AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,97

sur 210 notes
5
4 avis
4
14 avis
3
4 avis
2
2 avis
1
0 avis
Je recherche dans mes livres lus, une critique à rédiger. Parfois, j'ai lu le livre il y a très longtemps et je fouille alors dans ma mémoire, ou bien je n'ai pas écrit la critique aussitôt après la lecture car j'ai besoin de réfléchir encore au livre. Et alors, je retrouve le livre d'Albert Cohen. Et tout d'un coup, j'ai comme une grosse boule dans la gorge. Je ne sais plus par où commencer. Et c'est comme ça qu'ensuite je tire des généralités sur l'espèce humaine, sur la "saloperie" qui nous entoure, dont nous sommes aussi (un peu) responsables et tout et tout. J'ai moi aussi comme tout le monde ma sensibilité et, comme tout le monde (je veux le croire), je me remets en question. J'ai lu plusieurs bouquins de Cioran il n'y a pas si longtemps. Et actuellement je relis « La  nausée ». Rien de bien réjouissant pour se réconforter l'âme. Il y a des moments comme ça dans la vie où on a besoin d'entretenir une certaine déprime pour se sentir exister. le souvenir du livre de Cohen ne m'est pas d'un grand réconfort. Mais, il se révèle absolument nécessaire pour réfléchir à notre humanité. Pour ne pas oublier ce que j'appelle la « saloperie » humaine. La part d'ombre de chacun, de tout le monde. Il y a quelques jours, j'avais commencé à lire « Les bienveillantes ». J'ai lu l'introduction. Je n'ai pas pu aller plus loin. Parfois, on se dit qu'il n'y a pas de hasard. le narrateur dit, en gros, qu'on est tous responsables individuellement de la marche d'une société. Même indirectement, le plus petit fonctionnaire au fond d'un petit bureau ou le cheminot responsable d'un aiguillage, a sa part de responsabilité sur les réalisations collectives. Et je relie alors ensemble les deux livres. Le commerçant qui insulte l'enfant de 10 ans, absolument innocent, et lui dit qu'il ne sert pas les Juifs, se doute t-il du mal qu'il fait ? On peut dire qu'il est pris dans un engrenage sociétal… etc. Mais le point de vue de l'écrivain qui nous relate ce moment qui a déterminé toute sa vie, qu'est-ce qu'on en fait, nous, lecteurs ? Qu'est-ce qu'on peut en faire ? Je vous le disais : la « saloperie » !
Ce livre est donc un petit bijou, bien écrit, bien tourné, avec tout le pathos qu'il faut pour aborder (une partie de) la réalité de l'Humain et se remettre en question sur nos actes, nos paroles…
Commenter  J’apprécie          470
Une rencontre qui change la vie !" J'aime cette phrase quand elle décrit une belle rencontre, positive, sympathique, heureuse. Je la déteste lorsqu'elle évoque le contraire.
Albert Cohen, enfant de 10 ans, rencontre un camelot qui par une phrase, un geste, lui révèle son identité de juif détesté. Et le ciel s'écroule. Et la vie s'écroule.
Cet enfant, auparavant naïf, joyeux, souriant découvre la Haine. En une seconde. C'est le choc. L'enfant erre, rumine, pleure, ne comprend pas, tente pourtant de laisser pointer un rayon d'espérance et d'amour, avant de s'écrouler à nouveau.
Je referme ce livre très émue. Jamais je n'ai ressenti de manière aussi forte ce qu'un enfant juif a pu (et peut toujours) ressentir face à la haine de ses frères humains. En théorie, je le sais. L'histoire du peuple juif, dans ses grandes lignes, je la connais. Mais là, les mots d'Albert Cohen - toujours aussi puissants par leur beauté et leur réalisme - m'ont fait vivre, au plus profond de mes tripes, la souffrance violente d'un être rejeté et haï. Et ça fait mal.
"Une rencontre qui change la vie..." C'est certain, ma rencontre avec Albert Cohen, à travers ses mots, n'a pas fini de me transformer.
Commenter  J’apprécie          340
Quand Albert Cohen publie ce livre en 1972, il a 77 ans, il lui reste neuf ans à vivre. Pour lui, avant un adieu définitif , il devenait urgent d'écrire, de révéler, ce qui, depuis l'âge de dix ans le poursuivait, sans répit, le taraudait : raconter cette blessure restée béante toute sa vie, une sorte de carcinome irréversible dont l'affligea un camelot un 16 août après-midi en 1905 à Marseille quand il se vit traiter de « sale Youpin » . Ce livre c'est son credo par lequel il implore ses frères : ne point haïr leurs prochains parce qu'ils sont d'une race , d'une religion différentes.
J'ai vraiment ressenti le traumatisme subi par ce garçonnet, sa terrible souffrance. Envie de le consoler, d'essuyer ses larmes…
Un récit original, pour dénoncer le racisme, mais, personnellement, cet ouvrage ne m'a pas bouleversée, peut-être trop incantatoire, cela me laisse une sensation de gêne, et de regret, un sentiment d'incomplétude, difficile à expliquer.
Commenter  J’apprécie          280
En une journée , jour de son dixième anniversaire , un enfant va découvrir la haine .Un livre tres émouvant . Cet enfant va voir le monde qu'il s'était construit s'écrouler par la faute d'un imbécile .
Ce n'est pas une critique que j'ai envie d'écrire , mais plutôt d'un message que j'ai envie d'envoyer à l'auteur là ou il se trouve : " cher Monsieur Cohen , sachez que je vous aime .Sachez également que je n'ai pas pour habitudes de dire cela à un homme ! "
Commenter  J’apprécie          171
Marseille, 1905,

