ne sais même pas pourquoi j'ai décidé de lire ce livre. Peut-être parce que je le voyais souvent présenté dans les librairies. Enfin, la quatrième de couverture ne m'avait pas particulièrement attirée, je ne savais pas du tout à quoi m'attendre, et je ne pensais franchement pas que ça allait me passionner.
Et pourtant...
L'histoire de Brodeck m'a totalement absorbée. Plus j'avançais dans le roman, plus j'hallucinais des détails que j'apprenais sur les protagonistes. Je n'avais jamais vu exposée comme ça la lâcheté humaine, et surtout pas dans des circonstances aussi dramatiques.
Ce livre, c'est la face cachée de la guerre. C'est le pacte avec l'ennemi, la violence contre ceux qui ont le malheur de dire un mot, et surtout la couardise de ceux qui laissent faire, qui livrent les autres pour se protéger.
A lire ce livre, on a honte d'être humain, parce qu'on comprend les motivations des uns et des autres, bien qu'elles nous fassent vomir.
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L'impression générale est du même ordre que celle que me laissa « le roi des aulnes », une germanie sombre mais le héro ne portera pas l'étoile qui le sauvera ; Ici il devra fuir la haine de l'étranger que lui portent les villageois.
Comment tout homme (toute foule) peut insidieusement finir par vouloir la mort de celui qui n'est pas comme lui. le style est très littéraire et très fort ; assurément ce roman ne peut nous laisser intact.
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