"Non, il s'agit d'un souvenir d'enfance juive, il s'agit du jour où j'eus dix ans. Antisémites, préparez-vous à
savourer le malheur d'un petit enfant, vous qui mourrez bientôt et que votre agonie si proche n'empêche pas de
haïr. O rictus faussement souriants de mes juives douleurs. O tristesse de cet homme dans la glace que je regarde." 

Ce court livre (225 p)donne la parole à cet enfant de 10 ans, percuté par l'antisémitisme alors qu'il aller fêter son anniversaire.

c'est pas ton pays ici, tu as rien à faire chez nous, allez, file, débarrasse voir un peu le plancher, va un peu voir à
Jérusalem si j'y suis.

Amoureux de la France, cocardier, vouant un véritable culte patriotique avec un "autel à la France" le rejet du camelot le touche infiniment. 

Albert Cohen, dans sa vieillesse se souvient de l'errance de l'enfant dans Marseille et tout le livre se déroule en une journée, la "journée du camelot" qui déambule au lieu de rentrer chez lui

Mon héréditaire errance avait commencé. J'étais devenu un juif et j'allais, un sourire léger et quelque peu hagard aux lèvres tremblantes.

Soudain, j'aperçus un Mort aux juifs à la craie sur le mur. Je frissonnai et je m'enfuis. Mais au tournant de la rue, un autre Mort aux juifs.

Un long monologue, une déambulation, Albert Cohen 70 ans plus tard écrit un texte tendre, tragique, mais ne désespère pas. Il n'appelle pas à la vengeance mais à l'intrinsèque bonté qu'il veut trouver dans les humains,

"Dites, vous, antisémites, haïsseurs que j'ose soudain appeler frères humains, fils des bonnes mères et frères en nos mères, frères aussi en la commune mort, frères qui connaîtrez l'angoisse des heures de mort, pauvres frères en la mort, mes frères par la pitié et la tendresse de pitié, dites, antisémites, mes frères, êtes-vous vraiment heureux de haïr et fiers d'être méchants ? Et est-ce là vraiment le but que vous avez assigné à votre pauvre courte vie"


Si vous avez aimé le livre de ma mère il est de la même veine!
Lien : https://netsdevoyages.car.bl..
Commenter  J’apprécie          101
Cohen écrit bien après tous les livres qui l'ont rendu célèbre à très juste titre, ce témoignage poignant de sa découverte, à dix ans, de l'antisémitisme.
Écrit à la première personne, et mis dans la bouche de ce gamin de dix ans, interpellé par un camelot qui l'avait reconnu comme juif et rejeté violemment, et tellement bouleversé par cet incident qu'il ne rentre pas chez lui où l'attend un repas de fête préparé pour son anniversaire par des parents aimants, et déambule jusque tard dans la nuit dans les rues de Marseille en ruminant son désespoir, ce récit saisit assez rapidement le lecteur d'un doute. Ce dernier soupçonne bien vite que ce n'est pas le gamin qui parle, mais l'homme de près de 80 ans qui a porté toute sa vie ce traumatisme, et qui exprime un vécu sans doute reconstruit à chaque moment de sa longue existence ; et le voile se lève définitivement sur celui qui exprime réellement ses pensées quand, dans les derniers chapitres, apparaissent des allusions aux exactions nazies, qui sont bien postérieures au drame vécu par l'enfant.
Le flot des pensées de ce dernier qui défilent, de manière parfois incohérente, répétitive, comme tout ce que chacun ressent sous le coup d'une forte émotion, fait comprendre la profondeur du choc vécu par l'enfant. Mais c'est bien là la limite de cette transmission, qui est bien de l'ordre de la compréhension intellectuelle du drame vécu par le jeune garçon, compréhension qui ne peut évidemment pas être sans effet sur les sentiments que le lecteur éprouve au fil des courts et haletants chapitres, mais, au contraire par exemple de ce qu'il ressent en s'immergeant dans le "livre de ma mère" du même auteur, il n'est pas emporté par une émotion irrésistible qui n'ait nul besoin de passer par le stade de la compréhension intellectuelle.
D'où cela peut-il bien venir ? Peut-être la manière dont Albert Cohen transcrit ce qui est sensé se bousculer dans la tête du gamin, et où on reconnaît bien sa patte particulière, n'est pas adaptée à ce passage direct du mot lu au coeur ? Un style qui sent trop l'artifice rhétorique, par exemple à travers les répétitions, ces anaphores permanentes  ?
Cela n'en reste pas moins un livre véritablement marquant, qui aborde d'une manière peu habituelle un sujet malheureusement redevenu actuel, un livre trop peu connu. Je l'ai du reste découvert par le plus grand des hasards, alors même que je connaissais une grande partie de l'oeuvre romanesque de Cohen.
Commenter  J’apprécie          100
A l'approche de la mort, l'auteur réfléchit sur l'insanité du comportement humain. Les hommes se comportent comme si elle n'existait pas et surtout continuent à s'affronter, à se hair alors qu'ils sont frères en la mort.
Victime d'une violente attaque antisémite à l'âge de dix ans qui lui fait perdre son innocence, il s'interroge sur les ressorts de cette haine anti juive, sur les relations entre les hommes et sur la mort.
La mort devrait empêcher la haine, rapprocher les hommes présents si peu de temps sur terre. Cette communauté de destin devrait être bien plus efficace que l'amour du prochain, notion abstraite qui n'a jamais empêché guerres et haine. La pitié devrait empêcher la haine, les hommes sont frères en la mort "antisémites mes frères" écrit même l'auteur avec un brin de provocation.
Commenter  J’apprécie          90
Le récit autobiographique d'Albert Cohen, où il relate sa découverte brutale de l'antisémitisme, est pathétique à plus d'un titre : d'abord, on a pitié de l'enfant injurié et mis au ban du groupe, de son chagrin, de son désarroi et de la marque que l'expérience va laisser sur lui. Ensuite, le pathos du style et du récit augmentent l'émotion du lecteur et lui font partager l'angoisse de l'enfant et du narrateur qui se souvient. Enfin, la situation est d'autant plus triste que l'enfant et l'homme qu'il va devenir ne disposent d'aucune arme, d'aucun recours puisés dans leur tradition et leur identité pour se consoler, et pour transformer la haine qui leur a été crachée au visage en fierté et en vocation juives. Pour retourner la situation, il aurait fallu que l'enfant juif ait reçu une éducation juive vivante, ce qui est loin d'être le cas ici. Ce livre raconte autant l'horreur du racisme que les souffrances impuissantes de l'assimilation.
Commenter  J’apprécie          90
un livre atypique biensur ....son dernier...on imagine bien l'auteur prendre et reprendre la plume sans soucis des répétitions. j'avais entendu l'émission "a voix nue" de France Culture dédiée à l'interview d'Albert Cohen et il avouait se relire mais jamais enlever du texte , en rajouter oui ! c'est exactement cela et c'est plaisant à lire...biensur tout tient dans ce livre sur l'histoire vécue quand il avait 10 ans à Marseille et qu'un camelot l'avait traité de sale juif! un choc dont il a gardé la marque toute sa vie ....et qu'il partage donc dans son dernier livre....
Commenter  J’apprécie          80
Ce livre est un témoignage suivi d'une méditation. le jour de ses dix ans, Albert assiste au boniment d'un camelot, sort quelques sous de sa poche pour acheter la pacotille, et se fait traiter de sale youpin sous les rires complices des badauds. Il erre dans les rues de Marseille en lisant des graffiti antisémites et retrouve en pleine nuit ses parents affolés. L'auteur rapporte, soixante ans plus tard, cette première attaque d'une haine imbécile après avoir lu sur les murs d'Aix en Provence « Que crève la charogne juive et revienne l'heureux temps du génocide ». Hélas, la « bête immonde » est toujours en vie, et même détournée de son sens par un camelot contemporain. 

Le souvenir d'enfance est encadré d'une méditation sur la commune mort et sur la comédie de l'amour du prochain : « Dites, vous, antisémites, haïsseurs que j'ose soudain appeler frères humains, frères aussi en la commune mort, frères qui connaîtrez l'angoisse des heures de mort, pauvres frères en la mort, mes frères par la pitié et la tendresse de pitié, dites, antisémites, êtes-vous vraiment heureux de haïr et fiers d'être méchants ? Et est-ce vraiment le but que vous avez assigné à votre pauvre courte vie ? (p 208). « Ne pas haïr importe plus que l'illusoire amour du prochain, imaginaire amour, mensonge à soi-même, amour dilué, esthétique amour tout d'apparat léger, amour à tous donné, et c'est à dire à personne » (p 212). 

Il faut aussi saluer l'objet littéraire : la gravité n'exclut pas la maitrise. On trouve partout le contournement des noms, la torsion de la syntaxe, les raccourcis, le jeu des adjectifs dans toute la gamme du mièvre, de l'affectueux, du rude et du cruel, les images surprenantes des grands livres d'Albert Cohen. Je les avais lus en leur temps.  J'ai découvert ce petit livre à l'exposition des dessins de Luz : Musée d'art et d'histoire du judaïsme, jusqu'au 27 mai, c'est gratuit et prodigieux. 
Commenter  J’apprécie          60




Lecteurs (544) Voir plus



Quiz Voir plus

Mangeclous

Quel événement bouleverse la vie des héros et les décide à quitter leur île ?

La mort de l'un de leurs amis
La réception d'un chèque
Une grave épidémie
L'envahissement par une armée

13 questions
17 lecteurs ont répondu
Thème : Mangeclous de Albert CohenCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..